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N° affaire:
PE.2015.0126
Autorité:, Date décision:
CDAP, 19.06.2015
Juge:
AJO
Greffier:
CFV
Publication (revue juridique):
Ref. TF:
Nom des parties contenant:
A.X........, B.X......../Service de la population (SPOP)
ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES REGROUPEMENT FAMILIAL AUTORISATION DE SÉJOUR CONDITION{PRÉSUPPOSITION} ADMISSION DE LA DEMANDE
ALCP-annexe-I-3ALCP-7-dCLaH
Résumé contenant:
Admission du recours contre le refus d'octroyer aux recourantes, filles mineures d'une ressortissante française au bénéfice d'une autorisation de séjour, des autorisations de séjour UE/AELE, par regroupement familial.
Conditions du regroupement familial selon l'art. 3 annexe I ALCP remplies: la mère des recourantes a obtenu dans le cadre de la procédure de divorce pendante en France des mesures provisoires attribuant à la mère le droit de choisir le lieu de résidence de ses filles. Sur cette base, elle était fondée à s'installer en Suisse avec ses filles. Quant au père, titulaire de l'autorité parentale conjointe, il travaille en Suisse et vit en France voisine à une trentaine de kilomètres du domicile de ses filles. Il ne soutient pas qu'il serait entravé dans son droit de visite. Annulation de la décision et renvoi de la cause à l'autorité intimée pour qu'elle délivre les autorisations de séjour aux recourantes.
TRIBUNAL CANTONAL COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC
Arrêt du 19 juin 2015
Composition
M. André Jomini, président; MM. Jean-Marie Marlétaz et Roland Rapin, assesseurs; Mme Cécile Favre, greffière.
Recourantes
A. et B. X........., au 1********, représentées par leur mère C. Y......... au nom de qui agit Me François LOGOZ, avocat, à Lausanne,
Autorité intimée
Service de la population (SPOP), à Lausanne,
Objet
Refus de délivrer
Recours A. et B. X......... c/ décision du Service de la population (SPOP) du 17 février 2015 refusant leur autorisation de séjour UE/AELE par regroupement familial et prononçant leur renvoi de Suisse
Vu les faits suivants:
A. C. Y......... et ses deux filles A. (née le ******** 2005) et B. (née le ******** 2008) X........., toutes trois de nationalité française, sont arrivées en Suisse le 26 août 2013. D. X........., le père d'A. et B., vit à 2******** (France) et travaille en Suisse, dans la région lausannoise. C. Y......... et D. X......... sont en instance de divorce. La procédure est pendante devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Thonon-les-Bains.
Au mois d'octobre 2013, C. Y......... et ses deux filles ont déposé, auprès du contrôle des habitants de 3********, leur commune de résidence, une demande d'autorisation de séjour UE/AELE, qui a été transmise au Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le SPOP).
B. Par une première décision du 9 septembre 2014, le SPOP a octroyé à C. Y......... – qui vit au 1********, sur le territoire de 3********, avec son compagnon – une autorisation de séjour UE/AELE, valable jusqu'au 25 août 2018.
S'agissant de la demande d'autorisation de séjour en faveur d'A. et B. X........., le SPOP a requis la production des documents suivants:
"- Attestation du père de vos deux filles, les autorisant à vivre en Suisse auprès de vous. Ce document devra être légalisé par une autorité compétente;
C. Y......... a transmis au SPOP une ordonnance de non conciliation du 18 novembre 2011 du Juge aux affaires familiales du TGI de Thonon-les-Bains qui prévoit notamment ce qui suit:
"PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi;
AUTORISONS les époux à introduire l’instance en divorce.
[..]
Et statuant sur les mesures provisoires,
AUTORISONS les époux à résider séparément.
[..]
DISONS que l’autorité parentale sur les enfants:
X......... A. née le ******** 2005
X......... B. né[e] le ******** 2008
sera exercée par les deux parents et que les enfants auront leur résidence habituelle fixé[e] chez la mère.
DISONS que Monsieur D. X......... exercera son droit de visite et d’hébergement de manière libre et à défaut d’accord [régime usuel, à savoir un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires, …]".
Pour donner suite à la requête du SPOP, C. Y......... a également déposé une demande devant le TGI de Thonon-les-Bains tendant à ce qu'D. X......... soit condamné à délivrer au SPOP une attestation autorisant ses enfants à vivre en Suisse auprès de leur mère. Par ordonnance du 15 décembre 2014, le Juge de la mise en état (affaires familiales) du TGI a débouté C. Y......... de ses conclusions au motif qu'il ne pouvait pas enjoindre à Monsieur D. X......... de produire une attestation qu’il ne désirait pas remplir, tout en relevant qu’il pourrait trancher ce conflit s’il en était saisi, ce qui n’était pas le cas au vu des conclusions prises par le conseil de C. Y..........
C. Par décision du 17 février 2015 notifiée le 26 février 2015, le SPOP a refusé d'octroyer une autorisation de séjour UE/AELE, pour regroupement familial, en faveur d'A. et B. X......... et il a prononcé leur renvoi de Suisse. Il a retenu en substance qu'en cas d'autorité parentale conjointe, le consentement du père était nécessaire pour permettre le séjour des enfants en Suisse et qu'en l'occurrence le père avait refusé de donner son accord pour permettre à ses filles de résider en Suisse auprès de leur mère. Il a également retenu que la mère d'A. et B. n'avait pas été en mesure de produire une attestation établie par la justice française autorisant ses deux filles à vivre en Suisse, auprès d'elle, et qu'elle avait violé le devoir de collaboration prévue à l'art. 90 LEtr.
D. Par acte du 30 mars 2015, A. et B. X........., représentées par leur mère, recourent contre cette décision devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal, en concluant à l'octroi d'une autorisation de séjour UE/AELE en leur faveur, pour vivre auprès de leur mère. Elles se plaignent en substance d'une violation de l'art. 3 par. 1 annexe I ALCP relatif au regroupement familial de ressortissants européens. Elles font valoir à cet égard que l'ordonnance de non conciliation du 18 novembre 2011 du Juge aux affaires familiales du TGI de Thonon-les-Bains fixant la résidence habituelle des enfants auprès de leur mère équivaut, en droit suisse, à l'attribution du droit de garde et que le consentement du père au transfert de domicile des enfants en Suisse n'était pas nécessaire.
Par ordonnance du 24 avril 2015, le juge instructeur de la CDAP a invité l’avocat des recourantes à indiquer si le divorce des parents des recourantes avait été prononcé par le juge compétent. Cet avocat a répondu le 5 mai 2015 que le divorce des époux X......... n'avait pas été prononcé et que l'audience de jugement n'interviendrait pas avant plusieurs mois ; le jugement serait rendu plusieurs mois après ladite audience.
Le 6 mai 2015, le juge instructeur a invité le SPOP à se prononcer au sujet de la nature de l'"attestation établie par la justice française", mentionnée dans la décision attaquée, qui a été requise de la mère des recourantes selon la décision attaquée. En particulier, le SPOP était invité à préciser les motifs pour lesquels l'ordonnance du 18 novembre 2011 rendue par le Juge des affaires familiales du TGI de Thonon-les-Bains n'équivalait pas à une telle "attestation" autorisant les deux filles à vivre en Suisse auprès de leur mère.
Le SPOP a répondu le 8 mai 2015. Il expose que la mère n'a pas établi être en droit de vivre avec ses enfants conformément aux règles du droit civil. Il estime que l'ordonnance du 18 novembre 2011, qui est antérieure à l'arrivée des recourantes et de leur mère en Suisse, ne prendrait pas en considération l’établissement d’un domicile à l'étranger, et quelle ne saurait se substituer à une décision autorisant les recourantes à vivre en Suisse. Il relève également que le père, titulaire de l'autorité parentale conjointe sur ses filles, s'est opposé à leur prise de résidence en Suisse.
Considérant en droit:
1. Déposé dans le délai de trente jours fixé par l’art. 95 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; RSV 173.36), le recours est intervenu en temps utile. Il respecte au surplus les conditions formelles énoncées à l’art. 79 LPA-VD (par renvoi de l'art. 99 LPA-VD). Par ailleurs, en tant que destinataires de la décision attaquée, les recourantes mineures – représentées dans la procédure par leur mère - disposent manifestement de la qualité pour recourir (art. 75 LPA-VD). Il convient d'entrer en matière sur le recours.
2. Le litige porte sur le refus de l'autorité intimée d’octroyer une autorisation de séjour UE/AELE, pour regroupement familial, aux deux enfants, au motif que leur mère n'aurait pas établi être en droit de vivre avec elles en Suisse. Les recourantes soutiennent que ce refus viole l’art. 3 annexe I de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP ; RS 0.142.112.681).
a) Les deux enfants ainsi que leur mère sont de nationalité française et leur droit de séjour en Suisse est réglé par les dispositions topiques de l'ALCP, étant précisé que leur mère est au bénéfice d'un permis de séjour UE/AELE depuis le 9 septembre 2014.
b) Selon l'art. 3 annexe I ALCP, en relation avec l'art. 7 let. d ALCP, les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle. Le travailleur salarié doit disposer d'un logement pour sa famille considéré comme normal pour les travailleurs nationaux salariés dans la région où il est employé sans que cette disposition puisse entraîner de discriminations entre les travailleurs nationaux et les travailleurs en provenance de l'autre partie contractante (al. 1). Sont notamment considérés comme membres de la famille, quelle que soit leur nationalité, le conjoint et leurs descendants de moins de 21 ans ou à charge (al. 2 let. a).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un regroupement familial sous l'angle de l'ALCP n’est pas admissible sans réserve mais il est subordonné aux conditions suivantes (ATF 136 II 65 consid. 5.2): le citoyen communautaire concerné par la demande de regroupement doit manifester son accord à un tel regroupement. Ensuite, un regroupement est exclu lors de relations familiales fictives ("Scheinbeziehungen"). Cette exigence présuppose une relation familiale préexistante d'une intensité minimale, certes sans exiger une communauté de vie antérieure. Pour les enfants mineurs, le parent sollicitant le regroupement familial doit être en droit de vivre avec lui selon les règles du droit civil. Un regroupement familial présuppose aussi de disposer d'un logement approprié pour la famille, c'est-à-dire un logement qui soit considéré comme normal pour les travailleurs nationaux salariés dans la région de l'emploi (art. 3 al. 1 annexe I ALCP). Un tel regroupement peut être limité pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique (art. 5 annexe I ALCP). Enfin, un regroupement familial doit tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, comme l'exige l'art. 3 par. 1 de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE; RS 0.107). Cette convention requiert donc de se demander si la venue en Suisse d'un enfant au titre de regroupement familial partiel n'entraînerait pas un déracinement traumatisant, ne reviendrait pas de facto à le couper de tout contact avec la famille résidant dans son pays d'origine et n'interviendrait pas contre la volonté de celui-ci. Certes, déterminer l'intérêt de l'enfant est très délicat. Les autorités ne doivent pas perdre de vue qu'il appartient en priorité aux parents de décider du lieu de séjour de leur enfant, en prenant en considération l'intérêt de celui-ci. Leur pouvoir d'examen est limité à cet égard: elles ne doivent intervenir et refuser le regroupement familial que si celui-ci est manifestement contraire à l'intérêt de l'enfant (ATF 136 II 65 consid. 5.2; 136 II 78 consid. 4.8; 136 II 177 consid. 3.2.2).
Le Tribunal fédéral a précisé que le regroupement familial partiel, c’est-à-dire quand l’enfant mineur va résider avec un seul de ses parents, pose des problèmes spécifiques, surtout lorsque l’enfant vit à l’étranger avec l’autre parent ou dans sa famille. Outre la limite de l’abus de droit, le parent souhaitant faire venir son enfant mineur, pour regroupement familial, doit disposer (seul) de l’autorité parentale. Le risque est en effet que le parent résidant en Suisse utilise ces dispositions pour faire venir un enfant auprès de lui, alors qu’il n’a pas l’autorité parentale sur celui-ci, ou en cas d’autorité parentale conjointe, lorsque la venue en Suisse de l’enfant revient de facto à priver l’autre parent de toute possibilité de contact avec lui. Le regroupement familial doit donc être réalisé en conformité avec les règles du droit civil régissant les rapports entre parents et enfants et il appartient aux autorités compétentes en matière de droit des étrangers de s’en assurer (ATF 136 II 78 consid. 4.8). Dans un arrêt 2C.132/2011 du 28 juillet 2011 (consid. 4), le Tribunal fédéral a considéré que le parent qui demande une autorisation de séjour pour son enfant au titre du regroupement familial partiel doit disposer à tout le moins du droit de garde.
c) L'autorité intimée ne prétend pas que le droit au regroupement familial serait invoqué de manière abusive ou qu’il serait contraire à l’intérêt supérieur des recourantes. Elle ne remet ainsi pas en cause les relations personnelles entre la mère et les recourantes. Elle ne conteste pas non plus la validité formelle et matérielle de l'ordonnance de non conciliation du 18 novembre 2011 du Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains, qui règle notamment l'attribution du lieu de résidence habituelle des recourantes durant la procédure de divorce. Malgré l'absence du père des recourantes à l'audience pour des motifs professionnels, l'ordonnance précitée est réputée contradictoire (p. 3), le père n'ayant pas demandé le renvoi de l'audience (p. 1). Il ne ressort pas du dossier que le père des recourantes aurait par la suite contesté cette ordonnance. Celle-ci est donc exécutoire.
d) L'autorité intimée estime que les conditions formelles du regroupement familial ne sont pas réunies dès lors que les parents disposent de l'autorité parentale conjointe, que le père s'oppose à la prise de domicile en Suisse, et que selon lui la mère des recourantes n'aurait pas établi être autorisée, selon les règles du droit civil, à s'établir en Suisse avec ses filles parce que l'ordonnance du 18 novembre 2011 précitée a été rendue avant le départ de la mère et des recourantes pour la Suisse et qu'elle n'autorise pas expressément la prise de résidence des recourantes à l'étranger.
L'ordonnance du 18 novembre 2011 précitée attribue l'autorité parentale sur les recourantes conjointement aux deux parents. Elle fixe en revanche la résidence habituelle des recourantes auprès de leur mère.
Selon la Convention de La Haye concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (CLAH96; RSV 021.231.011), à laquelle la Suisse et la France sont parties, l'exercice de la responsabilité parentale est régi par la loi de l'Etat de la résidence habituelle de l'enfant. En cas de changement de la résidence habituelle de l'enfant, il est régi par la loi de l'Etat de la nouvelle résidence habituelle (art 17 CLAH96). La résidence habituelle des recourantes est en l'espèce la Suisse pays dans lequel elles résident depuis bientôt deux ans.
En droit suisse, le droit de choisir le lieu de résidence des enfants est traditionnellement la prérogative essentielle du droit de garde (sur ces notions voir Philippe Meier/Martin Stettler, Droit de la filiation, 5e édition, Zurich 2014, p. 461 et ss). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral à ce propos, le parent, titulaire du droit de garde pouvait en règle générale déménager à l'étranger sans l'accord de l'autre parent. Le droit de visite devait être adapté en conséquence. En cas de menaces sérieuses pour le bien de l'enfant, l'autorité compétente pouvait interdire le départ pour l'étranger (ATF 136 III 353 consid. 3.3).
Le 1er juillet 2014, la modification des dispositions du code civil relatives à l'autorité parentale est entrée en vigueur (RO 2014 357). Cette modification a notamment entraîné le remplacement de la notion de droit de garde par le droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant. Ce droit constitue une composante à part entière de l'autorité parentale (Meier/Stettler, op. cit., p. 308 à 312). Selon le nouvel art. 301a CC, lorsque l'autorité parentale est exercée en commun, les père et mère doivent décider ensemble de ce lieu, sous réserve des changements qui n'ont pas de conséquence significative dans l'exercice de l'autorité parentale pour l'autre parent (art. 301a al. 2 CC). Un parent exerçant conjointement l'autorité parentale ne peut modifier le lieu de résidence de l'enfant qu'avec l'accord de l'autre parent ou sur décision du juge ou de l'autorité de protection de l'enfant lorsque le nouveau lieu de résidence se trouve à l'étranger (art. 301 al. 2 let. a CC). Le refus de l'autre parent ne disposant pas de la garde doit se fonder sur le bien de l'enfant, seule considération qui peut justifier de limiter la liberté du parent gardien (Meier/Stettler, op. cit., p. 589).
e) Dans le cadre des mesures provisoires du divorce, la mère a obtenu le droit de choisir le lieu de résidence de ses filles, ce qui équivalait en droit suisse, au moment où le juge français a statué, à l’octroi du droit de garde. L'ordonnance du 18 novembre 2011 n'excluait pas expressément la prise de résidence de la mère hors du territoire français. Conformément au droit en vigueur et à la jurisprudence du Tribunal fédéral prévalant à la date de la prise de résidence des recourantes en Suisse, soit en octobre 2013, la mère des recourantes, titulaire du droit de garde sur ses filles, était en principe autorisée, selon les règles du droit civil suisse précisées par la jurisprudence (ATF 136 III 353 consid. 3.3), à déménager à l'étranger avec les recourantes, indépendamment de l'accord du père, sous réserve des cas d'abus de droit (art. 2 al. 2 CC). Il y a abus de droit lorsque la prise de résidence à l'étranger a pour seul but de compromettre les relations de l'enfant avec le parent qui n'a pas la garde. En l'occurrence, la mère des recourantes s'est installée en Suisse pour des motifs personnels, son compagnon étant établi à 3********. Quant au père des recourantes, il travaille dans le canton de Vaud et il habite en France voisine à 2********, soit à une trentaine de kilomètres du lieu de résidence de ses filles. Dans ses diverses prises de position auprès du SPOP, il n'a pas prétendu qu'il serait entravé dans son droit de visite et ses relations personnelles avec ses filles, à cause de leur déménagement en Suisse. La prise de domicile à l'étranger de la mère ne procède ainsi pas d'un abus de droit. A cela s'ajoute qu'à la date d'arrivée en Suisse des recourantes, en octobre 2013, le père n'a pas manifesté d'emblée son désaccord à propos de leur résidence en Suisse. Dans sa première prise de contact avec le SPOP, qui date de mars 2014, il a uniquement indiqué qu'il souhaitait avoir un "récapitulatif" de la situation les concernant. Ce n'est qu'ultérieurement qu'il a manifesté un tel désaccord au motif qu'il souhaitait obtenir le droit de garde sur ses filles à l'issue de la procédure de divorce et que le refus du SPOP de délivrer une autorisation de séjour en faveur de ses filles favoriserait sa position dans le cadre de cette procédure (cf. son courriel au SPOP du 28 avril 2014). Son refus, qui s'est manifesté postérieurement à l'arrivée en Suisse de ses filles, d'autoriser leur déménagement dans ce pays rejoint ainsi son intérêt à obtenir leur garde dans la procédure de divorce. Or, il n'appartient pas à l'autorité administrative compétente en matière de droit des étrangers de déterminer l'intérêt des enfants à vivre chez l'un ou l'autre des parents. Conformément à la jurisprudence précitée (supra, consid. 2b), elle doit seulement refuser le regroupement familial si celui-ci est manifestement contraire à l'intérêt des enfants. Tel n'apparaît pas être le cas en l'espèce. Les recourantes vivent en effet en Suisse, auprès de leur mère, depuis août 2013. Elles sont actuellement scolarisées à 3******** et leur père n'est pas entravé dans son droit de visite en raison de la proximité de ses lieux de travail et de domicile.
Selon les indications transmises par l'avocat des recourantes, le jugement de divorce ne sera pas prononcé avant plusieurs mois, et la question de l'attribution définitive du droit de garde ne sera pas tranchée à bref délai par le juge français. Comme, après le 18 novembre 2011, aucune autre décision sur la garde n’a été prise dans le cadre de la procédure de divorce pendante en France, ni aucune décision contraire d’une autorité de protection de l’enfant, la mère pouvait donc bien, au moment de demander une autorisation de séjour, se prévaloir d’une décision de l’autorité compétente fixant chez elle le lieu de résidence habituelle des deux filles.
Même si, entretemps, les dispositions du droit suisse sur l’autorité parentale ont été modifiées pour conférer aux deux titulaires de l’autorité parentale conjointe le droit de décider ensemble du lieu de résidence des enfants, cela ne rend pas caduque l’ordonnance du juge français reconnaissant, dans le cas particulier, que le domicile des enfants était celui de leur mère, titulaire du droit de garde. Le père n’a certes pas formellement approuvé – par une déclaration à l’intention du SPOP ou du TGI, lorsque la mère des recourantes a tenté en 2014 une démarche tendant à ce qu’il soit enjoint de produire une attestation – le déménagement de ses filles à l’étranger, mais il ne dispose pas pour autant du droit de garde pour les accueillir en France, en cas d’exécution de la décision attaquée. Dans cette situation provisoire, étant donné que la procédure de divorce n’est pas achevée, il importe que le statut des recourantes en Suisse soit régularisé. De ce point de vue, la décision du juge français qui fixe leur domicile là où réside leur mère est déterminante, et ce droit de garde exclusif suffit pour le regroupement familial. En d’autres termes, le changement de la législation suisse relative à l'exercice de l'autorité parentale, qui est postérieur à l'arrivée en Suisse des recourantes, ne saurait justifier le refus d'une autorisation de séjour UE/AELE, pour leur permettre de vivre auprès de leur mère.
Il s'ensuit que la décision attaquée qui refuse aux recourantes une autorisation de séjour pour vivre auprès de leur mère, ne respecte pas l’art. 3 annexe I ALCP. Elle doit par conséquent être annulée et la cause doit être renvoyée à l'autorité intimée pour qu'elle délivre les autorisations UE/AELE en faveur des recourantes.
3. Il résulte de ce qui précède que le recours doit être admis, la décision attaquée annulée et la cause doit être renvoyée à l’autorité intimée pour une nouvelle décision au sens du considérant précédent. Vu le sort de la cause, il se justifie de statuer sans frais (49 al. 1 et 52 al. 1 LPA-VD). Les recourantes, qui ont procédé avec l'assistance d'un mandataire professionnel, ont droit à des dépens (art. 55 al. 1, 91 et 99 LPA-VD).
Par ces motifs la Cour de droit administratif et public
du Tribunal cantonal arrête:
I. Le recours est admis.
II. La décision du Service de la population du 17 février 2015 est annulée, la cause étant renvoyée à ce service pour qu'il rende une nouvelle décision au sens des considérants.
III. Il n’est pas perçu de frais judiciaires.
IV. Une indemnité de 1'500 (mille cinq cents) francs, à payer à titre de dépens aux recourantes, solidairement entre elles, est mise à la charge de l'Etat de Vaud (par le Service de la population).
Lausanne, le
Le président: La greffière:
Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint.
Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral. Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.