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Décision / 2024 / 721

Datum
2024-09-23
Gericht
Chambre des recours pénale
Bereich
Schweiz

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TRIBUNAL CANTONAL 682 PE24.013483-DBT CHAMBRE DES RECOURS PENALE .......................................... Arrêt du 24 septembre 2024 .................. Composition : M. Krieger, président Mmes Byrde et Elkaim, juges Greffier : M. Robadey ***** Art. 212 al. 3, 221 al. 2 et 237 CPP Statuant sur le recours interjeté le 19 septembre 2024 par V......... contre l’ordonnance rendue le 4 septembre 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte dans la cause n° PE24.013483-DBT, la Chambre des recours pénale considère : En fait : A. a) De nationalité suisse, V......... est né le [...] 1998 à Lausanne. Son casier judiciaire suisse ne comporte aucune inscription. b) V......... a été engagé auprès de l’Y......... (ci-après : Y.........) en tant qu’apprenti employé de commerce. Durant ses quelques mois de travail au sein de l’établissement, il aurait adopté des comportements inappropriés envers la responsable des apprentis. Le 25 mai 2023, il a présenté sa démission. Depuis son départ, il s’est présenté à plusieurs reprises aux abords des locaux de son ancien employeur. Le 25 janvier 2024, l’Y......... lui a remis en main propre une interdiction de périmètre, que le prévenu a déchirée. Les jours suivants, il s’est à nouveau présenté à proximité du bâtiment, ce qui a conduit la police à intervenir, sur demande de l’Y.......... Parallèlement, il a envoyé plusieurs courriels à l’Y......... et à certains employés de celui-ci dont le contenu était inquiétant. Le 19 juin 2024, le Ministère public a ouvert une enquête contre V......... pour contrainte, tentative de contrainte, violation de domicile, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Selon la demande de prolongation de la détention du 23 août 2024, les faits suivants sont reprochés au prévenu : « 1. Entre le mois de mai 2023 et le mois de mars 2024, V......... a adressé de nombreux messages et courriels à l'Y......... et à ses collaborateurs au contenu inquiétant. L’Y......... a dû lui envoyer un courrier le 6 juillet 2023 pour l’enjoindre de cesser de contacter ses collaborateurs (P.4/10). Pourtant, le prévenu a poursuivi ses agissements, ce qui a fortement inquiété les collaborateurs de l’Y.......... Ainsi : A. Le 20 février 2024, V......... a envoyé un courriel à un collaborateur de l’Y......... dans lequel il a écrit qu’il allait entrer dans le bâtiment de l’Y......... quand il en aura le courage (P.4/2). B. Le 20 février 2024, V......... a envoyé un courriel à l’Y......... avec le contenu suivant (P.4/3) : « je vois bien que vous me voyez comme une personne violente, bien que je ne me vois pas comme ça. Faudra juste dire à la police de bien gérer la situation. La dernière fois, ils me répétaient de retirer mes mains de mes poches alors qu’ils m’ont fouillé. Cette fois ci je ne retirerai pas mes mains de mes poches, et c’est possible qu’il m’abatte comme l’iranien qui a perdu toute patience. Vu que mes origines riment avec « iranien » ils me réserveront le même sort. Sur ma montre ça fait tic tac. Vous faites genre que vous n’avez pas mon temps, mais moi j’ai tout mon temps. Bonne réflexion. » C. Le 20 février 2024, V......... a envoyé un courriel à l’Y......... avec le contenu suivant (P.4/4): « Dites à la police de pas me tirer dessus lorsque je vais rentrer dans le bâtiment de l’Y.......... » D. Entre février 2024, V......... a adressé un message à l’Y......... via le formulaire de contact avec le contenu suivant (P.4/7) : « la police m’a déjà relâché. Vous pouvez les rappeler parce que je n’abandonnerai pas. » L’Y........., par [...] et [...], a déposé plainte le 26 février 2024. E. Le 21 mars 2024, V......... a écrit un courriel à l’Y......... avec le contenu suivant (P.7/2) : « c’est quoi votre problème à vouloir m’humilier comme vous le faites ? Vous faites comme si je n’avais pas de cœur. C’est à cause de gens injustes comme vous que des personnes deviennent fou de rage. Y’a personne qui veut utiliser sa raison pour trouver un juste milieu à cette situation ? Je vais pas vous menacer mais réfléchissez bon sang ! C’est pas tout le monde qui décide d’être patient face à votre bêtise. Non mais oh ! » L’Y........., par son conseil, a dénoncé les faits le 27 mars 2024. 2. A [...], avenue [...], le 19 juin 2024, V......... est entré dans le bâtiment de l’Y......... par la porte principale, malgré l’interdiction de périmètre émise par l’Y......... à son encontre le 25 janvier 2024. Il s’est dirigé au rez-supérieur avec l’ascenseur. Arrivé à la réception, il s’est arrêté devant le bureau de la réceptionniste avec le poing levé fermé. Il ne s’est pas exprimé et est resté dans cette position plusieurs secondes. La réceptionniste a eu peur et appelé le responsable de la sécurité. Ce dernier a demandé au prévenu de quitter les lieux. Le prévenu a refusé. L’adjudant [...] de la CVP est venu vers le prévenu et l’a enjoint à nouveau de quitter les lieux. Le prévenu a refusé d’obtempérer. La police a été appelée. Le prévenu est finalement sorti du bâtiment et a été interpellé par la police. Lors de son transfert à l’Hôtel de police de Lausanne, le prévenu a déclaré aux policiers : « ça fait une année que je me retiens de faire un attentat dans ce bâtiment, je n’en peux plus ». L’Y........., par [...], a déposé plainte le 19 juin 2024. V......... a été entendu, en présence d’un avocat, par la police et le Ministère public le 20 juin 2024. Il a été formellement mis en garde contre toute récidive (cf. PV aud. 2 et 3). 3. Le 28 juin 2024, V......... a envoyé un message sur le compte Instagram exploité par l’Y......... avec le contenu suivant (P.16/2) : « Ne me demandez pas comment j’ai mal histoire que je vous étrangle jusqu’à ce que vous ayez mal. » L’Y........., par son conseil, a dénoncé les faits le 8 juillet 2024. 4. Le 2 juillet 2024, V......... a écrit un courriel à l’Y......... dans lequel il a répété ses doléances et a demandé un dédommagement. Il a conclu son courriel par les propos suivants (P.14/2) : « J’attends une réponse cette semaine pour un arrangement amical, faute de quoi je commencerai à m’énerver sérieusement. » L’Y........., par son conseil, a dénoncé les faits le 2 juillet 2024. 5. Entre 2021 et le mois de juillet 2024, V......... a consommé quotidiennement du cannabis. » c) V......... a été appréhendé par la police le 8 juillet 2024. Son audition d’arrestation a eu lieu de même jour. d) Dans son rapport médical parvenu au Ministère public le 8 juillet 2024, le Dr [...], psychiatre et psychothérapeute, a indiqué qu’il suivait le prévenu depuis le 5 mars 2024 pour des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives multiples, un trouble de la personnalité mixte et un épisode dépressif moyen, sans symptôme psychotique. Le médecin a précisé que son patient avait besoin d’un réseau de soins pluridisciplinaire (P. 20/1). e) Le 10 juillet 2024, V......... a été entendu par la Présidente du Tribunal des mesures de contrainte. Le prévenu a admis l’ensemble des faits qui lui étaient reprochés. f) Par ordonnance du 11 juillet 2024, le Tribunal des mesures de contrainte a ordonné la détention provisoire d’V......... (I) pour une durée maximale de deux mois, soit au plus tard jusqu’au 7 septembre 2024 (II), et a dit que les frais de l’ordonnance, par 1’650 fr., suivaient le sort de la cause (III). Le tribunal a retenu qu’il existait des soupçons suffisants de culpabilité du prévenu, dès lors qu’il avait admis une partie des faits qui lui étaient reprochés en cours d’enquête et l’entièreté de ceux-ci lors de son audition du 10 juillet 2024. Il a ensuite considéré que le risque de réitération qualifiée était concret, tout comme le risque de passage à l’acte. Certes le casier judiciaire du prévenu était vierge. Toutefois, les faits qui lui étaient reprochés étaient extrêmement graves. Il a relevé que le prévenu estimait être victime de l’Y......... et agir dans son bon droit, précisant que les mesures prises par l’Y........., l’interdiction de périmètre, les diverses interventions de police, l’enquête pénale en cours, la nuit en cellule et la mise en garde de la police et du Ministère public le 20 juin 2024 ne l’avaient pas empêché de récidiver. Ses agissements ainsi que sa détermination étaient allés crescendo. Le prévenu avait en outre reconnu lui-même qu’à sa sortie de détention, il allait recommencer et que ses agissements seraient pires. Le tribunal a par ailleurs relevé qu’V......... semblait présenter une détresse psychologique et n’être suivi par un médecin que sur un mode volontaire et de manière sporadique, alors qu’il présenterait des troubles psychologiques. Ainsi, en l’état, le prévenu paraissait représenter un danger sérieux et imminent pour autrui, au vu de la teneur de ses propos et messages, et n’avait pas identifié les facteurs déclencheurs de ses délits ni mis en place des stratégies d’évitement à la récidive. Le tribunal a considéré qu’il n’existait aucune mesure de substitution susceptible de pallier les risques retenus, eu égard à leur intensité. Enfin, il a estimé que la durée de détention de trois mois était proportionnée au vu des mesures d’instruction annoncées par le Ministère public, en particulier la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique du prévenu, et compte tenu de la peine à laquelle il s’exposait. g) Le 15 août 2024, le Ministère public a mandaté un expert psychiatre aux fins de se prononcer notamment sur l’existence d’un trouble mental chez V........., sur sa responsabilité pénale, sur la probabilité d’une récidive ainsi que sur les éventuelles mesures pénales. Un délai au 13 décembre 2024 a été imparti à l’expert pour déposer son rapport. B. a) Le 23 août 2024, le Ministère public, invoquant l’existence des risques de récidive et de passage à l’acte, a saisi le Tribunal des mesures de contrainte d’une demande de prolongation de la détention provisoire d’V......... pour une durée de trois mois. A l’appui de sa requête, le procureur, considérant que des soupçons suffisants de culpabilité du prévenu demeuraient, a rappelé que celui-ci souffrait de troubles mentaux et du comportement liés à sa consommation de produits stupéfiants, ainsi que de troubles de la personnalité. Il a mentionné ses difficultés à gérer ses émotions, lesquelles rendaient son comportement imprévisible. Il a estimé qu’il convenait de prolonger la détention provisoire d’V......... dans l’attente des conclusions de l’expertise psychiatrique, laquelle était essentielle pour déterminer l’ampleur des risques de récidive et de passage à l’acte que présentait le prévenu. Il a enfin relevé que l’astreinte pour celui-ci d’être soumis à un suivi thérapeutique et à une interdiction de périmètre et de contact n’était pas suffisante, le respect de telles mesures ne dépendant que de sa bonne volonté, ajoutant que le prévenu avait lui-même déclaré lors d’une audition qu’il ne pouvait pas s’engager à ne plus contacter l’Y.......... b) Par déterminations du 29 août 2024, V........., par son défenseur d’office, a conclu, principalement, au rejet de la demande de prolongation et à sa libération immédiate. Subsidiairement, il a conclu à ce qu’il soit ordonné, en lieu et place de la détention, des mesures de substitution en la forme d’une obligation d’entreprendre un suivi ambulatoire auprès de la Consultation de Chauderon (CHUV) ou du Centre des Toises, avec un ordre donné aux thérapeutes d’avertir le Ministère public en cas de tout manquement de sa part, et d’une interdiction de se rendre dans les locaux de l’Y......... et de contacter ses collaborateurs, de quelque manière que ce soit. c) Par ordonnance du 18 octobre 2023, le Tribunal des mesures de contrainte a prolongé la détention provisoire du prévenu pour une durée de trois mois, soit au plus tard jusqu’au 6 décembre 2024. Il a maintenu que des soupçons sérieux existaient à l’encontre de celui-ci dès lors qu’il avait admis les faits, relevant par ailleurs que les faits étaient graves et que la question de la responsabilité pénale du prévenu incombait au juge du fond. Le tribunal a ensuite considéré que le risque de réitération qualifié demeurait concret, invoquant les mêmes arguments que dans sa précédente ordonnance et s’y référant. Il a ajouté ne pas partager l’avis de la défense selon lequel les comportements reprochés au prévenu relèveraient uniquement de « comportements socialement nuisibles ». V......... représenterait en effet un danger sérieux et imminent pour autrui eu égard à ses troubles mentaux, à ses idées obsessionnelles et aux déclarations qu’il a faites. Le prénommé risquerait effectivement de mettre gravement en danger les biens juridiques des victimes potentielles. Le tribunal a également estimé le risque de passage à l’acte comme étant toujours concret, en se référant aux motifs exposés dans sa précédente ordonnance qui gardaient toute leur pertinence. Il a relevé que le prévenu ne présentait toujours que peu de facteurs protecteurs à la récidive, mentionnant la rupture avec ses amis et sa famille, sa consommation régulière d’alcool, de gaz et de cannabis ainsi que sa souffrance psychique. Enfin, le tribunal a considéré qu’aucune mesure de substitution ne permettait de parer concrètement aux risques retenus, réitérant les arguments développés dans sa précédente ordonnance, et que la durée de la prolongation de la détention de trois mois était proportionnée, étant donné l’expertise psychiatrique ordonnée le 15 août 2024 ainsi que la peine à laquelle le prévenu s’exposait en cas de condamnation. C. Par acte du 19 septembre 2024, V........., par son défenseur d’office, a recouru contre cette ordonnance, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement, à sa libération immédiate. Subsidiairement, il a conclu à sa libération au bénéfice de mesures de substitution à la détention à forme d’une obligation d’entreprendre un suivi ambulatoire auprès de la Consultation de Chauderon (CHUV), avec un ordre donné aux thérapeutes d’avertir le Ministère public en cas de manquement aux rendez-vous fixés, et d’une interdiction de se rendre dans les locaux de l’Y......... et de contacter ses collaborateurs de quelque manière que ce soit. Plus subsidiairement, il a conclu à l’annulation de l’ordonnance et au renvoi de la cause à l’autorité inférieure pour qu’elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants de l’arrêt à intervenir. Il n’a pas été ordonné d’échange d’écritures. En droit : 1. Interjeté dans le délai légal (art. 396 al. 1 CPP [Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0]) contre une décision du Tribunal des mesures de contrainte dans un cas prévu par le CPP (art. 393 al. 1 let. c CPP), par le prévenu détenu qui a qualité pour recourir (art. 222 et 382 al. 1 CPP) et dans les formes prescrites (art. 385 al. 1 CPP), le recours est recevable. 2. 2.1 Le recourant ne conteste pas l’existence de forts soupçons de culpabilité à son encontre. Il conteste en revanche l’existence d’un risque de réitération qualifié. Il soutient que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas « extrêmement graves », puisqu’il ne s’en est jamais pris à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle d’autrui, qu’il s’en est tenu à des propos menaçants et que son agressivité est le plus souvent dirigée contre lui-même. Il relève que lors de la perquisition, aucun objet dangereux n’a été retrouvé chez lui. Il estime que ses comportements, qu’il qualifie de « socialement nuisibles », sont l’expression de son mal-être psychique. Il conteste ensuite l’existence d’un risque de passage à l’acte, dès lors que malgré une présence intempestive dans les locaux de l’Y........., il n’aurait à aucun moment été menaçant envers l’intégrité physique des employés. Un tel risque doit en outre être retenu restrictivement. Il fait valoir qu’avant sa détention, il travaillait à temps partiel dans un restaurant de fast-food, ce qui constituait un facteur d’équilibre et de structure dans son quotidien. Il aurait également renoué contact avec ses parents. 2.2 2.2.1 Selon l’art. 221 al. 1 CPP, la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ne peuvent être ordonnées que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d’avoir commis un crime ou un délit et qu’il y a sérieusement lieu de craindre qu’il se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite (let. a), qu’il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuves (let. b) ou qu’il compromette sérieusement et de manière imminente la sécurité d’autrui en commettant des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre (let. c). Conformément à l’art. 221 al. 1bis CPP, en vigueur depuis le 1er janvier 2024, la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté peuvent exceptionnellement être ordonnées, aux conditions suivantes : le prévenu est fortement soupçonné d’avoir porté gravement atteinte à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle d’autrui en commettant un crime ou un délit grave (let. a) ; en outre, il y a un danger sérieux et imminent qu’il commette un crime grave du même genre (let. b). En édictant le nouvel art. 221 al. 1bis CPP, le législateur a prévu un risque de récidive qualifié comme motif de détention provisoire, sans exigence d’infractions préalables comme l’expose l’art. 221 al. 1 let. c CPP, mais à des conditions restrictives, soit de restreindre les infractions soupçonnées aux crimes et délits graves contre des biens juridiques particulièrement importants (par ex. la vie, l’intégrité physique ou l’intégrité sexuelle). L’exigence supplémentaire de l’atteinte grave a pour objectif de garantir que, lors de l’examen de la mise en détention, on prendra en considération non seulement les peines encourues, mais aussi les circonstances de chaque cas (let. a). Ces restrictions sont de plus requises en ce qui concerne le risque de crime grave du même genre. En effet, la détention provisoire ne paraît justifiée que si le prévenu risque de mettre gravement en danger les biens juridiques des victimes potentielles (comme lorsque le motif de mise en détention est le passage à l’acte). Enfin, ces restrictions ont pour objectif d’exclure que ce motif de mise en détention soit avancé en cas de dommages purement matériels ou de comportements socialement nuisibles (TF 7B.1025/2023 du 23 janvier 2024 consid. 3.2). Pour établir le pronostic de récidive, les critères déterminants sont la fréquence et l'intensité des infractions poursuivies. Cette évaluation doit prendre en compte une éventuelle tendance à l'aggravation telle qu'une intensification de l'activité délictuelle, une escalade de la violence ou une augmentation de la fréquence des agissements. Les caractéristiques personnelles du prévenu doivent en outre être évaluées. La gravité de l'infraction dépend, outre de la peine menace prévue par la loi, de la nature du bien juridique menacé et du contexte, notamment de la dangerosité présentée concrètement par le prévenu, respectivement de son potentiel de violence (ATF 150 IV 149 consid. 3.6.2 ; ATF 146 IV 326 consid. 3.1). En général, la mise en danger de la sécurité d'autrui est d'autant plus grande que les actes redoutés sont graves. En revanche, le rapport entre gravité et danger de récidive est inversement proportionnel. Cela signifie que plus l'infraction et la mise en danger sont graves, moins les exigences seront élevées quant au risque de réitération. Lorsque la gravité des faits et leurs incidences sur la sécurité sont particulièrement élevées, on peut ainsi admettre un risque de réitération à un niveau inférieur. Il demeure qu'en principe le risque de récidive ne doit être admis qu'avec retenue comme motif de détention. Dès lors, un pronostic défavorable est nécessaire (et en principe également suffisant) pour admettre l'existence d'un tel risque (ATF 143 IV 9 consid. 2.9 ; TF 7B.1025/2023 précité consid. 3.2 et les réf. cit.). 2.2.2 Aux termes de l’art. 221 al. 2 CPP, également dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2024, la détention peut aussi être ordonnée s’il y a un danger sérieux et imminent qu’une personne passe à l’acte après avoir menacé de commettre un crime grave. L'art. 221 al. 2 CPP permet d'ordonner la détention lorsqu'il y a lieu de craindre un passage à l'acte, même en l'absence de toute infraction préalable. Il doit s'agir d'un crime grave et non seulement d'un délit. Il convient de faire preuve de retenue dans l'admission de ce risque et ne l'admettre que lorsque le pronostic est très défavorable. Il n'est toutefois pas nécessaire que la personne soupçonnée ait déjà pris des dispositions concrètes pour passer à l'exécution des faits redoutés. Il suffit que le passage à l'acte apparaisse comme hautement vraisemblable sur la base d'une appréciation globale de la situation personnelle de l'intéressé et des circonstances. En particulier en cas de menace d'infractions violentes, on doit prendre en considération l'état psychique de la personne soupçonnée, son imprévisibilité ou son agressivité. Plus l'infraction redoutée est grave, plus la mise en détention se justifie lorsque les éléments disponibles ne permettent pas une évaluation précise de ce risque (ATF 140 IV 19 consid. 2.1.1, JdT 2015 IV 32 ; ATF 137 IV 122 consid. 5 ; TF 1B.138/2023 du 28 mars 2023 consid. 2.1). Pour ce qui est des menaces, il n’est pas nécessaire que la personne ait pris des mesures concrètes pour commettre l’infraction, il suffit que sur la base des circonstances de l’espèce et de sa situation personnelle, la probabilité du passage à l’acte soit considérée comme très élevée (ATF 140 IV 19 précité consid. 2.1.1). D’après la jurisprudence du Tribunal fédéral, la menace de commettre un crime grave peut aussi résulter d’actes concluants (ATF 137 IV 339 consid. 2.4, JdT 2012 IV 79). 2.3 En l’espèce, avec le recourant, il y a lieu de considérer que ses agissements n’entrent pas dans le champ d’application de l’art. 221 al. 1bis CPP. Il n’a objectivement commis aucun crime grave au sens de cette disposition, ni ne s’en est pris aux biens juridiques protégés spécifiquement par celle-ci. La simple possibilité qu’il mette gravement en danger les bien juridiques des victimes potentielles ne suffit ici pas. En revanche, quand bien même les menaces seraient principalement dirigées contre le recourant lui-même, elles sont violentes. Le recourant parait désespéré et psychologiquement en difficulté. Cet état de détresse le rend imprévisible, ce qu’il admet du reste lui-même. En ce sens, la probabilité d’un passage à l’acte violent demeure importante en l’état, dès lors que le recourant ne semble pas encore avoir été adéquatement pris en charge médicalement. Son suivi sporadique auprès de son médecin actuel, qui, selon lui, se limiterait à lui délivrer des arrêts de travail et refuserait de le voir en personne par crainte d’accès de colère, est de toute évidence insuffisant. La toxicodépendance du recourant, conjuguée à ses troubles psychiques et au fait qu’il continue de se positionner en victime de l’Y......... ne font qu’accroître le risque de passage à l’acte au sens de l’art. 221 al. 2 CPP, de sorte que celui-ci doit être considéré comme étant concret. Le maintien en détention provisoire d’V......... pour ce motif est par conséquent justifié. 3. 3.1 Le recourant se plaint ensuite d’une violation du principe de la proportionnalité. Il soutient que des mesures de substitution à la détention seraient propres à atteindre le même but que celle-ci, soit en particulier l’obligation d’entreprendre un suivi thérapeutique, lequel permettrait de réduire son mal-être profond ainsi que sa toxicodépendance, et des mesures d’interdiction de périmètre et de contact vis-à-vis de l’Y......... et de ses employés. Il relève que l’expertise psychiatrique ordonnée par le Ministère public peut être mise en œuvre sans qu’il soit incarcéré. 3.2 Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101) ; pour la procédure pénale, cf. art. 197 al. 1 let. c CPP), il convient d'examiner les possibilités de mettre en œuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité), qui représente l'ultima ratio (ATF 140 IV 74 consid. 2.2, JdT 2014 IV 289). Cette exigence est concrétisée par l'art. 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention provisoire ou de la détention pour des motifs de sûreté si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. En vertu de l'art. 237 al. 2 CPP, font notamment partie des mesures de substitution la fourniture de sûretés (let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (let. d), l'obligation d'avoir un travail régulier (let. e), l'obligation de se soumettre à un traitement médical ou à des contrôles (let. f) et l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (let. g). Cette liste est exemplative et le juge de la détention peut également, le cas échéant, assortir les mesures de substitution de toute condition propre à en garantir l'efficacité (ATF 145 IV 503 consid. 3.1). Une obligation de soins s’apparente à l’instauration d’une mesure au sens des art. 59 ss CP qui relève du juge du fond et ne peut donc être instaurée par le juge de la détention sans que toutes les conditions en soient a priori assurées, dont l’existence d’une expertise renseignant sur le trouble mental et/ou l’addiction dont souffre l’intéressé et les mesures propres à le détourner de nouvelles infractions (TF 1B.91/2021 du 10 mars 2021 consid. 2.3 ; TF 1B.171/2019 du 8 mars 2019 consid. 3.1). 3.3 En l’état, le Tribunal des mesures de contrainte a considéré à juste titre qu’aucune mesure de substitution n’était propre à pallier le risque de passage à l’acte. Les mesures d’éloignement et d’interdiction de contact envisagées semblent difficiles à respecter. Elles ne dépendent que de la bonne volonté du recourant, qui a d’ores et déjà déclaré qu’il ne pouvait pas s’engager à les respecter, sa parole ne valant rien selon lui (PV aud. 4, ll. 156-164). Du reste, celui-ci a été précédemment dans l’incapacité de respecter l’interdiction de périmètre qui lui avait été signifiée et les mises en garde de la police et du Ministère public, notamment, ne l’ont pas empêché de réitérer. Quant aux obligations de soins évoquées, dont le suivi dépend une nouvelle fois que du recourant, les conditions pour les ordonner font défaut. En effet, les troubles dont souffriraient le recourant ont été diagnostiqués par le médecin psychiatre qui le suit depuis mars 2024 mais n’ont pas fait l’objet d’une expertise, laquelle est précisément en cours. En outre, ce médecin considère que le recourant a besoin d’un réseau de soins pluridisciplinaire et que l’obligation de soins est vitale pour lui mais ne s’exprime pas sur le risque de passage à l’acte et les moyens d’y pallier. Seules les conclusions de l’expertise permettront de poser un diagnostic et d’analyser si une obligation de soins ambulatoires à titre de mesures de substitution est suffisante. Ainsi, il n’existe pour l’heure aucune autre mesure permettant d’atteindre le même but que la détention. Le principe de la proportionnalité est donc, de ce point de vue, respecté. En outre, la durée de la détention subie à ce jour est proportionnée aux charges qui pèsent sur le recourant et à la peine qui est susceptible d’être prononcée en cas de condamnation. Toutefois, il apparaît urgent que le recourant puisse bénéficier de soins adéquats, même en détention, notamment sous la forme d’un traitement et d’un suivi socio-psychologique. Il appartiendra également au Ministère public de recueillir au plus vite les conclusions de l’expertise, ne serait-ce qu’oralement ou de manière succincte, afin que des mesures de substitution puissent le cas échéant rapidement être mises en œuvre. 4. Il s’ensuit que le recours, manifestement mal fondé, doit être rejeté sans échange d'écritures (art. 390 al. 2 CPP) et l’ordonnance attaquée confirmée. Les frais de la procédure de recours sont fixés à 1’540 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; BLV 312.03.1]). Me Anne-Claire Boudry, défenseur d’office du recourant, a produit une liste d’opérations dans laquelle elle annonce avoir consacré 6 h 12 au mandat. Au vu de l’acte de recours déposé, qui reprend en partie les déterminations précédemment déposées, et de la nature de la cause, la durée annoncée de 5 heures pour la rédaction de celui-ci est excessive. C’est une durée totale de 4 heures d’activité nécessaire d’avocat qui sera retenue, au tarif horaire de 180 fr. (art. 2 al. 1 let. a et 3 al. 2 RAJ [règlement sur l'assistance judiciaire en matière civile du 7 décembre 2010 ; BLV 211.02.3] par renvoi de l'art. 26b TFIP). Le défraiement s’élève ainsi à 720 francs. S'y ajoutent 2 % pour les débours (art. 3bis al. 1 RAJ par renvoi de l'art. 26b TFIP), soit 14 fr. 40, et 8,1 % de TVA sur le tout, soit 59 fr. 50, de sorte que l'indemnité d'office est arrêtée au total à 794 fr. en chiffres arrondis. Les frais judiciaires et les frais imputables à la défense d’office seront mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). Le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée au défenseur d’office ne sera exigible du recourant que pour autant que sa situation financière le permette (art. 135 al. 4 CPP). Par ces motifs, la Chambre des recours pénale prononce : I. Le recours est rejeté. II. L’ordonnance du 4 septembre 2024 est confirmée. III. L’indemnité allouée à Me Anne-Claire Boudry, défenseur d’office d’V........., est fixée à 794 fr. (sept cent nonante-quatre francs). IV. Les frais d’arrêt, par 1’540 fr. (mille cinq cent quarante francs), ainsi que l’indemnité allouée à Me Anne-Claire Boudry, par 794 fr. (sept cent nonante-quatre francs), sont mis à la charge d’V.......... V. Le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée sous chiffre III ci-dessus ne sera exigible d’V......... que pour autant que sa situation financière le permette. VI. L’arrêt est exécutoire. Le président : Le greffier : Du Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : - Me Anne-Claire Boudry, avocate (pour V.........), - Ministère public central, et communiqué à : ‑ Mme la Présidente du Tribunal des mesures de contrainte, - M. le Procureur de l’arrondissement de Lausanne, par l’envoi de photocopies. Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral ; RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). Le greffier :