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Décision / 2018 / 123

Datum
2018-01-31
Gericht
Chambre des recours pénale
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL 886 PE17.000879-LCT CHAMBRE DES RECOURS PENALE .......................................... Arrêt du 1er février 2018 .................. Composition : M. Maillard, président M. Meylan, juge et Mme Epard, juge suppléant Greffière : Mme Umulisa Musaby ***** Art. 137, 138, 139, 181 CP; 319 al. 1, 393 al. 1 let. a, 420 CPP Statuant sur le recours interjeté le 2 octobre 2017 par K.........Sàrl contre l'ordonnance de classement rendue le 12 septembre 2017 par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne dans la cause n° PE17.000879-LCT, la Chambre des recours pénale considère : En fait : A. a) Par contrat non daté, la famille K........., en qualité de maître d’ouvrage, et K.........Sàrl, en qualité de mandataire principal, ont convenu avec la société [...] Sàrl (P. 6/1) en qualité d'entrepreneur, dont N......... était associé gérant avec signature individuelle, de la réalisation par cette dernière de travaux d’ouvrages métalliques courants, notamment la confection de deux portails (P. 6/3). Le 11 novembre 2016, [...], pour K.........Sàrl, a fait savoir à N......... qu'elle avait constaté divers défauts sur les portails qu'elle ne pouvait pas laisser passer et qu'elle fixait à [...] Sàrl un délai au 11 décembre 2006 pour les réparer (P. 6/7). b) Le 8 décembre 2016, N........., accompagné de son employé P........., a emporté les portails litigieux. Lors de leurs auditions devant le Ministère public, N......... et P......... ont déclaré que c'était à la demande de K.........Sàrl qu'ils avaient emporté les portails, afin de les réparer dans leur atelier. Après avoir analysé les dommages sur les portails, ils auraient constaté que les supports des serrures avaient vraisemblablement été forcés et que les dommages ne pouvaient résulter que d'actes de vandalisme (PV aud. 1 ll. 46, 54, 59; PV aud 2 ll. 73-77 et 106). c) Par courriels des 14 et 16 décembre 2016, N......... a informé K.........Sàrl qu'il refusait de restituer les portails en cause, à moins que celle-ci fasse des propositions précises de paiements et signe un accusé de réception (P. 6/14 et 6/16). d) Par acte du 11 janvier 2017, K.........Sàrl a déposé plainte pénale contre N......... pour vol, brigandage et contrainte, et a conclu à ce que celui-ci soit condamné à payer un montant de 4'346 fr., intérêts en sus, à titre de dommages-intérêts (P. 4/1). B. Par ordonnance du 12 septembre 2017, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne a ordonné le classement de la procédure pénale dirigée contre N........., pour appropriation illégitime et contrainte (I), a alloué à celui-ci une indemnité de 4'652 fr. au sens de l’article 429 CPP, à la charge de l’Etat (II), a mis les frais de procédure, par 975 fr., à la charge de l’Etat (III) et a dit qu'en application de l'art. 420 CPP, K.........Sàrl devait rembourser les frais de procédure mis à la charge de l'Etat, ainsi que l’indemnité allouée à N......... (IV). C. Par acte du 2 octobre 2017, K.........Sàrl a recouru devant la Chambre des recours pénale contre cette ordonnance, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à son annulation et au renvoi du dossier de la cause au Ministère public pour complément d'instruction et renvoi de N......... par-devant l'autorité de jugement pour prévention de vol, subsidiairement appropriation illégitime, abus de confiance et tentative de contrainte. A titre subsidiaire, elle a conclu à l'annulation de l'ordonnance de classement et au renvoi de la cause au Ministère public pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. Le 24 janvier 2018, N......... s’est spontanément déterminé. En droit : 1. Les parties peuvent attaquer une ordonnance de classement rendue par le Ministère public en application des art. 319 ss CPP ([Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0]), dans un délai de dix jours devant l’autorité de recours (art. 322 al. 2 et 396 al. 1 CPP; cf. art. 20 al. 1 let. b CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [Loi d’introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009; RSV 312.01]; art. 80 LOJV [Loi d’organisation judiciaire du 12 décembre 1979; RSV 173.01]). En l'espèce, déposé en temps utile et dans les formes prescrites (art. 385 al. 1 CPP) devant l'autorité compétente par la partie plaignante, qui a qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP), le recours est recevable. 2. 2.1 La recourante fait valoir qu'il y aurait à tout le moins des éléments constitutifs d'infraction d’appropriation illégitime, d’abus de confiance, de vol et de contrainte. D'une part, l'intimé aurait emporté les portails litigieux sans son autorisation, ce qui constituerait un acte de soustraction au sens de l'art. 139 CP. D'autre part, en refusant de restituer les portails, l'élément constitutif de l'appropriation au sens de l'art. 137 CP aurait été réalisé, indépendamment des raisons pour lesquelles les portails avaient initialement été emportés. Enfin, l'intimé aurait emporté les portails litigieux dans le seul but de faire valoir ultérieurement un droit de rétention, en invoquant de surcroît des factures sans rapport de connexité avec l'objet retenu. L'absence de portails aurait créé une situation dangereuse pour le propriétaire, et le refus de les restituer jusqu'au paiement desdites factures constituerait un dommage sérieux dont la menace pourrait réaliser l'infraction de contrainte. 2.2 Aux termes de l'art. 319 al. 1 CPP, le Ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure notamment lorsqu'aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'est établi (let. a), à savoir lorsque les soupçons initiaux qui ont conduit le ministère public à ouvrir une instruction n'ont pas été confirmés (Grädel/Heiniger, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 8 ad art. 319 CPP), ou lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis (let. b), à savoir lorsque le comportement incriminé, quand bien même il serait établi, ne réalise les éléments constitutifs objectifs et subjectifs d'aucune infraction pénale (Grädel/Heiniger, op. cit., n. 9 ad art. 319 CPP). De manière générale, les motifs de classement sont ceux « qui déboucheraient à coup sûr ou du moins très probablement sur un acquittement ou une décision similaire de l'autorité de jugement » (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 pp. 1057 ss, spéc. 1255). Un classement s'impose donc lorsqu'une condamnation paraît exclue avec une vraisemblance confinant à la certitude. La possibilité de classer la procédure ne saurait toutefois être limitée à ce seul cas, car une interprétation aussi restrictive imposerait un renvoi en jugement, même en présence d'une très faible probabilité de condamnation (ATF 138 IV 86 consid. 4.1.1 ; TF 1B.272/2011 du 22 mars 2012 consid. 3.1.1). Le principe « in dubio pro duriore » exige donc simplement qu'en cas de doute, la procédure se poursuive. Pratiquement, une mise en accusation s'impose lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement (ATF 137 IV 219 consid. 7; ATF 138 IV 86 consid. 4.1.1; ATF 138 IV 186 consid. 4.1; TF 1B.272/2011 du 22 mars 2012 consid. 3.1.1). I. Les infractions de vol, subsidiairement d’appropriation illégitime 3. 3.1 3.1.1 Selon l'art. 137 CP (Code pénal suisse du 21 décembre 1937; RS 311.0), celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire, en tant que les conditions prévues aux art. 138 à 140 ne seront pas réalisées (ch. 1). L'acte d'appropriation signifie tout d'abord que l'auteur incorpore économiquement la chose ou la valeur de la chose à son propre patrimoine, pour la conserver, la consommer ou pour l'aliéner; il dispose alors d'une chose comme propriétaire, sans pour autant en avoir la qualité. L'auteur doit avoir la volonté, d'une part, de priver durablement le propriétaire de sa chose, et, d'autre part, de se l'approprier, pour une certaine durée au moins. Il ne suffit pas que l'auteur ait la volonté d'appropriation, celle-ci devant se manifester par un comportement extérieurement constatable (ATF 129 IV 223 consid. 6.2.1 p. 227; ATF 121 IV 25 consid. 1c p. 25; ATF 118 IV 148 consid. 2a p. 151 s.). Il n'y a pas d'appropriation si d'emblée l'auteur veut rendre la chose intacte après un acte d'utilisation. Elle intervient cependant sans droit lorsque l'auteur ne peut la justifier par une prétention qui lui soit reconnue par l'ordre juridique (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd. 2010, n° 11 ad art. 137 CP). Sur le plan subjectif ensuite, l'auteur doit avoir agi intentionnellement : il sait ou accepte que la chose appartient à autrui et a la volonté, au moins à titre éventuel, de l’incorporer à son patrimoine (Corboz, op. cit., n. 14 ad art. 137 CP et les références). 3.1.2 Aux termes de l'art. 139 ch. 1 CP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. La soustraction supprime le pouvoir de disposition de l’ayant droit. Elle constitue une violation de sa sphère d’influence qui se traduit par le transfert de la chose sortant du domaine de possession du titulaire. L’auteur doit agir contre la volonté de l’ayant droit ; ce facteur est décisif, puisque le consentement de la victime empêche que l’acte soit conforme à l’énoncé de fait légal (Pozzo, Droit pénal, partie spéciale, 3ème éd., p. 220 ; Dupuis et alii, Petit commentaire du Code pénal, n. 10 ad art. 139 CP). Pour que la soustraction d'une chose mobilière appartenant à autrui constitue un vol, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, dans le dessein de s'approprier cette chose et dans celui de se procurer ainsi, ou de procurer à autrui, un enrichissement illégitime. L'auteur agit intentionnellement s'il veut soustraire une chose mobilière qu'il sait appartenir à autrui. Il agit dans un dessein d'appropriation s'il a pour but d'incorporer la chose à son patrimoine, que ce soit en vue de la conserver ou de l'aliéner (ATF 85 IV 17 consid. 1 p. 19). Il agit dans un dessein d'enrichissement illégitime s'il a pour but de tirer lui-même de la chose, ou de permettre à un tiers d'en tirer un profit qui devrait normalement revenir au propriétaire ou au possesseur légitime (TF 6B.159/2007 du 20 juin 2007 consid. 5 et les réf. citées). 3.2 En l'espèce, le Procureur a retenu que N......... s'était rendu sur les lieux pour constater les défauts et réparer le cas échéant les portails. Par la suite, il avait pris ces portails dans son atelier dans le but, selon lui, d'analyser les défectuosités constatées. Pour le Procureur, aucune infraction n'était réalisée, puisqu'il était manifeste que N......... n'avait jamais eu l'intention de s'approprier les portails litigieux. La recourante fait grand cas du fait que selon les dires de l'intimé, A.K........., associé de la recourante avec signature individuelle (P. 6/2), n'était pas présent au moment où ils ont emporté les portails. Il est vrai que l’intimé a déclaré que A.K......... n’était pas présent lorsque lui-même et P........., qui travaillait occasionnellement avec lui, avaient chargé les portails litigieux. P......... a également confirmé que A.K......... n’était pas présent lorsqu’ils avaient pris le deuxième portail. Cependant, dans son audition, N......... a encore précisé ce qui suit (PV aud. 1 ll. 30, 33-35 et 39-44) : « On est venu pour constater des dégâts occasionnés sur des portails. (…) Les portails n’étaient pas là. M. A.K......... ouvre la porte. Il les avait à la cave. Il nous a accompagnés à la cave. (…) On a tenté de remettre en place les portails. L’un a été remis en place facilement. On ne pouvait plus verrouiller simplement les deux portails l’un à l’autre. On est finalement parti avec ses deux portails pour les réparer, ce qu’on ne pouvait pas faire sur place. » A la question de savoir si l’intimé était reparti avec les deux portails pour effectuer un contrôle à l’atelier et ceci à la demande de A.K........., P......... a déclaré ce qui suit (PV aud. 2 ll. 73-77) : « Oui, on l’avait averti qu’on allait les reprendre. Il fallait ressouder les plaques arrières. On a pris celui qui était au sous-sol devant M. A.K.......... Je ne sais pas ce que M. N......... a dit à M. A.K.......... M. A.K......... était dans son local au sous-sol lorsqu’on a pris la partie du portail qui était à cet endroit. Il n’a pas manifesté d’opposition lorsqu’on a pris le portail. Il n’a rien dit non plus lorsqu’on a pris celui à l’extérieur. » Au vu de ces dépositions, l'argument de la recourante paraît de mauvaise foi. Il est impossible de retenir que les portails ont été enlevés à l'insu ou contre la volonté de A.K.......... Le fait que celui-ci n'ait pas assisté au chargement n'est pas relevant. On relèvera également que par lettre du 9 décembre 2016, puis par lettre du défenseur de l'intimé du 13 décembre 2016, K.........Sàrl a été informée que les dégâts au portail provenaient selon toute vraisemblance de vandalisme et que l'entreprise de l'intimé n'allait pas les prendre en charge. Par courriel du 14 décembre 2016, la recourante a répondu avoir un besoin urgent du retour des portails pour des raisons de sécurité (P. 6/9, 6/10, 6/14). Il ressort dès lors de ce qui précède que c'est avec l'autorisation de la recourante à tout le moins tacite, mais plus vraisemblablement explicite, que les portails ont été emportés par l'intimé. L’intimé n’ayant pas rompu la possession de la recourante contrairement à sa volonté, un acte de soustraction fait défaut. En outre, comme on le verra ci-dessous, il n’est pas non plus établi que l’intimé ait voulu s’attribuer la propriété des portails litigieux ou qu’il ait voulu s’enrichir en refusant de restituer ceux-ci (cf. consid. 4.2.2). Il en découle que c’est à juste titre que le Procureur a exclu les infractions de vol ou d’appropriation illégitime. II. Infraction d’abus de confiance ou de contrainte 4. 4.1 Par courriel du 14 décembre 2016 (P. 6/14), l’intimé a répondu ce qui suit au courriel de la recourante : « (…) Je vous rappelle toutefois que c’est sur demande de A.K......... que nous avons accepté le 8 décembre dernier de reprendre les deux portails pour un contrôle en atelier, ce bien que plusieurs de nos factures soient toujours en souffrance. (…) Il va de soi en conséquence que si nous acceptions de vous redéposer et réinstaller en urgence ce jour, les deux portails ce serait naturellement à la condition sine qua non de votre signature confirmant la réception de ces derniers que de propositions de votre part concernant le règlement de nos factures. » La recourante soutient qu’il y aurait là abus de confiance ou contrainte. 4.2. 4.2.1 Commet un abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 al. 1 CP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui et qui lui avait été confiée. Sur le plan objectif, cette infraction suppose la réalisation de trois conditions, à savoir l'existence d'une chose mobilière, que cette chose ait été confiée à l'auteur et que ce dernier se soit approprié la chose en violation du rapport de confiance. Une chose est confiée au sens de l'art. 138 ch. 1 CP lorsqu'elle est remise ou laissée à l'auteur, en vertu d'un accord ou d'un autre rapport juridique, pour qu'il l'utilise d'une manière déterminée dans l'intérêt d'autrui, en particulier pour qu'il la garde, l'administre ou la livre selon des instructions qui peuvent être expresses ou tacites (Corboz, op. cit., n. 4 ad art. 138 CP ; ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; TF 6B.1043/2013 du 4 juillet 2014 consid. 3.1.1). Du point de vue subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime. Celui qui dispose à son profit ou au profit d'un tiers d'un bien qui lui a été confié et qu'il s'est engagé à le tenir en tout temps à disposition de l'ayant droit s'enrichit illégitimement s'il n'a pas la volonté et la capacité de la restitution immédiatement en tout temps (ATF 118 IV 27 consid. 3a). Le dessein d'enrichissement illégitime fait en revanche défaut si, au moment de l'emploi illicite de la valeur patrimoniale, l'auteur avait à tout moment, ou le cas échéant, à la date convenue à cet effet, la volonté et la possibilité de restituer la chose confiée ("Ersatzbereitschaft"; ATF 118 IV 32 consid. 1a) ou encore s'il était en droit de compenser (ATF 105 IV 29 consid. 3a). 4.2.2 En l’espèce, l’intimé a manifestement agi pour recouvrer une créance ("des factures en souffrance"), de sorte que le dessein d’enrichissement illégitime n’est pas établi. Il en va de même de la volonté de s’approprier les portails litigieux, dans la mesure où l’intimé était d’accord de les restituer très rapidement moyennant la réalisation de certaines conditions. Il en découle que l’abus de confiance n’entre pas en ligne de compte. 4.3 4.3.1 Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte. La menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (TF 6B.447/2014 du 30 octobre 2014 consid. 2.1 et les références citées). Il peut y avoir également contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime « de quelque autre manière » dans sa liberté d'action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive. N'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. Il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 137 IV 326 consid. 3.3.1 ; ATF 134 IV 216 consid. 4.2 ; ATF 119 IV 301 consid. 2a). Selon la jurisprudence, la contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite. Tel est notamment le cas lorsqu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux mœurs (TF 6B.447/2014 précité consid. 2.1 et les références citées). Il en va ainsi en particulier de réquisitions de poursuite portant sur des montants de 200'000 fr. signées en vue de faire adresser des commandements de payer à des personnes appelées à déposer comme témoin (Favre/Pellet/Stoudmann, Code pénal annoté, 3e éd., Lausanne 2007, n 1.17 ad art. 181 CP, p. 499 in initio). Réclamer le paiement d'une créance ou menacer de déposer une plainte pénale (lorsque l'on est victime d'une infraction) constituent en principe des actes licites; celui qui, étant victime d'une infraction, menace de déposer une plainte pénale afin d'obtenir la réparation du préjudice subi ne commet pas une contrainte au sens de l'art. 181 CP; l'illicéité n'apparaît que si le moyen utilisé n'est pas dans un rapport raisonnable avec le but visé et constitue un moyen de pression abusif; tel est le cas en particulier si l'objet de la plainte pénale est sans rapport avec la prestation demandée ou si la menace doit permettre d'obtenir un avantage indu (TF 6B.70/2016 du 2 juin 2016 consid. 4.3.2 à 4.3.4, consid. non publié aux ATF 142 IV 315; ATF 115 IV 207 consid. 2b/cc; ATF 101 IV 47 consid. 2b; ATF 96 IV 58 consid. 1; ATF 87 IV 13 consid. 1). 4.3.2 La recourante critique l’appréciation du Procureur selon lequel des « factures en souffrance » invoquées par l’intimé pouvaient justifier la rétention des portails litigieux. Pour la recourante, qui se prévaut de l’arrêt publié aux ATF 115 IV 207, JdT 1960 I 485, l’intimé aurait été dans le vrai s’il y avait un rapport de connexité entre la créance et l’objet retenu. 4.3.2.1 Selon l’art. 895 al. 1 CC (Code civil suisse du 10 décembre 1907 ; RS 210), le créancier qui, du consentement du débiteur, se trouve en possession de chose mobilières appartenant à ce dernier, a le droit de les retenir jusqu’au paiement, à la condition que sa créance soit exigible et qu’il y ait un rapport naturel de connexité entre elle et l’objet retenu. L'alinéa 2 de cette disposition prévoit que la « connexité existe pour les commerçants dès que la possession de la chose et la créance résultent de leurs relations d’affaires ». En d’autres termes, entre commerçants, l’exigence de la connexité subit un assouplissement : il suffit que la possession de l’objet et la créance à garantir résultent de leurs relations d’affaires pour que cette condition d’existence du droit de rétention soit réunie. Il n’est plus nécessaire que la créance et le bien retenu soient en rapport de connexité, il suffit qu’ils soient tous deux issus des relations d’affaires entre les parties. Est un commerçant au sens de cette disposition « celui que les dispositions légales obligent à inscrire sa raison sociale au registre du commerce et qui, en outre, exploite réellement une entreprise en la forme commerçiale (Foëx, in Pichonnaz/Foëx/Piotet, Commentaire romand du Code civil II, nn. 42 et 43 ad art. 895 CC). 4.3.2.2 En l’espèce, tant l’intimé, associé gérant d’une société à responsabilité limité, que la recourante K.........Sàrl, sont des commerçants (cf. art. 17 let. c de l'Ordonnance du 17 octobre 2007 sur le registre du commerce; RS 221.41) qui œuvrent en cette qualité (let. A/a ci-dessus). Il n’est pas non plus contesté que les factures en souffrance invoquées par l’intimé s’inscrivaient dans leurs relations d’affaires précédentes. Dans ces conditions, contrairement à la jurisprudence citée par la recourante, qui concerne les non-commerçants (cf. ATF 115 IV 207 consid. 2/bb, p. 213), l’intimé pouvait justifier la rétention des portails en cause par des factures antérieures non payées, sans qu’il soit nécessaire que celles-ci soient dans un rapport de connexité avec les portails. Aussi bien le but poursuivi (le règlement de ces factures) que le moyen utilisé (la rétention des portails) sont licites. Pour le reste, ce moyen, qui est adéquat, apparaît proportionné pour atteindre le but. Les éléments constitutifs de l’infraction de contrainte n’apparaissent pas réalisées. III. De la violation du droit d’être entendu 5. 5.1 La recourante soutient que le procès-verbal de l’audition de l’intimé ne refléterait pas de manière fidèle les paroles de celui-ci en ce qui concerne l’autorisation d’emporter les portails litigieux. Elle reproche au Procureur de ne pas avoir interprété son courrier du 17 février 2017 en ce sens que la recourante demandait une nouvelle audition de l’intimé. Elle ajoute que, dans ce même courrier, elle a déclaré que M. [...] pourrait attester de la déformation « des charnières » et de la rupture de celles-ci. La recourante reproche alors au Procureur de ne pas l’avoir interpellée, afin qu’elle dise si elle entendait, par ce courrier, requérir l’audition de M. [...] en qualité de témoin. 5.2 Conformément au principe de la maxime de l’instruction, les autorités pénales mettent en œuvre tous les moyens de preuve licites qui, selon l'état des connaissances scientifiques et l'expérience, sont propres à établir la vérité (art. 139 al. 1 CPP). Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101) et par les art. 3 al. 2 let. c et 107 CPP, confère, entre autres facultés, celle d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 132 V 387 consid. 3.1 p. 388). Une violation du droit d'être entendu peut toutefois être réparée dans le cadre de la procédure de recours lorsque l'irrégularité n'est pas particulièrement grave et pour autant que la partie concernée ait la possibilité de s'exprimer et de recevoir une décision motivée de la part de l'autorité de recours disposant d'un pouvoir d'examen complet en fait et en droit (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2; TF 1B.524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés (TF 6B.1369/2016 du 20 juillet 2017 consid. 2.1; TF 6B.259/2016 du 21 mars 2017 consid. 5.1.2 et la référence citée). 5.3 En l’espèce, la Cour de céans disposant d’un plein pouvoir d’examen (TF 6B.248/2015 du 13 mai 2015 consid. 3.1 et la référence citée), elle pourrait remédier à la prétendue violation du droit d’être entendu. Toutefois, le moyen de la recourante ne résiste pas à l’examen. La recourante soutient en substance que dans la mesure où elle n’était pas assistée, le Procureur aurait dû interpréter ses dires comme des demandes de complément d’instruction. Or, on ne saurait exiger d’un procureur qu’il prévienne les requêtes non exprimées des parties. En outre, dans le présent recours rédigé par un avocat, la recourante ne requiert même pas qu’il soit procédé aux mesures d’instruction soi-disant implicitement voulues par la recourante. Enfin, comme on l'a vu (cf. consid. 3 et 4 ci-dessus), les éléments au dossier permettent de statuer sur la plainte de la recourante. On ne voit dès lors pas en quoi d’autres mesures d’instruction étaient en l’occurrence pertinentes. Le moyen de la recourante frôle l’abus de droit et ne peut qu’être rejeté. 6. 6.1 La recourante invoque une violation des art. 423 et 427 CPP, en ce sens que les frais de procédure ne pouvaient pas être mis à la charge de la partie plaignante. 6.2 Le sort des frais de procédure à l'issue de celle-ci est régi par les art. 422 ss CPP. En principe, ils sont mis à la charge de la Confédération ou du canton qui a conduit la procédure, les dispositions contraires du CPP étant réservées (art. 423 al. 1 CPP). L’art. 427 CPP ne permet qu’exceptionnellement d'imputer les frais de procédure à la partie plaignante lorsque les infractions dénoncées sont poursuivies sur plainte (ATF 138 IV 248), et il ne permet pas de le faire lorsque les infractions dénoncées sont poursuivies d’office. En revanche, le Tribunal fédéral a jugé que l'art. 420 let. a CPP – aux termes duquel la Confédération ou le canton peut intenter une action récursoire contre les personnes qui, intentionnellement ou par négligence grave, ont provoqué l'ouverture de la procédure – permet à l’autorité pénale de faire supporter les frais de procédure à celui qui saisit l'autorité de poursuite pénale de manière infondée ou par malveillance (TF 6B.5/2013 du 19 février 2013 consid. 2.5 et 2.6 et les références citées). La personne défenderesse à l'action récursoire doit avoir accompli le comportement procédural qu'on lui reproche avec conscience et volonté. Agit par négligence grave celui qui introduit une demande en violant les règles élémentaires de prudence à ce point que tout justiciable avisé aurait, dans les mêmes circonstances, renoncé à agir (cf. Domeisen, in Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, n. 6 ad art. 420 CPP). 6.3 En l’espèce, pour mettre les frais à la charge de la recourante, le Procureur a considéré que la plaignante avait fait preuve d’une grande témérité et qu’elle devait, en application de l’art. 420 CPP, supporter les frais de procédure. L’appréciation du Ministère public est fondée et doit être approuvée. Les conditions qui fondent l’action recursoire de l’Etat étant remplies, c'est à juste titre que les frais de procédure ont été mis à la charge de la partie plaignante. 7. Manifestement mal fondé, le recours doit être rejeté sans autre échange d’écritures (art. 390 al. 2 CPP) et l’ordonnance attaquée confirmée. Les frais de la procédure de recours, constitués en l'espèce du seul émolument d'arrêt, par 1'540 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale; RSV 312.03.1]), seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). Par ces motifs, la Chambre des recours pénale prononce : I. Le recours est rejeté. II. L’ordonnance du 12 septembre 2017 est confirmée. III. Les frais d’arrêt, par 1'540 fr. (mille cinq cent quarante francs), sont mis à la charge de K.........Sàrl. IV. L’arrêt est exécutoire. Le président : La greffière : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : - Me Ludovic Tirelli, avocat (pour K.........Sàrl), - Me Anne Bessonnet, avocate (pour N.........), - Ministère public central, et communiqué à : ‑ M. le Procureur du Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, par l’envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). La greffière: