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Décision / 2020 / 720

Datum
2020-08-02
Gericht
Chambre des recours pénale
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL 612 PE19.005080-CMI CHAMBRE DES RECOURS PENALE .......................................... Arrêt du 3 août 2020 .................. Composition : M. Perrot, président M. Kaltenrieder et Mme Giroud Walther, juges Greffière : Mme de Benoit ***** Art. 85 al. 4, 87 al. 2, 90 al. 1, 205, 355 et 384 let. b CPP Statuant sur le recours interjeté le 4 juin 2020 par X......... contre l’ordonnance rendue le 1er juillet 2019 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois dans la cause n° PE19.005080-CMI, la Chambre des recours pénale considère : En fait : A. Par ordonnance pénale du 24 avril 2019, le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois (ci-après : Ministère public) a condamné X......... pour lésions corporelles simples, injure et menaces à une peine privative de liberté de 60 jours, ainsi qu’à dix jours-amende à 30 fr. le jour, et a mis les frais de procédure, par 200 fr., à la charge de X.......... Par courrier non daté, remis à la poste le 29 avril 2019, X......... a formé opposition à l’ordonnance pénale précitée et a requis son audition par le Procureur. Par mandat de comparution du 7 mai 2019, X......... a été convoqué à l’audience du Ministère public du 27 juin 2019 à 8h30. Cette citation à comparaître, adressée à X........., incarcéré à l’Etablissement fermé de la Brenaz, à Puplinge, mentionnait les dispositions du Code de procédure pénale relatives à la procédure en cas d’opposition, à l’obligation de comparaître et aux conséquences d’un défaut. Le 9 mai 2019, le greffe du Ministère public a inscrit la mention suivante au procès-verbal des opérations : « Madame [...], du Service de probation du canton de Genève, avise la greffière que la fin de peine de X......... est prévue pour le 15.05.2019. Si aucune date pour son renvoi en Macédoine n’est pour l’heure prévue, ce dernier devrait intervenir dans les jours suivant la fin de peine. Aucune détention administrative n’est prévue dans l’intervalle, X......... risquant de ne pas se présenter à l’audience appointée le 27.06.2019. Après son renvoi, il est possible d’adresser du courrier au père du prévenu, [...], domicilié [...]. » Selon un rapport de refoulement de la police du 15 mai 2019, X......... a été pris en charge le 15 mai 2019 à l’Etablissement de la Brenaz pour être acheminé à l’aéroport de Genève. Il a été placé sur un vol à destination de Skopje/Macédoine, via Zurich. X......... ne s’est pas présenté à l’audience du 27 juin 2019. B. Par ordonnance du 1er juillet 2019, le Ministère public a pris acte du retrait de l’opposition (I), a dit que l’ordonnance pénale du 24 avril 2019 devenait exécutoire (II) et a dit que cette décision était rendue sans frais (III). Le Procureur a considéré que X......... avait fait défaut à l’audience du 27 juin 2019 à laquelle il avait été cité à comparaître sous pli recommandé. Partant, en application de l’art. 355 al. 2 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0), l’opposition devait être considérée comme retirée. L’ordonnance précitée a été adressée pour notification à X......... au père de ce dernier, [...], [...]. C. Le 17 mai 2020, X........., alors incarcéré à la prison de la Croisée, a écrit au Ministère public en expliquant qu’il n’avait pas pu se présenter à l’audience à laquelle il avait été convoqué en raison de son renvoi dans son pays d’origine, le 15 mai 2019. Il a requis son audition ensuite de son opposition à l’ordonnance pénale du 24 avril 2019. Le 28 mai 2020, le Ministère public a indiqué à X......... qu’au vu de son défaut à l’audience prévue le 27 juin 2019, son opposition avait été considérée comme retirée, de sorte que l’ordonnance pénale du 24 avril 2019 était entrée en force. En annexe à ce courrier, une copie de l’ordonnance de retrait de l’opposition du 1er juillet 2019 a été adressée à X.......... Par acte du 30 mai 2020, X......... a formé recours contre l’ordonnance de retrait de l’opposition précitée et a conclu implicitement à son annulation et au renvoi du dossier au Ministère public pour qu’il procède à son audition. Le 1er juillet 2020, dans le délai imparti à cet effet, le Ministère public a transmis ses déterminations. En droit : 1. 1.1 La décision par laquelle le Ministère public prend acte du retrait de l’opposition et déclare l’ordonnance pénale exécutoire, par exemple pour cause de défaut de l’opposant à l’audience à laquelle il a été assigné (cf. art. 355 al. 2 CPP), est susceptible de recours selon les art. 393 ss CPP (Riklin, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 5 ad art. 355 CPP; Schwarzenegger, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2e éd., Zurich/Bâle/Genève 2014, n. 2 ad art. 355 CPP ; CREP 2 juillet 2020/521 consid. 1.1). Ce recours s’exerce auprès de l’autorité de recours (art. 20 al. 1 let. b CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [loi vaudoise d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 ; BLV 312.01] ; art. 80 LOJV [loi vaudoise d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; BLV 173.01]). Il doit être adressé par écrit, dans un délai de dix jours dès la notification de la décision attaquée (art. 384 let. b CPP), à l’autorité de recours (art. 396 al. 1 CPP). En l’espèce, le recours a été interjeté dans les formes (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP) contre un prononcé ou un acte de procédure visé par l’art. 393 al. 1 CPP. 1.2 Le délai de recours de dix jours – qui ne peut pas être prolongé (art. 89 al. 1 CPP) – commence à courir le jour qui suit la notification de l’ordonnance entreprise (art. 90 al. 1 et 384 let. b CPP ; Calame, in : Jeanneret/Kuhn/Perrier Depeursinge [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, 2e éd., Bâle 2019, n. 3 ad art. 384 CPP). Le recours écrit doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à l’autorité pénale, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s’agissant de personnes détenues, à la direction de l’établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP). Les autorités pénales notifient leurs prononcés par lettre signature ou par tout autre mode de communication impliquant un accusé de réception, notam­ment par l'entremise de la police (art. 85 al. 2 CPP). La date de réception étant déterminante pour faire courir le délai d’opposition ou de recours, la règle de l'art. 85 al. 2 CPP se justifie par le fait qu'il faut acquérir la certitude que le prévenu a bien reçu la décision et qu'il a eu la possibilité de faire opposition ou recours. En ce sens, elle a une fonction de preuve importante (ATF 142 IV 125 consid. 4.1 et les réf. citées ; TF 6B.30/2020 du 6 avril 2020 consid. 1.1.1). Toute communication doit être notifiée au domicile, au lieu de résidence habituelle ou au siège du destinataire (art. 87 al. 1 CPP) ; les parties et leur conseil qui ont leur domicile, leur résidence habituelle ou leur siège à l'étranger sont tenus de désigner un domicile de notification en Suisse, les instruments internationaux prévoyant la possibilité de notification directe étant réservés (art. 87 al. 2 CPP ; TF 6B.662/2020 du 18 août 2020 consid. 1.2). Un prononcé est réputé notifié lorsque, expédié par lettre signature, il n'a pas été retiré dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de remise du pli, si la personne concernée devait s'attendre à une telle remise (art. 85 al. 4 let. a CPP). De jurisprudence constante, celui qui se sait partie à une procédure judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir notification d'actes du juge (ou de la direction de la procédure), est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins (ATF 146 IV 130 consid. 1.1.2 ; TF 6B.723/2020 du 2 septembre 2020 consid. 1.1.1 et les arrêts cités). A ce défaut, il est réputé avoir eu, à l'échéance du délai de garde, connaissance du contenu des plis recommandés que l’autorité lui adresse. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2 ; ATF 141 II 429 consid. 3.1 ; ATF 139 IV 228 consid. 1.1 et les réf. citées ; TF 6B.936/2018 du 4 décembre 2018 consid. 1.1). 1.3 En l’espèce, se pose la question de la tardiveté du recours interjeté contre l’ordonnance du 1er juillet 2019 et remis à la poste le 4 juin 2020. Selon la mention au procès-verbal des opérations du 9 mai 2019, il apparaît que le Ministère public s’est fié à une communication d’une collaboratrice du Service de probation de Genève, en envoyant cette décision pour notification au prévenu à l’adresse de son père, alors que le recourant avait été renvoyé dans son pays d’origine. A défaut d’une indication écrite signée par le prévenu, on ne peut considérer que celui-ci avait exprimé la volonté de faire élection de domicile chez son père. La fiction de la notification ne peut donc pas s’appliquer en l’espèce. Il y a dès lors lieu de considérer que la notification de l’ordonnance attaquée n’est pas intervenue valablement. Pour le surplus, il semble que le recourant n’avait pas connaissance de cette ordonnance avant que le Ministère public lui en fasse parvenir une copie par courrier du 28 mai 2020. Par conséquent, il faut retenir que le recours a été formé dans le délai de dix jours dès la date de réception et qu’il est donc recevable. 2. 2.1 Le recourant soutient qu’il n’a pas pu se rendre à l’audience du 27 juin 2019 en raison de son renvoi dans son pays d’origine au terme de l’exécution de sa peine, le 15 mai 2019. Il fait valoir en substance une violation de son droit d’être entendu. 2.2 Aux termes de l'art. 205 al. 1 CPP, quiconque est cité à comparaître par une autorité pénale est tenu de donner suite au mandat de comparution. Cette disposition consacre une obligation générale de comparution à la charge des personnes citées (ATF 142 IV 158 consid. 3.2, JdT 2017 IV 46). Celui qui est empêché de donner suite à un mandat de comparution doit en informer sans délai l’autorité qui l’a décerné ; il doit indiquer les motifs de son empêchement et lui présenter les pièces justificatives éventuelles (art. 205 al. 2 CPP). En matière d'ordonnance pénale, le défaut de celui qui a formé opposition est réglé de manière spécifique. Selon l'art. 355 al. 2 CPP, si l'opposant, sans excuse, fait défaut à une audition devant le Ministère public malgré une citation, son opposition est réputée retirée. Ainsi, le défaut peut, en vertu de l'art. 355 al. 2 CPP, aboutir à une perte de toute protection juridique, nonobstant le fait que l'opposant ait précisément voulu une telle protection en formant opposition (ATF 140 IV 82 consid. 2.4, JdT 2014 IV 301). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a rappelé le caractère particulier de l'ordonnance pénale et a spécifié que l'art. 355 al. 2 CPP devait être interprété en considération de différentes garanties procédurales, en particulier celles prévues aux art. 3 CPP, 29a et 30 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101) et 6 § 1 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; RS 0.101). Au vu de l'importance fondamentale du droit d'opposition au regard de ces garanties, un retrait de l'opposition par actes concluants suppose que celui-ci résulte de l'ensemble du comportement de l'opposant, qui démontre qu'il se désintéresse de la suite de la procédure tout en étant conscient des droits dont il dispose (ATF 142 IV 158 précité consid. 3.1). La fiction légale de retrait découlant d'un défaut non excusé suppose également que l'opposant ait conscience des conséquences de son omission et qu'il renonce à ses droits en connaissance de cause, l’abus de droit étant réservé (ATF 142 IV 158 précité consid. 3.4 ; ATF 140 IV 82 précité consid. 2.3 et 2.5 ; Denys, Ordonnance pénale : Questions choisies et jurisprudence récente, SJ 2016 II 130, spéc. 133-134). 2.3 En l’espèce, la citation à comparaître à l’audience du 27 juin 2019 a été valablement notifiée au recourant. Son attention a également été attirée sur les conséquences d’un défaut à ladite audience, puisque les dispositions légales topiques figuraient en annexe au mandat de comparution. Cela étant, le recourant a été renvoyé en Macédoine dès sa sortie de prison, le 15 mai 2019. Certes, il disposait de quelques jours entre la notification de la citation à comparaître et son refoulement de Suisse pour en informer le Procureur. Cependant, le prévenu pouvait compter sur l’intervention du Service de probation pour informer le magistrat de son renvoi à sa sortie de prison. Selon la mention au procès-verbal des opérations du 9 mai 2019, l’attention du Ministère public a été expressément attirée sur cette problématique par le Service de probation de Genève. Il a ainsi été indiqué que le prévenu ne pourrait, selon toute vraisemblance, pas se présenter à l’audience du 27 juin 2019. Le Procureur avait donc connaissance de la situation et devait ainsi s’attendre au défaut du prévenu pour ce motif. Le recourant pouvait donc de bonne foi compter sur l’annulation de cette audition, à laquelle il ne pouvait pas assister. La comparaison avec l’arrêt du Tribunal fédéral cité par le Ministère public dans ses déterminations n’est pas pertinente, puisque dans cette affaire, l’intéressé avait volontairement fui à l’étranger pour se soustraire à ses obligations (ATF 6B.860/2013). Dans la présente cause, le prévenu a été pris en charge directement à sa sortie de prison par la brigade de sécurité et des audiences (BSA) et placé sur un vol à destination de Skopje/Macédoine. Il n’a donc pas eu d’autre choix que de retourner dans son pays d’origine, moins de deux semaines avant son audition. On ne peut pas non plus lui reprocher de ne pas être revenu en Suisse pour y assister. Au vu de ce qui précède, on ne saurait considérer le défaut du recourant comme la conséquence d’un désintérêt de celui-ci pour la procédure, mais bien plutôt comme une incapacité objective non fautive de comparaître. Partant, son opposition ne pouvait pas être réputée retirée. 3. Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis, l’ordonnance entreprise annulée et le dossier de la cause renvoyé au Ministère public pour qu’il procède à nouveau selon l’art. 355 CPP. Vu l’issue de la cause, les frais d’arrêt, par 880 fr. (art. 20 al. 1 TFIP), seront laissés à la charge de l’Etat (art. 423 et 428 al. 1 CPP). Par ces motifs, la Chambre des recours pénale prononce : I. Le recours est admis. II. L’ordonnance du 1er juillet 2019 est annulée. III. Le dossier de la cause est renvoyé au Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois pour qu’il procède à nouveau selon l’art. 355 CPP. IV. Les frais d’arrêt, par 880 fr. (huit cent huitante francs), sont laissés à la charge de l’Etat. V. L’arrêt est exécutoire. Le président : La greffière : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : - X........., - L........., - Ministère public central, et communiqué à : - M. le Procureur de l’arrondissement du Nord vaudois, - Service de la population, par l’envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 ; RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). La greffière :