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PE.2021.0150

Datum
2021-11-19
Gericht
CDAP
Bereich
Schweiz

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			N° affaire: 
				PE.2021.0150
			
			
				Autorité:, Date décision: 
				CDAP, 19.11.2021
			  
			
				Juge: 
				STO
			
			
				Greffier: 
				MSA
			
			
				Publication (revue juridique): 
				  
			
			
				Ref. TF: 
				  
			  
			
				Nom des parties contenant:  
				A......... /Service de la population (SPOP), Ministère public de l'arrondissement de Lausanne
			
				
	
	
		
			 DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION  EXPULSION{DROIT PÉNAL}  DEVOIR DE COLLABORER  CRÉDIBILITÉ  PREUVE  DROIT D'ÊTRE ENTENDU  NATIONALITÉ  EXPERTISE  REPORT{DÉPLACEMENT}  PROCÉDURE SOMMAIRE 
			CP-66aCP-66dCst-29-2	
		
	


	
		
			
				Résumé contenant: 
				Recours d'un ressortissant étranger contre le refus du SPOP de reporter l'exécution de son expulsion pénale vers le Nigéria au motif qu'il serait originaire de Sierra Leone. Pas de violation du droit d'être entendu de l'intéressé en raison de l'absence de transmission du rapport d'analyse LINGUA (consid. 3). Il résulte des déclarations changeantes et contradictoires du recourant qu'aucune crédibilité ne peut être accordée à ses allégations passées et présentes qui ne visent qu'à induire les autorités en erreur. Pourtant soumis à l'obligation de collaborer à l'obtention de papiers d'identité et de documents de voyage valables, le recourant a systématiquement refusé d'assister le SPOP et le SEM dans ce cadre. Dans ces conditions, la nouvelle version de l'intéressé pour expliquer sa fuite de Sierra Leone paraît d'emblée peu vraisemblable. De plus, les seuls documents qu'il a produit, une fois les mesures d'instruction des autorités achevées et concluant à sa nationalité nigériane, ne sont pas des documents officiels de nature à établir sa nationalité sierra-léonaise. A l'inverse, l'analyse LINGUA et la reconnaissance par les autorités nigérianes que le recourant est un ressortissant nigérian suffisent à considérer que tel est bien le cas (consid. 4). Rejet du recours selon la procédure simplifiée de l'art. 82 LPA-VD et refus de l'assistance judiciaire.
			
		
	




	
		
		

TRIBUNAL CANTONAL COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC

 

Arrêt du 19 novembre 2021

Composition

M. Stéphane Parrone, président; MM. Emmanuel Vodoz et Guy Dutoit, assesseurs; M. Matthieu Sartoretti, greffier.

 

Recourant

 

A........., à ******** représenté par Me Tracy SALAMIN, avocate à Lausanne,

  

Autorité intimée

 

Service de la population (SPOP), à Lausanne,

  

Autorité concernée

 

Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, à Lausanne.

  

 

Objet

Exécution du renvoi

 

Recours A......... c/ décision du Service de la population (SPOP) du 13 septembre 2021 prononçant l'exécution de l'expulsion judiciaire du territoire suisse, refusant le report de l'expulsion et levant l'effet suspensif au recours

 

Vu les faits suivants:

A.                     A........., né en 1994 et dont la nationalité sierra-léonaise ou nigériane est débattue entre les parties (cf. consid. 4 ci-dessous), est entré en Suisse en 2015 et y a déposé une demande d'asile. Le formulaire y relatif complété et signé par le précité contient son identité, son ethnie, sa filiation, etc. Il mentionne en particulier Freetown, capitale de la Sierra Leone, comme lieu de naissance. Par décision du 9 juillet 2015, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) n'est pas entré en matière sur sa demande d'asile en raison de sa réadmission en Espagne. A......... n'a pas respecté l'obligation de quitter le territoire suisse et a séjourné illégalement dans notre pays depuis lors.

Le 17 janvier 2017, A......... a été condamné à 20 jours-amende à 30 fr. avec sursis et à une amende de 200 fr. pour séjour illégal.

Interpellé par la police le 8 février 2017, l'intéressé a notamment déclaré ce qui suit lors de son audition:

" Je suis né au Sierra Leone. J'ai une sœur mais je ne la connais pas. Ma mère a fui le pays avec elle quant j'étais enfant. Je n'ai pas connu mon père. J'ai grandi tout seul dans la rue. Je suis allé à l'école et j'ai terminé l'école secondaire. Après j'ai travaillé comme vendeur d'habits en rue. […] J'ai quitté le Sierra Leone pour ma sécurité. En effet, je suis chrétien mais la communauté dans laquelle je vivais est musulmane. Cela était dangereux. Je ne peux pas retourner là-bas, car je n'ai pas de famille et j'ai peur pour ma vie. […]"

B.                     Le 9 février 2017, A......... a été condamné à une peine privative de liberté de 60 jours et à une amende de 300 fr. pour séjour illégal et plusieurs infractions à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121). Les 17 novembre 2017 et 16 mai 2019, il a été condamné à 60 jours, respectivement 120 jours, de privation de liberté pour séjour illégal.

A la demande du Service de la population (SPOP), A......... a été auditionné par la police le 1er août 2017. A la question "Quand, où et comment êtes-vous entré en Suisse?", le précité a répondu ce qui suit:

" Né à Freetown/Sierra Leone, je suis le cadet de deux enfants. J'ai été élevé par ma maman. Je n'ai jamais connu mon papa. J'ai suivi l'école obligatoire jusqu'à 19 ans. Ensuite, durant deux ans, j'ai vendu des habits en rue à Freetown. Par la suite, j'ai travaillé dans la sécurité d'un hôtel, durant quelques mois. Sur ma place de travail, j'ai rencontré, durant l'été 2013, une personne à laquelle j'ai donné 30'000 Leones ce qui représente un peu plus d'un salaire mensuel. Il m'a expliqué qu'avec cet argent, il pouvait me faire venir en Europe sans me préciser le pays. Pour ce faire, j'ai quitté mon pays natal en fin 2013, en camion pour me rendre en Guinée Conakry puis en Algérie. […]. Ensuite, au bout de 4 tentatives, j'ai rejoint le Maroc à pieds. J'y suis resté environ une année. Comme ma situation n'était pas en règle, la communauté Musulmane m'est venu en aide. A fin 2015, j'ai quitté le Maroc en bateau pour me rendre en Espagne. J'ai payé 1'000 Euros. J'ai réuni cette somme grâce à la communauté. […]"

Lors d'une nouvelle audition par la police le 26 septembre 2019, A......... a indiqué ce qui suit:

" Je suis né à Freetown. J'ai une sœur. J'ai été élevé par ma maman. J'ai suivi ma scolarité en primaire et en secondaire. Par la suite, j'ai travaillé dans la sécurité dans les hôtels en Afrique. Pour vous répondre, j'ai quitté mon pays il y a plus de 10 ans. c'est ma mère qui m'a dit de le faire."

C.                     Le 2 juin 2020, A......... a été condamné par le Tribunal d'arrondissement de Lausanne à une peine privative de liberté de 15 mois pour diverses infractions à la LStup et à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20). Le tribunal a également prononcé son expulsion pour une durée de huit ans en vertu de l'art. 66a du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP; RS 311.0). Définitif et exécutoire depuis le 2 juin 2020, il résulte de ce jugement que A......... a déclaré être né à Freetown et avoir sombré dans la drogue à la mort de sa mère.

D.                     Le 20 juillet 2020, le SPOP a informé A......... qu'il serait expulsé à sa sortie de prison et l'enjoignait de faire le nécessaire pour obtenir des papiers d'identité et de voyage valables au moment de son départ de Suisse. Dans ce cadre, un entretien a eu lieu le 23 juillet 2020 afin de préparer son expulsion. Interrogé sur sa volonté de quitter la Suisse et de collaborer à la mise en œuvre de son expulsion, l'intéressé a indiqué être d'accord de se rendre en Espagne mais non pas en Sierra Leone où sa vie était menacée en raison d'une dispute qu'il aurait eue avec son oncle concernant l'héritage familial. Il ajoutait ne pas savoir s'il collaborerait avec des autorités étrangères en vue de son expulsion car il ne souhaitait pas que des ressortissants de son pays d'origine sachent qu'il se trouvait en Suisse. De même, il répondait "ne pas savoir" quelles démarches il entreprendrait pour obtenir les papiers d'identité et documents de voyage valables qui lui faisaient défaut. Après le refus de l'Espagne de réadmettre l'intéressé sur son territoire et dès lors qu'il était dépourvu de document d'identification, le SPOP a, le 27 juillet 2020, adressé une demande de soutien à l'exécution du renvoi qui a été acceptée par le SEM.

Partant, le SEM a par la suite procédé à une analyse LINGUA consistant en un entretien téléphonique avec A........., soumis à un expert afin de déterminer son origine. Le 4 mars 2021, le SEM a indiqué au SPOP que selon le résultat de cette analyse, le précité était "vraisemblablement d'origine nigériane". Sur cette base, A......... a été présenté aux autorités nigérianes le 24 mars 2021, qui l'ont reconnu comme l'un de leurs ressortissants.

Les autorités nigérianes ayant déclaré qu'elles établiraient un laissez-passer pour l'intéressé, le SPOP a, le 11 mai 2021, sollicité de la police cantonale qu'elle réserve un vol à destination de Lagos, au Nigéria, et organise le transfert de A......... jusqu'à l'aéroport.

E.                     Le 23 juin 2021, le SPOP a ordonné la détention administrative de A......... à compter de la date de sa libération, soit le 28 juin 2021. Sa détention a été confirmée par ordonnance du tribunal des mesures de contrainte du 29 juin 2021 à l'issue d'une audience au cours de laquelle A......... a notamment déclaré ce qui suit:

" […]

Q: Etes-vous d'accord de retourner dans votre pays d'origine?

R: J'ignorais que l'Espagne avait refusé ma réadmission. Je n'ai plus personne dans mon pays d'origine.

[…]

Q: Au vu des explications fournies par le SPOP, êtes-vous d'accord de prendre cet avion à destination de Lagos?

R: Lagos se trouve au Nigéria. Or, je viens de Sierra Leone.

[…]

Q: Avez-vous des documents prouvant votre nationalité?

R: J'ai un certificat de naissance. C'est la seule preuve que j'ai. Je ne l'ai pas remis au SPOP car ils ne me l'ont pas demandé. Le Nigéria reconnaît tout le monde. Je n'ai pas de passeport. Ce certificat est en possession de ma sœur, qui est au Sierra Leone."

La détention administrative de A......... a été régulièrement prolongée depuis lors.

F.                     Le 2 juillet 2021, le recourant a, par l'entremise de son conseil récemment constitué, sollicité du SPOP la suspension de son renvoi au motif qu'il était ressortissant de Sierra Leone et non du Nigéria, de sorte que le renvoi dans ce dernier pays ne devait pas être exécuté. Il produisait par ailleurs un certificat de naissance portant la mention "LATE [tardif] / DELAYED [différé]" attestant de la naissance de l'intéressé à Bo, chef-lieu de la province du Sud en Sierra Leone. Daté du 2 août 2019, ce document porte le sceau bien visible du "Chief Registrar", tandis qu'à l'emplacement réservé au sceau officiel ("Official Seal") se trouvent quelques rares traces d'encre difficilement décelables, qui ne forment pas un sceau reconnaissable. Dans son courrier, A......... a par ailleurs sollicité la consultation de l'entier du dossier du SPOP, y compris les documents relatifs à l'analyse LINGUA.

Par courrier du 6 juillet 2021, le SPOP a transmis le dossier de A......... à son conseil, ainsi que le laissez-passer des autorités nigérianes. Concernant l'analyse LINGUA, le SPOP a rappelé que les analyses étaient organisées par le SEM et que les rapports issus des auditions menées dans ce cadre n'étaient pas transmis à l'autorité d'exécution et ne figuraient par conséquent pas dans le dossier cantonal, ces pièces devant être sollicitées du SEM directement. Il en allait de même s'agissant de l'audition et de la reconnaissance du précité par les autorités nigérianes.

G.                     Le 7 juillet 2021, A......... a refusé d'embarquer à bord d'un vol à destination de Lagos.

H.                     Le 12 juillet 2021, le conseil de A......... a sollicité du SEM la consultation de l'entier du dossier de son client, soit en particulier les documents relatifs à l'analyse LINGUA et à son audition par les autorités nigérianes.

I.                       Le 21 juillet 2021, le SPOP a soumis le certificat de naissance de A......... au SEM et lui a demandé des informations quant aux motifs ayant conduit à la reconnaissance de sa nationalité nigériane.

Par courriel du 22 juillet 2021, le SEM a répondu que le certificat de naissance ne permettait pas d'établir la nationalité de l'intéressé dans la mesure où son authenticité n'était pas avérée. Le SEM ajoutait que lors de sa demande d'asile en 2015, l'intéressé n'avait déposé aucun document établissant sa prétendue nationalité et rappelait que l'analyse LINGUA avait révélé qu'il était peu probable qu'il soit originaire de Sierra Leone. De surcroît, les autorités nigérianes l'avaient effectivement reconnu. Enfin, la mention sur le laissez-passer, selon laquelle l'intéressé avait déclaré être ressortissant nigérian, était une formule type utilisée par les autorités nigérianes pour les personnes reconnues mais refusant de reconnaître leur nationalité nigériane.

J.                      Le 23 juillet 2021, A......... a fourni la preuve du versement du montant gagné en prison à B........., domiciliée à Freetown, ainsi qu'une copie du permis de conduire de cette dernière. Le 2 août 2021, il a produit la première page de l'édition du 23 juillet 2009 d'un journal sierra-léonais qui aurait été retrouvé dans les affaires de la mère du précité par son cousin et transmis par la sœur de A......... à son conseil en Suisse. En relation avec cette coupure de presse, l'intéressé indiquait pour la première fois qu'il aurait dû fuir son pays "pour échapper à un rituel [poro], manifestement brutal, auquel sa famille paternelle allait le contraindre à se soumettre".  

K.                     A la demande du SEM qui l'avait interpelé quant à l'authenticité du certificat de naissance, l'ambassade de Sierra Leone à Genève a, par courriel du 2 septembre 2021, indiqué qu'elle n'était pas en mesure de se prononcer à ce sujet, ce document devant en effet être préalablement authentifié par les autorités de Freetown et certifié par la section consulaire.

Par courriels du 6 septembre 2021, la spécialiste du SEM responsable de la Sierra Leone a informé le SPOP que ce pays délivrait plusieurs types de certificats de naissance, soit notamment les certificats tardifs ("LATE") ou différés ("Delayed"), de couleur verte, établis entre un mois et une année après la naissance pour les premiers et au-delà d'une année pour les seconds. Un document unique étant utilisé pour ces deux certificats, la mention "Late / Delayed" non pertinente devait être tracée sur le document au moment de son établissement. Or, aucune de ces mentions n'avait été tracée sur le document produit par A........., indice qu'il pouvait s'agir d'un certificat falsifié. La spécialiste ajoutait que ce document avait de sucroît été soumis à l'ambassade sierra-léonaise à Genève qui n'avait cependant pas pu certifier son authenticité.

L.                      Par décision du 13 septembre 2021, le SPOP a décidé que l'expulsion judiciaire de A......... serait exécutée vers le Nigéria et refusé son report, l'effet suspensif étant levé en cas de recours. En substance, le SPOP relevait que A......... avait fait l'objet d'une décision d'expulsion du territoire entrée en force et que les démarches effectuées par le SEM pour déterminer le pays d'origine de l'intéressé et obtenir les documents de voyage nécessaires à son expulsion avaient permis d'établir qu'il était nigérian. Partant, c'est bien vers ce pays que son expulsion, considérée comme licite par le SPOP, devait être effectuée sans délai.  

M.                    Par acte du 14 octobre 2021, A......... (ci-après: le recourant) a interjeté recours contre cette décision, concluant principalement à son annulation ainsi qu'au report de l'expulsion et, subsidiairement, au renvoi de la cause au SPOP (ci-après: l'autorité intimée) pour nouvelle décision dans le sens des considérants. A l'appui de son recours, A......... invoque une violation de son droit d'être entendu motif pris que les documents relatifs à l'analyse LINGUA et à son audition par les autorités nigérianes ne lui auraient pas été communiqués. Il reproche encore à l'autorité intimée d'avoir insuffisamment instruit la question de sa nationalité, d'avoir indûment reporté sur lui la charge de la preuve de son origine et d'avoir mal apprécié les éléments à sa disposition pour retenir qu'il était d'origine nigériane. A cet égard, il a encore produit une copie de la carte de vote de l'un de ses oncles que sa sœur a fait parvenir à son conseil en Suisse le 28 septembre 2021. Dès lors que son expulsion devrait, à le suivre, être exécutée vers la Sierra Leone, il se prévaut encore du caractère illicite d'un tel renvoi puisqu'il serait menacé de mort dans ce pays. Au titre des mesures d'instruction, le recourant sollicite son audition, ainsi que celle d'un tiers présenté comme son oncle et qui résiderait en Sierra Leone, la production par l'autorité intimée de tous les documents relatifs à l'analyse LINGUA d'octobre 2020, la mise en œuvre d'une nouvelle analyse LINGUA, ainsi que la mise en œuvre de toute mesure de nature à établir sa nationalité sierra-léonaise, soit notamment l'authentification de son certificat de naissance, des recherches dans les registres civils, etc. Enfin, l'intéressé a requis la restitution de l'effet suspensif.

N.                     Le 18 octobre 2021, le juge instructeur a restitué l'effet suspensif au recours à titre superprovisionnel et imparti à l'autorité intimée un délai pour déposer son mémoire de réponse. Les parties étaient par ailleurs informées que le tribunal se réservait, à ce stade, de statuer selon la procédure simplifiée de l'art. 82 de la loi du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; BLV 173.36).

O.                     Dans sa réponse du 26 octobre 2021, l'autorité intimée a conclu au rejet du recours et s'est opposée à la restitution de l'effet suspensif.

P.                     Il n'a pas été ordonnée de second échange d'écritures.

Q.                     Les arguments des parties seront repris ci-dessous dans la mesure utile.

 

Considérant en droit:

1.                      a) L'art. 3 al. 1 ch. 3ter de la loi du 18 décembre 2007 d'application dans le canton de Vaud de la législation fédérale sur les étrangers (LVLEI; BLV 142.11) dispose que le SPOP est compétent pour mettre en œuvre les décisions d'expulsion judiciaire, y compris statuer sur leur report.

En vertu de l'art. 92 al. 1 LPA-VD, le Tribunal cantonal connaît des recours contre les décisions et décisions sur recours rendues par les autorités administratives lorsque la loi ne prévoit aucune autre autorité pour en connaître. Il est ainsi compétent pour statuer sur les recours interjetés contre les décisions du SPOP en la matière (cf. ég. arrêts PE.2019.0422 du 15 janvier 2020 consid. 2 et PE.2020.0015 du 13 mars 2020 consid. 1a).

b) Déposé dans le délai légal par le destinataire de la décision attaquée, qui peut manifestement faire valoir un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, le recours respecte en outre les autres exigences de forme prévues par la loi. Il est partant recevable et il y a lieu d'entrer en matière sur le fond (art. 75, 79, 95 et 99 LPA-VD).

2.                      a) Si, comme déjà mentionné, le SPOP est l'autorité compétente pour exécuter les décisions d'expulsion, l'art. 71 LEI dispose que le Département fédéral de justice et police (DFJP) assiste quant à lui les cantons qui sont chargés d'exécuter l'expulsion au sens de l'art. 66a CP, notamment par la collaboration à l'obtention des documents de voyage (let. a), l'organisation du voyage de retour (let. b) et la coordination entre les cantons concernés et avec le DFAE (let. c). L'art. 1 de l'ordonnance du 11 août 1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers (OERE; RS 142.281) dispose que le SEM assiste les cantons dans le domaine de l'expulsion pénale notamment.

L'obtention de documents de voyage comprend en particulier l'établissement de l'identité de la personne et de sa nationalité par le SEM qui peut, à cet effet, mener des entretiens, présenter l'intéressé à la représentation de son pays d'origine et effectuer des analyses linguistiques ou textuelles; il doit ensuite communiquer le résultat de ses investigations au canton (art. 3 OERE). En cas d'expulsion, un entretien de départ doit être mené par l'autorité cantonale compétente pour lui expliquer en particulier la décision d'expulsion pénale, clarifier et documenter sa disposition à quitter la Suisse, l'avertir, si nécessaire, de l'existence de mesures de contraintes au sens des art. 73 à 78 LEI et l'informer de son obligation de coopérer à l'obtention de papiers d'identité ou de documents de voyages valables (art. 2a OERE; sur l'obligation de collaborer, cf. ég. art. 30 LPA-VD, ainsi que 89 et 90 LEI).

En application de la Directive sur la saisie et la modification des données personnelles dans SYMIC du SEM, dans sa version 2.0 du 1er juillet 2020 (ci-après: la directive), l'identité d'une personne, savoir notamment sa nationalité (ch. 2.1), est considérée comme établie si cette dernière est titulaire d'un document d'identité ou de voyage authentique et valable, délivré à son nom (ch. 2.1.1). En cas de doute sur l'identité d'une personne, diverses possibilités permettent de procéder à la détermination de son identité, comme des investigations auprès des services nationaux et des autorités étrangères et l'expertise LINGUA (ch. 3.7).

b) En l'espèce, l'autorité intimée s'est entretenue avec le recourant le 23 juillet 2021 en vue de son départ immédiat après sa libération. Le procès-verbal dressé à cette occasion révèle qu'après avoir été dûment informé des conséquences auxquelles il s'exposait en cas de défaut de collaboration, le recourant a indiqué "ne pas savoir" quelles démarches il entreprendrait pour obtenir des documents d'identité et de voyage valables. Il a ajouté qu'il "ne savait pas trop" s'il allait collaborer car il ne voulait pas que des ressortissants de son pays sachent qu'il était en Suisse. Dans ces conditions, le SPOP a sollicité l'aide du SEM afin d'établir son identité et d'obtenir les documents de voyage nécessaires. Contrairement à ce que soutient de manière incompréhensible le recourant, ce n'est pas "[p]our une raison que l'on ignore" qu'il a été soumis à une analyse LINGUA, mais bien en raison de son absence totale de collaboration en vue de son expulsion, singulièrement de l'établissement de son identité (sur ce point cf. ég. consid. 4b/bb ci-dessous). L'expert mandaté a conclu qu'il était vraisemblablement nigérian, appréciation confirmée par les autorités nigérianes auxquelles le recourant a par la suite été présenté. Au vu de ces éléments, la procédure a été menée conformément aux dispositions rappelées ci-dessus, ce que le recourant ne conteste pas. Ce dernier se plaint en revanche d'une violation de son droit d'être entendu et reproche à l'autorité intimée d'avoir arbitrairement apprécié les faits et moyens de preuve disponibles pour déterminer son pays d'origine.

3.                      a) Tout d'abord, le recourant voit une violation de son droit d'être entendu dans le refus du SEM de lui transmettre le rapport d'analyse LINGUA, ce qui le priverait en outre de la possibilité de vérifier la régularité de cette analyse. Ce droit aurait également été violé du fait que le dossier ne contiendrait aucun document relatif à la reconnaissance du recourant par les autorités nigérianes, exception faite d'un "Emergency Certificate" sans valeur. Dans la mesure où il considère par ailleurs que l'autorité intimée aurait insuffisamment établi les faits, le recourant requiert, au titre des mesures d'instruction complémentaires, son audition, celle d'un tiers présenté comme son oncle et domicilié en Sierra Leone, ainsi que l'authentification par les autorités sierra-léonaises de son certificat de naissance. Il sollicite également que des recherches soient entreprises auprès de ces dernières en vue de confirmer sa nationalité sierra-léonaise et qu'une nouvelle analyse LINGUA soit diligentée.

b) aa) Tel que garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération Suisse du 18 avril 1999 (Cst.; RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour chaque intéressé de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 137 II 266 consid. 3.2 et 137 IV 33 consid. 9.2). Le droit de faire administrer les preuves suppose notamment que le fait à prouver soit pertinent et que le moyen de preuve proposé soit apte et nécessaire à prouver ce fait; il ne comprend en revanche pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 et 130 II 425 consid. 2.1). L’autorité peut par conséquent mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves proposées, elle a acquis la certitude qu’elles ne pourraient pas l’amener à modifier sa décision (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1; 136 I 229 consid. 5.3 et 134 I 140 consid. 5.3).

Devant la cour de céans, la procédure est en principe écrite (art. 27 LPA-VD). Si les parties ont le droit d'être entendues avant toute décision les concernant (art. 33 al. 1 LPA-VD), elles n'ont en revanche pas un droit à être auditionnées par l'autorité (al. 2; cf. ég. ATF 130 II 425 consid. 2.1). Il leur est certes loisible de présenter des offres de preuve en ce sens (art. 34 LPA-VD), mais l'autorité n'est pas liée par celles-ci (art. 28 al. 2 LPA-VD). Il lui incombe d'examiner les allégués de fait et de droit et d'administrer les preuves requises, si ces moyens n'apparaissent pas d'emblée dénués de pertinence (art. 34 al. 3 LPA-VD). Ainsi, l'autorité peut mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.2.1 et les réf. cit.).

bb) En matière d'analyse LINGUA, l'autorité n'a pas à communiquer l'intégralité des documents à l'administré dont le droit d’être entendu est respecté si les points essentiels du rapport lui ont été communiqués sous forme résumée et qu'ils ont été informés du contenu essentiel (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral [TAF] E-1195/2019 du 25 mars 2021 consid. 2.3 et la référence citéee). En effet, la Commission de recours en matière d'asile (CRA) avait déjà considéré que le rapport de l'analyse LINGUA est confidentiel et ne peut en aucun cas être publié intégralement, afin d'éviter un effet d'apprentissage sur la base du questionnaire – par l'intéressé ou d'autres personnes étrangères avec lesquelles il serait en contact – et le risque d'identification des experts mandatés ou des interprètes (SEM, Manuel Asile et retour – Article B4 Le droit d'être entendu [ci-après: Article B4], état au 1er mars 2019, ch. 2.5.2.4 et SEM, Manuel Asile et retour – Article C8 LINGUA – Analyses de provenance [ci-après: Article C8], p. 3 et les références citées). L'intéressé a néanmoins le droit d'écouter l'enregistrement de l'entretien téléphonique auquel il a participé et sur lequel l'analyse LINGUA se base (Article C8, p. 4).

c) aa) En l'espèce, le recourant a sollicité et obtenu du SEM des documents relatifs à l'analyse LINGUA (pièces 15 à 19, 23 et 24 de son chargé), mais pas le rapport y relatif. Pour les motifs exposés ci-dessus, ce document n'avait cependant pas à lui être communiqué, étant par ailleurs relevé qu'un résumé de ce rapport par le SEM se trouve au dossier du SPOP – courrier du SEM au SPOP du 16 août 2021 – que le recourant a pu consulter. Il ressort en effet de ce document qu'il "n'a pas été en mesure de démontrer des connaissances significatives concernant la Sierra Leone et que sa manière de parler l'anglais s'apparente à l'anglais parlé au Nigeria et non à celui parlé en Sierra Leone." En outre et alors qu'il savait que l'écoute de son enregistrement LINGUA était possible (cf. pièce 15 de son chargé), le recourant n'a pas jugé utile de la requérir. Il résulte de ces éléments que le recourant ne saurait présentement soutenir, abstraitement et sur la base de critiques générales émises à l'endroit des analyses LINGUA, que son droit d'être entendu aurait été violé dans ce cadre. Le comportement du recourant démontre en réalité que le procédé est dilatoire: alors qu'il n'a ni contesté la procédure d'analyse au moment où elle a eu lieu et n'a de surcroît pas sollicité la consultation de son enregistrement au moment où il a su qu'il pouvait le faire, le recourant invoque subitement, soit au stade de son expulsion sous la contrainte, une violation de son droit d'être entendu à cet égard. Contraires à la bonne foi et dénués de substance, les critiques émises à l'encontre de l'analyse LINGUA ne permettent pas de remettre en cause sa régularité, ni sa validité. Pour les mêmes motifs, il n'y a pas lieu de procéder à une seconde analyse, comme le souhaiterait le recourant.

bb) Par ailleurs, le recourant a été présenté, à Berne, aux membres de l'ambassade du Nigéria le 24 mars 2021. C'est à cette occasion qu'ils l'ont reconnu comme étant l'un de leurs ressortissants, ce qui a été formalisé par la délivrance d'un laissez-passer. Dans la mesure où le recourant a participé à la rencontre du 24 mars 2021 et qu'il a reçu copie du laissez-passer, le tribunal ne discerne pas et l'intéressé n'explique pas en quoi son droit d'être entendu aurait été violé. Le simple fait qu'il soit en désaccord avec cette reconnaissance n'emporte pas une violation de son droit d'être entendu, mais implique uniquement que sa version des faits et les moyens de preuve présentés au soutien de son argumentation soient appréciés au moment de statuer sur sa nationalité (cf. consid. 4c ci-dessous).

cc) Pour le reste, la procédure est en principe écrite. Le recourant a eu l'occasion de faire valoir son point de vue de manière détaillée, de sorte qu'il n'y a aucune raison de l'entendre personnellement. L'audition de son prétendu oncle, outre qu'elle s'avérerait excessivement complexe et retarderait de beaucoup la procédure puisqu'il séjournerait en Sierra Leone selon les informations du recourant, n'apparaît quoi qu'il en soit pas pertinente pour établir la nationalité du recourant. Cette appréciation est encore confortée par le fait que le recourant ne prend même pas la peine d'exposer en quoi ces deux auditions, savoir les déclarations orales du principal intéressé et d'un tiers, seraient de nature à remettre en question les autres moyens de preuve sur la base desquels l'autorité intimée a déterminé son pays d'origine. Ces requêtes sont ainsi rejetées.

dd) S'agissant du certificat de naissance, son authentification par les autorités sierra-léonaises serait également superflu. Comme l'ont pertinemment mentionné les autorités intimée et concernée, même à supposer qu'il soit authentique – ce qui est loin d'être acquis –, il ne s'agirait pas d'un document propre à établir son identité et son origine en l'absence de photographie, contrairement à des documents d'identité (sur ces points, cf. consid. 4c ci-dessous).

ee) Enfin, il n'y a pas lieu d'entreprendre d'autres démarches supplémentaires puisque, eu égard à l'absence totale de collaboration du recourant, aux éléments recueillis par les autorités et aux différentes pièces au dossier, le SPOP – et le tribunal de céans à sa suite – disposait de suffisamment d'éléments pour trancher la question de la nationalité de l'intéressé en connaissance de cause (sur cette question, cf. consid. 4 ci-dessous).

d) A l'aune des considérants qui précèdent, les griefs sont rejetés et il ne sera pas donné suite aux diverses mesures d'instruction requises.  

4.                      a) Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir sombré dans l'arbitraire en retenant qu'il serait de nationalité nigériane et non sierra-léonaise sur la base des pièces au dossier. L'analyse LINGUA effectuée serait douteuse car elle aurait conclu qu'il serait "vraisemblablement d'origine nigériane", serait fondée sur un entretien téléphonique consistant en quelques questions sommaires et que, de manière plus générale, la méthodologie de ces analyses serait sujette à caution. La reconnaissance des autorités nigérianes ne serait pas plus crédible dès lors qu'elle ne serait fondée que sur un laissez-passer dont le contenu serait inexact, étant rappelé que le SEM a reconnu que certaines indications qu'il comporte sont de simples mentions standard utilisées par les autorités nigérianes lorsque l'intéressé réfute précisément être ressortissant nigérian. En outre, l'autorité intimée aurait à tort omis de prendre en considération le certificat de naissance fourni par le recourant et aurait interprété de manière erronée les déclarations de l'ambassade nigériane à Genève. Cette dernière n'aurait en effet pas déclaré que ce certificat n'aurait aucune valeur, mais qu'il était nécessaire, pour qu'elle puisse en certifier l'authenticité, qu'il soit préalablement soumis aux autorités de Freetown. A défaut, l'autorité intimée n'aurait pas été habilitée à retenir que ce certificat aurait été falsifié. Par ailleurs, les autorités suisses et espagnoles auraient, au cours des diverses procédures précédentes, constamment et de manière récurrente considéré le recourant comme étant de nationalité sierra-léonaise, de sorte qu'il n'y aurait aucune raison d'en douter aujourd'hui. Ce d'autant moins que l'article de journal versé à la procédure et relatant les raisons de la fuite du recourant de Sierra Leone attesterait de sa nationalité, de même que le versement à une personne résidant dans ce pays du pécule accumulé par l'intéressé durant son emprisonnement. La copie de la carte de vote sierra-léonaise de son oncle plaiderait également en faveur de sa nationalité sierra-léonaise.

b) aa) D'emblée, il ressort manifestement des pièces au dossier que le recourant a – opportunément – varié dans ses déclarations au gré des circonstances et des procédures engagées contre lui.

Ainsi a-t-il notamment déclaré par écrit, en 2015, être né à Freetown en Sierra Leone et indiqué lors de son audition en février 2017 n'avoir pas connu son père, avoir grandi seul dans la rue, suite au départ de sa mère et de sa sœur. Il ajoutait n'avoir pas connu cette dernière. Il aurait par la suite travaillé comme vendeur d'habits avant de quitter la Sierra Leone pour des raisons de sécurité liée à sa religion chrétienne et n'avoir plus de famille dans ce pays. En août 2017, il déclarait en revanche avoir été élevé par sa mère, n'avoir pas connu son père et avoir vendu des habits dans la rue après avoir terminé l'école obligatoire à 19 ans, soit en 2011. Ce n'est qu'alors qu'il travaillait comme agent de sécurité d'un hôtel, en 2013, qu'il aurait rencontré un passeur qui lui aurait offert de le conduire en Europe pour 30'000 Leones. Lors de son voyage, la communauté musulmane l'aurait aidé, alors qu'il affirmait initialement la craindre puisqu'il était lui-même chrétien. En septembre 2019, il confirmait être né à Freetown et avoir quitté son pays sur les conseils de sa mère, tandis qu'en juillet 2020, il soutenait avoir quitté son pays en 2009 suite à une dispute avec son oncle au sujet de l'héritage de son père, alors qu'il avait précédemment indiqué n'avoir pas connu ce dernier et avoir achevé son école obligatoire en 2011. Dans la présente procédure, le recourant prétend désormais être né à Bo et non plus à Freetown, en Sierra Leone, avoir dû fuir le pays suite aux blessures infligées à son oncle qui souhaitait le soumettre à un rite poro après le décès de son père, de sorte que sa vie aurait été et serait toujours menacée dans ce pays.

Il résulte de ce qui précède qu'aucune crédibilité ne peut être accordée aux déclarations passées et présentes du recourant qui, changeantes et contradictoires, ne visent qu'à induire les autorités en erreur afin de lui permettre de demeurer en Suisse malgré l'illégalité de son séjour et la décision d'expulsion entrée en force.

bb) De plus et contrairement à ce qu'il soutient, le recourant était et demeure soumis à l'obligation de collaborer à l'obtention de papiers d'identité, singulièrement à l'établissement de sa nationalité, ou de documents de voyages valables (art. 30 LPA-VD, 89 et 90 LEI et 2a OERE). Si, comme il le soutient, la charge de l'instruction, respectivement de la preuve, repose certes sur l'autorité intimée en la matière, cela ne signifie pas qu'il serait pour sa part exempté de lui apporter son concours. L'obligation de collaborer n'est en effet pas nécessairement liée à la répartition du fardeau de la preuve (cf. Clémence Grisel, L'obligation de collaborer des parties en procédure administrative, thèse Fribourg, Zurich/Bâle/Genève 2008, n. 281). Or, faute de collaboration de l'intéressé, des mesures de contrainte peuvent non seulement être mises en œuvre (art. 2a al. 4 let. d OERE), mais l'autorité intimée est également en mesure de statuer en l'état du dossier (art. 30 al. 2 LPA-VD). Cela signifie en particulier que, dans l'appréciation des preuves, l'autorité tiendra compte de l'attitude de la partie et en particulier de son refus de collaborer, ce qui entraîne trois conséquences: premièrement, la partie qui n'a pas collaboré dans la mesure exigible ne doit pas profiter de ce manquement; deuxièmement, l'autorité peut tenir compte du comportement de l'administré en relation avec le degré de la preuve, de sorte que l'autorité peut accorder une force probante plus importante, ou au contraire plus faible, à certains moyens de preuve; troisièmement, l'administré qui n'a pas collaboré risque de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuve (cf. Clémence Grisel, op. cit., n. 797 à 804). En matière d'asile, par exemple, si le défaut de collaboration n'est pas suffisant pour justifier la non-entrée en matière, le fait de montrer un désintérêt, de collaborer de manière tardive ou déficiente est généralement considéré comme un indice d'invraisemblance (cf. Clémence Grisel, op. cit., n. 799).

En l'occurrence, force est de constater que le recourant a systématiquement refusé de collaborer avec les autorités. Il s'est en effet soustrait à son renvoi suite à la non-entrée en matière sur sa demande d'asile en 2015. Il a refusé de collaborer à l'établissement de son identité, singulièrement de sa nationalité, ainsi qu'à l'obtention de documents de voyage en vue de son expulsion depuis juillet 2020. Il a enfin refusé d'embarquer à destination de Lagos le 7 juillet 2021. Lorsque l'autorité intimée s'est entretenue avec le recourant le 23 juillet 2021 en vue de son départ immédiat après sa libération, l'intéressé a indiqué, après avoir été dûment informé des conséquences auxquelles il s'exposait en cas de défaut de collaboration, "ne pas savoir" quelles démarches il entreprendrait pour obtenir des documents d'identité et de voyage valables. Il a ajouté qu'il "ne savait pas trop" s'il allait collaborer car il ne voulait pas que des ressortissants de son pays sachent qu'il était en Suisse. Ce n'est finalement qu'à l'issue de la procédure d'instruction, que le recourant a produit quelques pièces pour prouver sa nationalité et tenter de remettre ainsi en cause les fruits du travail de l'autorité intimée. Or, sa collaboration poursuit un but purement dilatoire, savoir empêcher son expulsion par vol spécial, et n'est que de façade. Les pièces fournies – copie d'un article de journal, copie d'une carte de vote et preuve d'un versement en mains d'une personne séjournant en Sierra Leone – ne sont pas des documents officiels et n'émanent pas d'autorités, de sorte que ce sont tout au plus des indices qui doivent être appréciés au regard de l'ensemble du dossier. Quant à l'extrait de naissance dont le recourant fait grand cas, il est daté d'août 2019 mais n'a été produit qu'un an plus tard environ et, surtout, ne constitue pas un document d'identité. De surcroît, si l'intéressé avait réellement souhaité collaborer, il aurait eu le temps de requérir, depuis l'entrée en force de la décision d'expulsion, des documents d'identité ou de voyage en sollicitant, au besoin, l'aide de l'autorité intimée, de sa sœur ou de son oncle, ces derniers étant prétendument domiciliés en Sierra Leone. En définitive, l'absence de collaboration du recourant et la production de documents qui, per se, ne sont pas de nature à établir sa nationalité mais constituent tout au plus de vagues indices à cet égard, qui plus est à l'issue de l'instruction menée par l'autorité intimée, penchent plutôt en faveur de l'invraisemblance de la nouvelle version des faits exposée dans le mémoire de recours.

c) aa) Concernant l'appréciation proprement dite des pièces au dossier, il n'y a pas lieu de s'écarter de celle retenue par l'autorité intimée. En effet, les documents produits par le recourant n'ont pas la force probante qu'il leur attribue pour sa part dans la démonstration de sa prétendue nationalité sierra-léonaise.

A cet égard, l'authenticité de l'article de journal dont se prévaut le recourant n'est, sur la base de la copie de piètre qualité fournie, pas avérée et la comparaison de la photographie de l'article avec celles figurant au dossier ne permet pas de conclure qu'il serait effectivement le sujet de cet article. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle version de la fuite du recourant est contraire à nombre de ses précédentes déclarations car elle implique notamment qu'il serait né et aurait grandi à Bo et pas à Freetown, qu'il se serait disputé avec son oncle en raison de sa volonté de le soumettre à un rituel poro et non pour des querelles d'héritage, qu'il aurait fui le pays après avoir blessé son oncle mais pas car il était menacé pour des motifs religieux. S'y ajoute le fait que l'intéressé aurait prétendument fui la Sierra Leone après avoir réussi à se libérer de l'emprise de son oncle, faits qui se seraient déroulés en 2009, lors même qu'il avait auparavant indiqué avoir achevé sa scolarité obligatoire dans son pays d'origine en 2011 ou encore qu'il avait quitté la Sierra Leone en 2013 après avoir rencontré un passeur. L'article de presse est enfin opportunément apparu au moment où il était question pour le recourant de reporter son expulsion par la contrainte vers le Nigéria.

S'agissant du versement du pécule économisé en prison par le recourant en mains d'une personne vivant en Sierra Leone, il est certes de nature à démontrer qu'il dispose à tout le moins d'un contact dans ce pays mais n'atteste pas, loin s'en faut, qu'il en serait lui-même ressortissant. Il en va de même de la copie de la carte de vote d'un prénommé C........., dont le recourant prétend qu'il s'agirait de son oncle, sans apporter du reste aucun élément à l'appui de leur lien de parenté.

Quant au certificat de naissance produit, il ne s'agit pas d'une pièce d'identité, soit un document officiel comportant une photographie délivrée dans le but de prouver l'identité du détenteur, ou d'un document de voyage, soit un document officiel autorisant l'entrée dans l'état valable au sens de l'art. 1a de l'ordonnance du 11 août 1999 sur l'asile relative à la procédure (OA 1; RS 142.311). La mention erronée, "LATE [tardif]" ou "DELAYED [différé]" n'a de surcroît pas été biffée sur ce document qui date de 2019 et que le recourant a caché depuis lors. Il ne porte enfin pas de sceau officiel ("Official Seal") reconnaissable. Sur la base de ces constatations, c'est à bon droit que l'autorité intimée a considéré que ce document n'avait aucune valeur probante.

bb) A l'inverse, l'analyse LINGUA a révélé que le recourant était vraisemblablement originaire du Nigéria puisqu'il n'avait pas de connaissances significatives concernant la Sierra Leone et que sa manière de parler l'anglais s'apparentait à celle parlée au Nigéria et non en Sierra Leone. Contrairement à ce que soutient le recourant, le fait que le rapport arrive à la conclusion que l'intéressé est "vraisemblablement" nigérian ne remet pas en cause son bien-fondé. Les rapports LINGUA comportent en effet deux catégories de résultats, soit ceux sans équivoque s'il n'y a aucun doute quant à l'origine, ou ceux très vraisemblables lorsqu'une majorité d'élément confirme une région ou une socialisation (cf. Article C8, pp. 7 et 8). Surtout, ce résultat a été confirmé par les autorités nigérianes qui ont reconnu l'intéressé comme l'un de leurs compatriotes malgré les dénégations de l'intéressé.

cc) A l'aune de ce qui précède, l'autorité intimée pouvait légitimement et sans violer le droit d'être entendu du recourant, conclure qu'il était originaire du Nigéria, ordonner son renvoi dans ce pays et refuser la demande de report au sens de l'art. 66d CP, fondée sur le seul argument qu'il serait originaire de Sierra Leone.

5.                      La décision entreprise doit par conséquent être confirmée. Manifestement dénué de chances de succès et purement dilatoire, le recours est traité selon la procédure simplifiée de l'art. 82 LPA-VD, sans un double échange d'écritures, sur la base du dossier produit par l’autorité intimée, des pièces produites par le recourant et au bénéfice d'une motivation sommaire.

Le sort de la procédure était d'emblée prévisible, de sorte que la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 18 al. 1 LPA-VD a contrario). Vu les circonstances de l'affaire, il sera toutefois renoncé à la perception d'un émolument judiciaire (art. 50, 91 et 99 LPA-VD). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 55, 91 et 99 LPA-VD).

 

Par ces motifs la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal arrête:

I.                       Le recours est rejeté.

II.                      La décision du Service de la population du 13 septembre 2021 est confirmée.

III.                    La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

IV.                    Le présent arrêt est rendu sans frais ni dépens.

Lausanne, le 19 novembre 2021

 

Le président:                                                                                            Le greffier:          

                                                                                                                 

Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint.

Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral (Tribunal fédéral suisse, 1000 Lausanne 14). Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.