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HC / 2015 / 477

Datum
2015-06-07
Gericht
Cour d'appel civile
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL JL15.005815-150753 284 cour d’appel CIVILE ............................. Arrêt du 8 juin 2015 .................. Composition : M. Colombini, président M. Giroud et Mme Charif Feller, juges Greffière : Mme Tille ***** Art. 257d CO; 257 CPC Statuant à huis clos sur l'appel interjeté par D........., à [...], locataire, contre l'ordonnance rendue le 28 avril 2015 par la Juge de paix du district de Lausanne dans la cause divisant l'appelant d’avec V........., à Prilly, bailleresse, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal considère: En fait : A. Par ordonnance du 28 avril 2015, la Juge de paix du district de Lausanne a ordonné à D......... de quitter et rendre libres pour le mardi 26 mai 2015 à midi les locaux occupés dans l’immeuble sis à [...], Route [...] (Local commercial [...] de trois niveaux – café restaurant, un dépôt, un appartement de 3 pièces et hall, un appartement de 2.5 pièces, des places de parc, un garage et une cave) (I), dit qu’à défaut pour la partie locataire de quitter volontairement ces locaux, l’huissier de paix est chargé sous la responsabilité du juge de paix de procéder à l’exécution forcée de la décision sur requête de la partie bailleresse, avec au besoin l’ouverture forcée des locaux (II), ordonné aux agents de la force publique de concourir à l’exécution forcée de la décision, s’ils en sont requis par l’huissier de paix (III), arrêté à 480 fr. les frais judiciaires, compensés avec l’avance de frais de la partie bailleresse (IV), mis les frais à la charge de la partie locataire (V), dit qu’en conséquence D......... remboursera à V......... son avance de frais à concurrence de 480 fr. et lui versera la somme de 750 fr. à titre de défraiement de son représentant professionnel (VI) et rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (VII). En droit, le premier juge a considéré que le congé signifié le 24 septembre 2014 pour le 31 octobre 2014 était valable au regard de l’art. 257d CO (Code des obligations du 30 mars 1911, RS 220), dès lors que le locataire ne s'était pas acquitté de l'intégralité du montant de 23'100 fr., représentant le solde des loyers dus pour la période du 1er janvier au 31 juillet 2014, dans le délai comminatoire fixé au 31 août 2014 par lettre de la bailleresse du 29 juillet 2014. A cet égard, le premier juge a retenu que c'était en vain que le locataire invoquait le non-respect du délai contenu dans l'avis comminatoire pour procéder à la résiliation du bail, dit avis, daté du 29 juillet 2014, fixant expressément un délai au 31 août 2014. Certes, l'avis comminatoire lui avait été notifié le 7 août 2014 seulement, mais le locataire ne s'était pas acquitté de l'entier de l'arriéré de loyer dans un délai de trente jours, n'ayant versé que 3'000 fr. au total entre le 31 juillet et le 1er septembre 2014. Dès lors, le congé, signifié le 24 septembre 2014, était valable et l’on se trouvait en présence d’un cas clair au sens de l’art. 257 CPC (Code de procédure civile du 19 décembre 2008, RS 272) permettant l'application de la procédure sommaire des art. 248 ss CPC. B. Par acte du 12 mai 2015, D......... a formé appel contre cette ordonnance, concluant, avec dépens de première et deuxième instances, à sa réforme en ce sens que la procédure en protection des cas clairs déposée le 10 février 2015 est déclarée irrecevable. C. La Cour d'appel civile retient les faits suivants, sur la base de l'ordonnance complétée par les pièces du dossier : 1. Le 30 juin 2010, la bailleresse V........., d'une part, et le locataire D........., d'autre part, ont signé un contrat de bail à loyer pour locaux commerciaux portant sur un café-restaurant de trois niveaux à l'enseigne de "[...]", un dépôt, un appartement de 3 pièces et hall, un appartement de 2.5 pièces, des places de parc, un garage et une cave, à la route [...]. Le loyer mensuel s'élevait à 4'800 fr., charges comprises. Le locataire exploite un restaurant en raison individuelle dans les locaux faisant l'objet du bail. Au 31 juillet 2014, il faisait l'objet de poursuites ouvertes et d'actes de défaut de biens pour plusieurs dizaines de milliers de francs. 2. Du 1er au 29 juillet 2014, le locataire a effectué en faveur de la bailleresse sept versements allant de 400 fr. à 600 fr., pour un montant total de 3'500 francs. 3. Par lettre recommandée du 29 juillet 2014, la bailleresse a mis le locataire en demeure de s'acquitter des loyers de mars, avril, mai, juin et juillet 2014, pour un montant total de 23'100 fr. d'ici au 31 août 2014, faute de quoi le contrat de bail serait résilié de manière anticipée, en application de l’art. 257d CO. Le locataire a retiré le pli recommandé au guichet postal le 7 août 2014, après qu'un avis de retrait eût été déposé dans sa boîte aux lettres le 31 juillet 2014. Du 31 juillet au 1er septembre 2014, le locataire s'est acquitté d'un montant de 3'000 fr., par six versements de 500 francs. 4. Le 24 septembre 2014, constatant que l'entier de l'arriéré de loyer réclamé n'avait pas été payé, la bailleresse a résilié le contrat de bail avec effet au 31 octobre 2014. 5. Le 10 octobre 2014, agissant par l'intermédiaire de son conseil, le locataire a proposé à la bailleresse un règlement de l'arriéré de loyers par le paiement d'acomptes, moyennant renonciation à la résiliation du bail. Dans sa lettre, il exposait avoir subi dernièrement une réduction de la fréquentation de son établissement, mais que "l'approche de l'automne, et la période des fêtes, devait permettre à l'exploitation du restaurant de dégager plus de marge, de nature à favoriser le règlement des loyers". Le 13 octobre 2014, la bailleresse a répondu qu'il ne serait renoncé à la résiliation du bail que contre versement du total des loyers en retard. Divers échanges de correspondance ont suivi, n'aboutissant à aucun accord. En particulier, le 19 décembre 2014, le locataire a informé la bailleresse qu'il ne serait pas en mesure de restituer les locaux pour la date précédemment fixée au 5 janvier 2015, dès lors qu'il entendait poursuivre son exploitation jusqu'à la remise du commerce, dont le produit devait lui servir à la régularisation de ses loyers. Selon un document comptable intitulé "recettes de location restaurant" produit par la bailleresse devant le premier juge, l'arriéré de loyer s'élevait à 57'700 fr. au 31 décembre 2014 . 6. Le 10 février 2015, la bailleresse a saisi le Juge de paix d'une requête d'expulsion en cas clair pour défaut de paiement du loyer. Par lettre du 23 avril 2015, le locataire, agissant par l'intermédiaire de son conseil, a conclu à l'irrecevabilité de la requête d'expulsion. Le 27 avril 2015, la bailleresse a déclaré maintenir sa requête. Une audience a eu lieu le 28 avril 2015, en présence du conseil de la bailleresse, le locataire ne s'étant pas présenté, ni personne en son nom. En droit : 1. a) Le litige porte sur le bien-fondé d'une ordonnance d'expulsion rendue pour défaut de paiement de loyers (art. 257d CO). Pour déterminer quelle voie de droit, de l'appel ou du recours, est ouverte, il faut se fonder sur la valeur litigieuse, calculée selon le droit fédéral. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsque le litige porte sur la question de savoir si les conditions d'une expulsion selon la procédure en cas clair sont réalisées, la valeur litigieuse correspond au dommage prévisible causé par le retard dans la restitution de l'objet loué au cas où lesdites conditions ne seraient pas réalisées; le dommage correspond à la valeur locative ou à la valeur d'usage hypothétiquement perdue jusqu'à ce qu'un prononcé d'expulsion soit rendu dans une procédure ordinaire (TF 4A.449/2014 du 19 novembre 2014 c. 2.1; TF 4A.273/2012 du 30 octobre 2012 c. 1.2.2, non publié à l’ATF 138 III 620). Cette période, qui commence à courir dès la date fixée pour l’expulsion dans l’ordonnance rendue en procédure sommaire et prend fin au moment où la partie bailleresse obtient un prononcé d’expulsion en procédure ordinaire, comprend ainsi le temps nécessaire pour que l’instance d’appel statue – après avoir recueilli les déterminations de la partie bailleresse – par un arrêt motivé, puis que la partie bailleresse introduise une nouvelle demande en procédure ordinaire, que celle-ci soit instruite et aboutisse enfin à un prononcé d’expulsion. Compte tenu de ces éléments, on devrait ainsi pouvoir partir du principe que la durée prévisible ne sera, en règle générale, pas inférieure à un an (CACI 28 janvier 2015/52 c. 1a). En l'espèce, le loyer mensuel étant de 4'800 fr., la valeur litigieuse est sans conteste supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 2 CPC). b) L’ordonnance ayant été rendue en procédure sommaire, le délai d’appel est de dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 314 al. 1 CPC). Interjeté en temps utile par une partie qui y a un intérêt, l’appel est recevable. 2. a) L’appel peut être formé pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L’instance d’appel revoit les faits avec une cognition pleine et entière; elle contrôle librement l’appréciation des preuves et les constatations de fait de la décision de première instance (Hohl, Procédure civile, t. Il, 2e éd., Berne 2010, n. 2399, p. 435). b) L’appel peut également être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC). L’autorité d’appel applique le droit d’office: elle n’est pas liée par les motifs invoqués par les parties ou par le tribunal de première instance. Son pouvoir d’examen est plein et entier (HohI, op. cit., n. 2396 p. 435; Spühler, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, Bâle 2013, n. 1 ad art. 310 ZPO, qui parle de "vollkommenes Rechtsmittel"). 3. a) L'appelant fait valoir qu'il n'a reçu l'avis comminatoire que le 7 août 2014, de sorte que le délai de paiement au 31 août suivant n'aurait pas été de trente jours comme l'impose l'art. 257d al. 1 CO, peu important qu'une résiliation n'ait été notifiée qu'après l'écoulement d'un délai de trente jours à compter du 7 août 2014. b) Aux termes de l’art. 257d CO, lorsque, après la réception de la chose, le locataire a du retard pour s’acquitter d’un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu’à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Ce délai sera de dix jours au moins et, pour les baux d’habitation ou de locaux commerciaux, de trente jours au moins (al. 1). Faute de paiement dans ce délai, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d’habitation ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de trente jours pour la fin du mois (al. 2). Le délai comminatoire prévu à l'art. 257d al.1 CO commence à courir lorsque le locataire a effectivement reçu en ses mains la mise en demeure, mais au plus tard à l’échéance du délai de garde postale de sept jours (ATF 137 III 208 c. 3.1.3 ; ATF 119 II 147, JT 1994 I 205 ; Lachat, Le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 667; Burkhalter/Martinez-Favre, Commentaire SVIT du droit du bail, 2011, n. 28 ad art. 257d CO). La doctrine et les tribunaux hésitent sur la sanction juridique qu'emporte la fixation d'un délai trop court, en particulier sur le point de savoir si ce délai est nul et le congé subséquent inefficace (cf. TF 4A.574/2011 du 24 novembre 2011 c. 2.2; Lachat, op. cit., p. 666; Burkhalter/Martinez-Favre, op. cit., n. 27 ad art. 257d CO p. 124). Dans un arrêt 4C.88/2003 du 1er juillet 2003, le Tribunal fédéral a laissé la question ouverte, considérant que la fixation d'un délai de paiement, assortie de la menace de la résiliation, telle que prévue à l'art. 257d al. 1 CO, visait principalement à fournir au locataire – et à son conjoint, non titulaire du bail, dans le cas du logement familial – une dernière occasion d'échapper aux conséquences pénibles du congé en leur accordant un minimum de temps pour se procurer les moyens nécessaires au paiement de l'arriéré de loyer. Est, dès lors, contraire à l'esprit de cette disposition, de même qu'aux règles de la bonne foi, l'attitude du locataire ou de son conjoint consistant à se prévaloir, pour contester la validité du congé subséquent, de ce que l'avis comminatoire mentionnait un délai inférieur aux trente jours prévus par la loi, alors qu'aucun des deux n'entendait régler les loyers arriérés, quel que fût le délai qui leur aurait été imparti. Tel était le cas dans cette affaire. En effet, il ressortait des constatations de la cour cantonale que ni le locataire ni son conjoint n'auraient payé les loyers dus dans un délai de trente jours si ce délai leur avait été imparti. c) En l'espèce, lorsque l'appelant a reçu, le 7 août 2014, une sommation de s'acquitter d'un arriéré de loyer de 23'100 fr., il venait de verser à la bailleresse, en juillet, par sept acomptes de 400 fr. à 600 fr., un montant global de 3'500 fr., alors que le loyer mensuel s'élevait à 4'800 fr., et faisait par ailleurs l'objet de plusieurs poursuites pour un montant total de quelque 35'000 francs. Il a ensuite fait dire à l'intimée par lettre de son conseil du 10 octobre 2014 que "l'approche de l'automne, et la période des fêtes, devrait permettre à l'exploitation du restaurant de dégager plus de marge". Dans ces conditions, on ne saurait admettre qu'un délai de quelques jours supplémentaires aurait permis à l'appelant de s'acquitter des loyers en souffrance et son moyen tiré de la manière dont l'intimée lui a fixé le délai comminatoire s'avère abusif. 4. Au vu de ce qui précède, l’appel doit être rejeté selon le mode procédural de l’art. 312 al. 1 CPC et l’ordonnance entreprise confirmée. Le délai de libération des locaux étant échu du fait de l’effet suspensif accordé à l’appel, il convient de renvoyer la cause au premier juge pour qu’il fixe à l’appelant un nouveau délai pour libérer les locaux. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 831 fr. (art. 62 al. 1 et 3 TFJC [tarif des frais judiciaires en matière civile du 28 septembre 2010, RSV 270.11.5]), seront mis à la charge de l’appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Il n’y a pas lieu à l’allocation de dépens de deuxième instance, l’intimée n’ayant pas été invitée à se déterminer. Par ces motifs, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal, statuant en application de l'art. 312 al. 1 CPC, prononce : I. L’appel est rejeté. II. L'ordonnance est confirmée. III. La cause est renvoyée à la Juge de paix du district de Lausanne pour qu'elle fixe à D........., une fois les considérants écrits du présent arrêt envoyés pour notification aux parties, un nouveau délai pour libérer les locaux occupés dans l'immeuble sis à [...], [...] (Local commercial "[...]" de trois niveaux – café restaurant, un dépôt, un appartement de 3 pièces et hall, un appartement de 2.5 pièces, des places de parc, un garage et une cave). IV. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 831 fr. (huit cent trente et un francs), sont mis à la charge de l'appelant D.......... V. L'arrêt motivé est exécutoire. Le président : La greffière : Du 9 juin 2015 Le dispositif de l'arrêt qui précède est communiqué par écrit aux intéressés. La greffière : Du L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié en expédition complète, par l'envoi de photocopies, à : ‑ M. Christophe Savoy, agent d'affaires breveté (pour D.........), ‑ M. Pierre-Yves Zurcher, agent d'affaires breveté (pour V.........). La Cour d’appel civile considère que la valeur litigieuse est supérieure à 15'000 francs. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF). Cet arrêt est communiqué, par l'envoi de photocopies, à : ‑ Mme la Juge de paix du district de Lausanne. La greffière :