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Décision / 2019 / 602

Datum
2019-07-16
Gericht
Chambre des recours pénale
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL 572 PE18.023476-VWT CHAMBRE DES RECOURS PENALE .......................................... Arrêt du 17 juillet 2019 .................. Composition : M. Krieger, juge unique Greffière : Mme Grosjean ***** Art. 354 al. 1 let. b, 382 al. 1 CPP Statuant sur l’acte déposé le 22 janvier 2019 par Z......... contre l’ordonnance pénale rendue le 14 janvier 2019 par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte dans la cause n° PE18.023476-VWT, le Juge unique de la Chambre des recours pénale considère : En fait : A. Le 22 octobre 2018, Z......... a déposé plainte pénale pour lésions corporelles, se portant également partie civile. Il a exposé que le jour même, vers 13h05, alors qu’il était en train de sortir du magasin [...] d’[...] après y avoir fait ses achats, il aurait manqué de se faire heurter par un chariot que poussait un homme qui entrait dans le commerce. Après un échange verbal au cours duquel Z......... aurait demandé à l’inconnu de faire attention et de s’excuser, ce dernier l’aurait insulté et poussé au sol, avant de se jeter sur lui et de l’étrangler. Le plaignant a indiqué que la scène aurait duré environ trois secondes, avant qu’un homme intervienne et tire son agresseur en arrière. L’auteur des faits a été identifié comme étant N........., ressortissant britannique domicilié à [...]. Il a été entendu par la police le 26 octobre 2018. Il a déclaré qu’en entrant dans le magasin avec son chariot, un homme lui aurait crié dessus en français, ce à quoi il aurait répondu qu’il ne comprenait pas. L’homme en question aurait néanmoins continué à vociférer tout en ne le laissant pas continuer son chemin. Se sentant agressé, N......... l’aurait repoussé avec ses mains et l’inconnu serait tombé au sol. Il se serait alors positionné sur lui afin de le maintenir et de le maîtriser, mais a contesté avoir tenté de l’étrangler. B. Par ordonnance pénale du 14 janvier 2019, le Ministère public de l’arrondissement de La Côte a déclaré N......... coupable de voies de fait (I), l’a condamné à une peine de 600 fr. d’amende, convertible en six jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif dans le délai imparti (II), a renvoyé Z......... à agir devant le juge civil (III), a dit que les images de vidéosurveillance produites au dossier sous fiche de pièce à conviction n° 40623 demeuraient au dossier (IV) et a mis les frais de procédure, par 200 fr., à la charge de N......... (V). La Procureure a retenu que N......... avait poussé Z......... des deux mains au niveau du thorax, le faisant chuter, et l’avait maintenu au sol avant qu’un tiers n’intervienne pour séparer les deux hommes. C. Par acte daté du 21 janvier 2019, remis à la poste le 22 janvier 2019 à l’attention du Ministère public de l’arrondissement de La Côte, Z......... a déclaré qu’il formait opposition à cette ordonnance pénale, prenant les conclusions suivantes : « (...) je vous prie Madame la Procureure de revoir la qualification des infractions commises par Monsieur N......... et de le condamner à la juste peine qu’il mérite afin qu’à l’avenir il réfléchisse un peu plus avant d’agir de la sorte. » Le Ministère public a reçu cet acte le 23 janvier 2019. Il ressort du tampon figurant sur celui-ci ainsi que du procès-verbal des opérations que la Procureure l’a considéré comme un recours et non comme une opposition. Le Ministère public a transmis l’acte de Z......... à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal le 7 mai 2019. Il n’a pas été ordonné d’échange d’écritures. En droit : 1. 1.1 1.1.1 Aux termes de l’art. 354 al. 1 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0), peuvent former opposition contre l’ordonnance pénale devant le ministère public, par écrit et dans les dix jours, le prévenu (let. a), les autres personnes concernées (let. b) et, si cela est prévu, le premier procureur ou le procureur général de la Confédération ou du canton, dans le cadre de la procédure pénale pertinente (let. c). A teneur de l’art. 393 al. 1 let. a CPP, le recours est recevable contre les décisions et les actes de procédure du ministère public. Ce recours s’exerce par écrit dans les dix jours devant l’autorité de recours (art. 396 al. 1 CPP ; cf. art. 20 al. 1 let. b CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [Loi d’introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 ; BLV 312.01] ; art. 80 LOJV [Loi d’organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; BLV 173.01]). 1.1.2 L'art. 395 let. a CPP prévoit que si l’autorité de recours est un tribunal collégial – ce qui est le cas de la Chambre des recours pénale, laquelle statue à trois juges (art. 67 al. 1 let. i LOJV ; art. 12 al. 1 ROTC [Règlement organique du Tribunal cantonal du 13 novembre 2007 ; BLV 173.31.1]) –, sa direction de la procédure statue seule sur le recours lorsqu’il porte exclusivement sur des contraventions. 1.2 En l’espèce, l’acte de Z........., qu’il s’agisse d’une opposition ou d’un recours, a été déposé dans le délai de dix jours dès notification de l’ordonnance attaquée, soit en temps utile. L’ordonnance attaquée porte sur la condamnation de N......... pour voies de fait au sens de l’art. 126 al. 1 CP (Code pénal suisse du 21 décembre 1937 ; RS 311.0). Cette infraction, passible de la seule amende, est une contravention (cf. art. 103 CP), si bien qu’un membre de la Chambre des recours pénale est compétent pour statuer en tant que juge unique sur l’acte de Z......... (art. 13 al. 2 LVCPP). Il reste à déterminer si l’acte de Z......... doit être compris et traité comme une opposition, tel que celui-ci l’a considéré, ou comme un recours, tel que l’a estimé le Ministère public. 2. 2.1 2.1.1 Quoique le CPP n'ouvre pas expressément la voie de l'opposition à la partie plaignante, une large majorité de la doctrine admet que celle-ci peut avoir un intérêt juridique à contester une ordonnance pénale, par exemple en mettant en cause la qualification juridique retenue pour le cas où celle-ci serait trop clémente (par exemple voies de fait à la place de lésions corporelles simples) et influerait sur ses prétentions civiles, en particulier sur l’importance de l’indemnité. Elle est ainsi d'avis que la qualité pour former opposition est ouverte à la partie plaignante sur la base de l'art. 354 al. 1 let. b CPP, qui donne la qualité pour former opposition aux « autres personnes concernées » (Gilliéron/Killias, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 354 CPP ; Riklin, in : Niggli/Heer/Wiprächitger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 11 ad art. 354 CPP ; Schwarzenegger, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2e éd., Zurich/Bâle/Genève 2014, n. 5 ad art. 354 CPP ; ATF 141 IV 231 consid. 2.4 et les réf. citées, JdT 2016 IV 115 ; ATF 138 IV 241 consid. 2.6 et les réf. citées). 2.1.2 Selon l’art. 382 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification d’une décision a qualité pour recourir contre celle-ci (al. 1). La partie plaignante ne peut pas interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée (al. 2). Dans deux arrêts publiés, le Tribunal fédéral s’est penché sur la question de la qualité pour faire appel de la partie plaignante qui s’était constituée uniquement comme demanderesse au pénal selon l’art. 119 al. 2 let. a CPP. Dans le premier, il a considéré que le droit à la poursuite et à la condamnation de l’auteur de l’infraction selon l’art. 119 al. 2 let. a CPP justifiait, indépendamment de toute action civile ou de préjudice actuel, un intérêt juridique de la partie plaignante au sens de l’art. 382 al. 1 CPP à faire appel du jugement (ATF 139 IV 78 consid. 3.3.3 s.). Dans le second, les juges fédéraux ont admis que la partie plaignante pouvait avoir un intérêt, au sens de l’art. 382 al. 1 CPP, à invoquer une autre qualification juridique, en particulier une qualification juridique plus grave, susceptible d’avoir une incidence sur l’appréciation de l’atteinte subie (ATF 139 IV 84 consid. 1.1). La partie plaignante est ainsi habilitée, indépendamment de la prise de conclusions civiles, en vertu de l’art. 382 al. 1 CPP, à attaquer notamment les décisions d’irrecevabilité et de classement par le recours et l’acquittement et la qualification juridique par l’appel (ATF 141 IV 231 consid. 2.5 et les réf. citées). 2.1.3 Eu égard à ce qui précède, le Tribunal fédéral a récemment jugé que même si une ordonnance pénale ne contenait jamais d’acquittement et ne se prononçait pas sur les conclusions civiles, la partie plaignante pouvait avoir un intérêt juridique digne de protection à son annulation ou à sa modification et ceci aussi indépendamment d’éventuelles conclusions civiles. Compte tenu de la systématique du CPP, il paraissait en effet justifié d’autoriser la partie plaignante à s’opposer à une ordonnance pénale lorsque dans une situation analogue, elle aurait qualité selon l’art. 382 al. 1 CPP pour user d’une voie de droit. Si l’on adoptait une autre solution, la partie plaignante qui est lésée par l’infraction qui peut être jugée dans la procédure d’ordonnance pénale se trouverait désavantagée par rapport à une partie civile et/ou pénale qui participe à une procédure ordinaire. Alors que la première devrait accepter l’ordonnance pénale, la seconde pourrait recourir en tout cas à l’autorité cantonale de deuxième instance et le cas échéant même – aux conditions de l’art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF (Loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 ; RS 173.110) – au Tribunal fédéral (ATF 141 IV 231 consid. 2.6 et les réf. citées). 2.2 En l’occurrence, on relèvera dans un premier temps que le Ministère public a reçu l’opposition de Z......... le 23 janvier 2019 et a d’emblée considéré qu’il s’agissait d’un recours. Or, il n’a transmis cet acte à la Cour de céans que le 7 mai 2019, soit plus de trois mois après, ce qui n’est pas admissible s’il devait être retenu que cet acte devait bien être traité comme un recours. Au regard des règles précitées cependant, force est d’admettre que c’est à juste titre que le plaignant a attaqué l’ordonnance pénale du 14 janvier 2019 par la voie de l’opposition. En effet, dans ses conclusions, celui-ci conteste la qualification juridique de l’infraction retenue, qu’il considère trop clémente. Un intérêt juridiquement protégé à former opposition doit donc lui être reconnu, au même titre qu’il devrait lui être reconnu en vertu de l’art. 382 al. 1 CPP pour recourir contre une ordonnance de classement ou pour interjeter appel contre un jugement par exemple. Le Ministère public s’est donc mépris en considérant cet acte comme un recours. 3. Il résulte de ce qui précède que l’opposition formée par Z......... à l’ordonnance pénale du 14 janvier 2019 est valable. Le dossier de la cause doit dès lors être retourné au Ministère public de l’arrondissement de La Côte pour qu’il procède conformément à l’art. 355 CPP. Les frais de la procédure de recours, constitués en l’espèce du seul émolument d’arrêt (art. 422 al. 1 CPP), par 660 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; BLV 312.03.1]), seront laissés à la charge de l’Etat (art. 423 al. 1 CPP). Par ces motifs, le juge unique prononce : I. L’opposition formée par Z......... à l’ordonnance pénale du 14 janvier 2019 est valable. II. Le dossier de la cause est renvoyé au Ministère public de l’arrondissement de La Côte pour qu’il soit procédé conformément à l’art. 355 CPP. III. Les frais d’arrêt, par 660 fr. (six cent soixante francs), sont laissés à la charge de l’Etat. IV. L’arrêt est exécutoire. Le juge unique : La greffière : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : - M. Z........., - Me Etienne Monnier, avocat (pour N.........), - Ministère public central, et communiqué à : - Mme la Procureure de l’arrondissement de La Côte, - Service de la population, division étrangers, par l’envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF. Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). La greffière :