Omnilex

HC / 2023 / 835

Datum
2024-01-28
Gericht
Cour d'appel civile
Bereich
Schweiz

Omnilex ist das KI-Tool für Juristen in Schweiz

Wir indexieren und machen Entscheidungen zugänglicher

Zum Beispiel können Sie Omnilex verwenden für:


TRIBUNAL CANTONAL AX22.037362-230287 47 cour d’appel CIVILE ............................. Arrêt du 29 janvier 2024 .................. Composition : Mme Crittin Dayen, présidente MM. Oulevey et de Montvallon, juges Greffière : Mme Barghouth ***** Art. 257 CPC Statuant sur l’appel interjeté par B.Q........., à [...], appelante, contre le jugement rendu le 25 janvier 2023 par le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois dans la cause divisant l’appelante d’avec A.Q........., à [...], intimé, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal considère : En fait : A. Par jugement du 25 janvier 2023, motivé le 16 février 2023, le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois (ci-après : le président ou le premier juge) a admis la requête en cas clair déposée par A.Q......... le 15 septembre 2022 (I), a ordonné à B.Q......... de quitter et libérer l’immeuble sis sur la parcelle no [...] de la commune de H........., en emportant tous ses biens et en restituant toutes les clés en sa possession à A.Q........., pour le 6 mars 2023 au plus tard (II), a dit qu’à défaut d’exécution du chiffre II ci-dessus dans le délai imparti B.Q......... serait condamnée à une amende d’ordre de 50 fr. par jour d’inexécution (III), a mis les frais judiciaires, par 800 fr., à la charge de B.Q........., sous réserve de l’éventuel octroi de l’assistance judiciaire (IV), a dit que B.Q......... devait payer à A.Q......... 4'000 fr. à titre de dépens ainsi que, si le bénéfice de l’assistance judiciaire ne lui était pas accordé, 800 fr. à titre de remboursement de l’avance de frais fournie (V) et a rejeté toute autre ou plus ample conclusion (VI). Le président a considéré en substance qu’aussi bien les faits que la situation juridique étaient clairs, en ce sens que B.Q......... n’était titulaire d’aucun droit, réel, personnel ou contractuel, lui permettant d’occuper l’immeuble revendiqué par A.Q........., lequel avait établi en être le seul propriétaire. En particulier, les parties n’étaient liées ni par un contrat de société simple, ni par un contrat de bail. La requête en cas clair de A.Q......... a ainsi été admise et l’expulsion de B.Q......... ordonnée. B. a) Par acte du 27 février 2023, B.Q......... (ci-après : l’appelante) a interjeté appel contre cette décision, concluant principalement à ce que la requête d’A.Q......... (ci-après : l’intimé) soit déclarée irrecevable à raison de la valeur litigieuse et de l’exception de chose jugée (1°), et subsidiairement à ce que ladite requête en expulsion en cas clair soit déclarée irrecevable (2°). L’appelante a encore conclu « en tout état de cause » à l’octroi de l’assistance judiciaire et « sous suite de frais et dépens en application des dispositions sur l’assistance judiciaire » (3° et 4°). b) Le 7 mars 2023, l’intimé a sollicité l’exécution anticipée des chiffres I à VI du dispositif de la décision attaquée. Cette requête a été rejetée par ordonnance du 9 mars 2023. c) L’appelante a été mise au bénéfice de l’assistance judiciaire pour la procédure d’appel par ordonnance du 15 mars 2023. d) L’intimé a déposé une réponse le 17 août 2023. e) Par avis du 30 août 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger. C. La Cour d'appel civile retient les faits pertinents suivants, sur la base du jugement complété par les pièces du dossier : 1. L’appelante est la mère de l’intimé. 2. a) Le 5 septembre 2005, les parties ont acquis en copropriété ordinaire, chacun pour une demie, un lot de propriété par étages, soit le feuillet no [...] de la commune de J........., pour le prix de 790'000 francs. Dans ce cadre, l’appelante a versé, le 21 juillet 2005, un acompte de 79'000 fr. au notaire ayant instrumenté l’acte. Le 31 août suivant, elle a en outre versé les montants de 35'700 fr. et 39'600 fr. au notaire précité. L’appelante a également réglé la note d’honoraires et débours du notaire, qui s’élevait à 9'550 francs. Les parties étaient par ailleurs codébitrices solidaires d’une cédule hypothécaire d’un montant total de 560'000 fr. en lien avec cet immeuble. b) Par acte notarié du 16 novembre 2009, l’appelante a vendu à l’intimé sa part de copropriété d’une demie au feuillet no [...] de la commune de J........., pour le prix de 415'000 francs. L’acte précisait que ce montant avait été payé, d’une part, par la reprise de la part de la venderesse au prêt hypothécaire à hauteur de 276'298 fr. 80 et, d’autre part, par le versement du solde de 138'701 fr. 20 hors la vue et la responsabilité du notaire, dont quittance était confirmée dans l’acte notarié de vente. 3. L’étude du notaire ayant instrumenté la vente du 16 novembre 2009 a établi un projet de testament daté du même jour. Ce projet de testament prévoyait que l’intimé instituait l’appelante héritière de tous ses biens dans l’hypothèse où il décéderait sans laisser de descendants et sans être marié. Il était par ailleurs déterminé, pour le cas où l’intimé serait marié au jour de son décès, avec ou sans descendance, qu’il léguait à sa mère un droit d’usufruit viager sur l’habitation dont il serait propriétaire et qu’elle ou qu’ils occuperaient. Le 25 novembre 2009, l’intimé a « écrit et remis » au notaire le projet avec une page manuscrite par laquelle il était ajouté que, dans l’hypothèse où ses héritiers n’accepteraient pas sa succession ou seraient prédécédés sans laisser de descendance, son frère, [...], serait désigné en qualité de seul héritier. L’intimé n’a pas signé ce document, ni fait concrétiser ce projet par acte authentique. 4. Au cours de l’année 2015, l’intimé a vendu l’immeuble inscrit au feuillet no [...] de la commune de J......... pour le prix de 1'230'000 francs. Après déduction de diverses retenues, en particulier pour couvrir les frais liés à la vente et pour rembourser le prêt hypothécaire, un montant de 451'270 fr. subsistait en sa faveur. 5. a) Par contrat de vente à terme du 13 juillet 2015, l’intimé a acheté la parcelle no [...] de la commune de H......... (ci-après : la parcelle litigieuse) pour le prix de 1'435'000 francs. b) En lien avec l’achat de la parcelle litigieuse, les parties ont souscrit solidairement un prêt hypothécaire à hauteur de 850'000 fr. auprès de la Banque Valiant SA, conformément au contrat-cadre signé le 16 septembre 2015. L’intimé a en outre prélevé un montant de 151'000 fr. auprès de sa caisse de pension pour financer l’achat de cette parcelle. Actuellement, le prêt hypothécaire grevant l’immeuble est néanmoins souscrit aux seuls noms de l’intimé et de son épouse, C.Q.......... c) Selon extrait du registre foncier, l’intimé est inscrit en qualité de propriétaire unique de la parcelle litigieuse, dont l’achat a été exécuté le 30 septembre 2015. Aucun droit réel limité ou personnel n’a été porté sur le feuillet en faveur de l’appelante. 6. a) L’appelante vit dans la villa sise sur la parcelle litigieuse depuis 2015. L’intimé y a vécu avec elle pendant plusieurs années, avant de se marier en juin 2020. b) Plusieurs devis et factures en lien avec la villa de H......... ont été soumis à l’appelante à cette adresse. c) Dans un signalement concernant l’appelante que l’intimé a adressé le 8 décembre 2020 à la Justice de paix des districts du Jura-Nord vaudois et du Gros-de-Vaud, celui-ci a indiqué percevoir une « participation forfaitaire mensuelle de CHF 500.00 » de sa mère pour le logement. 7. a) Le 29 janvier 2021, l’appelante a fait changer la totalité des cylindres de la villa sise à H.......... Elle soutient avoir agi de la sorte en réaction à l’installation, par l’intimé, d’un système de vidéosurveillance dans la maison. b) Par courrier adressé le 5 février 2021 à l’appelante, l’intimé a imparti à cette dernière un délai au 26 mars 2021 pour quitter les lieux en emportant les biens lui appartenant ainsi que pour faire remettre à ses propres frais les cylindres précédemment installés. 8. a) Par requête en cas clair déposée le 19 avril 2021 auprès de la Chambre patrimoniale cantonale, l’intimé a pris les conclusions suivantes à l’encontre de l’appelante : « I. ordonner à B.Q......... de quitter immédiatement l’immeuble suivant : [parcelle litigieuse] ; II. dire que l’ordre mentionné sous chiffre I. est assorti de la commination faite à B.Q......... de l’art. 292 CP selon lequel « celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d’une amende » ; III. dire que si B.Q......... ne s’exécute pas dans un délai de 10 (dix) jours suite à l’entrée en force de la décision, ordre est donné à l’autorité chargée de l’exécution d’y procéder avec l’assistance de la force publique, soit la police communale ou cantonale. » b) Par jugement du 12 août 2021, motivé le 23 novembre 2021, la Chambre patrimoniale cantonale a déclaré irrecevable la requête en cas clair déposée le 19 avril 2021 par l’intimé, considérant que si celui-ci avait bel et bien prouvé qu’il était le propriétaire de la parcelle litigieuse, il n’était pas d’emblée exclu que les parties eussent été liées par un contrat de société simple, voire un contrat de bail, et que l’appelante exerçait dès lors la possession du bien concerné légitimement. 9. Le 22 avril 2021, l’intimé a déposé une plainte pénale contre l’appelante pour violation de domicile, contrainte et/ou dommages à la propriété, en faisant valoir que celle-ci occupait sans droit la parcelle litigieuse. L’appelante a été entendue en qualité de prévenue le 12 mai 2022. Dans ce cadre, elle a notamment déclaré avoir vendu sa part de la villa de J......... à son fils, mais que le montant d’environ 138'000 fr. mentionné dans l’acte de vente ne lui avait jamais été versé. Elle a également déclaré que le prix pour l’achat de la maison de H......... avait été payé avec l’argent de la vente de la maison de J........., précisant que l’argent provenant de ladite vente avait été touché par l’intimé exclusivement et qu’elle n’avait donc « pas mis un franc » pour l’achat de la maison de H.......... L’appelante a enfin déclaré à cet égard qu’il était prévu que son fils écrive un testament lui permettant de rester dans la maison, mais qu’un tel testament n’avait finalement jamais été signé, l’intimé ayant déchiré le document. 10. a) Par courriers recommandés du 7 avril 2022 adressés à l’appelante et à son conseil, l’intimé a à nouveau mis sa mère en demeure de quitter immédiatement les lieux et de lui remettre l’entier des jeux de clés de la maison, en lui reprochant d’occuper illicitement la maison depuis le changement des cylindres. L’intimé a rappelé qu’il considérait sa présence dans la maison comme accordée à bien plaire et en raison d’un devoir moral qu’un fils a envers sa mère. Par ce même courrier, il a déclaré résilier expressément au 31 octobre 2022 tout contrat de société simple qui pourrait lier les parties. En outre, soulignant que les parties avaient possiblement et sans même le savoir conclu en 2015 un bail permettant à l’appelante d’utiliser une chambre et les parties communes de la villa sise sur la parcelle litigieuse et relevant que sa mère avait cessé, depuis le mois de novembre 2020, de payer le montant de 500 fr. qu’elle lui remettait mensuellement auparavant, l’intimé a mis l’appelante en demeure de lui payer une somme de 9'000 fr. – représentant les éventuels loyers arriérés – dans un délai de trente jours. Il a enfin précisé qu’à défaut de paiement dans le délai imparti, le contrat de bail, pour autant qu’il existe, serait résilié moyennant un délai de congé de trente jours pour la fin d’un mois. L’appelante n’a pas réclamé ledit recommandé, de telle sorte que celui-ci a été renvoyé à l’intimé. Le conseil de l’appelante a, pour sa part, retiré le recommandé le 8 avril 2022. b) Le 25 mai 2022, en l’absence de paiement de la somme de 9'000 fr. dans le délai imparti, l’intimé a adressé à l’appelante une notification de résiliation de bail pour le 30 juin 2022, pour non-paiement du loyer. c) Par courrier du 7 juin 2022, l’appelante a fait opposition au congé. d) Le 24 juin 2022, l’appelante a déposé une requête en annulation de la résiliation auprès de la Commission de conciliation en matière de bail (ci-après : la Commission de conciliation), afin de faire constater le caractère inefficace de la résiliation, faute de bail, subsidiairement annuler ladite résiliation. e) Par courrier du 9 juillet 2022 adressé à la Commission de conciliation, l’intimé a indiqué se rallier au point de vue de l’appelante s’agissant du fait qu’il n’y avait jamais eu de bail, précisant avoir de bonne foi dû résilier le contrat de bail, pour autant qu’il existe, aux fins de la préservation de ses droits vu la teneur du jugement rendu par la Chambre patrimoniale cantonale. f) Le 19 juillet 2022, la Commission de conciliation a confirmé aux parties que la cause était rayée du rôle, vu l’inexistence d’un bail. g) Par courrier du 24 août 2022, l’intimé a prié l’appelante de quitter la maison de H......... au 31 octobre 2022 en emportant ses effets personnels et après avoir nettoyé l’ensemble de la maison à ses frais. Il l’a par ailleurs informée que son épouse et lui emménageraient le 2 novembre suivant dans la maison. h) Le 29 août 2022, l’appelante a informé par courrier l’intimé qu’elle souhaitait demeurer dans la maison de H......... au-delà du 31 octobre 2022. 11. a) Le 15 septembre 2022, l’intimé a déposé auprès du président une requête en cas clair datée du jour précédent, en prenant, avec suite de frais et dépens, les conclusions suivantes à l’encontre de l’appelante : « 1. Ordonner à B.Q......... de quitter la maison sise sur la parcelle no […] à H........., dans les 3 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, mais au plus tôt le 1er novembre 2022, sous la menace de la sanction de l’amende au sens de l’art. 292 CP en cas d’inexécution, en emportant ses effets personnels. 2. Autoriser A.Q......... à faire appel aux forces de l’ordre aux fins d’exécution du chiffre 2 [sic]. 3. Déclarer la présente ordonnance immédiatement exécutoire, nonobstant recours ou appel. » Par courrier du 13 novembre 2022, l’intimé a précisé ce qui suit : « l’ordre de quitter les lieux formulé dans la conclusion n° 1 comprend implicitement la restitution des clefs et doit être interprété dans ce sens (art. 52 CPC). Explicitement, il faut ajouter à la conclusion n° 1 […] après “à H.........”, la copule “(…) et de restituer le jeu complet des clefs de la maison à A.Q......... [sic]” ». b) Dans sa réponse du 20 octobre 2022, l’appelante a pour sa part prié l’autorité de : « Principalement : 1. Se déclarer incompétente au vu de la valeur litigieuse ; Subsidiairement : 2. Déclarer irrecevable la requête d’expulsion en cas clair de Monsieur A.Q......... du 14 septembre 2022 ; Plus subsidiairement : 3. Rejeter la requête d’expulsion en cas clair de Monsieur A.Q......... du 14 septembre 2022 ; En tout état de cause : 4. Accorder l’assistance judiciaire à Madame B.Q.......... 5. Avec suite de frais et dépens, sous réserve des règles sur l’assistance judiciaire. » c) Une audience a été tenue le 20 janvier 2023, en présence des parties et de leurs conseils. Lors de celle-ci, l’intimé a pris une conclusion no 4 dont la teneur est la suivante : « A.Q......... maintient ses conclusions 1 à 3 et, très subsidiairement, requiert qu’elles soient prises à titre de mesures provisionnelles, à charge pour lui d’ouvrir action dans un certain délai. ». L’appelante a conclu au rejet de cette nouvelle conclusion. En droit : 1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC [Code de procédure civile du 19 décembre 2010 ; RS 272]), dans les causes non patrimoniales ou dans les affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité précédente, est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC). L’appel, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l’instance d’appel (art. 311 al. 1 CPC), soit la Cour d’appel civile (art. 84 al. 1 LOJV [loi vaudoise du 12 décembre 1979 d’organisation judiciaire ; BLV 173.01]). Lorsque la décision entreprise a été rendue en procédure sommaire, comme c’est le cas en matière de cas clairs (art. 248 let. b CPC), le délai pour l’introduction de l’appel et le dépôt de la réponse est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC). 1.2 Interjeté en temps utile, contre une décision finale de première instance rendue dans une cause pécuniaire dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (infra consid. 3.3.2), par une partie qui a un intérêt digne de protection (art. 59 al. 2 let. a CPC), l’appel, écrit et motivé, est recevable. Déposée en temps utile et dans les formes prescrites, la réponse l’est également. 2. L’appel peut être formé pour violation du droit ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L’autorité d’appel peut revoir l’ensemble du droit applicable, y compris les questions d’opportunité ou d’appréciation laissées par la loi à la décision du juge, et doit, le cas échéant, appliquer le droit d’office conformément au principe général de l’art. 57 CPC. Elle peut revoir librement l'appréciation des faits sur la base des preuves administrées en première instance (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 ; TF 5A.340/2021 du 16 novembre 2021 consid. 5.3.1 ; TF 4A.215/2017 du 15 janvier 2019 consid. 3.4). Sous réserve des vices manifestes, l'application du droit d'office ne signifie pas que l'autorité d'appel doive étendre son examen à des moyens qui n'ont pas été soulevés dans l'acte d’appel. Elle doit se limiter aux griefs motivés contenus dans cet acte et dirigés contre la décision de première instance ; l'acte d’appel fixe en principe le cadre des griefs auxquels l'autorité d’appel doit répondre eu égard au principe d'application du droit d'office (ATF 147 III 176 consid. 4.2.1 et 4.2.2 ; TF 5A.873/2021 du 4 mars 2022 consid. 4.2 applicable en appel). 3. 3.1 Dans un premier moyen, l’appelante conteste la compétence ratione valoris du président, soutenant que le litige divisant les parties concernerait la liquidation d’une société simple dans le cadre de laquelle elle serait en droit de prétendre à un montant de 250'783 fr. 80 au minimum. Cette valeur litigieuse étant supérieure à 100'000 fr., seule la Chambre patrimoniale cantonale pouvait se déclarer compétente pour traiter la requête de l’intimé, à l’exclusion du président. 3.2 L’appelante procède par simple affirmation en soutenant l’existence d’un contrat de société simple en lien avec l’acquisition de l’immeuble de H........., ses déclarations ne reposant sur aucun élément de preuve quelconque. En particulier, l’appelante fait valoir ne pas avoir reçu l’argent que lui devait l’intimé dans le cadre de la vente de sa part de copropriété d’une demie sur l’immeuble de J........., alors même qu’elle en a donné quittance devant notaire (pièce T. 23, p. 5 in fine). Surtout, l’appelante ne démontre pas qu’elle aurait investi le moindre argent lors de l’acquisition de l’immeuble de H........., ayant même au contraire affirmé devant le Ministère public lors de son audition comme prévenue le 12 mai 2022 que le prix d’achat de la maison de H......... avait été payé avec l’argent de la vente de la maison de J......... – argent que seul l’intimé avait touché, puisqu’il était seul propriétaire de la maison au moment de sa vente – et qu’elle n’avait donc en rien financé l’achat de la maison de H......... (pièce T. 10, ll. 53 à 70, pp. 2 ss. ; jugement, p. 26). Il faut relever que l’appelante a cédé à l’intimé sa part de copropriété sur l’immeuble de J......... le 16 novembre 2009, alors que la vente des parts de copropriété de l’intimé sur cet immeuble est intervenue 6 ans plus tard, soit en 2015. Ainsi, même à suivre le raisonnement de l’appelante comme quoi elle n’aurait pas reçu l’argent que lui devait l’intimé dans le cadre de la vente de sa part de copropriété sur l’immeuble de J......... en 2009, elle considère elle-même ne pas avoir investi le moindre franc dans l’immeuble de H........., de sorte que si la question d’une liquidation d’une société simple devait encore se poser, celle-ci ne pourrait concerner que l’immeuble de J.......... En d’autres termes, l’appelante reconnaissant elle-même n’avoir jamais eu la volonté de financer l’immeuble de H........., l’existence même d’une société simple en lien avec ce dernier immeuble est de facto exclue, faute d’accord de volonté réciproque et concordante entre les parties (art. 1 CO [loi fédérale complétant le Code civil suisse (Livre cinquième : Droit des obligations) du 30 mars 1911 ; RS 220]). En toute hypothèse, le montant concerné, dont l’intimé serait éventuellement redevable vis-à-vis de l’appelante depuis l’année 2009, ne peut pas concerner l’acquisition du bien immobilier de H......... en 2015 (pièce 2). Certes, durant plusieurs années, l’appelante a été solidaire du crédit hypothécaire contracté sur l’immeuble de H......... avec l’intimé. Toutefois, cette dette a été reprise par l’intimé et son épouse, ce qui exclut toute responsabilité financière de l’appelante à ce niveau. Cette circonstance passée ne joue donc aucun rôle en l’espèce. A supposer même l’existence d’une société simple concernant l’immeuble de H........., l’intimé, resté propriétaire, était en droit de reprendre l’immeuble au moment de la dissolution de la société (François Chaix, in : Commentaire romand, Code des obligations II, 2ème éd., Bâle 2017, n. 15 ad art. 548-550 CO ; Pierre Tercier / Laurent Bieri / Blaise Carron, Les contrats spéciaux, 5ème éd., Zürich 2016, n. 7111), soit en l’occurrence dès le 31 octobre 2022 (pièce 11). Partant, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de l’existence d’une société simple liant les parties concernant l’immeuble de H.......... 3.3 3.3.1 Dans une action en revendication au sens de l’art. 641 al. 2 CC (Code civil suisse du 10 décembre 1907 ; RS 210), la valeur litigieuse correspond en principe à la valeur de l'objet revendiqué, déduction faite de l'hypothèque grevant celui-ci (TF 5A.226/2022 du 22 juin 2022 consid. 5.3.3 ; TF 4A.18/2011 du 5 avril 2011 consid. 1.1). Cela étant, lorsque seul l'usage de l'immeuble est revendiqué, et non la propriété du bien, la valeur litigieuse peut se calculer de la même façon qu'en matière d'expulsion d'un locataire, soit selon le dommage présumé causé par le retard ou selon la valeur d'usage hypothétiquement perdue pendant la période considérée (TF 5A.226/2022 précité consid. 5.3.3 ; TF 5D.126/2012 du 26 octobre 2012 consid. 1.1). Si le litige porte uniquement sur la question de savoir si les conditions d'une expulsion selon la procédure dans les cas clairs sont réalisées, la valeur litigieuse correspond au retard causé par le recours à la procédure sommaire, dont il y a lieu en principe de fixer la durée à six mois concernant des anciens locataires ou des squatters (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 ; TF 4D.79/2015 du 22 janvier 2016 consid. 1 ; CACI du 4 décembre 2020/521 consid. 4.1.3 ; Juge déléguée CACI 7 avril 2020/131 consid. 1.2). Dans le cas d’une action en revendication contre l’ancien propriétaire d’un immeuble ayant été acquis aux enchères, une valeur litigieuse correspondant à une période d’une année, soit la durée prévisible pour aboutir à une expulsion dans ce type de contexte, a été retenue (TF 5A.226/2022 précité consid. 5.1 et 5.3.3 ; CACI 22 septembre 2021/528 consid. 1.2 ; CACI 27 avril 2020/160 consid. 3.4.2 ; CACI 16 novembre 2020/489 consid. 1.1). 3.3.2 La présente procédure concerne l’évacuation d’une personne occupant sans droit un immeuble, situation comparable à l’évacuation d’un ancien propriétaire ou d’un ancien locataire dès lors qu’il n’est pas contesté que l’appelante était autorisée à occuper les lieux durant plusieurs années puisqu’elle a vécu dans la villa avec son fils de l’année 2015 à l’année 2020, puis seule jusqu’au 26 mars 2021, date à laquelle il lui a été demandé par courrier du 5 février 2021 de quitter les lieux. La valeur litigieuse doit ainsi se calculer comme pour le cas d’une action en revendication de l’art. 641 al. 2 CC où seul l’usage du bien est contesté et non sa propriété. On peut admettre en l’espèce que la valeur litigieuse correspond à celle de l'usage des locaux pendant une année. Le calcul opéré par l’autorité de première instance doit être confirmé en ce qu’elle estime cette valeur d’usage (valeur locative) à 3’507 fr. 40 par mois. L’appelante n’a du reste pas contesté ce calcul en appel. La valeur litigieuse doit donc être arrêtée à 42’088 fr. 80 (3'507 fr. 40 x 12 mois). Il s’ensuit que le président était bien compétent pour connaître de la requête en cas clair déposée le 15 septembre 2022 (art. 96b al. 3 LOJV [loi d’organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; BLV 173.01] ; art. 43 al. 1 let e CDPJ [Code de droit privé judiciaire vaudois du 12 janvier 2010 ; BLV 211.01]). Partant, il y a lieu de rejeter le grief et de confirmer également le jugement sur ce point. 4. 4.1 L’appelante se prévaut ensuite de l’exception de chose jugée pour contester la recevabilité de l’action introduite par l’intimé devant le président. Elle fait valoir que la Chambre patrimoniale a statué de manière définitive en la matière dans sa décision du 12 août 2021 lorsqu’elle a déclaré irrecevable la requête en cas clair déposée devant elle. L’appelante relève que cette autorité s’est prononcée exactement sur le même litige (identité des parties, des conclusions et même complexe de faits), la décision en cause, désormais définitive, ayant acquis selon elle autorité de la chose jugée. 4.2 Lorsque le juge considère que les conditions légales sont remplies, il accorde la protection des cas clairs. La décision est alors définitive et elle est revêtue de l’autorité de la chose jugée une fois entrée en force (ATF 138 III 620 consid. 5.1.1). En revanche, si le juge considère que la protection ne peut pas être accordée, il doit refuser d’entrer en matière et déclarer la demande irrecevable. Le litige demeure entier (ATF 144 III 462 consid. 3.1 ; ATF 140 III 315 consid. 5 ; François Bohnet, in : Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., Bâle 2019, n. 23 ad art. 257 CPC et réf. cit.). Si après un jugement d'irrecevabilité, le demandeur se procure de nouvelles preuves, il peut introduire une nouvelle requête selon l'art 257 CPC devant le même juge (TF 4A.470/2022 du 4 janvier 2023 consid. 4.1 ; TF 4A.420/2012 du 7 novembre 2012 consid. 5). 4.3 En l’occurrence, la première requête en cas clair déposée par l’intimé le 19 avril 2021 a été déclarée irrecevable par la Chambre patrimoniale cantonale le 12 août 2021 au motif que la situation juridique n’était pas claire, soit plus particulièrement qu’on ne pouvait pas exclure l’existence d’un contrat de société simple ou d’un contrat de bail entre les parties. Depuis cette décision, l’intimé a résilié l’éventuel bail qui pouvait avoir lié les parties (pièce 12). L’appelante s’est opposée à cette résiliation, puis la procédure de contestation a été rayée du rôle par la Commission de conciliation, selon décision du 18 juillet 2022 (pièce 16), cette autorité ayant constaté l’inexistence d’un contrat bail. L’éventuelle société simple a été dissoute le 31 octobre 2022 (pièce 11). Du reste, l’appelante ne le conteste pas, estimant toutefois que la société simple n’aurait pas encore été liquidée (appel, ch. 3, p. 9). Ces faits nouveaux et les moyens de preuve y afférents permettaient à l’intimé de déposer une nouvelle requête en cas clair auprès du président, sans se voir opposer l’exception de chose jugée. Partant, il y a lieu de rejeter le moyen formé à ce titre par l’appelante. 5. 5.1 L’appelante conteste encore l’applicabilité de la protection accordée aux cas clairs estimant que l’état de fait est litigieux, qu’il n’est pas susceptible d’être prouvé immédiatement et que la situation juridique n’est pas claire. Elle fait valoir l’existence d’une société simple pour l’acquisition successive « des maisons familiales de J......... et H......... ». 5.2 Aux termes de l’art. 257 al. 1 CPC, relatif à la procédure de protection dans les cas clairs, le tribunal admet l’application de la procédure sommaire lorsque l’état de fait n’est pas litigieux ou est susceptible d’être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b). Selon la jurisprudence, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur. Il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve doit être rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. Si le défendeur fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure pour les cas clairs est exclue et la requête irrecevable. A l'inverse, le cas clair doit être retenu lorsque sont émises des objections manifestement mal fondées ou inconsistantes sur lesquelles il peut être statué immédiatement (ATF 144 III 462 consid. 3.1 ; ATF 138 III 620 consid. 5.1.1 ; TF 4A.468/2022 du 10 novembre 2022 consid. 2.1). La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées. En règle générale, la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce, ce qui est notamment le cas lorsqu'il doit statuer sur la bonne foi (ATF 144 III 462 consid. 3.1 ; TF 4A.468/2022 précité consid. 2.1). Une action en revendication peut faire l'objet d'une procédure en cas clair. Si la qualité de propriétaire du revendiquant est clairement établie, celui-ci peut conclure au déguerpissement, fondé sur l'art. 641 CC, sous réserve de l'abus de droit (TF 5A.710/2013 du 17 février 2014 consid. 3). 5.3 La question de l’existence d’une société simple entre l’appelante et l’intimé concernant l’immeuble de H......... a pu être aisément exclue (supra consid. 3.2). Il n’est pas contesté que l’intimé est l’unique propriétaire de l’immeuble. L’appelante ne fait valoir aucun droit réel, personnel ou contractuel sur la parcelle litigieuse qui lui permettrait de s’opposer à son évacuation. Il y a donc lieu d’admettre que l'état de fait est établi et que la situation juridique est claire, en sorte que les conditions d'application de l'art. 257 CPC sont réunies. L’intimé était ainsi fondé à réclamer l'application de la procédure sommaire de protection des cas clairs pour obtenir l'évacuation de l’appelante. Il y a par conséquent lieu de rejeter le moyen tiré de la contestation du cas clair. 6. 6.1 En définitive, l’appel doit être rejeté et la décision entreprise confirmée. Le terme de l’expulsion étant désormais échu, la cause sera renvoyée au premier juge pour qu’il fixe à l’appelante un nouveau délai pour libérer les lieux. 6.2 Vu l’issue de l’appel, les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 1'420 fr. (art. 62 al. 1 TFJC [tarif des frais judiciaires civils du 28 septembre 2010 ; BLV 270.11.5]), sont mis à la charge de l’appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), mais provisoirement supportés par l’Etat (art. 122 al. 1 let. b CPC). 6.3 Il n’y a pas lieu à l’allocation de dépens en faveur de l’intimé, qui n’a pas formulé de conclusion à cet égard dans sa réponse du 17 août 2023 (ATF 139 III 334 consid. 4.3). 6.4 6.4.1 Le conseil d’office a droit à une rémunération équitable pour ses opérations et débours dans la procédure d’appel (art. 122 al. 1 let. a CPC). En l'absence de liste détaillée des opérations, le défraiement est fixé équitablement sur la base d'une estimation des opérations nécessaires pour la conduite du procès (art. 3 al. 2 RAJ [règlement du 7 décembre 2010 sur l’assistance judiciaire en matière civile ; BLV 211.02.3]). Le juge applique un tarif horaire de 180 fr. pour l’avocat et 110 fr. pour l’avocat-stagiaire (art. 2 al. 1 RAJ). 6.4.2 Me Jérôme Fer, conseil d’office de l’appelante, a renoncé à déposer une liste détaillée de ses opérations. En l’occurrence, l’activité déployée par Me Fer consiste en particulier au dépôt d’un acte d’appel, lequel est également signé par une avocate-stagiaire, de 10 pages, dans le cadre d’une procédure sommaire. On peut considérer que la rédaction de cet acte, les échanges avec la cliente et les autres opérations utiles ont nécessité 6 heures de travail par l’avocate-stagiaire et 2 heures de travail par l’avocat. L’indemnité d’office due à Me Fer doit ainsi être arrêtée à 1'020 fr. ([6 h x 110 fr.] + [2 h x 180 fr.]), indemnité à laquelle s’ajoutent les débours par 20 fr., équivalant à 2 % du défraiement hors taxe (art. 3bis al. 1 RAJ), et la TVA à 7.7 % sur le tout par 80 fr., ce qui représente au total 1'120 francs. 6.4.3 La bénéficiaire de l’assistance judiciaire remboursera les frais judiciaires mis à sa charge et l’indemnité à son conseil d’office, provisoirement supportés par l’Etat, dès qu’elle sera en mesure de le faire (art. 123 CPC). Il incombe à la Direction générale des affaires institutionnelles et des communes de fixer le principe et les modalités de ce remboursement (art. 39a CDPJ). Par ces motifs, la Cour d’appel civile prononce : I. L’appel est rejeté. II. Le jugement est confirmé. III. La cause est renvoyée au Président du Tribunal civil de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois pour qu'il fixe à l’appelante B.Q......... un nouveau délai pour libérer l’immeuble sis sur la parcelle no […] de la commune de H.......... IV. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 1'420 fr. (mille quatre cent vingt francs), sont mis à la charge de l’appelante B.Q......... et provisoirement supportés par l’Etat. V. Il n’y a pas lieu à l’allocation de dépens. VI. L’indemnité de Me Jérôme Fer, conseil d’office de l’appelante B.Q........., est arrêtée à 1'120 fr. (mille cent vingt francs), débours et TVA compris. VII. La bénéficiaire de l’assistance judiciaire remboursera les frais judiciaires mis à sa charge et l’indemnité à son conseil d’office, provisoirement supportés par l’Etat, dès qu’elle sera en mesure de le faire (art. 123 CPC). VIII. L’arrêt est exécutoire. La présidente : La greffière : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à : ‑ Me Grégoire Ventura (pour A.Q.........) ; ‑ Me Jérôme Fer (pour B.Q.........) ; - Mme Cécile Oulevay (curatrice de B.Q.........), et communiquée, par l'envoi de photocopies, à : ‑ M. le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois. La Cour d’appel civile considère que la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 francs. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral ; RS 173.110), le cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF). La greffière :