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DCSO/232/2018

Datum
2018-04-12
Gericht
dcso
Bereich
Schweiz

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A/4397/2017 DCSO/232/2018 du 12.04.2018 ( PLAINT ) , ADMIS Descripteurs : RETINJ Normes : LP.17.al3 En fait En droit Par ces motifs RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4397/2017-CS DCSO/232/18

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 12 AVRIL 2018

 

Plainte 17 LP (A/4397/2017-CS) formée en date du 3 novembre 2017 par A......, élisant domicile en l'étude de Me Blaise GROSJEAN, avocat.

 


 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du à :

 

 

 

EN FAIT

A.           a. La société B...... SA (ci-après : B......) avait pour but la création, la promotion et la commercialisation de systèmes informatiques spécialement conçus pour les petites et moyennes entreprises et les professions indépendantes.

C...... en était l'administrateur-président et disposait du pouvoir d'engager seul la société.

b. Sur requête de son ancien employé A......, titulaire à son encontre d'une créance judiciairement constatée, la faillite de B...... a été déclarée par jugement du Tribunal de première instance du 1er décembre 2016.

c. Par courrier daté du 19 décembre 2016 adressé à l'Office des faillites (ci-après : l'Office), A...... a attiré l'attention de ce dernier sur le fait qu'antérieurement à la faillite la société faillie aurait cédé divers actifs (logiciels, licences, droits de propriété intellectuelle, contrats en cours et clientèle) lui appartenant, apparemment sans contrepartie, à une société tierce, D...... SA, dont l'actionnariat était identique à celui de B....... Cette cession aurait eu pour effet de vider la société faillie de tout actif intéressant.

d. Lors de son audition par l'Office en date du 20 décembre 2016, C...... a indiqué que, conformément à un contrat signé en 2014, les logiciels et clientèle de B...... lui avaient été cédés – sous sa raison de commerce individuelle E...... – pour un prix de 80'000 fr. payable en nature, par la reprise pour une certaine période des services de support à la clientèle incombant à B....... Il n'a pas été question de D...... SA.

e. Au terme de l'audition du 20 décembre 2016, l'Office a octroyé à C...... un délai au 28 février 2017 pour lui remettre le contrat de transfert des logiciels et clientèle ainsi que les bilans 2014, 2015 et 2016. Ce délai n'a pas été respecté et a été prolongé à plusieurs reprises, en dernier lieu jusqu'à l'automne 2017, par l'Office. Ce n'est finalement qu'à la mi-novembre 2017 que l'Office a pu obtenir une copie – au demeurant non signée – du contrat de transfert, ainsi que la comptabilité pour les exercices 2010 à 2013, celle relative aux exercices postérieurs faisant toujours défaut.

d. Procédant à l'analyse de ces documents, l'Office est parvenu à la conclusion, d'une part, que B...... paraissait déjà se trouver en état de surendettement au 31 décembre 2013 et, d'autre part, que le prix de 80'000 fr. prévu par le contrat de transfert de logiciels et de clientèle semblait sous-évalué dans une mesure importante.

Le 27 novembre 2017, l'Office a en conséquence porté à l'inventaire deux prétentions révocatoires, l'une contre C...... et la seconde contre D...... SA, au titre de la sous-évaluation du prix de transfert des logiciels et clientèle, ainsi qu'une prétention en paiement contre C...... au titre du solde de son compte actionnaire.

Par courrier du même jour, l'Office a par ailleurs interpellé l'ancien établissement bancaire de B...... afin d'obtenir des détails supplémentaires sur plusieurs transactions paraissant insolites.

e. Sur requête de l'Office, la Chambre de céans, par décision DCSO/3...... rendue le 12 décembre 2017, a prolongé d'une année, soit jusqu'au 30 novembre 2018, le délai dont disposait l'Office selon l'art. 270 al. 1 LP pour liquider la faillite. Il résulte des considérants de cette décision que l'inventaire n'était pas encore finalisé et que, la masse ne disposant pas à ce stade de liquidités suffisantes, l'Office restait dans l'attente du versement par un créancier d'une avance de frais nécessaire pour permettre la liquidation sommaire de la faillite.

B. a. Tout au long de l'année 2017, A......, par l'intermédiaire de son conseil, a exhorté l'Office à procéder de manière plus énergique, notamment en assortissant les délais octroyés à C...... pour fournir des documents de la mention prévue à l'art. 222 al. 6 LP, ainsi qu'en déposant plainte pénale pour violation des art. 163 et 166 CP.

b. Finalement, par acte déposé le 3 novembre 2017 auprès de la Chambre de surveillance, A...... a formé une plainte pour retard injustifié de la part de l'Office dans la liquidation de la faillite. Selon lui, l'Office n'avait accompli aucun acte d'instruction depuis le 20 décembre 2016, date de l'ouverture de la faillite, et s'était abstenu sans raison de déposer la plainte pénale qui s'imposait. Le plaignant a dès lors conclu à la constatation du caractère injustifié du retard pris selon lui dans la liquidation de la faillite et à ce qu'il soit ordonné à l'Office de procéder "de suite" à ladite liquidation, "notamment en agissant par toutes voies de droit utiles contre les personnes responsables de la faillite et des actes pénalement répréhensibles, notamment par le dépôt d'une plainte pénale".

c. Dans ses observations datées du 29 novembre 2017, l'Office a conclu à ce qu'il soit constaté que la plainte était devenue sans objet, au vu des actions entreprises à compter de la mi-novembre 2017. Il a indiqué qu'après avoir obtenu les informations supplémentaires demandées et avoir ainsi acquis une vision complète de la situation, il déposerait vraisemblablement une plainte pénale.

d. Par courrier adressé le 4 décembre 2017 à la Chambre de surveillance, le plaignant, après avoir pris connaissance des observations de l'Office, a concédé que ce dernier avait entrepris des démarches mais, relevant que celles-ci étaient postérieures au dépôt de la plainte et visaient donc à rattraper le retard accumulé antérieurement, a conclu à ce que des dépens lui soient alloués en application de l'art. 87 LPA.

Il a renouvelé cette conclusion par courriers datés des 13 février et 6 avril 2018.

e. La cause a été gardée à juger le 6 décembre 2017.

EN DROIT

  1. 1.1 La voie de la plainte au sens de l'art. 17 LP est ouverte contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire (al. 1), ainsi qu'en cas de déni de justice ou de retard à statuer (al. 3). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

1.2 La plainte respecte en l'occurrence les exigences de forme prévues par la loi. Reprochant à l'Office un retard non justifié, elle pouvait par ailleurs être déposée en tout temps.

Contrairement à ce que soutient l'Office, les diverses mesures prises depuis le milieu du mois d'octobre 2017 ne privent pas la plainte de son objet. D'une part en effet, aucune plainte pénale n'avait encore été déposée au moment où la cause a été gardée à juger, alors qu'il s'agit là d'une conclusion expresse du plaignant. D'autre part, selon la jurisprudence (ATF 122 IV 111 consid. I/4; 129 V 411 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A.638/2016 du 2 décembre 2016, consid. 2.1), la constatation d'un retard injustifié constitue en soi une forme de réparation pour celui qui en est la victime : le plaignant conserve ainsi un intérêt légitime à ce qu'il soit statué sur sa conclusion en constatation d'un tel retard, alors même que, dans son courrier daté du 4 décembre 2017, il a paru se satisfaire des démarches effectuées par l'Office postérieurement au dépôt de sa plainte.

La plainte est ainsi recevable.

  1. 2.1 Il y a retard non justifié, au sens de l'art. 17 al. 3 LP, lorsqu'un organe de l'exécution forcée n'accomplit pas un acte qui lui incombe – d'office ou à la suite d'une requête régulière – dans le délai prévu par la loi ou dans un délai raisonnable compte tenu de l'ensemble des circonstances (Cometta/Möckli, in BAK SchKG I, 2ème édition, 2010, n° 31-32 ad art. 17 LP; Dieth/Wohl, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, n° 32 ad art. 17 LP; Erard, in CR LP, 2005, n° 55 ad art. 17 LP).

2.2 Dès que l'ouverture de la faillite lui a été communiquée, l'Office doit procéder à l'inventaire des biens du failli et prendre les mesures nécessaires pour leur conservation (art. 221 LP). Le failli lui-même est tenu, sous menace des peines prévues par la loi, d'indiquer tous ses biens à l'Office (art. 222 al. 1 LP).

L'inventaire doit donner une vision d'ensemble sur le patrimoine du failli, dont il vise à assurer la conservation. Il sert aussi de base au choix du mode de liquidation de la faillite (suspension de la liquidation, liquidation sommaire ou liquidation ordinaire) (Vouilloz, in CR LP, n° 3 ad art. 221 LP).

2.3 Dans le cas d'espèce, l'Office a procédé le 20 décembre 2016, soit peu de temps après la communication du jugement déclarant la faillite, à l'interrogatoire de l'administrateur président de cette dernière en vue – notamment – de l'établissement de l'inventaire. Il a donc fait diligence à cet égard, et c'est à tort que le plaignant lui reproche de n'avoir procédé à aucun acte d'instruction.

Au terme de cet interrogatoire, l'Office a requis de la part de l'administrateur président de la faillie, conformément à l'art. 223 al. 2 LP, la remise de la comptabilité des derniers exercices ainsi que celle du contrat de transfert des principaux actifs de la faillie. Ces documents – ou plus exactement une partie d'entre eux – ne lui ont finalement été remis qu'à la mi-novembre 2017, ce qui lui a permis, après analyse, d'inventorier plusieurs prétentions supplémentaires et d'adresser à l'ancienne banque de la faillie des demandes de renseignement précises.

Il faut cela étant concéder au plaignant que, du 28 février 2017 – date d'expiration du premier délai imparti à l'administrateur président de la faillie pour lui remettre les documents demandés – au mois de novembre 2017, soit pendant environ huit mois, l'Office s'est borné à relancer régulièrement cet organe alors que celui-ci, comme l'Office l'admet lui-même, cherchait à gagner du temps. Certes, ces renvois successifs, motivés notamment par le fait qu'une partie des bilans requis n'avaient pas encore été établis, sont demeurés sans influence sur le patrimoine de la faillie. Il n'en reste pas moins qu'ils contreviennent au principe de célérité devant guider l'établissement de l'inventaire (Schober, in KUKO SchKG, n° 2 et 3 ad art. 221 LP) et la liquidation de la faillite (art. 270 al. 1 LP) et sont dès lors constitutifs d'un retard non justifié. Confronté aux atermoiements de l'ancien organe de la faillite, l'Office aurait en effet dû se montrer plus pressant, et faire usage de la mesure comminatoire prévue par l'art. 222 al. 6 LP.

C'est en revanche à tort que le plaignant reproche à l'Office un retard injustifié en relation avec l'absence de dépôt d'une plainte pénale à l'encontre des anciens organes de la faillie. Au contraire de l'établissement de l'inventaire, en effet, une telle démarche ne doit pas être accomplie d'office et, bien que le plaignant l'ait à plusieurs reprises suggérée par l'intermédiaire de son conseil, il ne résulte pas du dossier qu'il l'aurait formellement requise. Une telle démarche, qui suppose une appréciation d'ensemble de la situation et une pesée des avantages et inconvénients qui en résultent, ainsi que des frais qu'elle comporte, pouvait par ailleurs difficilement être envisagée avant la remise, à la mi-octobre 2017, du contrat de transfert ainsi que de la comptabilité jusqu'en 2013.

En résumé, la plainte doit être admise dans la mesure où elle vise à la constatation d'un retard non justifié de la part de l'Office dans l'établissement de l'inventaire, et rejetée pour le surplus.

  1. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

PAR CES MOTIFS, La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 3 novembre 2017 par A...... pour retard injustifié de la part de l'Office des faillites dans la liquidation de la faillite de B...... SA.

Au fond :

L'admet en ce sens qu'un retard non justifié dans l'établissement de l'inventaire est constaté.

La rejette pour le surplus.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Monsieur Michel BERTSCHY et Monsieur Eric DE PREUX, juges assesseurs; Madame Véronique PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Véronique PISCETTA

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.