Schweiz
Aktuelles Land
Schweiz

Filter

Datumsbereich

Omnilex

Jug / 2020 / 90

Datum:
2020-02-26
Gericht:
Cour d'appel pénale
Bereich:
Schweiz

Omnilex ist das KI-Tool fĂŒr Juristen in Schweiz

Wir indexieren und machen Entscheidungen zugÀnglicher

Zum Beispiel können Sie Omnilex verwenden fĂŒr:

  • Erstellen Sie eine prĂ€gnante Zusammenfassung von Jug / 2020 / 90
  • Listen Sie die Überlegungen zu Jug / 2020 / 90
  • Finden Sie Ă€hnliche FĂ€lle zu Jug / 2020 / 90
  • Und vieles mehr...

TRIBUNAL CANTONAL 50 PE18.003555-PCL COUR D’APPEL PENALE .............................. Audience du 27 fĂ©vrier 2020 .................. Composition : M. P E L L E T, prĂ©sident Mme Rouleau et M. Stoudmann, juges Greffier : M. Ritter ***** Parties Ă  la prĂ©sente cause : J........., plaignante, reprĂ©sentĂ©e par Me Claire Neville, conseil d’office, appelante, et MINISTERE PUBLIC, reprĂ©sentĂ© par la Procureure de l’arrondissement de Lausanne, appelant, P........., prĂ©venu, reprĂ©sentĂ©e par Me Nicolas Blanc, dĂ©fenseur d’office, intimĂ©. La Cour d’appel pĂ©nale considĂšre : En fait : A. Par jugement du 30 octobre 2019, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libĂ©rĂ©, au bĂ©nĂ©fice du doute, P......... des chefs d’accusation d’actes d’ordre sexuel avec des enfants et de contrainte sexuelle (I), lui a allouĂ© une indemnitĂ© au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP d’un montant de 14'600 fr. (II), a fixĂ© l’indemnitĂ© d’office de Me Nicolas Blanc, dĂ©fenseur d’office de P........., dĂ©bours, vacations et TVA compris, Ă  15'498 fr. (III), a fixĂ© l’indemnitĂ© d’office de Me Claire Neville, conseil juridique gratuit de J........., dĂ©bours, vacations et TVA compris, Ă  19'401 fr. (IV) et a laissĂ© les frais de la cause, comprenant les indemnitĂ©s arrĂȘtĂ©es sous chiffres III et IV du dispositif, Ă  la charge de l’Etat (V). B. Par annonce du 6 novembre 2019 puis dĂ©claration du 26 novembre 2019, le MinistĂšre public a interjetĂ© appel contre ce jugement, concluant Ă  sa modification, en ce sens que P......... est condamnĂ©, pour actes d’ordre sexuel avec des enfants et contrainte sexuelle, Ă  une peine privative de libertĂ© de cinq ans, sous dĂ©duction de 73 jours de dĂ©tention avant jugement et de quatre jours Ă  titre de rĂ©paration morale pour dĂ©tention dans des conduisions illicites durant sept jours. Le MinistĂšre public a en outre conclu au rejet de la demande d’indemnitĂ© du prĂ©venu au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP et Ă  ce que les frais de la cause soient mis Ă  la charge de l’intimĂ© P........., Ă©tant prĂ©cisĂ© que les indemnitĂ©s des conseils d’office seront remboursables par lui dĂšs que sa situation financiĂšre le permet. Par annonce du 4 novembre 2019 puis dĂ©claration du 3 dĂ©cembre 2019, J......... a Ă©galement interjetĂ© appel contre ce jugement, concluant Ă  sa modification, en ce sens que P......... est condamnĂ© pour actes d’ordre sexuel avec des enfants et contrainte sexuelle, qu’il est tenu de lui verser la somme de 40'000 fr., plus intĂ©rĂȘt Ă  5 % l’an dĂšs le 1er mars 2013, Ă  titre de rĂ©paration du tort moral et qu’une indemnitĂ© de dĂ©pens au sens de l’art. 433 CPP est octroyĂ©e Ă  l’appelante, la requĂȘte d’indemnitĂ© de P......... au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP Ă©tant rejetĂ©e. Par Ă©criture du 26 dĂ©cembre 2019, P........., intimĂ© aux appels, a conclu, avec suite de frais et dĂ©pens, Ă  leur rejet (P. 130). C. Les faits retenus sont les suivants : 1.1 Le prĂ©venu P........., nĂ© en 1976, est ressortissant portugais. ElevĂ© par ses parents dans son pays natal, le prĂ©venu a suivi l’école obligatoire jusqu’en quatriĂšme annĂ©e. AprĂšs sa scolaritĂ©, il a directement travaillĂ©, dĂšs l’ñge de 14 ans, comme manƓuvre sans formation dans la construction. Il a toujours ƓuvrĂ© dans ce domaine, que ce soit dans son pays ou en Suisse. A l’ñge de 17 ans, le prĂ©venu a Ă©pousĂ© une compatriote, [...], avec laquelle il vit toujours, mĂȘme si le couple a traversĂ© une pĂ©riode de sĂ©paration de quelques temps aprĂšs la rĂ©vĂ©lation, en 2018, des faits de la cause, dĂ©crits ci-dessous. De cette union sont issus deux enfants, Ă  savoir J........., nĂ©e le [...] 2000, et [...], nĂ© le [...] 2004. Les deux enfants, qui ont rencontrĂ© des difficultĂ©s psychologiques, ont Ă©tĂ© suivis par des psychologues et par le Service de protection de la jeunesse (P. 86 et 87). Depuis sa majoritĂ©, J......... ne vit plus chez ses parents, mais s’est constituĂ©e un domicile sĂ©parĂ© en colocation depuis la fin du mois de mai 2018 (cf. le rapport du SPJ du 31 juillet 2018, P. 65). Pour sa part, le prĂ©venu vit toujours avec son Ă©pouse et son fils. Leurs relations sont bonnes. Il a totalement perdu de vue sa fille. Le domaine de la construction Ă©tant en crise au Portugal, le prĂ©venu est venu s’installer en Suisse en 2009, d’abord seul, avant d’ĂȘtre rejoint en 2010 par son Ă©pouse et leurs enfants. Il rĂ©side dans notre pays au bĂ©nĂ©fice d’un permis B. Il a continuĂ© Ă  travailler dans la branche de la construction, tout en traversant plusieurs pĂ©riodes de chĂŽmage. Il a perçu le revenu d’insertion en 2013. Il travaille actuellement pour une entreprise de peinture, [...], Ă  [...]. Au bĂ©nĂ©fice d’un contrat de durĂ©e indĂ©terminĂ©e comme manƓuvre depuis novembre 2018, il a rĂ©alisĂ© un salaire mensuel brut de 4'272 fr., treiziĂšme salaire inclus (P. 93), avant que cette rĂ©munĂ©ration ne soit augmentĂ©e de 200 fr. par mois. Son Ă©pouse travaille comme femme de mĂ©nage. Le couple n’a pas de dette particuliĂšre et n’a aucune Ă©conomie. Le casier judiciaire suisse du prĂ©venu est vierge de toute inscription. 1.2 Pour les besoins de la prĂ©sente cause, une expertise psychiatrique du prĂ©venu a Ă©tĂ© ordonnĂ©e. Dans un rapport Ă©tabli le 20 mai 2018, le psychiatre dĂ©signĂ© a posĂ© le diagnostic de faible niveau Ă©ducatif et d’illettrisme. Pour le reste, ce praticien a considĂ©rĂ© que le prĂ©venu ne souffrait d’aucun trouble mental spĂ©cifique, hormis son illettrisme qu’il compensait par de bonnes capacitĂ©s adaptatives dans son pays d’accueil. Aucun signe ayant pu altĂ©rer les compĂ©tences cognitives ou volitives de l’expertisĂ© n’a Ă©tĂ© relevĂ©. L’absence de trouble mental spĂ©cifique n’a pas permis une Ă©valuation du risque de rĂ©cidive. Aucune mesure n’est prĂ©conisĂ©e (P. 41). Dans la partie discussion, l’expert relĂšve que le prĂ©venu a grandi dans un climat familial de permissivitĂ© de la violence physique, notamment par l’éducation stricte qu’il a reçue de sa mĂšre. Il relĂšve que « [l]e point le plus prĂ©occupant est son insistance Ă  dire qu’il n’a jamais de geste d’affection auprĂšs de sa fille et propose un parallĂšle avec sa femme, laissant planer un doute sur sa capacitĂ© Ă  diffĂ©rencier les places de chacun dans la famille (
). Son comportement dĂ©fensif se retrouve dans sa prolixitĂ© Ă  reprendre les faits, et qui tranche avec la pauvretĂ© de la description de son parcours de vie ou de son quotidien » (P. 41, p. 7 et 8). 1.3 Un mandat d’amener concernant le prĂ©venu a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ© le 20 fĂ©vrier 2018. L’arrestation par la police est intervenue le mĂȘme jour, en soirĂ©e. Depuis lors, le prĂ©venu est restĂ© incarcĂ©rĂ© Ă  titre prĂ©ventif jusqu’au 3 mai 2018, soit pour une durĂ©e totale de 73 jours, dont neuf dans des conditions illicites. 2.1 A Lausanne, [...], au domicile familial, en mars 2013, un lundi matin, P......... s’est approchĂ© de sa fille J........., laquelle Ă©tait alors malade et fiĂ©vreuse et qui se trouvait en pyjama allongĂ©e devant la tĂ©lĂ©vision sur le canapĂ©-lit du salon. Avec une lavette mouillĂ©e, il lui a Ă©pongĂ© le front puis le cou, avant de la lui mettre sur le ventre, et enfin sur les jambes. Il a ensuite soulevĂ© le pyjama de sa fille et lui a passĂ© la patte mouillĂ©e sur la poitrine, en rigolant. J......... lui a demandĂ© d’arrĂȘter et de la laisser tranquille, ce qu’il a fait. Peu aprĂšs, le prĂ©venu est cependant revenu vers sa fille avec la lavette, qu’il lui a Ă  nouveau passĂ©e sur le front et sur le cou. Il a ensuite lĂąchĂ© la patte et a commencĂ© Ă  toucher sa fille sur le corps avec les mains, tout en lui disant de rester silencieuse. Il s’est mis Ă  la caresser sur la poitrine puis sur l’entrejambe, sous le pyjama, mais par-dessus la culotte. ApeurĂ©e, J......... n’a rien dit. Le prĂ©venu s’est alors allongĂ© sur le lit Ă  cĂŽtĂ© d’elle, habillĂ©, continuant Ă  la caresser. Il a essayĂ© de lui enlever le pyjama, mais s’est interrompu lorsque [...], le frĂšre de la jeune fille, est sorti de sa chambre. Le prĂ©venu s’est alors levĂ© pour s’occuper de son fils. Une fois celui-ci parti Ă  l’école, le prĂ©venu est revenu vers sa fille. Il s’est couchĂ© Ă  cĂŽtĂ© d’elle et a commencĂ© Ă  lui enlever le pyjama. Il lui a alors dit que, si elle en parlait, il gĂącherait sa vie. AprĂšs lui avoir enlevĂ© ses vĂȘtements et sa culotte, tout en continuant Ă  la toucher, le prĂ©venu a introduit un ou plusieurs doigts dans son vagin, lui disant qu’elle n’avait pas besoin d’avoir peur, qu’il savait ce qu’il faisait. Comme il n’avait rien pour se protĂ©ger, il a indiquĂ© en substance qu’il ne voulait pas la pĂ©nĂ©trer par le vagin mais qu’elle n’avait pas Ă  s’inquiĂ©ter d’une pĂ©nĂ©tration anale car elle ne tomberait pas enceinte. Il a ajoutĂ© qu’au dĂ©but ce serait douloureux mais qu’aprĂšs cela irait mieux. CouchĂ© derriĂšre elle, lui tenant les deux mains avec l’une des siennes et le ventre avec l’autre, le prĂ©venu a alors pĂ©nĂ©trĂ© sa fille analement avec son sexe. Une fois terminĂ©, il s’est retirĂ©, a Ă©jaculĂ©, puis s’est rhabillĂ© et s’est dirigĂ© vers la cuisine. J......... en a profitĂ© pour aller se doucher. Quand elle est sortie de la salle de bain, son pĂšre est revenu vers elle en la menaçant de faire du mal Ă  sa mĂšre et Ă  son frĂšre si elle parlait Ă  quelqu’un. 2.2 A Lausanne, [...], Ă  une date indĂ©terminĂ©e en juillet 2014, P......... a bloquĂ© la sortie de la salle de bain Ă  sa fille J........., en se mettant devant elle. Il est entrĂ© dans la piĂšce, a fermĂ© la porte et a commencĂ© Ă  l’enlacer et Ă  l’embrasser sur la bouche. J......... l’a repoussĂ© avec les mains. Il lui a alors bloquĂ© les bras et l’a embrassĂ©e dans le cou. La jeune fille a cependant rĂ©ussi Ă  se libĂ©rer de son Ă©treinte en le repoussant et est sortie de la salle de bain. 3. J......... a dĂ©posĂ© plainte. Elle a pris des conclusions civiles Ă  hauteur de 40'000 fr., plus intĂ©rĂȘt Ă  5 % l’an dĂšs le 1er mars 2013, en rĂ©paration du tort moral. En droit : 1. InterjetĂ©s dans les formes et dĂ©lais lĂ©gaux (art. 399 CPP) par des parties ayant la qualitĂ© pour recourir contre le jugement d’un tribunal de premiĂšre instance ayant clos la procĂ©dure (art. 398 al. 1 CPP), les appels sont recevables. 2. Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaquĂ©s du jugement (al. 2). L'appel peut ĂȘtre formĂ© pour violation du droit, y compris l'excĂšs et l'abus du pouvoir d'apprĂ©ciation, le dĂ©ni de justice et le retard injustifiĂ© (let. a), pour constatation incomplĂšte ou erronĂ©e des faits (let. b) et pour inopportunitĂ© (let. c) (al. 3). L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner Ă  rechercher les erreurs du juge prĂ©cĂ©dent et Ă  critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres dĂ©bats et prendre sa dĂ©cision sous sa responsabilitĂ© et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend Ă  la rĂ©pĂ©tition de l'examen des faits et au prononcĂ© d'un nouveau jugement (Eugster, in : Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2e Ă©d., BĂąle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immĂ©diatetĂ© des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procĂ©dure d'appel se fonde sur les preuves administrĂ©es pendant la procĂ©dure prĂ©liminaire et la procĂ©dure de premiĂšre instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou Ă  la demande d'une partie, les preuves complĂ©mentaires nĂ©cessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B.78/2012 du 27 aoĂ»t 2012 consid. 3.1). 3. L’art. 10 CPP dispose que toute personne est prĂ©sumĂ©e innocente tant qu'elle n'est pas condamnĂ©e par un jugement entrĂ© en force (al. 1). Le Tribunal apprĂ©cie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procĂ©dure (al. 2). Le tribunal se fonde sur l’état de fait le plus favorable au prĂ©venu lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux Ă©lĂ©ments factuels justifiant une condamnation (al. 3). S'agissant plus prĂ©cisĂ©ment de l'apprĂ©ciation des preuves et de l'Ă©tablissement des faits, il s’agit de l’acte par lequel le juge du fond Ă©value librement la valeur de persuasion des moyens de preuve Ă  disposition et pondĂšre ces diffĂ©rents moyens de preuve afin de parvenir Ă  une conclusion sur la rĂ©alisation ou non des Ă©lĂ©ments de fait pertinents pour l’application du droit pĂ©nal matĂ©riel. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices; en cas de versions contradictoires, il doit dĂ©terminer laquelle est la plus crĂ©dible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est dĂ©terminant, mais leur force de persuasion (Verniory, in : Jeanneret/Kuhn/Perrier Depeursinge [Ă©d.], Code de procĂ©dure pĂ©nale suisse, Commentaire romand, 2e Ă©d., BĂąle 2019, n. 34 ad art. 10 CPP). La prĂ©somption d’innocence, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l’apprĂ©ciation des preuves (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 38 consid. 2a). En tant que rĂšgle relative au fardeau de la preuve, la prĂ©somption d’innocence signifie que toute personne prĂ©venue d’une infraction pĂ©nale doit ĂȘtre prĂ©sumĂ©e innocente jusqu’à ce que sa culpabilitĂ© soit lĂ©galement Ă©tablie et, partant, qu’il appartient Ă  l’accusation de prouver la culpabilitĂ© de celle-lĂ  (ATF 127 I 38 prĂ©citĂ© ; TF 6B.47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1). Comme rĂšgle d’apprĂ©ciation des preuves, elle signifie que le juge ne doit pas se dĂ©clarer convaincu de l'existence d'un fait dĂ©favorable Ă  l'accusĂ© si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant Ă  l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et thĂ©oriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant ĂȘtre exigĂ©e. Il doit s'agir de doutes sĂ©rieux et irrĂ©ductibles, c'est-Ă -dire de doutes qui s'imposent Ă  l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l’apprĂ©ciation des preuves et la constatation des faits sont critiquĂ©es en rĂ©fĂ©rence au principe in dubio pro reo, celui-ci n’a pas de portĂ©e plus large que l’interdiction de l’arbitraire, prohibant une apprĂ©ciation reposant sur des preuves inadĂ©quates ou sans pertinence (ATF 144 IV 345 prĂ©citĂ© consid. 2.2.3.3 ; ATF 143 IV 500 consid. 1.1 ; ATF 138 V 74 consid. 7). Lorsque l'autoritĂ© a forgĂ© sa conviction sur la base d'un ensemble d'Ă©lĂ©ments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou mĂȘme chacun d'eux pris isolĂ©ment soit Ă  lui seul insuffisant. L'apprĂ©ciation des preuves doit ĂȘtre examinĂ©e dans son ensemble (ATF 127 I 38 consid. 2a; ATF 120 Ia 31 consid. 2c; TF 6B.831/2009 du 25 mars 2010 consid. 2.2.2). 4. La constatation des faits est incomplĂšte au sens de l’art. 398 al. 3 let. b CPP lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve dĂ©terminants pour le jugement n’ont pas Ă©tĂ© pris en compte par le tribunal de premiĂšre instance. Elle est erronĂ©e lorsque le tribunal a omis d’administrer la preuve d’un fait pertinent, a apprĂ©ciĂ© de maniĂšre erronĂ©e le rĂ©sultat de l’administration d’un moyen de preuve ou a fondĂ© sa dĂ©cision sur des faits erronĂ©s, en contradiction avec les piĂšces, par exemple (Kistler Vianin, in : Jeanneret/Kuhn/Perrier Depeursinge [Ă©d.], op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP). 5. Il convient d’examiner conjointement les appels du MinistĂšre public et de la plaignante qui contestent l’acquittement dont le prĂ©venu a bĂ©nĂ©ficiĂ©, s’agissant des chefs de prĂ©vention d’actes d’ordre sexuel avec des enfants et de contrainte sexuelle. En substance, les appelants font valoir qu’il n’existe en l’espĂšce aucun doute quant Ă  la rĂ©alitĂ© des faits dĂ©crits dans l’acte d’accusation et commis par le prĂ©venu au prĂ©judice de sa fille. L’accusation se fonde en substance sur les circonstances du dĂ©voilement, l’analyse des tĂ©moignages et des dĂ©clarations du prĂ©venu, ainsi que sur les rapports dĂ©posĂ©s par divers intervenants mĂ©dicaux et sociaux. La plaignante invoque les mĂȘmes Ă©lĂ©ments, ainsi que des dĂ©ductions erronĂ©es des premiers juges au sujet de la prĂ©tendue surprise ou stupĂ©faction exprimĂ©e par le prĂ©venu lors de la rĂ©vĂ©lation de la dĂ©nonciation de sa fille, au sujet de faits qui se seraient produits au Portugal et au sujet de l’absence de matĂ©riel informatique Ă  caractĂšre pornographique; elle relĂšve enfin des constatations lacunaires au sujet de l’expertise psychiatrique du prĂ©venu. 6. AprĂšs l’examen des Ă©lĂ©ments probatoires, il apparaĂźt que les doutes exprimĂ©s par les premiers juges en faveur du prĂ©venu ne peuvent pas ĂȘtre partagĂ©es pour les motifs suivants : 6.1 Les circonstances particuliĂšres du dĂ©voilement permettent d’exclure une dĂ©nonciation abusive. En effet, c’est en Ă©tĂ© 2017 que la plaignante s’est confiĂ©e Ă  sa psychologue, [...], consultĂ©e depuis la fin du mois de mai prĂ©cĂ©dent. Le 27 aoĂ»t 2017, la thĂ©rapeute a signalĂ© le cas au SPJ sans demander au prĂ©alable le consentement de sa patiente. Le SPJ a ensuite dĂ©noncĂ© les faits Ă  la justice pĂ©nale. L’ouverture de l’enquĂȘte n’est donc pas due Ă  la plaignante. Elle a d’ailleurs refusĂ© de s’exprimer dans un premier temps, ne se prĂ©sentant pas Ă  la convocation de la police, car elle redoutait les consĂ©quences pour sa famille, d’une part, et elle craignait encore le prĂ©venu, d’autre part (jugement en p. 9). Elle a finalement acceptĂ© d’ĂȘtre entendue une premiĂšre fois le 20 fĂ©vrier 2018. Elle a parfaitement expliquĂ© pourquoi elle n’avait pas parlĂ© dans un premier temps des faits les plus graves (la sodomie subie en mars 2013), sachant que sa mĂšre en serait informĂ©e et que ce serait trop pour celle-ci. La plaignante a ainsi fait des dĂ©clarations prĂ©cises et cohĂ©rentes. Du reste, avant l’ouverture de l’enquĂȘte pĂ©nale dĂ©jĂ , le SPJ avait reçu un signalement du SUPEA au sujet du frĂšre de la plaignante, [...], qui Ă©voquait, lors de ses dĂ©clarations, des abus commis par son pĂšre sur sa sƓur (P. 86/16). Par ailleurs, la plaignante s’était Ă©galement confiĂ©e, avant mĂȘme l’intervention de sa psychologue auprĂšs des autoritĂ©s, Ă  deux amies de son Ăąge, [...] et [...], leur indiquant avoir subi des attouchements de son pĂšre. Contrairement Ă  ce qu’ont retenu les premiers juges, rien dans les dĂ©positions de ces deux tĂ©moins ne permet de remettre en question la crĂ©dibilitĂ© de la plaignante. La premiĂšre souligne d’une part qu’elle ne voulait pas savoir ce qui s’était produit et d’autre part que, si la plaignante lui avait menti dans le passĂ©, ce n’était pas sur des « choses aussi importantes » (PV aud. 7, R. 10). Quant Ă  la seconde, le fait qu’elle n’ait pas cru la plaignante est beaucoup moins pertinent que le constat que cette derniĂšre lui a rapportĂ© la mĂȘme chose qu’à son autre amie. Il faut ainsi, au contraire des premiers juges, relever la similitude des confessions de l’appelante Ă  ces deux amies avant le signalement des faits aux autoritĂ©s. On constate ainsi que le dĂ©voilement progressif des faits, d’abord Ă  deux amies, puis Ă  la psychologue, puis aux autoritĂ©s judiciaires, constitue l’un des Ă©lĂ©ments probants qui permet de considĂ©rer comme vĂ©ridiques les dĂ©clarations de la plaignante. Il est en effet inconcevable que la plaignante ait fait part des abus de la sorte si elle ne les avait pas vĂ©cus. Qui plus est, elle n’a pas maĂźtrisĂ© la maniĂšre dont les autoritĂ©s pĂ©nales ont eu connaissance des faits. En outre, les confidences identiques faites en premier Ă  des amies accrĂ©ditent l’authenticitĂ© du rĂ©cit. 6.2 Les dĂ©clarations du prĂ©venu confortent la version de la plaignante : il est manifeste que sa version des faits est purement dĂ©fensive et que les dĂ©tails donnĂ©s par celui-ci le discrĂ©ditent totalement. En effet, il a d’abord confirmĂ© le contexte gĂ©nĂ©ral des faits en admettant s’ĂȘtre couchĂ© Ă  cĂŽtĂ© de sa fille « pour la rĂ©chauffer », a prĂ©cisĂ© s’ĂȘtre endormi ensuite pour constater Ă  son rĂ©veil « que son pantalon Ă©tait ouvert » (PV aud. 5, R. 15), ce qu’il a expressĂ©ment confirmĂ© Ă  l’audience d’appel. Il aurait alors demandĂ© Ă  sa fille s’il avait fait quelque chose pendant qu’il dormait et elle lui aurait rĂ©pondu par la nĂ©gative, explication qui paraĂźt totalement invraisemblable. InterpellĂ© sur d’éventuels contacts corporels avec sa fille, il a rĂ©pondu « Non, je ne crois pas. Peut-ĂȘtre avec la main, comme je dormais, je l’ai peut-ĂȘtre touchĂ©e » (ibidem). InterpellĂ© Ă  l’audience d’appel quant au fait qu’il avait dĂ©clarĂ©, durant l’enquĂȘte, avoir constatĂ©, Ă  son rĂ©veil, que son pantalon Ă©tait ouvert, il a indiquĂ© ne pas avoir d’explications Ă  ce sujet, autre que celle qu’il ouvrait usuellement son pantalon lors de sa sieste (cf. aussi jugement en p. 5). Il s’ensuit que le prĂ©venu, sans nier nombre d’élĂ©ments circonstanciels du rĂ©cit de sa fille, concernant en particulier le fait d’ĂȘtre couchĂ© derriĂšre sa fille et de l’avoir enlacĂ©e, conteste en rĂ©alitĂ© uniquement la partie des faits portant sur l’agression sexuelle, qu’il remplace par une sieste. 6.3 Les constats rapportĂ©s par les intervenants sociaux et mĂ©dicaux sont nombreux et vont tous dans le sens d’un traumatisme grave subi par la plaignante. D’abord, c’est Ă  tort que les premiers juges ont considĂ©rĂ© que la psychologue qui avait dĂ©noncĂ© les faits s’était fondĂ©e essentiellement sur les dĂ©clarations de la plaignante (jugement en p. 21). En effet, cette thĂ©rapeute a, dans son signalement, fait Ă©tat des signes cliniques caractĂ©ristiques d’un Ă©tat post-traumatique, Ă  savoir insomnie, hypervigilance, tremblements, anesthĂ©sie Ă©motionnelle, irritabilitĂ©, anxiĂ©tĂ©, comportement d’évitement, symptĂŽmes complĂ©tĂ©s par des Ă©lĂ©ments somatiques rencontrĂ©s frĂ©quemment par des victimes, tels que maux de tĂȘte, maux de ventre, tensions et douleurs musculaires (P. 28). Ces troubles ont d’ailleurs Ă©tĂ© confirmĂ©s par le mĂ©decin de la plaignante (P. 19). Ensuite, les constats des autres intervenants, en particulier de la pĂ©diatre de la plaignante, confirment encore l’existence d’un traumatisme vĂ©cu Ă  la date des premiers faits incriminĂ©s (mars 2013), avec des hospitalisations de la plaignante en avril et octobre 2013 pour des douleurs abdominales persistantes (P. 71). Ce traumatisme est Ă©galement Ă©tayĂ© par la baisse abrupte des rĂ©sultats scolaires de l’appelante dĂšs le premier Ă©pisode d’actes incriminĂ©s, remontant au mois de mars 2013, comme l’établit le relevĂ© de notes pour l’annĂ©e scolaire 2013-2014 (sous P. 65). Plus encore, l’appelante a prĂ©sentĂ© un problĂšme d’absentĂ©isme scolaire aprĂšs les faits de mars 2013. Ainsi, elle a manquĂ© pas moins de 35 pĂ©riodes d’école en avril et mai 2014, comme le mentionne le courrier d’avertissement adressĂ© par l’autoritĂ© scolaire aux parents le 22 mai 2014 (sous P. 65). Ces absences peuvent ĂȘtre interprĂ©tĂ©es en relation avec le rapport du 1er avril 2014 de l’Action Ă©ducative en milieu ouvert (AEMO) Est, qui mentionne que « [l]es absences rĂ©pĂ©titives de [...] Ă  l’école sont en nette baisse par rapport l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente » (P. 86/16, dĂ©jĂ  mentionnĂ©e), ce qui donne la mesure des carences scolaires de celle-ci en 2013. Cet absentĂ©isme, dont aucune mention n’est antĂ©rieure Ă  2013, a perdurĂ© aprĂšs la rentrĂ©e 2015, comme l’établit encore une lettre du 15 octobre 2015 (sous P. 65 Ă©galement). Tous ces Ă©lĂ©ments dĂ©montrent donc qu’un Ă©vĂ©nement traumatique important s’est produit en mars 2013. 6.4 L’expertise psychiatrique du prĂ©venu, dont la partie « discussion » n’est pas examinĂ©e dans le jugement, contient aussi des Ă©lĂ©ments probants en faveur de l’accusation. Les experts relĂšvent en effet que le prĂ©venu nie toute affectivitĂ© Ă  l’égard de ses enfants, pour se dĂ©fendre d’une attitude qui pourrait paraĂźtre suspecte (P. 41 en p. 7), et qu’il fait un parallĂšle entre sa fille et sa femme, montrant une confusion gĂ©nĂ©alogique (ibidem). Ce comportement dĂ©fensif, dĂ©jĂ  relevĂ© au sujet de sa version des faits, contraste, selon les experts, avec la pauvretĂ© de ses descriptions concernant son parcours de vie. Il s’agit lĂ  encore d’élĂ©ments d’apprĂ©ciation dĂ©favorables au prĂ©venu dans l’examen de ses relations avec sa fille. 6.5 Il apparaĂźt Ă©galement que les premiers juges ont accordĂ© un crĂ©dit injustifiĂ© aux membres de la famille ou de la belle-famille du prĂ©venu. Les tĂ©moignages de [...], demi-frĂšre du prĂ©venu, d’[...], beau-frĂšre du prĂ©venu, et de [...], beau-pĂšre du prĂ©venu, sont en effet dĂ©pourvus de valeur probante s’agissant de la rĂ©alitĂ© des accusations. Les prĂ©tendus aveux de la plaignante au sujet de la faussetĂ© de ses allĂ©gations, rapportĂ©s par le tĂ©moignage de [...] (PV aud. 12, R. 8, et jugement en p. 7), ne sont aucunement crĂ©dible. Les propos rapportĂ©s n’ont pas Ă©tĂ© entendus par [...] (mĂšre de la plaignante et Ă©pouse du prĂ©venu), ni par un autre tĂ©moin, [...], pourtant prĂ©sents lors de la discussion Ă©voquĂ©e par [...] (jugement en p. 7, dernier par.). Ces propos sont manifestement destinĂ©s Ă  discrĂ©diter la plaignante sans qu’ils ne reposent sur le moindre Ă©lĂ©ment concret. Certes, les tĂ©moins [...] et [...] rapportent que le prĂ©venu serait quelqu’un de calme et d’aimant avec ses enfants, les tĂ©moins ne concevant pas que les accusations puissent ĂȘtre fondĂ©es. Ces dĂ©positions sont toutefois d’une banalitĂ© telle qu’elles n’apportent rien de probant au jugement de la cause, tant il est Ă©vident que la famille d’un prĂ©venu commettant des abus intrafamiliaux ne se dĂ©clare jamais convaincue de tels faits. Il en va de mĂȘme de l’absence de tout matĂ©riel informatique Ă  caractĂšre pornographique rĂ©vĂ©lĂ©e par la perquisition effectuĂ©e chez le prĂ©venu. En effet, la commission des faits par le prĂ©venu n’implique pas nĂ©cessairement une telle dĂ©couverte. 6.6 En conclusion, il apparaĂźt que l’analyse du tribunal correctionnel repose sur des Ă©lĂ©ments dĂ©pourvus de valeur probante, alors mĂȘme que les premiers juges en ont ignorĂ© d’autres qui accrĂ©ditaient la version de la plaignante. Ils ont ainsi omis en particulier les Ă©lĂ©ments liĂ©s Ă  l’absence de vĂ©racitĂ© des dĂ©nĂ©gations du prĂ©venu, au diagnostic clair et Ă©tayĂ© par de nombreux intervenants d’un Ă©tat post-traumatique de la plaignante dĂ©clenchĂ© Ă  partir de 2013 et du contexte particulier de la rĂ©vĂ©lation des faits dĂ©lictueux qui n’a pas Ă©tĂ© maitrisĂ© par la plaignante. Les faits dĂ©noncĂ©s sont en dĂ©finitive Ă©tablis, sur la base de preuves suffisantes. 7. Pour ce qui est des actes incriminĂ©s de mars 2013, la contrainte exercĂ©e par le prĂ©venu rĂ©sulte de l’opposition manifestĂ©e dans un premier temps par sa fille. Cette opposition a Ă©tĂ© levĂ©e par l’injonction de celui-ci Ă  la victime de rester silencieuse et les menaces de lui gĂącher sa vie si elle n’obtempĂ©rait pas, ce qui suffisait Ă  briser la rĂ©sistance d’une enfant de 12 ans vis-Ă -vis de son propre pĂšre. Cette contrainte a Ă©tĂ© suivie d’actes d’ordre sexuel. Il en va de mĂȘme des faits de juillet 2014, lors desquels le prĂ©venu a eu recours Ă  la force physique pour s’interposer et commettre des actes d’ordre sexuel contre le grĂ© de sa fille. Lors de chacun de ces deux Ă©pisodes, l’intimĂ© s’est ainsi rendu coupable d’actes d’ordre sexuel avec des enfants (art. 187 al. 1 ch. 1 CP) et de contrainte sexuelle (189 al. 1 CP), les infractions Ă©tant en concours idĂ©al. 8. 8.1 Le juge fixe la quotitĂ© de la peine d'aprĂšs la culpabilitĂ© de l'auteur (art. 47 CP). Elle doit ĂȘtre Ă©valuĂ©e en fonction de tous les Ă©lĂ©ments objectifs pertinents, qui ont trait Ă  l'acte lui-mĂȘme, Ă  savoir notamment la gravitĂ© de la lĂ©sion, le caractĂšre rĂ©prĂ©hensible de l'acte et son mode d'exĂ©cution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensitĂ© de la volontĂ© dĂ©lictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilitĂ©, il faut ajouter les facteurs liĂ©s Ă  l'auteur lui-mĂȘme, Ă  savoir les antĂ©cĂ©dents, la rĂ©putation, la situation personnelle, la vulnĂ©rabilitĂ© face Ă  la peine et le comportement aprĂšs l'acte et au cours de la procĂ©dure pĂ©nale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 et les arrĂȘts citĂ©s). Le juge exprime dans sa dĂ©cision les Ă©lĂ©ments essentiels relatifs Ă  l'acte ou Ă  l'auteur qu'il prend en compte, de maniĂšre Ă  ce que l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont Ă©tĂ© pris en considĂ©ration et comment ils ont Ă©tĂ© apprĂ©ciĂ©s, que ce soit dans un sens aggravant ou attĂ©nuant (art. 50 CP; cf. ATF 136 IV 55 consid. 5.5). La motivation doit justifier la peine prononcĂ©e, en permettant de suivre le raisonnement adoptĂ© (ATF 141 IV 244 consid. 1.2.2). Le juge n'est toutefois pas tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentages l'importance qu'il accorde Ă  chacun des Ă©lĂ©ments qu'il cite (ATF 136 IV 55 consid. 5.6). 8.2 Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de mĂȘme genre, le juge le condamne Ă  la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excĂ©der de plus de la moitiĂ© le maximum de la peine prĂ©vue pour cette infraction. Il est en outre liĂ© par le maximum lĂ©gal de chaque genre de peine. Pour satisfaire Ă  cette rĂšgle, le juge, dans un premier temps, fixera la peine pour l'infraction la plus grave, en tenant compte de tous les Ă©lĂ©ments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou attĂ©nuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner les autres infractions, en tenant lĂ  aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2; ATF 127 IV 101 consid. 2b; TF 6B.1175/2017 du 11 avril 2018 consid, 2.1; TF 6B.688/2014 du 22 dĂ©cembre 2017 consid. 27.2.1). L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de mĂȘme genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine Ă  prononcer pour chacune d'elle. Le prononcĂ© d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu Ă  l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le mĂȘme genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1; ATF 142 IV 265 consid. 2.3.2; ATF 138 IV 120 consid. 5.2). Que les dispositions pĂ©nales applicables prĂ©voient abstraitement des peines de mĂȘme genre ne suffit pas (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1; ATF 144 IV 217 consid. 2.2; ATF 138 IV 120 consid. 5.2). Si les sanctions envisagĂ©es concrĂštement ne sont pas du mĂȘme genre, elles doivent ĂȘtre prononcĂ©es cumulativement (ATF 144 IV 313 consid. 1.1; ATF 142 IV 265 consid. 2.3.2; ATF 138 IV 120 consid. 5.2; ATF 137 IV 57 consid. 4.3.1). La peine privative de libertĂ© et la peine pĂ©cuniaire ne sont pas des sanctions du mĂȘme genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1; ATF 144 IV 217 consid. 2.2). 8.3 Les faits incriminĂ©s sont particuliĂšrement graves, dans la mesure oĂč ils trahissent le mĂ©pris portĂ© par l’auteur Ă  l’intĂ©gritĂ© sexuelle de sa propre fille, Ă  laquelle il a imposĂ© une agression sexuelle d’une brutalitĂ© abjecte. Cet acte d’ordre sexuel d’une particuliĂšre gravitĂ© en a Ă©tĂ© accompagnĂ© d’autres, Ă  savoir, notamment, de caresses et de pĂ©nĂ©trations vaginales avec les doigts. Le mĂ©pris portĂ© Ă  l’intĂ©gritĂ© sexuelle de la victime s’est poursuivi par de nouveaux abus, certes moins graves que ceux perpĂ©trĂ©s en mars 2013, un peu plus d’un an aprĂšs les premiers. Le concours d’infractions commande d’alourdir la peine dans la mesure prĂ©vue par l’art. 49 al. 1 CP. A dĂ©charge, il convient de prendre en compte la durĂ©e Ă©coulĂ©e depuis le second des actes en cause, durant laquelle le prĂ©venu n’a pas dĂ©favorablement retenu l’attention des autoritĂ©s pĂ©nales. En outre, son insertion socio-professionnelle s’avĂšre adĂ©quate. Tout au plus peut-on admettre, encore Ă  dĂ©charge, que son caractĂšre fruste et une enfance dans un climat de violence, mis en exergue par l’expertise psychiatrique, attĂ©nue quelque peu sa responsabilitĂ© parentale. L’absence d’antĂ©cĂ©dent est un facteur neutre au regard de l’art. 47 CP (ATF 136 IV 1). L’infraction la plus grave est celle de contrainte sexuelle, rĂ©primĂ©e d’une peine privative de libertĂ© de dix ans au plus. Les actes les plus graves sont ceux commis en mars 2013. En concours idĂ©al, ils doivent ĂȘtre punis d’une peine privative de libertĂ© de quatre ans, soit trois ans pour l’infraction de contrainte sexuelle et un an pour l’infraction d’actes d’ordre sexuel avec des enfants. La peine punissant ces premiers actes doit ĂȘtre accrue d’un an pour rĂ©primer les actes commis en juillet 2014, Ă©galement en concours idĂ©al. Tout bien pesĂ©, la Cour considĂšre ainsi, avec le MinistĂšre public, que c’est une peine privative de libertĂ© de cinq ans qui doit rĂ©primer les infractions retenues. La quotitĂ© de la peine exclut le sursis, mĂȘme partiel. La dĂ©tention avant jugement doit ĂȘtre dĂ©duite (art. 51 CP). 9. L’intimĂ© a Ă©tĂ© dĂ©tenu dans des conditions illicites durant neuf jours, soit du moment de son arrestation jusqu’à son transfert dans un Ă©tablissement de dĂ©tention. En application de l’art. 431 al. 1 CPP, la dĂ©tention initiale justifie une rĂ©paration du tort moral passĂ© les 48 premiĂšres heures. C’est ainsi une rĂ©duction de moitiĂ© sur sept jours, arrondie Ă  quatre jours, qui doit ĂȘtre opĂ©rĂ©e sur la peine privative de libertĂ©, Ă  titre de rĂ©paration du tort moral (JdT 2019 III 189). 10. L’appelante a conclu Ă  l’octroi, par l’intimĂ©, d’un montant de 40'000 fr., plus intĂ©rĂȘt Ă  5 % l’an dĂšs le 1er mars 2013, Ă  titre de rĂ©paration du tort moral. C’est un dĂ©dommagement de l’ordre de 30'000 fr. qui est communĂ©ment allouĂ© aux victimes d’abus sexuels du type de ceux ici en cause, s’agissant de jeunes victimes en rapport de dĂ©pendance Ă  l’égard de l’auteur (cf. HĂŒtte/Landolt, Genugtuungsrecht – Grundlagen zur Bestimmung der Genugtuung, Band 1, Zurich/St-Gall 2013, p. 187). Le fait que la victime n’avait pas d’expĂ©rience sexuelle lors de la commission de l’infraction est un facteur d’augmentation du montant de la rĂ©paration morale Ă  octroyer (cf., en matiĂšre de LAVI, par analogie, Converset, Aide aux victimes d’infractions et rĂ©paration du dommage, thĂšse, GenĂšve 2009, p. 301, avec n. infrapaginale 1492). Il faut en outre prendre en compte le fait que les actes dommageables ont affectĂ© la santĂ© de l’appelante jusqu’à avoir Ă©tĂ© Ă  l’origine d’un traitement auprĂšs d’une psychologue en 2017, puis auprĂšs d’un autre thĂ©rapeute dĂšs le 20 septembre 2019 (cf. le certificat du 25 fĂ©vrier 2020 sous P. 137/1). La lĂ©sĂ©e prĂ©sente de multiples troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et diverses problĂ©matiques anxio-dĂ©pressives; elle est obligĂ©e de prendre des mĂ©dicaments pour attĂ©nuer son mal-ĂȘtre et est en arrĂȘt de travail depuis le 3 dĂ©cembre 2019 (ibidem), comme elle l’a confirmĂ© Ă  l’audience d’appel. Les services sociaux souhaiteraient qu’elle entreprenne des mesures de rĂ©insertion, mais elle n’a pas les capacitĂ©s de concentration qui lui permettent de le faire. Ces Ă©lĂ©ments Ă©tayent la gravitĂ© des sĂ©quelles. Il y a lieu de prendre en compte le fait que les actes dommageables ont entraĂźnĂ© une baisse des rĂ©sultats scolaires, sa scolaritĂ© s’étant achevĂ©e sans diplĂŽme. L’intĂ©ressĂ©e n’a occupĂ© que quelques emplois prĂ©caires. Son avenir professionnel apparaĂźt ainsi durablement obĂ©rĂ©, ce qui alourdit encore les consĂ©quences des actes dommageables. Dans ces conditions, c’est un montant de 30'000 fr. qui est adĂ©quat pour rĂ©parer les atteintes illicites portĂ©es Ă  la personnalitĂ© de la plaignante. L’intĂ©rĂȘt assortissant ce capital, arrĂȘtĂ© au taux lĂ©gal de 5 % l’an, doit courir depuis le lendemain du dernier lundi du mois de mars 2013, soit dĂšs le 26 mars 2013. En effet, le jour exact du premier acte dommageable est inconnu, sinon par le jour de la semaine (lundi) et le mois (mars 2013). 11. En dĂ©finitive, les appels doivent ĂȘtre admis dans le sens de ce qui prĂ©cĂšde. Les frais de premiĂšre instance doivent ĂȘtre mis Ă  la charge du prĂ©venu, celui-ci Ă©tant condamnĂ© (art. 426 al. 1 CPP). Par identitĂ© de motif, aucune indemnitĂ© au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP ne saurait lui ĂȘtre allouĂ©e au titre de la dĂ©tention subie avant jugement. 12. Vu l’issue des appels, les frais d’appel (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [tarif des frais de procĂ©dure et indemnitĂ©s en matiĂšre pĂ©nale du 28 septembre 2010; BLV 312.03.1]) seront mis Ă  la charge de l’intimĂ©, qui succombe (art. 428 al. 1, 1re phrase, CPP). Outre l’émolument, les frais d’appel comprennent l’indemnitĂ© en faveur du dĂ©fenseur d’office de l’intimĂ© et celle en faveur du conseil d’office de l’appelante (art. 422 al. 1 et al. 2 let. a CPP). Le dĂ©fenseur d’office de l’intimĂ© a produit une liste d’opĂ©rations et de dĂ©bours, laquelle englobe Ă©galement les opĂ©rations de l’avocat stagiaire (P. 138). S’agissant de Me Blanc, il y a lieu de retenir la durĂ©e d’activitĂ© selon la liste, soit 11 heures. La durĂ©e de l’audience d’appel doit ĂȘtre ajoutĂ©e Ă  raison de 2,4 heures. Les honoraires correspondant Ă  une durĂ©e d’activitĂ© de 13,40 heures, soit 2'412 fr. au tarif horaire de 180 fr., doivent ĂȘtre augmentĂ©s des dĂ©bours forfaitaires, Ă  hauteur de 2 % (cf. art. 26b TFIP qui renvoie Ă  l'art. 3bis RAJ [rĂšglement sur l’assistance judiciaire en matiĂšre civile du 7 dĂ©cembre 2010; BLV 211.02.3]), par 48 fr. 25, et d’une vacation ‬de 120 francs. Les honoraires et dĂ©bours en faveur de l’avocat personnellement se montent donc Ă  2'580 fr. 25, TVA comprise. Pour ce qui est du stagiaire, il convient Ă©galement de retenir la durĂ©e d’activitĂ© selon la liste, soit 2,26 heures au tarif horaire de 110 francs. Ces honoraires de 248 fr. 60 doivent ĂȘtre augmentĂ©s des dĂ©bours forfaitaires, Ă  hauteur de 2 %, soit 253 fr. 55. Il n’y a pas lieu de prendre en compte une vacation en faveur du stagiaire. En effet, il n’a pas accompli d’opĂ©rations lors de l’audience d’appel. Le total de l’indemnitĂ© de dĂ©fense d’office s’élĂšve donc Ă  2'833 fr. 80, dĂ©bours et TVA compris. L’indemnitĂ© en faveur du conseil d’office de l’appelante peut ĂȘtre arrĂȘtĂ©e au vu de la liste d’opĂ©rations produite (P. 139), soit sur la base d’une durĂ©e d’activitĂ© de 22,8 heures, en plus de 2,40 heures pour l’audience d’appel, soit 25,2 heures. Aux honoraires de 4'536 fr. doivent ĂȘtre ajoutĂ©s ‬les dĂ©bours forfaitaires, Ă  hauteur de 2 % et une vacation ‬de 120 francs. L’indemnitĂ© se monte donc Ă  4'626 fr. 70 + 120 fr., soit Ă  4'746 fr. 70, dĂ©bours et TVA compris. Il n’y a pas matiĂšre Ă  allouer une indemnitĂ© de l’art. 433 CPP Ă  la plaignante, puisqu’elle est assistĂ©e d’un conseil d’office. L’intimĂ© ne sera tenu de rembourser l’indemnitĂ© en faveur de son dĂ©fenseur d’office prĂ©vue ci-dessus que lorsque sa situation financiĂšre le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). Par ces motifs, la Cour d’appel pĂ©nale, appliquant les art. 36, 40, 47, 49 al. 1, 50, 51, 187 ch. 1 et 189 al. 1 CP; 49 CO; 135 al. 1, 2 et 4, 398 ss CPP, prononce : I. Les appels sont admis. II. Le jugement rendu le 30 octobre 2019 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne est modifiĂ© aux chiffres I, II et V de son dispositif, ainsi que par l’ajout d’un chiffre VI, ce dispositif Ă©tant dĂ©sormais le suivant : "I. constate que P......... s’est rendu coupable d’actes d’ordre sexuel avec des enfants et de contrainte sexuelle et le condamne Ă  une peine privative de libertĂ© de 5 (cinq) ans, sous dĂ©duction de 73 (septante-trois) jours de dĂ©tention avant jugement et de 4 (quatre) jours Ă  titre de rĂ©paration du tort moral pour la dĂ©tention subie dans des conditions illicites; II. dit que P......... est le dĂ©biteur de J......... de la somme de CHF 30'000.- Ă  titre d’indemnitĂ© pour tort moral, avec intĂ©rĂȘt Ă  5 % l’an dĂšs le 26 mars 2013; III. fixe l’indemnitĂ© d’office de Me Nicolas Blanc, dĂ©fenseur d’office de P........., dĂ©bours, vacations et TVA compris, Ă  CHF 15'498.-; IV. fixe l’indemnitĂ© d’office de Me Claire Neville, conseil juridique gratuit de J........., dĂ©bours, vacations et TVA compris, Ă  CHF 19'401.-; V. met les frais de la cause, par 56’379 fr. 25, y compris les indemnitĂ©s arrĂȘtĂ©es sous chiffres III et IV du prĂ©sent dispositif, Ă  la charge de P.........; VI. dit que P......... est tenu de rembourser l’indemnitĂ© de dĂ©fense d’office prĂ©vue au chiffre III ci-dessus dĂšs que sa situation financiĂšre le permettra". III. Une indemnitĂ© de dĂ©fenseur d'office pour la procĂ©dure d'appel d'un montant de 2'833 fr. 80, dĂ©bours et TVA compris, est allouĂ©e Ă  Me Nicolas Blanc. IV. Une indemnitĂ© de conseil d'office pour la procĂ©dure d'appel d'un montant de 4'746 fr. 70, dĂ©bours et TVA compris, est allouĂ©e Ă  Me Claire Neville. V. Les frais d'appel, par 10'260 fr. 50‬, y compris les indemnitĂ©s mentionnĂ©es aux chiffres III et IV ci-dessus, sont mis Ă  la charge de P.......... VI. P......... est tenu de rembourser l’indemnitĂ© de dĂ©fense d’office prĂ©vue au chiffre III ci-dessus dĂšs que sa situation financiĂšre le permettra. Le prĂ©sident : Le greffier : Du Le jugement qui prĂ©cĂšde, dont le dispositif a Ă©tĂ© communiquĂ© par Ă©crit aux intĂ©ressĂ©s le 28 fĂ©vrier 2020, est notifiĂ©, par l'envoi d'une copie complĂšte, Ă  : - Me Nicolas Blanc, avocat (pour P.........), - Me Claire Neville, avocate (pour J.........), - MinistĂšre public central, et communiquĂ© Ă  : ‑ M. le PrĂ©sident du Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne, - Mme la Procureure du MinistĂšre public de l’arrondissement de Lausanne, - Service de la population (P........., [...].1976), - Service de protection de la jeunesse, UnitĂ© d’appui juridique, par l'envoi de photocopies. Le prĂ©sent jugement peut faire l'objet d'un recours en matiĂšre pĂ©nale devant le Tribunal fĂ©dĂ©ral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fĂ©dĂ©ral – RS 173.110). Ce recours doit ĂȘtre dĂ©posĂ© devant le Tribunal fĂ©dĂ©ral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expĂ©dition complĂšte (art. 100 al. 1 LTF). En vertu de l’art. 135 al. 3 let. b CPP, le prĂ©sent jugement peut, en tant qu'il concerne l’indemnitĂ© d’office, faire l’objet d’un recours au sens des art. 393 ss CPP devant le Tribunal pĂ©nal fĂ©dĂ©ral (art. 37 al. 1 et 39 al. 1 LOAP [Loi fĂ©dĂ©rale du 19 mars 2010 sur l’organisation des autoritĂ©s fĂ©dĂ©rales; RS 173.71]. Ce recours doit ĂȘtre dĂ©posĂ© devant le Tribunal pĂ©nal fĂ©dĂ©ral dans un dĂ©lai de dix jours dĂšs la notification de l’arrĂȘt attaquĂ© (art. 396 al. 1 CPP). Le greffier :