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ACJC/1626/2024

Datum
2024-12-17
Gericht
acjc
Bereich
Schweiz

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C/20670/2023 ACJC/1626/2024 du 17.12.2024 ( IUO ) , ADMIS En fait En droit Par ces motifs RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/20670/2023 ACJC/1626/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 17 DECEMBRE 2024

 

Entre

A....../B...... SARL, sise ...... [GE], demanderesse, représentée par Me Raphaël QUINODOZ, avocat, Banna & Quinodoz, rue Verdaine 15, case postale 3015, 1211 Genève 3,

et

A....../C...... SARL, sise ...... [GE], défenderesse, représentée par Me Marco ROSSI, avocat, SLRG Avocats, Quai Gustave-Ador 2, 1207 Genève.

 

EN FAIT

A. a. A....../B...... Sàrl est une société à responsabilité limitée inscrite au registre du commerce de Genève le ...... 2016.

Son but est notamment, à teneur du registre du commerce, l'exploitation d'une entreprise générale du bâtiment, en particulier l'étude, la planification, le pilotage et la réalisation de constructions de toute nature ainsi que la rénovation en second œuvre.

D...... en est l'unique associé gérant.

b. A....../C...... Sàrl est une société à responsabilité limitée inscrite au registre du commerce de Genève le ...... 2023.

Son but est notamment l'exploitation d'une entreprise de peinture et plâtrerie ainsi que toute activité qui s'y rapporte.

E...... en est l'unique associé gérant.

c. Par courriers des 24 juillet et 22 août 2023, A....../B...... Sàrl a mis en demeure A....../C...... Sàrl de procéder d'ici au 4 août 2023, respectivement au 29 août 2023, à la modification de sa raison sociale afin d'éviter tout risque de confusion.

A....../C...... Sàrl n'a pas donné suite à ces courriers.

d. Le 6 septembre 2023, A....../B...... Sàrl a mis en demeure A....../C...... Sàrl de procéder à la modification de sa raison sociale en lui impartissant un ultime délai au 18 septembre 2023.

A....../C...... Sàrl n'a pas non plus donné suite à ce courrier.

B. a. Le 11 octobre 2023, A....../B...... Sàrl a déposé devant la Cour de justice une action en cessation de trouble, avec demande de mesures provisionnelles.

Elle a conclu, sur mesures provisionnelles, à ce qu'il soit ordonné au Préposé du registre du commerce de ne pas rendre accessible ou visible au public l'inscription "A....../C...... Sàrl" jusqu'à droit jugé au fond et à ce qu'il soit interdit à A....../C...... Sàrl, en substance, d'utiliser, sous quelque forme que ce soit, sa raison sociale ainsi que tout usage du vocable "A......", que ce soit à titre de nom commercial, enseigne ou nom de domaine, à titre publicitaire, sur internet ou les réseaux sociaux, ou sur tout support, sous la menace de la peine de l'art. 292 CP et à ce qu'une amende de 1'000 fr. par jour d'inexécution soit prévue.

Au fond, elle a pris des conclusions en cessation et en interdiction similaires, tendant, en substance, à ce qu'il soit fait interdiction à la défenderesse d'utiliser le terme "A......" en lien avec une entreprise active dans le domaine de la construction, à quelque titre que ce soit. Elle a par ailleurs requis qu'il soit ordonné au Préposé du registre du commerce de radier la société A....../C...... Sàrl, subsidiairement, à ce qu'il soit ordonné à A....../C...... Sàrl de modifier sa raison sociale inscrite au registre du commerce, ceci sous la menace de la peine de l'art. 292 CP et à ce qu'une amende 1'000 fr. par jour d'inexécutions soit prévue, le tout avec suite de frais.

Invoquant les art. 956 CO, 3 let. d LCD et 29 CC, elle a soutenu qu'il existait un risque de confusion entre les deux raisons sociales du fait de l'usage du vocable "A......".

b. Invitée à répondre à la requête de mesures provisionnelles, A....../C...... Sàrl a conclu au déboutement de A....../B...... Sàrl de toutes ses conclusions et à ce que le sort des frais soit réservé.

Elle a allégué que E...... travaillait depuis 30 ans à Genève dans le domaine de la plâtrerie-peinture, qu'il était surnommé "A......" depuis son enfance et qu'il était connu sous ce surnom tant dans sa vie privée que professionnelle. Lorsqu'il avait décidé de créer sa propre entreprise en 2023, il avait choisi le nom de A....../C...... Sàrl en raison de son surnom et cette raison sociale était sans rapport avec la société A....../B...... Sàrl, qu'il ne connaissait pas. Les clients ou fournisseurs n'avaient jamais confondu les deux raisons sociales. Les deux sociétés n'étaient pas actives dans le même domaine et leurs papiers à en-tête étaient différents.

c. Par arrêt du 5 décembre 2023, la Cour, statuant sur mesures provisionnelles, a fait interdiction à A....../C...... Sàrl d'utiliser sa raison sociale de quelque manière ou sous quelque forme que ce soit pour désigner son entreprise, notamment comme nom commercial, enseigne ou nom de domaine, sur des documents promotionnels ou publicitaires, sur internet ou les réseaux sociaux, ou sur tout support, dit que cette interdiction prendrait effet à l'échéance d'un délai de 20 jours dès la notification de cette décision, débouté les parties de toutes autres conclusions et dit qu'il serait statué sur les frais liés à cette décision dans l'arrêt rendu sur le fond.

d. Dans sa réponse au fond, A....../C...... Sàrl a conclu au déboutement de A....../B...... Sàrl de toutes ses conclusions, avec suite de frais. Elle a réitéré ses précédentes explications.

e.a Lors de l'audience devant la Cour du 26 juin 2024, D...... a expliqué que l'activité de sa société consistait à 80% en la rénovation d'appartements, dont 50% de travaux de plâtrerie-peinture. Les 20% restant concernaient la vente de terrains à des promoteurs. La société employait 6 collaborateurs et s'occupait d'environ 180 chantiers par années. Ses clients étaient établis dans les cantons de Genève et Vaud. Le nom de la société provenait du surnom de son petit frère F......, qui était A.......

Il n'avait pas connaissance de cas dans lesquels des clients qui souhaitaient s'adresser à sa société s'étaient adressés à A....../C...... Sàrl ou inversement. Des clients ou des amis lui avaient en revanche demandé, en référence avec cette dernière, s'il avait ouvert une nouvelle société. Il arrivait que lorsque des architectes ou des régies demandent qui s'occupait du chantier, les ouvriers présents répondent: "c'est A......".

e.b E...... a pour sa part expliqué qu'il avait créé sa société en 2023 mais qu'il avait exercé son activité d'abord comme employé dans une entreprise de peinture, puis, depuis 2014, en qualité d'indépendant, en raison individuelle. Sa société effectuait des travaux de plâtrerie-peinture. Ses clients provenaient des cantons de Vaud et Genève. La société avait un employé en plus de lui-même.

A...... était son surnom, sous lequel il est connu depuis de nombreuses années. Il n'était pas actif sur internet pour rechercher des clients et n'avait jamais entendu parler de A....../B...... Sàrl avant la présente procédure. Il n'avait pas connaissance de cas dans lesquels des clients auraient confondus les deux sociétés.

f.a Lors de l'audience devant la Cour du 28 août 2024, le témoin G...... a exposé qu'il connaissait E...... depuis 30 ans, qu'il l'avait toujours appelé "A......" et que tout le monde l'appelait ainsi. Il exerçait en qualité de peintre depuis qu'il le connaissait, mais il ignorait le nom de sa société.

f.b H......, également entendu en qualité de témoin, a exposé qu'il connaissait E...... depuis 40 ans sous le nom de "A......"; il ne le connaissait pas sous un autre surnom. Il travaillait dans le domaine de la peinture et tous les gens qui le côtoyaient, y compris dans le domaine professionnel, l'appelaient "A......".

g. Lors de l'audience de plaidoiries finales du 1er octobre 2024, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions.

La Cour a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

  1. 1.1 La Chambre civile de la Cour de justice connaît en instance unique des litiges portant sur l’usage d’une raison de commerce ou relevant de la loi contre la concurrence déloyale lorsque la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 5 al. 1 let. c et d CPC; art. 120 al. 1 let. a LOJ).

La demanderesse fonde ses prétentions sur les dispositions en matière de raison de commerce et de protection du nom ainsi que sur la loi contre la concurrence déloyale; elle chiffre son préjudice à 30'001 fr. Ce montant, non contesté par la défenderesse, n'apparaît pas surévalué au vu du dommage qui pourrait résulter du risque de confusion invoqué, de sorte que la Cour est compétente à raison de la matière pour connaître du présent litige en instance unique.

1.2 Les parties ayant leur siège à Genève, la Cour est également compétente à raison du lieu (art. 36 CPC).

1.3 Les conditions de forme de la demande et de la réponse sont respectées (cf. art. 221 et 222 CPC).

1.4 La procédure ordinaire (art. 219 et ss CPC) est applicable (art. 243 al. 3 CPC a contrario). La cause est soumise aux maximes des débats (art. 55 al. 1 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

  1. La demanderese soutient que la raison sociale de la défenderesse crée un risque de confusion avec sa propre raison sociale. Elle invoque à l'appui de sa demande les art. 956 al. 1 CO ainsi que 3 let. d. LCD et 29 CC.

2.1 2.1.1 L'inscription au registre du commerce d'une raison de commerce confère à l'ayant droit l'usage exclusif de celle-ci (art. 956 al. 1 CO). Celui qui subit un préjudice du fait de l'usage indu d'une raison de commerce peut demander au juge d'y mettre fin (art. 956 al. 2 CO).

La raison de commerce d'une société commerciale doit se distinguer nettement de toute autre raison de commerce d'une société commerciale déjà inscrite en Suisse (art. 951 CO). Comme les sociétés anonymes et à responsabilité limitée peuvent choisir en principe librement leur raison de commerce, des exigences élevées quant à leur caractère distinctif sont posées (arrêt du Tribunal fédéral 4A.45/2012 du 12 juillet 2012 consid. 3.2.2).

Est donc prohibé non seulement l'usage d'une raison de commerce identique à celle dont le titulaire a le droit exclusif, mais aussi l'utilisation d'une raison semblable, qui ne se différencie pas suffisamment de celle inscrite au point de créer un risque de confusion (ATF 131 III 572 consid. 3; 130 III 478).

Sur la base de son droit d'exclusivité, le titulaire d'une raison de commerce antérieure peut donc agir contre le titulaire d'une raison postérieure et lui en interdire l'usage s'il existe un risque de confusion entre les deux raisons sociales (ATF 131 III 572 consid. 3; 122 III 369 consid. 1).

L’action en abstention et en cessation du trouble tend à ce que la raison de commerce soit modifiée. Elle n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute. La condition de l’existence d’un préjudice, dont fait mention l'art. 956 al. 2 CO, est remplie dès qu’il existe un risque de confusion. En règle générale, le juge ordonne de modifier la raison sociale dans un délai, habituellement, de trente jours dès le jugement définitif et exécutoire, sous la menace l'art. 292 CP (d'office; ATF 97 II 234 consid. 2) ou d’une amende d’ordre selon l'art. 343 al. 1 let. b ou c CPC (Cherpillod, Commentaire romand, CO II, 3ème éd., 2024, n. 11 ad art. 956 CO; Altenpohl, Basler Kommentar, OR II, 6ème éd., 2024, n. 11 ad art. 956 CO).

2.1.2 Par rapport à l’art. 29 CC, l’art. 956 CO est une lex specialis, qui protège les raisons de commerce des particuliers, de sociétés commerciales ou de sociétés coopératives, dès leur inscription au registre du commerce et leur publication dans la Feuille officielle suisse du commerce (Thévenaz, Commentaire romand CC I, 2ème éd., 2024, n. 11 ad art. 29 CC).

2.1.3 Le titulaire de la première raison sociale inscrite peut aussi agir sur la base de l'art. 3 let. d LCD, qui s'applique cumulativement si les parties sont dans un rapport de concurrence (ATF du 15 décembre 1992, consid. 4 in RSPI 1994 p. 53; 100 II 395 consid. 1; 100 II 224 consid. 5).

A teneur de cette disposition est déloyal le comportement de celui qui prend des mesures qui sont de nature à faire naître une confusion avec les marchandises, les œuvres, les prestations ou les affaires d'autrui. Est ainsi visé tout comportement au terme duquel le public est induit en erreur par la création d'un danger de confusion, en particulier lorsque celui-ci est mis en place pour exploiter, de façon parasitaire, la réputation d'un concurrent (arrêts du Tribunal fédéral 4A.168/2010 du 19 juillet 2010 consid. 5.1; 4A.253/2008 du 14 octobre 2008 consid. 5.2; ATF 127 III 33 = JdT 2001 I 340 consid. 2b). La création d'un risque de confusion n'entraîne de conséquences en droit de la concurrence déloyale que si le signe imité possède une certaine force distinctive, à titre originaire ou parce qu'il s'est imposé dans le commerce (ATF 135 III 446 consid. 6.2; arrêts 4A.290/2023, du 29 novembre 2023, consid. 4.2.2 non publié in ATF 150 III 83; 4A.267/2020 du 28 décembre 2020 consid. 7.1 et les références citées).

2.1.4 Un risque de confusion existe lorsque la fonction distinctive du signe antérieur est atteinte par l'utilisation du signe le plus récent. Des personnes qui ne sont pas titulaires du droit exclusif à l'usage d'un signe peuvent provoquer, en utilisant des signes identiques ou semblables à celui-ci, des méprises en ce sens que les destinataires vont tenir les personnes ou les objets distingués par de tels signes pour ceux qui sont individualisés par le signe protégé en droit de la propriété intellectuelle (confusion dite directe). La confusion peut également résider dans le fait que, dans le même cas de figure, les destinataires parviennent certes à distinguer les signes, par exemple des raisons sociales, mais sont fondés à croire qu'il y a des liens juridiques ou économiques entre l'utilisateur de la raison et le titulaire de la raison valablement enregistrée (confusion dite indirecte) (ATF 131 III 572 consid. 3; 128 III 146 consid. 2a; 127 III 160 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A.167/2019 du 8 août 2019 consid. 3.1.1).

Pour déterminer s'il existe un risque de confusion, notion qui est la même dans tout le droit relatif aux signes distinctifs, il faut, d'une part, examiner les signes à comparer dans leur ensemble et, d'autre part, se demander ce que le destinataire moyen conserve en mémoire (ATF 131 III 572 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A.315/2009 du 8 octobre 2009 consid. 2.1, in SJ 2010 I 129). Les raisons ne doivent pas seulement se différencier par une comparaison attentive de leurs éléments, mais aussi par le souvenir qu'elles peuvent laisser. Tous les signes n'ont pas la même importance pour l'appréciation du risque de confusion. Selon la jurisprudence, il convient surtout de prendre en compte les éléments frappants que leur signification ou leur sonorité mettent particulièrement en évidence, si bien qu'ils ont une importance accrue pour l'appréciation du risque de confusion (ATF 131 III 572 consid. 3; 127 III 160 consid. 2b/cc; ATF 122 III 369 consid. 1). Cela vaut en particulier pour les désignations de pure fantaisie, qui jouissent généralement d'une force distinctive importante, à l'inverse des désignations génériques appartenant au domaine public.

Celui qui emploie comme éléments de sa raison de commerce des désignations génériques identiques à celles d'une raison plus ancienne a le devoir de se distinguer avec une netteté suffisante de celle-ci en la complétant avec des éléments additionnels qui l'individualiseront (arrêt du Tribunal fédéral 4C.197/2003 du 5 mai 2004 consid. 5.3, non publié à l'ATF 130 III 478; ATF 122 III 369 consid. 1).

Lorsqu'une raison sociale est composée de termes génériques, un élément additionnel, même revêtu d'un caractère distinctif relativement faible, peut suffire à exclure la confusion (ATF 131 III 572 consid. 3; 122 III 369 = JdT 1997 I 239 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 4A.315/2009 du 8 octobre 2009 consid. 2.1). En effet, comme le public ne perçoit les désignations génériques que comme des indications sur le genre de l'entreprise et son activité, et qu'il ne lui prête dès lors qu'une attention limitée en ce qui concerne l'image de marque de l'entreprise, il accorde plus d'attention aux autres éléments de la raison sociale (ATF 122 III 369 consid. 1).

On se montrera plus strict s'il existe un rapport de concurrence entre les entreprises, si elles ont des buts statutaires identiques, ou si elles exercent leurs activités dans un périmètre géographique restreint, auquel cas les raisons de commerce doivent se distinguer nettement (ATF 131 III 572 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 4A.315/2009 précité consid. 2.1).

Le Tribunal fédéral a jugé qu'il existait un risque de confusion entre les raisons sociales "Swiss Trustees SA" et "SwissIndependent Trustees SA", dans la mesure où elles comportaient les deux les termes "Swiss" et "Trustees", qui n'avaient pas de force distinctive, et où le seul terme "Independent", qui ne se retrouvait pas dans la première, avait également une faible force distinctive et ne semblait pas suffisante pour exclure le risque d'une confusion dans le souvenir des clients potentiels (arrêt du Tribunal fédéral 4A.315/2009 du 8 octobre 2009 consid. 2.4). Un risque de confusion n'a en revanche pas été retenu entre Arveron SA et ARVEYRON-RHÔNE Sàrl. Le Tribunal fédéral a relevé que du point de vue auditif, ces signes se prononçaient de manière similaire voir identique en français. S'agissant du risque de confusion, la discussion devait donc se concentrer sur l'élément additionnel de la raison de commerce de l'intimée " -Rhône ". Si la force distinctive de l'élément additionnel était relativement faible, l'impression globale qui ressortait du signe litigieux permettait d'écarter un risque de confusion avec celui d'Arveron SA (arrêt du Tribunal fédéral 4A.167/2019 du 8 août 2019, consid. 3.2.3).

2.2 En l'espèce, les parties ont chacune leur siège en ville de Genève et elles exercent pour l'essentiel, à titre principal, une activité similaire, à savoir la plâtrerie-peinture. Leurs clients proviennent du même périmètre, soit le canton de Genève, voire le canton de Vaud. Elles s'adressent dès lors au même cercle de clients.

Les deux raisons sociales commencent par le même terme, soit A......, qui n'est le nom d'aucune des parties, mais qui est uniquement un surnom et constitue dès lors une désignation de pure fantaisie. Le positionnement de ce terme au début de la raison sociale lui donne une importance particulière dans le souvenir que le public peut en retirer et contribue dès lors à créer un risque de confusion. Le représentant de la demanderesse a d'ailleurs déclaré que son entreprise était parfois désignée de manière abrégée par ce seul terme.

Un élément distingue les deux raisons sociales, à savoir que le terme "A......" est suivi du terme "B......" pour l'une et de "C...... " pour l'autre. Cet élément n'a toutefois pas de force distinctive particulière dans le domaine des travaux et de la rénovation. Le terme utilisé par la défenderesse pourrait d'ailleurs s'appliquer à la demanderesse dont l'activité consiste précisément pour une large part en la rénovation d'appartements. Ces termes ne sont dès lors pas aptes à distinguer les deux raisons sociales.

Les deux parties sont par ailleurs des sociétés à responsabilité limitée, de sorte que cette mention ne permet pas de les distinguer.

Enfin, le fait que le défendeur aurait eu des motifs pertinents pour choisir sa raison sociale, à savoir que son surnom est de longue date "A......", qu'il est connu sous ce surnom dans le domaine de la peinture et le fait qu'il n'aurait pas volontairement choisi et adopté une raison sociale qui créerait un risque de confusion avec celle de la demanderesse, ce qui peut être considéré comme suffisamment établi, n'est pas pertinent pour l'issue du litige. Le fait que l'une soit une structure moins importante que l'autre ou ne fasse pas de publicité et compte sur le bouche à oreille pour trouver des clients n'est pas davantage déterminant pour apprécier un éventuel risque de confusion. Il en va de même de l'absence de confusion avérée et effective puisqu'il n'est pas nécessaire qu'une confusion se soit déjà produite pour admettre la présence d'un risque de confusion.

2.3 En définitive, au vu de ce qui précède, l'existence d'un risque de confusion entre les deux raisons sociales doit être admis du fait qu'elles sont composées chacune d'un premier élément identique, puis d'un second, qui ne permet pas particulièrement de différencier la défenderesse de la demanderesse. Il sera dès lors fait droit à la demande en application des dispositions sur les raisons sociales, sans qu'il soit nécessaire d'examiner spécifiquement les dispositions sur la concurrence déloyale, dont les conditions d'application ne semblent toutefois pas remplies (cf. consid. 2.1.3 in fine), ou sur le nom.

Il sera ainsi ordonné à A....../C...... Sàrl de cesser tout usage de sa raison sociale. Comme déjà indiqué dans la décision sur mesures provisionnelles, il ne peut en revanche lui être fait interdiction d'utiliser toute raison sociale ou nom comportant le terme "A......" (ou A...... [majuscule]), comme le réclame la demanderesse, dans la mesure où, combiné à d'autres éléments et dans un autre ordre, ceux-ci pourraient permettre, le cas échéant, de suffisamment distinguer les raisons sociales des deux parties même si elles contiennent les deux le terme "A......" (ou A......).

La demanderesse conclut également à ce que la défenderesse soit radiée. Cela étant, seule la raison sociale de la défenderesse contrevient aux dispositions en vigueur et aucun motif ne justifie la radiation de la société elle-même. Il sera dès lors uniquement ordonné à la défenderesse de modifier sa raison sociale, comme la demanderesse le réclame à titre subsidiaire.

Enfin, les interdiction et injonction précitées seront prononcées sous la menace de la peine de l'art. 292 CP lequel prévoit que quiconque ne se conforme pas à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue à l'article précité, par une autorité ou un fonctionnaire compétents, est puni d’une amende. Il sera en revanche renoncé à prévoir, en plus, une amende de 1'000 fr. par jour d'inexécution, dont la demanderesse n'explique pas en quoi elle serait nécessaire et dont le montant paraît par ailleurs excessif.

  1. Les frais seront mis à la charge de la défenderesse qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Compte tenu d'une valeur litigieuse évaluée à 30'001 fr. et non remise en cause par la défenderesse, les frais judiciaires pour l'ensemble de la procédure, y compris la décision sur mesures provisionnelles, seront arrêtés à 2'800 fr. (art. 17 et 26 RTFMC). Ils seront compensés avec l'avance de frais versée par la demanderesse, qui reste acquise à l'Etat de Genève. La défenderesse sera condamnée à verser ce montant à la demanderesse qui en a fait l'avance (art. 111 al. 1 CPC).

La défenderesse sera par ailleurs condamnée à verser à la demanderesse la somme de 5'000 fr. à titre de dépens (art. 20 LaCC; art. 84 et 85 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25 et 26 LaCC).


PAR CES MOTIFS, La Chambre civile :

Statuant en instance unique:

A la forme :

Déclare recevable la demande formée par A....../B...... SARL le 11 octobre 2023 à l'encontre de A....../C...... SARL dans la cause C/20670/2023.

Au fond :

Fait interdiction à A....../C...... SARL d'utiliser sa raison sociale de quelque manière ou sous quelque forme que ce soit pour désigner son entreprise, notamment comme nom commercial, enseigne ou nom de domaine, sur des documents promotionnels ou publicitaires, sur internet ou les réseaux sociaux, ou sur tout support ou de quelque manière que e soit.

Dit que cette interdiction prendra effet à l'échéance d'un délai de 30 jours suivant l'entrée en force du présent arrêt.

Ordonne à A....../C...... SARL de modifier sa raison sociale inscrite au registre du commerce dans le même délai.

Prononce ces interdiction et injonction sous la menace de la peine de l'art. 292 du Code pénal, lequel prévoit que "Quiconque ne se conforme pas à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents est puni d’une amende".

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 2'800 fr., les met à la charge de A....../C...... SARL et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A....../C...... SARL à verser à A....../B...... SARL la somme de 2'800 fr. à titre de frais judicaires.

 

Condamne A....../C...... SARL à verser à A....../B...... SARL la somme de 5'000 fr. à titre de dépens.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Monsieur Laurent RIEBEN, Madame Ursula ZEHETBAUER-GHAVAMI, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.