Omnilex

Jug / 2022 / 423

Datum
2022-11-20
Gericht
Cour d'appel pénale
Bereich
Schweiz

Omnilex ist das KI-Tool für Juristen in Schweiz

Wir indexieren und machen Entscheidungen zugänglicher

Zum Beispiel können Sie Omnilex verwenden für:


TRIBUNAL CANTONAL 194 PE20.006421-MMR/VBA COUR D’APPEL PENALE .............................. Audience du 21 novembre 2022 .................. Composition : Mme Kühnlein, présidente M. Pellet et Mme Rouleau, juges Greffier : M. Jaunin ***** Parties à la présente cause : W........., prévenu et appelant, et MINISTERE PUBLIC, intimé, représenté par la Procureure de l’arrondissement de Lausanne, S........., partie plaignante, représenté par Me Fabien Mingard, avocat de choix à Lausanne, intimé. La Cour d’appel pénale considère : En fait : A. Par jugement du 26 novembre 2021, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré W......... du chef d’inculpation de désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel (I), a constaté qu’il s’est rendu coupable d’injure, de menaces et de discrimination raciale (II), l’a condamné à une peine privative de liberté de 90 jours, peine complémentaire à celles prononcées les 7 janvier 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, 19 février 2020 par le Ministère public cantonal Strada et 17 avril 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois (III), a ordonné le maintien au dossier du DVD contenant des images de vidéosurveillance du [...] enregistré sous forme de pièce à conviction sous fiche n° 28338 (IV), a renvoyé S......... à agir par la voie civile (V), a dit qu’W......... doit verser à S......... la somme de 1’700 fr. TTC à titre de dépens pénaux (VI) et a mis l’entier des frais de la cause, arrêtés à 3'221 fr. 55, à la charge du condamné (VII). B. Par annonce du 7 décembre 2021, puis déclaration motivée du 26 janvier 2022, W......... a interjeté appel contre ce jugement, en concluant à son acquittement. Par courriers respectifs des 17 février et 4 mars 2022, le Ministère public et S......... ont indiqué qu’ils n’entendaient ni présenter une demande de non-entrée matière ni déclarer un appel joint. Par courrier du 19 octobre 2022, le Ministère public a renoncé à déposer des conclusions. C. Les faits retenus sont les suivants : 1. 1.1 Originaire d’Algérie, W......... est né le 25 septembre 1972 à Alger, en Algérie. Arrivé en Suisse en 1994, il s’est installé à Lausanne en 2014. Il n’a jamais déposé de demande d’asile et n’est pas titulaire d’une autorisation de séjour. Il est logé par l’EVAM et bénéficie de l’aide d’urgence depuis 2018. Il perçoit 9 fr. 50 par jour pour ses besoins personnels. Il n’a ni dettes ni fortune. 1.2 Le casier judiciaire d’W........., lequel est connu sous plusieurs alias ([...], [...], [...] et [...]), comporte les inscriptions suivantes : - 16.12.2014, Ministère public cantonal Strada : 120 jours de peine privative de liberté pour tentative de vol, recel et séjour illégal ; - 22.01.2015, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne :20 jours-amende à 20 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans, pour tentative de vol et dommages à la propriété ; - 31.03.2015, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne : 180 jours de peine privative de liberté pour vol, tentative de vol, dommages à la propriété, tentative de violation de domicile, opposition aux actes de l’autorité et séjour illégal ; - 16.06.2015, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne : 100 jours de peine privative de liberté pour recel et séjour illégal ; - 26.08.2015, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne : 120 jours de peine privative de liberté pour vol, tentative de vol, dommages à la propriété et séjour illégal ; - 09.04.2017, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois : 170 jours de peine privative de liberté et 10 jours-amende à 30 fr. le jour pour injure, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et séjour illégal ; - 24.07.2017, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne : 120 jours de peine privative de liberté et amende de 400 fr. pour vol, tentative de vol, dommages à la propriété, séjour illégal et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants ; - 15.12.2017, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne : 80 jours de peine privative de liberté et amende de 300 fr. pour vol, recel, séjour illégal et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants ; - 20.02.2019, Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois : 100 jours de peine privative de liberté pour vol et séjour illégal ; - 07.01.2020, Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois : 120 jours de peine privative de liberté et amende de 600 fr. pour voies de fait, vol d’importance mineure et séjour illégal ; - 19.02.2020, Ministère public cantonal Strada : 60 jours de peine privative de liberté pour vol, utilisation frauduleuse d’un ordinateur et séjour illégal ; - 17.04.2020, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois : 45 jours de peine privative de liberté pour tentative de vol. 2. 2.1 A [...], [...], le 22 août 2019 vers 02h00, W........., qui était accompagné de P........., a traité S........., agent de sécurité au [...], de « sale noir » et lui a déclaré « suce ma bite » avant, de concert avec P........., de le menacer de mort en lui disant « on va niquer ta race ce soir » et « on va revenir et on va te faire ta peau ce soir ». S......... a déposé plainte le 8 novembre 2019. 2.2 A [...], [...], le 29 août 2019 vers 23h30, W......... a à nouveau traité S......... de « sale noir » et l’a menacé de mort en lui disant « je vais te faire la peau, je ne vais pas t’oublier ». S......... a déposé plainte le 8 novembre 2019. En droit : 1. Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 et 400 al. 3 let. b CPP [code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0]) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel d’W......... est recevable. 2. Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour (a) violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) constatation incomplète ou erronée des faits et (c) inopportunité (al. 3). L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (TF 6B.481/2020 du 17 juillet 2020 consid. 1.2 et les références citées). 3. W........., qui admet avoir été présent au [...] aux dates indiquées, conteste avoir insulté et menacé de mort S.......... En substance, il estime que les faits ne sont pas établis. Il relève également que les images de la vidéosurveillance de l’établissement ne montrent pas qu’il aurait touché le plaignant ou eu des gestes invoquant des menaces à son encontre. 3.1 Selon l'art. 10 CPP, le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu, lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation (al. 3). La présomption d’innocence, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 précité ; TF 6B.47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1). Comme règle d’appréciation des preuves, elle signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l’appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe in dubio pro reo, celui-ci n’a pas de portée plus large que l’interdiction de l’arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 et les références citées ; ATF 144 IV 345 précité consid. 2.2.3.3 ; ATF 143 IV 500 consid. 1.1). L'appréciation des preuves est l’acte par lequel le juge du fond évalue librement la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. Elle est dite libre, car le juge peut par exemple attribuer plus de crédit à un témoin, même prévenu dans la même affaire, dont la déclaration va dans un sens, qu’à plusieurs témoins soutenant la thèse inverse. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices ; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Verniory, in : Jeanneret/Kuhn/Perrier Depeursinge, [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 34 ad art. 10 CPP). 3.2 S’agissant des faits du 22 août 2019, W......... a déclaré, en première instance, qu’il n’avait pas tenté de discuter avec l’agent de sécurité et qu’il s’était mis « dans un coin plus loin » (cf. jgt. 6). Or, cette version est démentie par les images de la vidéosurveillance. Certes, celles-ci sont muettes, mais on y voit clairement l’appelant prendre à partie le plaignant après s’être vu refuser l’entrée de l’établissement. On constatera par ailleurs qu’en cours d’instruction, l’appelant a fourni des explications variables et confuses, admettant tantôt qu’il y avait eu une « une dispute avec le noir de la sécurité » (PV audition 1, R. 5), tantôt qu’il n’avait rien fait, qu’il n’y avait pas de preuve ni de témoin et que le plaignant était un menteur (PV audition 4, ll. 28 ss). De son côté, S......... a fait des déclarations constantes et précises, lesquelles correspondent à ce que l’on peut constater sur les images de la vidéosurveillance. Aucun élément ne permet de douter de sa crédibilité, ce d’autant plus qu’il n’a pas cherché à charger l’appelant puisqu’il a indiqué ne pas avoir été menacé au moyen du sabre détenu par son comparse, P......... (PV audition 2, R. 6). Par ailleurs, on ne voit pas pour quelles raisons il aurait menti, comme le soutient l’appelant, ce dernier ne fournissant au demeurant aucune explication à ce sujet. En ce qui concerne l’incident du 29 août 2019, B........., directeur de l’établissement où travaille S........., a décrit précisément les évènements, et notamment les propos tenus par l’appelant, dans une version qui concorde en tout point avec celle du plaignant (PV audition 4, R. 5). Il a en outre attesté que son employé avait été affecté car, les deux semaines suivantes, il avait travaillé avec un gilet pare-balles (ibidem, in fine). Pour le surplus, les dénégations de l’appelant, au demeurant évolutives puisqu’il a commencé par nier s’être énervé (PV audition 4, p. 2) alors qu’il reconnait dans son appel que son comportement a pu effrayer le plaignant, sont dénuées de crédibilité. Par ailleurs, ce ne sont pas des gestes qui lui sont reprochés, mais bien des paroles, si bien que son argumentaire tombe à faux. En conséquent, il faut retenir, à l’instar du Tribunal de police, que les faits se sont déroulés comme décrits dans l’acte d’accusation du 15 juin 2021, de sorte que la condamnation d’W......... pour injure, menaces et discrimination raciale doit être confirmée, les qualifications juridiques n’étant pas contestées. 4. W......... ne conteste pas, à titre subsidiaire, la quotité de la peine. Celle-ci doit toutefois être vérifiée d’office. Compte tenu de sa situation personnelle, l’appelant étant multirécidiviste et dénué de toutes ressources financières licites, c’est une peine privative de liberté qui doit être préférée à une peine pécuniaire (cf. art. 41 al. 1 CP). Cela étant, la quotité prononcée par le premier juge, soit 90 jours, est adéquate et peut être approuvée par adoption de motifs (art. 82 al. 4 CPP ; jugement, p. 12). En effet, elle tient compte, à juste titre, du concours d’infractions et d’une culpabilité qualifiée de non-négligeable, l’appelant ayant adopté, par deux fois, une attitude méprisante, injurieuse et menaçante à l’égard d’un agent de sécurité, qui ne faisait que son travail. En outre, à aucun moment, il n’a remis en question son comportement, si ce n’est à l’occasion des maigres excuses, peu convaincantes, qu’il a formulées dans sa déclaration d’appel, mais qu’il n’a toutefois pas renouvelé lors des débats. Enfin, la condition subjective du sursis n’est à l’évidence pas réalisée compte tenu de ses nombreux antécédents et de son absence totale d’amendement et d’introspection. La peine est partiellement complémentaire à celles prononcées les 7 janvier 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, 19 février 2020 par le Ministère public cantonal Strada et 17 avril 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois. 5. Au vu de ce qui précède, l’appel doit être rejeté et le jugement entrepris confirmé. Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d’appel, constitués des émoluments de jugement et d’audience, par 1’280 fr. (art. 21 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; BLV 312.03.1]), seront mis à la charge d’W........., qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). Par ces motifs, la Cour d’appel pénale, statuant en application des les art. 40, 47, 49 al. 1 et 2, 50, 177 al. 1, 180 al. 1 et 261bis al. 4 CP ; 398 ss CPP, prononce : I. L’appel d’W......... est rejeté. II. Le jugement rendu le 26 novembre 2021 par le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne est confirmé selon le dispositif suivant : « I. libère W......... du chef d’inculpation de désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel ; II. constate qu’W......... s’est rendu coupable d’injure, menaces et discrimination raciale ; III. condamne W......... à 90 (nonante) jours de peine privative de liberté, peine complémentaire à celles prononcées les 7 janvier 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, 19 février 2020 par le Ministère public cantonal Strada et 17 avril 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois ; IV. ordonne le maintien au dossier du DVD contenant des images de vidéosurveillance du [...] enregistré sous forme de pièce à conviction sous fiche n° 28338 ; V. renvoie S......... à agir par la voie civile ; VI. dit que W......... doit verser à S......... la somme de 1’700 fr. TTC à titre de dépens pénaux ; VII. met l’entier des frais de la cause, arrêtés à 3'221 fr. 55, à la charge d’W.......... » III. Les frais d’appel, par 1’280 fr., sont mis à la charge d’W.......... IV. Le présent jugement est exécutoire. La présidente : Le greffier : Du Le jugement qui précède, dont le dispositif a été communiqué par écrit aux intéressés le 22 novembre 2022, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à : - M. W........., - Me Fabien Mingard, avocat (pour S.........), - Ministère public central, et communiqué à : ‑ Mme la Présidente du Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne, - Mme la Procureure de l’arrondissement de Lausanne, - Office d’exécution des peines, - Service de la population, par l'envoi de photocopies. Le présent jugement peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF). Le greffier :