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Décision / 2018 / 735

Datum
2018-09-10
Gericht
Chambre des recours pénale
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL 693 PE18.009774-OJO CHAMBRE DES RECOURS PENALE .......................................... Arrêt du 11 septembre 2018 .................. Composition : M. Meylan, président MM. Krieger et Perrot, juges Greffière : Mme de Benoit ***** Art. 263 al. 1 let. a, b et d CPP Statuant sur le recours interjeté le 3 septembre 2018 par V.B......... contre l’ordonnance de séquestre rendue le 16 août 2018 par le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois dans la cause n° PE18.009774-OJO, la Chambre des recours pénale considère : En fait : A. a) Plusieurs membres de la famille B........., d'origine [...], seraient impliqués dans un trafic de produits stupéfiants de grande envergure sur la Riviera vaudoise. Le rôle des principaux protagonistes aurait été le suivant : le père A.B........., sous le coup d'une interdiction d'entrée en Suisse, aurait approvisionné la famille en produits stupéfiants, ses fils B.B......... et E.B......... auraient vendu la marchandise et sa fille D.B......... et son ex-femme C.B......... auraient servi d'intermédiaires. Au cours de ses auditions, A.B......... a admis qu'il s'était livré à un trafic de produits stupéfiants, notamment qu'il avait vendu 26,5 kg de marijuana et 3 kg de haschisch durant une année pour un montant total de près de 10'000 francs. La perquisition des logements des intéressés a permis la découverte de 2,4 kg de marijuana, 1 kg de haschich, 70 gr de cocaïne et 9'930 francs. En cours d’enquête, il est apparu que A.B......... pourrait également être impliqué dans le trafic de 9,4 kg de marijuana saisis lors de l'interpellation d'un autre membre de sa famille le 12 novembre 2017. A.B........., B.B........., C.B........., D.B......... et l’époux de cette dernière sont actuellement en détention provisoire. b) Selon un rapport d’investigation de la police de sûreté du 29 juin 2018 (P. 12), dans le cadre de l’enquête précitée, V.B........., frère de A.B........., pourrait avoir aidé ce dernier dans le cadre de son trafic de stupéfiants, notamment en transportant 7'000 euros en Espagne à destination d’un complice, en lui prêtant de l’argent, en lui proposant de garder son argent et en mettant à sa disposition son propre véhicule. Le même jour, le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois (ci-après : le Ministère public) a décidé de l’ouverture d’une instruction pénale contre V.B.......... B. a) Le 29 juin 2018, le Ministère public a délivré un mandat de perquisition et de perquisition documentaire au domicile d’V.B.......... La perquisition a été opérée par la police le 2 juillet 2018 (P. 20) et s’est soldée par la saisie de la somme de 1’200 euros se trouvant dans une enveloppe. Lors de son audition par la police du 2 juillet 2018, V.B......... a déclaré que la somme saisie était destinée aux vacances. Selon ses dires, « tout le monde savait ce que faisait A.B......... ». Il a toutefois contesté avoir eu un rôle actif dans le trafic de son frère, que ce soit dans le transport, les transactions financières ou la vente de produits stupéfiants. Il a également démenti avoir gardé de l’argent pour son frère ou remis de l’argent à un tiers, contrairement à ce que A.B......... avait déclaré lors de différentes conversations téléphoniques interceptées par la police (PV. aud. 3). Il a par contre admis lui avoir prêté de l’argent à quelques reprises, en précisant qu’il refusait que cet argent soit utilisé pour le trafic de drogues. b) Par ordonnance du 16 août 2018, le Ministère public a ordonné le séquestre de 1'367 fr. 40, correspondant à la contre-valeur de la somme de 1'200 euros (no de séquestre : [...]). Le procureur a considéré qu’il était fort probable que la somme retrouvée chez V.B......... soit en lien avec le trafic de son frère A.B.......... Cet argent pourrait ainsi être utilisé comme moyen de preuve, être confisqué et servir à garantir les frais de la procédure. Le magistrat a précisé que le prévenu n’avait manifestement pas besoin de cet argent pour vivre, au vu de ses déclarations selon lesquelles cette somme était destinée aux vacances. C. Par acte du 3 septembre 2018, V.B......... a interjeté recours auprès de la Chambre des recours pénale contre cette ordonnance, en concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et à la libération de la somme séquestrée en sa faveur. A l’appui de son recours, V.B......... a produit un billet d’avion Easyjet pour un vol de retour, de Pristina à Genève, le 23 août 2018, pour lui, son épouse et ses enfants. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. En droit : 1. 1.1 Aux termes de l’art. 393 al. 1 let. a CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0), le recours est recevable contre les décisions et actes de procédure du Ministère public. Une ordonnance de séquestre (art. 263 CPP) rendue par le Ministère public dans le cadre de la procédure préliminaire est ainsi susceptible de recours selon les art. 393 ss CPP (Moreillon/ Parein-Reymond, Petit Commentaire du Code de procédure pénale, 2e éd., Bâle 2016, n. 24 ad art. 263 CPP ; Lembo/Julen Berthod, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 4 ad art. 267 CPP ; CREP 7 avril 2018/265 et les références citées). Ce recours s’exerce dans les dix jours devant l’autorité de recours (art. 396 al. 1 CPP ; cf. art. 20 al. 1 let. b CPP), qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [Loi vaudoise du 19 mai 2009 d’introduction du code de procédure pénale suisse ; RSV 312.01] ; art. 80 LOJV [Loi vaudoise du 12 décembre 1979 d’organisation judiciaire ; RSV 173.01]). Dans le cadre d’un recours contre une ordonnance de séquestre, un intérêt juridiquement protégé doit être reconnu à celui qui jouit sur les objets ou valeurs confisqués d'un droit de propriété ou d'un droit réel limité (TF 1B.94/2012 du 2 avril 2012 consid. 2 et les arrêts cités, SJ 2012 I p. 353). 1.2 Interjeté en temps utile (art. 396 al. 1 CPP) contre une ordonnance de séquestre du Ministère public (art. 263 al. 1 et 393 al. 1 let. a CPP), par le prévenu, détenteur de l'argent séquestré et qui a ainsi un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de l’ordonnance, dans les formes prescrites (art. 385 al. 1 CPP), le recours est recevable. 2. 2.1 Le recourant conteste toute implication dans le trafic de stupéfiants de son frère A.B........., bien qu’il admette lui avoir prêté de l’argent ainsi que son véhicule de temps à autre, à des fins privées. Il affirme que l’argent séquestré était prévu pour les vacances, de sorte qu’il ne serait en aucune façon en relation avec le trafic de son frère. Il n’y aurait aucune preuve de sa culpabilité, ni d’un lien avec l’activité de son frère. 2.2 2.2.1 Le séquestre pénal est prononcé en principe sur la base de l'art. 263 CPP, qui permet de mettre sous séquestre des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers, lorsqu'il est probable qu'ils seront utilisés comme moyens de preuves (art. 263 al. 1 let. a CPP), qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités (art. 263 al. 1 let. b CPP), qu'ils devront être restitués au lésé (art. 263 al. 1 let. c CPP) ou qu'ils devront être confisqués (art. 263 al. 1 let. d CPP). Le séquestre est ordonné par voie d'ordonnance écrite, brièvement motivée (art. 263 al. 2, 1re phrase, CPP). En tant que mesure de contrainte au sens de l’art. 196 CPP, le séquestre ne peut être ordonné que lorsqu’il est prévu par la loi, que des soupçons suffisants laissent présumer une infraction, que les buts poursuivis ne peuvent pas être atteints par des mesures moins sévères et que la mesure apparaît justifiée au regard de la gravité de l'infraction (cf. art. 197 al. 1 CPP). 2.2.2 Le séquestre à des fins de garantie ou en couverture des frais (art. 263 al. 1 let. b CPP) a pour but d’assurer à l’Etat le paiement des frais de procédure (art. 422 CPP), des peines pécuniaires (art. 34 ss CP [Code pénal suisse du 21 décembre 1937 ; RS 311.0]), des amendes (art. 106 CP) et des autres indemnités (art. 429 ss CPP) que la procédure a pu faire naître à la charge du prévenu (Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., n. 13 ad art. 263 CPP). Ce séquestre impose de prendre en compte le revenu et la fortune du prévenu (art. 268 al. 2 CPP) et d’exclure le séquestre des valeurs insaisissables selon les art. 92 à 94 LP (art. 268 al. 3 CPP ; ATF 141 IV 360 consid. 3.1 ; Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., n. 9 ad art. 268 CPP, et les réf. citées). 2.2.3 Le séquestre de type conservatoire (art. 263 al. 1 let. d CPP) consiste en la confiscation des biens en raison du danger qu'ils présentent pour la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (art. 69 CP), de leur origine ou de leur utilisation criminelle (art. 70 et 72 CP) pour autant que l'on puisse admettre, prima facie, qu'ils pourront être confisqués en application du droit fédéral (ATF 141 IV 360 consid. 3.2 ; ATF 140 IV 57 consid. 4.1.1 ; Lembo/Julen Berthod, op. cit., n. 7 ad art. 263 CPP). Cette mesure conservatoire est fondée sur la vraisemblance : la seule probabilité que ces biens soient issus d’une infraction ou aient servi à la commission d’une infraction est suffisant, tant que l'instruction n'est pas achevée (CREP 15 décembre 2017/863 consid. 2.1 ; CREP 1er février 2018/71 consid. 2.2.1 ; Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., n. 20 ad art. 263 CPP et les références citées). Il doit exister un rapport de connexité entre l’objet du séquestre conservatoire et l'infraction poursuivie (principe de spécialité) (Lembo/Julen Berthod, op. cit., n. 17 ad art. 263 CPP ; ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2). Ce lien de connexité existe lorsque l'objet séquestré est en relation directe avec l'infraction, qu'il ait servi à la commettre ou en soit le produit (Lembo/Julen Berthod, op. cit., n. 24 ad art. 263 CPP). 2.3 En l’espèce, le recourant est mis en cause pour avoir transporté de l’argent pour son frère, pour lui avoir prêté de l’argent et sa voiture. Dans son recours, il nie avoir eu connaissance du trafic géré par son frère, ce qui est en contradiction flagrante avec son audition du 2 juillet 2018, lors de laquelle il a notamment déclaré que tout le monde était au courant du trafic de A.B......... (PV. aud. 3). A ce stade, il existe des soupçons suffisants – contrairement à ce qu’allègue le recourant –, dès lors que le recourant admet des prêts d’argent, alors même qu’il devait se rendre compte de l’utilisation probable qui pouvait être faite de ces sommes d’argent. De surcroît, plusieurs conversations téléphoniques interceptées par la police font état de son accord de transporter de l’argent pour son frère. Pour le surplus, il apparaît probable que l’argent trouvé au domicile d’V.B......... ait pu servir, d’une manière ou d’une autre, au trafic de stupéfiants de son frère A.B........., ou en soit le produit. Cette probabilité suffit à justifier le séquestre de la somme d’argent en cause. Au demeurant, les autres motifs invoqués par le Ministère public sont également pertinents. En particulier, même si un lien direct avec le trafic ou son financement n’était pas établi, le prévenu reste soupçonné d’avoir notamment transporté 7'000 euros en Espagne à destination d’un complice de A.B........., d’avoir prêté de l’argent à ce dernier, de lui avoir proposé de garder son argent et d’avoir mis à sa disposition son propre véhicule. Or, si ces motifs de prévention s’avéraient fondés, il y aurait matière à confiscation ou à couverture des frais de la procédure. A cet égard d’ailleurs, force est de constater, avec le Ministère public, que le séquestre prononcé ne lèse pas le minimum vital de la famille du prévenu, au vu de la destination alléguée de la somme d’argent en cause (cf. art. 268 al. 3 CPP). En définitive, les conditions de l’art. 263 CPP sont manifestement réunies. 3. Au vu de ce qui précède, le recours, manifestement mal fondé, doit être rejeté sans autre échange d’écritures (art. 390 al. 2 CPP) et l’ordonnance de séquestre confirmée. Les frais de la procédure de recours, constitués en l’espèce du seul émolument d'arrêt, par 770 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). Par ces motifs, la Chambre des recours pénale prononce : I. Le recours est rejeté. II. L’ordonnance du 16 août 2018 est confirmée. III. Les frais de procédure, par 770 fr. (sept cent septante francs), sont mis à la charge d’V.B.......... IV. L’arrêt est exécutoire. Le président : La greffière : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : ‑ Me Paul-Arthur Treyvaud, avocat (pour V.B.........), ‑ Ministère public central, et communiqué à : ‑ M. le Procureur de l’arrondissement de l’Est vaudois, par l’envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). La greffière :