Zum Beispiel können Sie Omnilex verwenden für:
aperçu avant l'impression
N° affaire:
AC.2000.0182
Autorité:, Date décision:
TA, 05.06.2003
Juge:
VP
Greffier:
LS
Publication (revue juridique):
Ref. TF:
Nom des parties contenant:
MORIER-GENOUD Jean-Claude et Huguette c/SAT/Bex/DA CAMPO Ginette et Marc-Olivier
LATC-80LATC-81-4LATC-82LAT-22LAT-24c (01.09.2000)LRou-38OAT-42
Résumé contenant:
L'adjonction d'un étage supplémentaire, sans accroissement de la surface au sol, et qui représente une augmentation de 34% de la surface de plancher habitable, est contraire à l'art. 42 OAT. Admissibilité du projet au regard des art. 38 LR, 80 LATC et des règles communales protégeant la zone intermédiaire en cause.
CANTON DE VAUD
TRIBUNAL ADMINISTRATIF
Arrêt du 5 juin 2003
sur le recours interjeté par Jean-Claude et Huguette MORIER-GENOUD, représentés par Me Jean-Pierre Gross, avocat à Lausanne,
contre
et
Composition de la section: M. Vincent Pelet, président; M. Rolf Ernst et M. Antoine Thélin, assesseurs. Greffier: M. Laurent Schuler.
Vu les faits suivants:
A. Marc-Olivier et Ginette da Campo, ci-après les constructeurs, sont propriétaires de la parcelle no 1915 du cadastre de la Commune de Bex, au lieu-dit "Le Buit". Sur ce bien-fonds de 1377 m² est construite une maison d'habitation (ECA no 1706), d'une surface au sol de 69 m². Ce bâtiment comprend un étage sur rez-de-chaussée, une cave et des combles. A l'est de la maison, un couvert à voiture de 19 m² a été érigé en 1995. La parcelle est colloquée en zone intermédiaire V, régie par les art. 190 à 200 du règlement du plan d'extension et de la police des constructions de la Commune de Bex (RPE) adopté par le conseil communal le 20 avril 1983 et approuvé par le Conseil d'Etat le 9 octobre 1985.
Jean-Claude et Huguette Morier-Genoud - les recourants - sont propriétaires de la parcelle no 1914, qui jouxte sur sa limite ouest le bien-fonds des constructeurs. Le bâtiment des époux Morier-Genoud (no ECA 1707) est situé quelques mètres en dessous au nord-ouest de l'immeuble no 1706 des constructeurs, calculée aux angles les plus proches, la distance entre les deux bâtiments n'est que de 2 m 20 : cette proximité laisse à penser que les biens-fonds 1914 et 1915 étaient à l'origine réunis en une seule parcelle.
B. Le 16 février 2000, les constructeurs ont déposé une "demande préalable" portant sur l'agrandissement de leur bâtiment par l'adjonction d'un étage supplémentaire (sans augmentation de la surface au sol). Cet avant-projet impliquait une élévation de l'immeuble de 2,90 m. Un "calcul du volume" prévoyait ainsi une augmentation de 165 m³, soit de 40,9 % de la surface initiale.
Le Service de l'aménagement du territoire (ci-après : le SAT) s'est déterminé sur cette demande le 5 avril 2000 : de son point de vue, le projet modifierait d'une manière fondamentale l'identité du bâtiment et s'inscrirait en rupture totale avec son environnement construit; de plus, l'agrandissement prévu ne serait pas admissible, ne pouvant être considéré comme une transformation partielle au sens de l'art. 81 de la loi sur l'aménagement du territoire et les constructions (ci-après LATC).
Le 26 mai 2000, les constructeurs ont soumis un nouvel avant-projet à la municipalité. Le SAT s'est déterminé le 17 juillet 2000 sur ce projet en formulant un préavis positif, sous certaines réserves :
"La nouvelle proposition qui nous est faite consiste à surélever le faîte de 1,75 m. A notre sens, elle respecte de l'identité du bâtiment. De même, elle correspond à la surface maximum de l'extension admissible.
Toutefois, cette proposition n'est pas réglementaire, dans la mesure où la hauteur de la chambre à créer n'atteint pas 2,40 m sur la moitié au moins de la surface habitable dans les combles (art. 27 RATC).
Nous avons donc examiné les mesures à prendre pour que le projet puisse être considéré comme conforme aux exigences de police des constructions. Après contrôle, il s'avère que le bâtiment devrait être surélevé de 2,10 m, soit 35 cm de plus que ce qui est proposé.
Cette élévation supplémentaire est conditionnée également par le fait que le plancher entre le 1er étage et les combles devra être d'une épaisseur normale (25 à 30 cm) en lieu et place des 50 cm projetés par souci de maintenir les équipements actuellement en place.
Cette mise en conformité du projet, eu égard aux normes de hauteur, implique un dépassement de la surface de plancher maximum que nous avions admise, soit 47 m² (min. de 1,5 m de hauteur sur toute la surface des combles). A cet égard, le projet maintiendra le principe de créer des armoires en bordure des parois latérales.
Ce nouveau projet, moins haut que le précédent, offre des ouvertures adaptées à la typologie de la façade. Dès lors, nous sommes à même de préaviser favorablement le nouveau projet, corrigé dans le sens des éléments développés ci-dessus. Le résultat de l'enquête publique est réservé.
Le requérant sera toutefois rendu attentif au fait que l'art. 42 de la nouvelle ordonnance fédérale sur l'aménagement du territoire (OAT) entrera en vigueur au 1er septembre 2000. Dans le cas particulier, les dispositions de dite ordonnance impliqueront une réduction des possibilités d'extension de la surface habitable.".
C. Le 22 août 2000, les constructeurs ont déposé une demande de permis de construire. Le projet prévoit de remplacer les combles par un deuxième étage, ce qui implique une élévation de 2,10 m du faîte. La construction comporterait deux fenêtres sur la façade sud, ainsi qu'une fenêtre et une porte-fenêtre sur la façade nord, avec un balcon de 3,25 m de large et de 1,5 m de profondeur. Enfin, un châssis-rampant serait aménagé sur le pan ouest du toit. Le dossier a été transmis à la CAMAC le 30 août 2000.
D. Le projet de construction a été mis à l'enquête publique du 5 au 25 septembre 2000.
. Par l'intermédiaire de leur conseil, Me Jean-Pierre Gross, Jean-Claude et Huguette Morier-Genoud, propriétaires de la parcelle no 1914, ont formé opposition au projet de construction de leurs voisins le 25 septembre 2000.
E. Par décision du 10 octobre 2000, la municipalité a levé l'opposition formée par les époux Morier-Genoud.
La synthèse de la Centrale des autorisations CAMAC a été communiquée à la municipalité le 19 octobre 2000. La synthèse comprend un préavis favorable du Service des eaux, sols et assainissement, et les autorisations spéciales requises du Service de la sécurité civile et militaire, et du SAT. On extrait de la décision du SAT le passage suivant :
"Compris à l'intérieur de la zone intermédiaire du plan général d'affectation communal, ce projet est soumis à autorisation du Département selon l'art. 120 lettre a LATC. Les travaux projetés peuvent être admis en tant qu'agrandissement de moindre importance, par rapport à l'ensemble de la construction existante, dans le cadre des articles 24c LAT et 81 al. 4 LATC. Par ailleurs, aucun intérêt prépondérant ne s'oppose au projet.
Il est relevé, à cet égard, que le projet considéré a fait l'objet d'un préavis de principe favorable du SAT le 17 juillet 2000. Compte tenu des éléments invoqués dans le courrier municipal du 30 août 2000, le retard pris pour la transmission du dossier à la CAMAC ne peut être imputé au requérant. Dans ces conditions, le principe de la bonne foi impose que l'administration se tienne à la position qu'elle a adoptée, nonobstant l'entrée en vigueur ultérieure de l'art. 42 OAT."
F. Par acte du 31 octobre 2000, toujours par l'intermédiaire de leur conseil, les opposants ont saisi le Tribunal de céans d'un recours. Ils concluent, avec dépens, à l'annulation de la décision de la municipalité levant leur opposition, ainsi que du permis de construire délivré aux constructeurs. A titre de mesures d'instruction, ils requièrent outre l'inspection locale, la pose de gabarits et le dépôt d'un rapport sur les incidences de la construction projetée sur l'ensoleillement de leur habitation.
Dans sa réponse du 30 novembre 2000, la municipalité a conclu implicitement au rejet du recours.
Les constructeurs ont déposé leurs premières observations le 29 novembre 2000, complétées par un mémoire du 20 décembre de leur conseil. Dans leurs écritures, ils requièrent la levée de l'effet suspensif accordé au recours, ainsi que des sûretés, en concluant, avec dépens, au rejet du recours.
Par décision incidente du 15 janvier 2001, le juge instructeur a rejeté la requête de sûretés et confirmé l'effet suspensif ordonné à titre préprovisionnel.
Le SAT a déposé ses déterminations le 23 mai 2001, concluant au rejet du recours.
Les recourants ont répliqué le 18 juin 2001, prenant une conclusion nouvelle tendant, avec suite de dépens, à l'annulation de la décision du SAT du 19 octobre 2000.
Le 12 juillet 2001, la municipalité a conclu au rejet de la nouvelle conclusion des recourants.
G. Le tribunal a tenu audience le 14 novembre 2001. Une inspection locale a eu lieu à l'issue de l'audience
E. Respectivement les 5, 11 et 17 décembre 2001, le SAT, les recourants, puis les constructeurs se sont déterminés sur le compte-rendu d'audience communiqué aux parties le 16 novembre 2001.
Considérant en droit:
1. La décision querellée a été notifiée au conseil des recourants par courrier signature du 10 octobre 2000, reçu le 11. Déposé à un bureau de poste suisse le 31 octobre 2000, soit dans le délai de vingt jours de l'art. 31 LJPA, le recours l'est en temps utile. Il est au surplus recevable à la forme.
2. a) La loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après : LAT, RS 700) a été modifiée par la novelle du 20 mars 1998, entrée en vigueur le 1er septembre 2000 (RO 2000 2042, 2046), soit pendant la procédure qui a abouti aux décisions contestées. En effet, la demande de permis de construire a été déposée le 22 août 2000, alors que la décision de la municipalité est datée du 10 octobre 2000. Il se pose ainsi un problème de droit intertemporel que le tribunal doit examiner en premier lieu.
b) La novelle du 20 mars 1998 ne contient aucune disposition de droit transitoire. L'ordonnance sur l'aménagement du territoire (ci-après : OAT ; RS 700.1) a subi, parallèlement à la révision de la loi, une refonte complète, également entrée en vigueur le 1er septembre 2000 (RO 2000, 2047, 2065). L'art. 52 OAT dispose ce qui suit :
"1. Les procédures en cours au moment de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance et de la modification du 20 mars 1998 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire sont soumises au nouveau droit.
Les décisions querellées sont toutes datées du mois d'octobre 2000, soit après l'entrée en vigueur de la novelle. Dès lors, au regard de la disposition précitée elles doivent être régies par le nouveau droit.
c) Dans ses déterminations du 23 mai 2001, le SAT allègue que l'ancien droit devrait s'appliquer au présent cas en vertu du principe de la bonne foi. En effet, d'après l'intimé, si la demande des recourants n'a pas pu être traitée avant l'introduction de la novelle, c'est en raison du retard pris par la municipalité dans l'acheminement du dossier aux autorités cantonales compétentes, ce qui ne peut être imputé aux constructeurs.
Le principe de la bonne foi découle de l'art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale (ci-après Cst) qui a la teneur suivante :"[l]es organes de l'Etat et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi". L'art. 9 Cst dispose également que "[t]oute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'Etat sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi". "Le principe de la bonne foi garantit au justiciable le droit d'être protégé dans la confiance que celui-ci place légitimement dans les assurances qu'il reçoit des autorités. Par sa nature même, ce principe interdit donc aux autorités de ne pas respecter les promesses qu'elles font" (Auer, Malinverni, Hottelier, Droit constitutionnel suisse, Volume II, Berne, 2000, p. 543, no 1121). "Pour qu'une indication - même erronée - ou une assurance lie l'autorité, il faut que celle-ci l'ait donnée dans un cas concret relatif à une personne déterminée, qu'elle ait été compétente pour le faire, que l'intéressé n'ait pas pu se rendre compte du caractère erroné de l'indication ou de l'assurance donnée, qu'il ait pris, en se fiant sur elle, des dispositions impossibles à rapporter et qu'enfin l'ordre juridique n'ait pas été modifié entre-temps" (ATF 116 Ia 215, consid 2b = JT 1993 I 413, et réf. citées ; voir également Auer, Malinverni, Hottelier, op. cit., nos 1122 ss).
Or, d'une part, dans son préavis du 17 juillet 2000, le SAT n'a pas donné aux constructeurs l'assurance que sa position de principe serait également valable sous l'emprise du nouveau droit; au contraire, cette autorité a attiré expressément l'attention des constructeurs sur le fait que le nouveau droit allait impliquer une "réduction des possibilités d'extension de la surface habitable". D'autre part, la jurisprudence réserve l'hypothèse de révisions législatives (ATF 99 Ib 101 consid. 4c). On ne saurait en effet admettre que l'administration puisse lier le législateur par des promesses ou des assurances (Knapp, Précis de droit administratif, 4. éd, Bâle, Frankfort-sur-le-Main, 1991, p. 108, no 509 ee). Dès lors, c'est à tort que le SAT soutient que l'ancien droit pourrait s'appliquer au projet querellé, contrairement à la lettre de l'art. 52 OAT. Partant, le tribunal de céans fera application des dispositions de la novelle pour examiner si le projet en cause est conforme au droit.
3. a) Les recourants soutiennent en premier lieu que le projet n'est pas conforme au droit fédéral. Ils invoquent une violation des art. 24c LAT, 39 et 42 OAT.
Aux termes de l'art. 22 LAT, aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (al. 1); l'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone et si le terrain est équipé (al. 2); le droit fédéral et cantonal peut poser d'autres conditions (al. 3). En l'occurrence, la parcelle des constructeurs est colloquée en zone intermédiaire V qui n'est pas une zone à bâtir. En vertu de l'art. 24c LAT, hors de la zone à bâtir, les constructions et installations qui peuvent être utilisées conformément à leur destination, mais qui ne sont plus conformes à l'affectation de la zone, bénéficient du principe de la garantie de la situation acquise (al. 1). L'autorité compétente peut autoriser la rénovation de telles constructions et installations, leur transformation partielle, leur agrandissement mesuré ou leur reconstruction pour autant que les bâtiments aient été érigés ou transformés légalement; dans tous les cas, les exigences majeures de l'aménagement du territoire doivent être satisfaites (art. 24c al. 2 LAT).
Dans un arrêt Oberson du 9 avril 2001 (1A.103/2000), le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que le nouvel art. 24c al. 2 LAT reprenait les mêmes critères que l'ancien art. 24 al. 2 LAT. Notre Haute Cour a considéré, en interprétant l'ancien art. 24 LAT, qu'étaient visés non seulement les travaux de transformation proprement dits, mais également certains agrandissements et changements d'affectation. Ceux-ci ont un caractère partiel s'ils visent à maintenir pour l'essentiel l'identité du bâtiment, dans son volume et dans son apparence, et s'ils n'ont pas d'effets sensiblement nouveaux du point de vue de l'occupation du sol, de l'équipement et de l'environnement; la transformation doit être d'importance réduite par rapport à l'état existant de la construction (ATF 1A.103 précité, consid 3b et références citées).
Il convient de préciser ici que le bâtiment en cause a été érigé avant l'entrée en vigueur du plan d'extension de la Commune de Bex et de son règlement d'application qui définissent la zone intermédiaire V. Aucun élément de l'instruction ne laisse à penser que la construction n'a pas été érigée en conformité avec les règles en vigueur à l'époque; cette donnée n'est pas contestée.
b) Les recourants relèvent tout d'abord une violation de l'art. 39 OAT : d'après eux, les conditions permettant l'octroi d'une autorisation sur la base de cette disposition ne sont pas réalisées. Ils se méprennent toutefois en considérant que cette disposition pourrait trouver application : il n'en est rien dès lors que le plan directeur du canton de Vaud n'a pas défini, à ce jour, de zone désignée comme "territoires à habitat traditionnellement dispersé".
c) Les recourants invoquent pour l'essentiel ensuite une violation de l'art. 42 OAT, qui dispose à ses alinéas 1 et 3 :
Les constructions et installations pour lesquelles l'art. 24c LAT est applicable peuvent faire l'objet de modifications si l'identité de la construction ou de l'installation et de ses abords est respectée pour l'essentiel. Sont admises les améliorations de nature esthétique.
La question de savoir si l'identité de la construction ou de l'installation est respectée pour l'essentiel est à examiner en fonction de l'ensemble des circonstances. Elle n'est en tout cas plus respectée: a. lorsque la surface utilisée pour un usage non conforme à l'affectation de la zone est agrandie de plus de 30%, les agrandissements effectués à l'intérieur du volume bâti existant comptant pour moitié; ou b. lorsque la surface utilisée pour un usage non conforme à l'affectation de la zone à l'intérieur ou à l'extérieur du volume bâti existant est agrandie de plus de 100 m² au total. (...)"
Selon le plan et le formulaire de demande de permis de construire déposé le 22 août 2000 par les constructeurs, le projet querellé prévoit un agrandissement de la surface habitable de plancher de 47 m², en plus des 138 m² existants. Il s'agit dès lors d'une augmentation de 34 % de la surface de plancher habitable. Lors de l'audience, puis dans ses dernières observations du 5 décembre 2001, le SAT a apporté les précisions suivantes sur le calcul de l'agrandissement :
"... en l'occurrence, la surface du couvert à voiture ne doit pas être prise en compte en déduction des surfaces autorisées aux requérants, ce en raison du fait que la surface occupée par le couvert (surface annexe) est inférieure au 30% des surfaces de service (surfaces annexes) préexistantes, au sous-sol du bâtiment. Il en résulte, en corollaire, que la création des nouvelles surfaces habitables doit être comparée avec les surfaces habitables existantes, sans que le quota admissible ne soit entamé par le fait de l'exécution de travaux antérieurs.
Afin d'être tout à fait clair, on précise que la pratique impose, de manière générale, de considérer séparément les surfaces annexes et les surfaces habitables donnant respectivement droit aux agrandissements prévus à l'art. 42 OAT. Cette mesure permet d'éviter qu'un bâtiment disposant d'importantes surfaces annexes, disproportionnées par rapport aux locaux d'habitation, n'en tire un profit démesuré au moment de la transformation, ou encore qu'on ne supprime, au profit de surfaces d'habitation, des surfaces annexes qui se révéleraient utiles ou nécessaires. L'idée est d'éviter que de tels travaux ne créent à terme des situations délicates ou difficilement maîtrisables (dépôts à l'air libre, voitures garées sur le domaine public etc.).
Ces réserves n'ont pas lieu d'être apportées lorsqu'un requérant renonce à augmenter les surfaces d'habitation auxquelles il aurait en principe droit (art. 42 OAT), au profit de plus importantes surfaces annexes. En pareil cas, un calcul global des possibilités d'agrandissement - prenant en compte l'ensemble des surfaces existantes - est donc admissible, sous réserve naturellement du respect de l'identité du bâtiment ou d'autres intérêts prépondérants.
Tel n'a cependant pas été le cas en l'espèce : les possibilités d'augmentation des surfaces annexes (couvert à voiture) doivent être rétroactivement comparées aux possibilités offertes par les surfaces annexes préexistantes; à cet égard, il n'est pas contesté que la surface du couvert ne dépasse pas le 30% des surfaces annexes préexistantes. Dès lors, l'agrandissement litigieux, qui consiste exclusivement en de nouvelles surfaces habitables, doit être comparé aux surfaces habitables préexistantes".
Le tribunal suit entièrement l'argumentation du SAT telle qu'elle est rappelée ci-dessus, mais ne se rallie pas à ses conclusions. En effet, s'il est convenu que le projet excède de quelques 11 m² les limites fixées par l'art. 42 OAT, le SAT soutient que l'autorisation pourrait être délivrée, au vu des circonstances très particulières de l'espèce. Le tribunal s'en tient au contraire à la constatation que les limites fixées par l'art. 42 OAT ne sont pas respectées, ce qui implique le refus du projet et, partant, l'admission du recours.
L'économie de la procédure justifie néanmoins l'examen des griefs fondés sur le droit cantonal et communal.
4. En droit cantonal, les recourants invoquent en premier lieu l'art. 81 al. 4 LATC qui (dans sa teneur antérieure à la révision du 28 mai 2002) n'autorise la transformation partielle d'un bâtiment construit hors zone à bâtir - soit son agrandissement - qu'à la double condition qu'il s'agisse d'une transformation d'importance réduite et qu'il n'en résulte pas d'effet notable sur l'affectation du sol, l'équipement ou l'environnement. Or, relèvent les recourants, aucune de ces conditions n'est réalisée; l'agrandissement projeté n'est pas d'importance réduite et il a un effet notable sur l'ensoleillement de leur propre habitation. Comme l'avait déjà relevé le Tribunal fédéral (ATF du 1er mars 1994, in RDAF 1997 I 194), ainsi formulé, l'art. 81 al. 4 LATC conférait au département le compétence d'autoriser les rénovations, les transformations partielles ou les reconstructions à des conditions matériellement identiques à celles énoncées à l'art. 24 al. 2 LAT. A cet égard, la novelle du 28 mai 2002, qui ne reprend plus en termes exprès les deux conditions rappelées ci-dessus, n'a pas modifié le régime légal cantonal. Ainsi, s'agissant de l'importance réduite de la transformation, on se réfère à ce qui a été dit plus haut à propos des art. 20c LAT et 42 OAT (au consid. 3 a et c). La question de l'ensoleillement qui entre également dans la pesée des intérêts imposée par l'art. 24c LAT sera, elle, examinée plus loin (au consid. 6 c).
5. Les recourants invoquent encore la protection communale dont doit bénéficier la zone intermédiaire V, régie notamment par les dispositions suivantes :
"Art. 190 Destination
Dans le site exceptionnel que constitue le Plateau de Chiètres, cette zone est destinée à assurer une extension restreinte du hameau de Châtel, en relation organique avec celui-ci. Les parties boisées (forêt, taillis, cordons, etc.) doivent être maintenus.
Art. 191 Mesures de protection
Cette zone est comprise dans un territoire inscrit à l'inventaire des monuments naturels et des sites et elle est donc soumise aux dispositions de la LPNMS (chap. III, art. 12 à 19).
Art. 192 Constructions existantes
Tout bâtiment existant peut être modifié même dans sa destination, pour autant que les équipements techniques le permettent. Le volume initial de la construction ne sera pas augmenté. Si le bâtiment est destiné à l'habitation, il comptera au maximum deux logements."
L'article 192 RPE autorise ainsi les modifications des bâtiments existants dans les parcelles colloquées en zone intermédiaire V pour autant que le volume initial ne soit pas augmenté. Cette dernière disposition ne condamne cependant pas encore le projet. L'art. 223bis RPE, figurant dans le chapitre 4 intitulé "règles applicables à toutes les zones", autorise des dérogations :
"Lorsque les dispositions de la zone interdisent l'agrandissement d'un bâtiment existant, la Municipalité peut autoriser de légers agrandissements nécessités par l'usage habituel du bâtiment."
S'agissant cependant d'un bâtiment sis hors zone à bâtir, l'art. 24c LAT s'impose aux cantons (comme aux communes); aussi, dans de telles zones, une municipalité ne saurait-elle par le biais d'une dérogation autoriser ce que l'art. 42 OAT interdit. Il relève en revanche du pouvoir d'appréciation de la commune de prêter au régime de protection des art. 192 et 223bis RPE la même portée qu'au droit fédéral, en ne soumettant pas l'agrandissement d'un bâtiment à des conditions plus strictes que celles de l'art. 42 OAT.
6. a) Les recourants allèguent que la décision de la municipalité violerait les art. 36 à 38 de la loi sur les routes (ci-après : LR). A lire le plan de situation, le bâtiment des constructeurs prend presque entièrement place dans la limite de 10 mètres prescrite par l'art. 36 al. 2 let. c LR.
L'art. 38 LR contient un renvoi à l'art. 82 LATC, applicable par analogie en cas de transformation ou d'agrandissement de bâtiments frappés d'une limite de construction découlant de la LR. L'art 82 LATC se réfère lui-même à l'art. 80 LATC applicable par analogie aux bâtiments frappés d'une limite des constructions, sous la réserve notamment que soit passée avec l'autorité compétente une convention de précarité, par laquelle le propriétaire s'engage à renoncer, en cas d'expropriation, à réclamer la plus-value résultant des travaux. Sur ce dernier point, les recourants relèvent à juste titre que le projet ne pouvait être approuvé sans qu'une convention de précarité n'ait été signée par les constructeurs.
b) L'art. 80 LATC concerne les bâtiments existants non conformes aux règles de la zone à bâtir entrée en force postérieurement, mais qui n'empiètent pas sur une limite de constructions; la transformation de tels bâtiments dans les limites des volumes existants ou leur agrandissement peuvent être autorisés, pour autant qu'il n'en résulte pas une atteinte sensible au développement, au caractère ou à la destination de la zone; les travaux ne doivent pas aggraver l'atteinte à la réglementation en vigueur ou les inconvénients qui en résultent pour le voisinage (art. 80 al. 2 LATC). Il est de jurisprudence constante que la question de l'existence d'une aggravation de l'atteinte à la réglementation en vigueur s'apprécie au regard du but visé par la norme transgressée (RDAF 1989, p. 314 ss; arrêts AC 1991/208 du 27 avril 1992; AC 7462 du 13 mai 1992; AC 1991/139 du 1er juin 1992; AC 1991/147 du 17 août 1992, AC 1991/261 du 29 octobre 1992, AC 1991/129 du 4 novembre 1992, AC 1992/043 du 16 novembre 1992, AC 1992/061 du 2 octobre 1992, AC 1994/0170 du 6 avril 1995, AC 1995/0238 du 25 janvier 1996, AC 1994/038 du 16 juin 1995, AC 1996/158 du 16 janvier 1997, AC 1998/0186 du 18 février 1999, AC 1998/0213 du 3 janvier 2000 et AC 1999/0055 du 24 février 2000). En l'occurrence, la réalisation du projet de construction ne conduirait pas à aggraver d'avantage l'empiétement sur la limite de construction, de sorte que l'on ne saurait considérer que les travaux pourraient engendrer une aggravation sur ce point à la réglementation en vigueur.
c) Quant aux inconvénients qui en résulteraient pour le voisinage, le tribunal de céans a déjà jugé que par inconvénients, il ne faut pas entendre tout préjudice, mais uniquement ceux qui ne sont pas supportables sans sacrifice excessif (voir à ce sujet B. Bovay, Exposé systématique de la jurisprudence rendue en 1989 par la CCRC, RDAF 1990, p. 255; arrêts AC 1991/0139 du 1er juin 1992; AC 1993/0187 du 29 août 1994; AC 1998/0213 du 3 janvier 2000; AC 1999/0055 du 24 février 2000). Les recourants font valoir le fait que l'agrandissement projeté - et tout spécialement l'élévation de la toiture - accroîtrait de façon très sensible la portée de l'ombre sur leur habitation pendant la matinée. L'inspection locale a permis au tribunal d'apprécier cet élément au regard de l'aspect général du site. Le hameau du Buit, sis au sud de Bex, prend place sur un plateau qui donne sur la vallée; les deux bâtiments des constructeurs et des recourants constituent un îlot très isolé dans un site presque dépourvu d'habitation, mais à l'ombre de la montagne pendant une partie de la journée. L'ombre portée par le rehaussement du toit des constructeurs n'apparaît dans cet environnement pas de nature à engendrer des inconvénients si sérieux qu'ils puissent être qualifiés de préjudices au sens de la jurisprudence précitée.
7. Les recourants font enfin valoir que différentes dispositions communales, applicables par renvoi, doivent conduire à condamner le projet des constructeurs.
L'art. 200 RPE (territoire non compris dans un sous-périmètre de constructions) se réfère aux règles de la zone agricole de plaine B, soit en particulier à l'art. 153 qui traite des constructions nouvelles et renvoie lui-même à certaines règles de la zone agricole A, notamment aux art. 148 (distance aux limites) et 146 (bâtiments d'habitation distincts); cette dernière disposition renvoie à son tour à la zone d'habitat individuel et, parmi d'autres, aux art. 116 (nombre de niveaux) et 117 (hauteur des bâtiments). Ainsi, par renvois successifs, plaident les recourants, l'art. 148 RPE (qui fixe la distante aux limites à 5 m au minimum), puis l'art. 116 (qui limite le nombre des niveaux à deux, y compris les combles) et l'art. 117 (hauteur maximale au faîte) sont applicables au projet de leurs voisins. A défaut, le règlement comprendrait une lacune, qui conduirait à soumettre les constructions existantes hors des zones à bâtir à des conditions moins sévères que celles qui s'appliquent en zone à bâtir. La municipalité rappelle que ces renvois concernent les constructions nouvelles; de son point de vue, son règlement ne souffre d'aucune lacune sur ce point, puisqu'un agrandissement tel que projeté requiert une pesée des intérêts, qui conduirait à autoriser le projet, pourvu qu'il soit conforme au droit fédéral. On ne saurait considérer que la municipalité excède les limites de son pouvoir d'appréciation, en interprétant ainsi son propre règlement.
8. Les développements qui précédent conduisent à l'admission du recours dans le sens des considérants. Les constructeurs, qui succombent, supporteront un émolument de justice. Les recourants, qui ont consulté avocat ont droit à des dépens.
Par ces motifs le Tribunal administratif arrête:
I. Le recours est admis dans le sens des considérants.
II. L'autorisation spéciale, délivrée le 19 octobre 2000 par le Service de l'aménagement du territoire, et la décision de la Municipalité de Bex du 10 octobre 2000 sont annulées.
III. Un émolument de justice de 2'000 (deux mille) francs est mis à la charge de Ginette et de Marc-Olivier Da Campo, solidairement entre eux.
IV. Ginette et Marc-Olivier Da Campo sont les débiteurs solidaires de Jean-Claude et d'Huguette Morier-Genoud d'une indemnité de 1'800 (mille huit cents) francs à titre de dépens.
mad/ft/Lausanne, le 5 juin 2003
Le président:
Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint
Le présent arrêt peut faire l'objet, dans les trente jours dès sa notification, d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Le recours s'exerce conformément aux art. 103 ss de la loi fédérale d'organisation judiciaire (RS 173.110)