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Arrêt / 2022 / 819

Datum
2022-11-20
Gericht
Cour des assurances sociales
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL AA 143/21 - 145/2022 ZA21.044437 COUR DES ASSURANCES SOCIALES ............................................. Arrêt du 21 novembre 2022 .................. Composition : M. Piguet, président Mmes Berberat et Durussel, juges Greffière : Mme Meylan ***** Cause pendante entre : H........., à [...], recourante, et F........., à [...], intimée. ............... Art. 4 LPGA ; 6 al. 1 et 36 al. 1 LAA E n f a i t : A. H......... (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en [...], a travaillé à 60 % du 1er juillet 2014 au 31 juillet 2021 comme assistante en soins pour le compte de la société [...]. A ce titre, elle était assurée contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de F......... (ci-après : F......... ou l’intimée). Le 4 septembre 2020, lors d’un soin chez une patiente, l’assurée s’est bloquée le dos en voulant éviter de tomber sur sa patiente alors qu’elle avait perdu l’équilibre. Elle a présenté une incapacité totale de travail dès le 12 octobre 2020. Consulté le 30 octobre 2020, le Dr K........., spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a observé que la palpation paravertébrale lombaire était sensible, descendant dans la fesse droite, et la marche sur les talons et/ou les pointes était possible avec des douleurs (cf. rapport du 13 novembre 2020). A teneur d’un rapport d’imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) de la colonne lombaire pratiquée le 2 novembre 2020, le Dr G........., spécialiste en radiologie et en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a relevé une ostéochondrose activée (inflammatoire L5-S1 à droite), mais pas de hernie discale ni de contrainte radiculaire (cf. rapport du 3 novembre 2020). Interpellée par F........., l’assurée a indiqué, dans un questionnaire rempli par ses soins le 10 décembre 2020, qu’elle avait ressenti des douleurs « tout de suite, et en augmentation les prochains jours », ajoutant être restée allongée pendant 48 heures dans l’impossibilité de se relever. Invité à se déterminer, le Dr T........., spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, médecin-conseil auprès de F........., a retenu les diagnostics de discopathies lombaires pluri-étagées prédominant en L1-L2 et surtout L5-S1 et d’arthrose facettaire postérieure L4-L5-S1. Il excluait le caractère accidentel des troubles présentés par l’assurée au motif qu’« il s’agi[ssait] d’un état maladif » et qu’il « n’y a[vait] pas de démonstration de lésion traumatique ni de lésion compatible avec atteinte 6.2 ». Selon lui, les douleurs étaient déjà présentes avant l’évènement annoncé (cf. rapport du 7 mars 2021). Une IRM de la colonne dorso-lombaire a été réalisée le 19 avril 2021. Dans son rapport du même jour, la Dre Z........., spécialiste en radiologie, a conclu à une attitude scoliotique dorsale à convexité droite, à de discrètes discopathies dégénératives dorsales moyennes et lombaires pluri-étagées, avec une discopathie plus marquée en L5-S1 où il existait un pincement discal significatif, et à des remaniements inflammatoires et graisseux des plateaux vertébraux, sans mise en évidence d’un conflit radiculaire, d’un rétrécissement canalaire ou foraminal significatif et d’une modification significative comparativement à l’IRM du 2 novembre 2020. Par décision du 12 juillet 2021, fondée sur l’avis de son médecin-conseil, F......... a refusé la prise en charge du traitement des douleurs dorso-lombaires, au motif que celles-ci n’étaient pas en lien de causalité avec l’accident du 4 septembre 2020. Tout au plus son intervention se limitait aux premiers frais encourus pendant un mois, soit jusqu’au 4 octobre 2020 au maximum (frais de l’instruction). L’assurée s’est opposée à cette décision en date du 21 juillet 2021. Par correspondance du 16 août 2021, son médecin traitant, le Dr S........., a complété cette opposition, précisant que l’assurée n’était pas connue du système médical pour des problèmes de dos avant le 4 septembre 2020. Par décision sur opposition du 12 octobre 2021, F......... a rejeté l’opposition et confirmé sa décision du 12 juillet 2021. B. Par acte du 11 novembre 2021, H......... a déféré la décision sur opposition précitée devant la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal et conclu implicitement à son annulation. Elle a fait valoir que ses douleurs, ses blocages et ses limitations fonctionnelles étaient dus à des efforts violents effectués le 4 septembre 2020 en mobilisant une patiente de plus de 200 kg sans l’aide d’un lit médicalisé. Par réponse du 13 décembre 2021, F......... a conclu au rejet du recours. Par réplique du 16 janvier 2022, H......... a confirmé ses précédentes conclusions et produit un rapport du 14 janvier 2022 du Dr S........., lequel a soutenu que les douleurs avaient bel et bien été provoquées par l’accident. Par duplique du 7 février 2022, F......... a maintenu sa position. E n d r o i t : 1. a) La LPGA (loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales ; RS 830.1) est, sauf dérogation expresse, applicable en matière d’assurance-accidents (art. 1 al. 1 LAA [loi fédérale du 20 mars 1981 sur l’assurance-accidents ; RS 832.20]). Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte peuvent faire l’objet d’un recours auprès du tribunal des assurances compétent (art. 56 et 58 LPGA), dans les trente jours suivant leur notification (art. 60 al. 1 LPGA). b) En l’occurrence, déposé en temps utile auprès du tribunal compétent (art. 93 let. a LPA-VD [loi cantonale vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative ; BLV 173.36]) et respectant les autres conditions formelles prévues par la loi (art. 61 let. b LPGA notamment), le recours est recevable. 2. Le litige porte sur la question de savoir si les dorso-lombalgies présentées par la recourante sont en lien de causalité avec l’accident qu’elle a subi le 4 septembre 2020. 3. a) Aux termes de l’art. 6 al. 1 LAA, les prestations d’assurance sont allouées en cas d’accident professionnel, d’accident non professionnel et de maladie professionnelle. L’art. 4 LPGA définit l’accident comme toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort. La notion d’accident repose donc sur cinq éléments, ou conditions, qui doivent être cumulativement réalisés : une atteinte dommageable à la santé, le caractère soudain de l’atteinte, son caractère involontaire, un facteur extérieur et le caractère extraordinaire de ce facteur extérieur (ATF 142 V 219 consid. 4.3.1 ; 129 V 402 consid. 2.1). En outre, l’atteinte doit s’inscrire dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec le facteur extérieur extraordinaire. b) Le droit à des prestations découlant d’un accident assuré suppose un lien de causalité naturelle entre l’événement dommageable de caractère accidentel et l’atteinte à la santé. Cette exigence est remplie lorsqu’il y a lieu d’admettre que le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière sans l’événement accidentel. Il n’est pas nécessaire, en revanche, que l’accident soit la cause unique ou immédiate de l’atteinte à la santé ; il faut et il suffit que l’événement dommageable, associé éventuellement à d’autres facteurs, ait provoqué l’atteinte à la santé physique, mentale ou psychique de la personne assurée, c’est-à-dire qu’il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 ; 142 V 435 consid. 1 et les références). Savoir si l’événement assuré et l’atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait que l’administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d’ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l’appréciation des preuves dans le droit des assurances sociales (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références). Il ne suffit pas que l’existence d’un rapport de cause à effet soit simplement possible ; elle doit pouvoir être qualifiée de probable dans le cas particulier (ATF 129 V 177 consid. 3.1). Le seul fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu’après la survenance d’un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement post hoc ergo propter hoc ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; TF 8C.140/2021 du 3 août 2021 consid. 3.5). Il convient en principe d’en rechercher l’étiologie et de vérifier, sur cette base, l’existence du rapport de causalité avec l’événement assuré (TF 8C.117/2020 du 4 décembre 2020 consid. 3.1). c) Le droit à des prestations de l’assurance-accidents suppose en outre l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident et l’atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 et les références). En matière de troubles physiques, la causalité adéquate se confond pratiquement avec la causalité naturelle (ATF 140 V 356 consid. 3.2 et la référence ; TF 8C.404/2020 du 11 juin 2021 consid. 6.2.1). d) En vertu de l’art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l’atteinte à la santé n’est que partiellement imputable à l’accident. Cependant, lorsqu’un état maladif préexistant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consécutivement à un accident, le devoir de l’assurance-accidents d’allouer des prestations cesse si l’accident ne constitue pas ou plus la cause naturelle (et adéquate) du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l’accident. Tel est le cas lorsque l’état de santé de l’intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l’accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu même sans l’accident par suite d’un développement ordinaire (statu quo sine). A l’inverse, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n’est pas rétabli, l’assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l’état maladif préexistant, dans la mesure où il s’est manifesté à l’occasion de l’accident ou a été aggravé par ce dernier (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références ; TF 8C.733/2020 du 28 octobre 2021 consid. 3.3). 4. Selon le principe de la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA), le juge apprécie librement les preuves médicales sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Le juge doit examiner objectivement tous les documents à disposition, quelle que soit leur provenance, puis décider s’ils permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. S’il existe des avis contradictoires, il ne peut trancher l’affaire sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion plutôt qu’une autre. En ce qui concerne la valeur probante d’un rapport médical, il est déterminant que les points litigieux aient fait l’objet d’une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description du contexte médical et l’appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions soient bien motivées. Au demeurant, l’élément déterminant pour la valeur probante, n’est ni l’origine du moyen de preuve, ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 125 V 351 consid. 3a ; TF 8C.510/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.4). 5. a) En l’occurrence, il est établi que l’évènement du 4 septembre 2020 est constitutif d’un accident au sens de l’art. 4 LPGA ; l’intimée ne conteste d’ailleurs pas que la recourante a été victime d’un évènement traumatique. Est par contre litigieuse la question de la causalité naturelle et adéquate entre l’accident assuré et les douleurs dorso-lombaires dont la recourante se plaint. Se fondant sur l’avis de son médecin-conseil, l’intimée a considéré que les dorso-lombalgies étaient d’origine exclusivement maladive, ce que la recourante conteste. b) Il sied de relever que la recourante a, dans les suites de l’évènement traumatique survenu le 4 septembre 2020, présenté des douleurs dorso-lombaires. Il ressort du questionnaire rempli le 10 décembre 2020 que l’accident du 4 septembre 2020 a déclenché chez la recourante une exacerbation douloureuse qui l’a contrainte à s’aliter. S’il est vrai que les examens radiologiques mis en œuvre par la suite n’ont mis en évidence que de discrets troubles dégénératifs (cf. IRM de la colonne lombaire du 2 novembre 2020 [« De D11 à L4 : ostéochondrose de type Modic II en L1-L2 » ; « en L5-S1 : discopathie avec dessiccation discale et étalement circonférentiel » ; « ostéochondrose à composante œdémateuse et inflammatoire latérale droite »] ; IRM de la colonne dorso-lombaire du 19 avril 2021 [« A l’étage dorsal, discrètes discopathies dégénératives pluri-étagées, prédominant dans la concavité de la courbure cyphotique. […] Remaniements graisseux antérieurs des plateaux vertébraux de D6-D7 à D9-D10, Modic II » ; « A l’étage lombaire, discrètes discopathies dégénératives pluri-étagées avec diminution de l’hypersignal T2 discal physiologique, et pincement discal significatif en L5-S1 et de façon moins marquée à la partie antérieure du disque L1-L2. Remaniements graisseux Modic II des plateaux vertébraux en L1-L2. Remaniements inflammatoires et graisseux, Modic I et II, des plateaux vertébraux en L5-S1. Petite fissure annulaire postérieure du disque L2-L3 » ; « En L1-L2, discrète protrusion discale paramédiane et latérale gauche, sans changement significatif ». « En L2-L3, […] discrète hypertrophie des ligaments jaunes » ; « En L3-L4, […] hypertrophie modérée des ligaments jaunes » ; « En L4-L5, […] hypertrophie modérée des ligaments jaunes » ; « En L5-S1, discrète protrusion discale globale inchangée. Discrète hypertrophie des ligaments jaunes » ; « Discrète amyotrophie de la musculature paravertébrale »]), il n’en demeure pas moins que l’exacerbation douloureuse est en lien de causalité naturelle et adéquate avec l’accident. Dans sa décision sur opposition du 12 octobre 2021 ainsi que dans son mémoire de réponse du 13 décembre 2021, l’intimée en convient d’ailleurs puisqu’elle considère que l’accident a servi de révélateur de la pathologie lombaire. Il convient par ailleurs de relever que le Dr T........., sur l’avis duquel l’intimée a fondé sa décision, s’est contenté d’indiquer que « les douleurs étaient déjà présentes avant l’évènement annoncé selon le rapport d’[...] ». S’il est établi que des lésions dégénératives étaient préexistantes, le raisonnement du médecin-conseil ne tient nullement compte du fait que l’accident a entraîné une exacerbation douloureuse qui a justifié un arrêt de travail et la mise en œuvre de diverses mesures d’investigation et repose sur une hypothèse – l’existence de douleurs antérieurement à l’évènement traumatique – qui n’est fondée sur aucune pièce figurant au dossier (voir également le rapport du Dr S......... du 16 août 2021). Il a ainsi lieu de dénier toute valeur probante à l’avis exprimé par le médecin-conseil de l’intimée. c) En définitive, il appert que la recourante peut prétendre à des prestations de l’assurance-accidents aussi longtemps que le caractère exclusivement dégénératif de l'atteinte à la santé n’est pas clairement établi (statu quo sine). 6. a) Au final, il convient d’annuler la décision attaquée et de renvoyer la cause à l’intimée afin qu’elle fixe, pour autant que celui-ci ait été atteint, le statu quo sine. b) Il n’y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 61 let. fbis LPGA), ni d’allouer de dépens, la partie recourante ayant procédé sans mandataire qualifié (ATF 127 V 205 consid. 4b). Par ces motifs, la Cour des assurances sociales prononce : I. Le recours est admis. II. La décision sur opposition rendue le 12 octobre 2021 par F......... est annulée, la cause lui étant renvoyée pour instruction complémentaire au sens des considérants puis nouvelle décision. III. Il n’est pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens. Le président : La greffière Du L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à : ‑ H........., ‑ F........., - Office fédéral de la santé publique, par l'envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral au sens des art. 82 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral ; RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF). La greffière :