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AC.2021.0356

Datum
2023-03-08
Gericht
CDAP
Bereich
Schweiz

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			N° affaire: 
				AC.2021.0356
			
			
				Autorité:, Date décision: 
				CDAP, 08.03.2023
			  
			
				Juge: 
				AJO
			
			
				Greffier: 
				CFV
			
			
				Publication (revue juridique): 
				  
			
			
				Ref. TF: 
				  
			  
			
				Nom des parties contenant:  
				A......... et B......... /Municipalité de Chexbres, Direction générale de l'environnement DGE-DIRNA, C.........
			
				
	
	
		
			 MODIFICATION DES CIRCONSTANCES  PLAN D'AFFECTATION  RÉDUCTION{EN GÉNÉRAL}  ÉQUIPEMENT{CONSTRUCTION}  ACCÈS{EN GÉNÉRAL}  FORÊT  DISTANCE À LA FORÊT  BIOTOPE  PROTECTION DE LA NATURE ET DU PAYSAGE  ARBRE  AUTORISATION DE DÉFRICHER  PLACE DE PARC  HAUTEUR{EN GÉNÉRAL} 
			LATC-97-4LAT-15-2 (01.05.2014)LAT-17LAT-19-1LAT-21-2LAT-25aLFo-13 (1.7.2013)LLavaux-20LPNMS-4aLPNMS-5-bLPN-18bLPN-18-1bisLPN-18-1terLVLFo-27OPN-14-3RLATC-69-1-1-gRLPNS-15	
		
	


	
		
			
				Résumé contenant: 
				Rejet du recours contre le permis de construire six immeubles d'habitation. Pas de motif de contrôler à titre préjudiciel le plan d'affectation, que ce soit sur la base de l'art. 15 al. 2 LAT (réduction des zones à bâtir surdimensionnées), de l'art. 19 al. 1 LAT (voie d'accès adaptée) ou de l'art. 17 al. 1 let. d LAT (zone à protéger en raison d'un biotope) (consid. 2). La DGE n'a pas violé le droit en considérant que la limite de la forêt, constatée officiellement en 2012, n'avait pas à être revue (consid.3). Pas d'atteinte à des biotopes dignes de protection (consid.4). Rejet des griefs relatifs à l'abattage des arbres protégés en vertu d'un règlement communal (consid.4) et à la hauteur des bâtiments (consid.9).

Recours au TF pendant (1C.144/2023).

TRIBUNAL CANTONAL COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC

 

Arrêt du 8 mars 2023  

Composition

M. André Jomini, président; Mme Pascale Fassbind-de Weck et M. Philippe Grandgirard, assesseurs; Mme Cécile Favre, greffière.  

 

Recourants

A........, à ********,  

 

 

B........, à ********, tous les deux représentés par Me Cléa BOUCHAT, avocate à Lausanne, 

  

Autorité intimée

 

Municipalité de Chexbres, représentée par Me Philippe VOGEL, avocat à Vevey,   

  

Autorité concernée

 

Direction générale de l'environnement (DGE-DIRNA), à Lausanne,   

  

Constructrice

 

C........, à ********, représentée par Me Romaine ZURCHER, avocate à Genève,  

  

 

Objet

permis de construire           

 

Recours A........ et B........ c/ décision de la Municipalité de Chexbres du 13 octobre 2021 levant leur opposition et délivrant le permis de construire six immeubles d'habitation sur la parcelle no 1418 (CAMAC 203666).

 

Vu les faits suivants:

A.                     La société C........ (ci-après: C........, ou la constructrice) est propriétaire depuis le 19 mars 2020 de la parcelle n° 1418 du registre foncier, sur le territoire de la commune de Chexbres. Cette parcelle a une surface totale de 24'746 m2. Elle n'est pour l'essentiel pas bâtie (il s'y trouve quatre petits bâtiments anciens et rudimentaires, à usage agricole, représentant au total 225 m2 de surface au sol).

L'affectation du sol de la parcelle n° 1418 est régie par le plan d'extension partiel (PEP) "Prealpina", adopté par le Conseil communal de Chexbres le 2 juillet 1985 et approuvé par le Conseil d'Etat le 8 novembre 1985. La surface totale des terrains compris dans le périmètre du PEP est d'environ 3 ha. Outre la parcelle n° 1418, ce périmètre comprend la parcelle n° 1697, où se trouve le bâtiment d'un hôtel (l'hôtel Prealpina). Le PEP délimite trois secteurs, selon l'art. 1.2 de son règlement (RPEP). La parcelle n° 1418 est classée dans les secteurs 2 (destiné aux constructions nouvelles) et 3 (destiné à la détente et aux loisirs). La parcelle n° 1697 constitue le secteur 1 (destiné au maintien du bâtiment existant). En 1985, l'ensemble du périmètre du PEP appartenait au même propriétaire, D........; la Fondation E........ est devenue ensuite propriétaire de ces immeubles.

Le règlement du PEP a été modifié par le Conseil communal le 26 juin 2018 (cette modification étant entrée en vigueur le 5 février 2019), pour confirmer l'affectation hôtelière du secteur 1 et préciser la destination du périmètre d'implantation E dans le secteur 2 (où sont désormais autorisées certaines activités, outre l'habitation). Ce plan d'affectation spécial n'a pour le reste pas été révisé.

Au sud (en aval), la parcelle n° 1418 est longée par la route de Chardonne. Depuis cette route, une voie d'accès a été créée, une allée bordée d'arbres, qui monte jusqu'à l'hôtel. La partie supérieure de cette parcelle, en amont de l'allée (dans le secteur 3 du PEP) est occupée par une forêt. L'autoroute RN 9 passe à proximité directe, au nord.

Dans le voisinage, entre l'autoroute et la route de Chardonne, se trouvent des parcelles bâties, classées dans la zone de villas du plan des zones entré en vigueur en 1984. La zone du village, au centre de la localité, s'étend en direction de l'ouest, sous la zone de villas. La parcelle n° 1418 est à 500 m environ de la gare de Chexbres.

B.                     En juin 2013, la Fondation E........, alors propriétaire de la parcelle n° 1418, a soumis à la Municipalité de Chexbres (ci-après: la municipalité) une demande de permis de construire en vue de la réalisation de six immeubles d'habitation, dans les périmètres d'implantation délimités à l'intérieur du secteur 2 du PEP. Plusieurs oppositions ont été déposées lors de l'enquête publique, dont celle de A........ et B......... Ce dernier est propriétaire d'une parcelle voisine, de l'autre côté de la route de Chardonne, où se trouve son habitation (parcelle n° 546).

Le 16 mai 2014, la municipalité a levé les oppositions et délivré le permis de construire requis (n° 67/2013).

C.                     Des opposants – parmi eux A........ et B........ – ont recouru contre cette décision devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (CDAP).

Dans son arrêt du 27 juillet 2016 (cause AC.2014.0224), la CDAP a admis les recours "en tant qu'ils portent sur la délivrance du permis de construire n° 67/2013 et la levée des oppositions dans ce cadre." (ch. I du dispositif) et elle a par conséquent annulé les décisions de la municipalité du 16 mai 2014 (ch. IV du dispositif).

Par ailleurs, selon les termes du ch. II du dispositif de cet arrêt, la CDAP a statué ce qui suit: "La décision de constatation de la nature forestière rendue le 7 avril 2014 par la Direction générale de l'environnement, Inspection des forêts du 5ème arrondissement, est confirmée". Cette décision de la Direction générale de l'environnement (DGE), citée dans l'arrêt (let. D), est ainsi libellée:

"Evaluation du projet par rapport à la conservation de l'aire forestière

La forêt est figurée correctement sur le plan de situation. Elle correspond à la détermination par l'Inspecteur des forêts du 1er octobre 2012.

A.               Constatation de la nature forestière

En date du 1er octobre 2012, conformément aux dispositions forestières légales et à la directive interne de la DGE-FORET, l'inspecteur d'arrondissement a fixé les limites de la forêt sur le terrain (piquetage de la lisière) et les a fait reporter par un géomètre (également présent lors du piquetage) sur un plan de situation comprenant le fond cadastral.

Lors de cette constatation, la surface sans aménagements extérieurs (murs, etc.), présentant un aspect forestier dans son ensemble, notamment en ce qui concerne les essences, les fonctions forestières et le sol, a été soumis au régime forestier.

Bien qu'adjacents à l'aire forestière délimitée, les alignements d'arbres situés à l'ouest de la surface soumise au régime forestier, n'ont pas été considérés comme forêts, car l'aire occupée par ces alignements est régulièrement pâturée et/ou entretenue. Au vu de la configuration de ces boisements et l'exploitation poursuivie, c'est leur aspect «pâturage», «parc» ou «espace vert» qui l'emporte.

Décision

Au vu de ce qui précède, la Direction générale de l'environnement, Inspection des forêts du 5ème arrondissement, lève les oppositions concernant la constatation de la nature forestière.

B.               Dérogation au sens de l'article 5, al. 2, de la loi forestière vaudoise du 19 juin 1996 (depuis le 1er janvier 2014, art. 27 LVLFo et art 26 RLVLFo)

Suite à la modification d'implantation de l'aire de jeux et des bâtiments A2 et B (plan [...] du 24 février 2014 [...]), plus aucune construction ne se situe à moins de 10 mètres de la lisière forestière déterminée le 1er octobre 2012 par l'Inspecteur des forêts. [...]"

Dans les considérants de cet arrêt, la CDAP a exposé ce qui suit, à propos de l'aire forestière sur la parcelle n° 1418 (consid. 2b/bb et 4):

"2b/bb: En l'espèce, la constatation de la nature forestière a été ordonnée par le service compétent (SFFN) dans le cadre de la demande de permis de construire déposée courant 2012 par la constructrice [...], la lisière n'ayant pas encore été délimitée (art. 23 al. 3 let. a LVLFo); comme l'a confirmé la DGE-FORET dans la synthèse CAMAC du 7 avril 2014, l'inspecteur d'arrondissement a alors fixé les limites de la forêt sur le terrain (piquetage de la lisière) et les a fait reporter par un géomètre (également présent lors du piquetage) sur un plan de situation comprenant le fond cadastral (cf. let. D/a supra), conformément à la procédure prévue par l'art. 24 al. 2 LVLFo. La constructrice ayant renoncé à ce premier projet en même temps qu'elle déposait une nouvelle demande de permis de construire [...], la constatation de la nature forestière a par la suite été rattachée à cette nouvelle demande et a dès lors suivi les modalités de cette "procédure principale" (au sens de l'art. 24 al. 3 in fine LVLFo), la lisière forestière étant directement représentée sur le plan de situation du projet; dans le cadre de la synthèse CAMAC du 7 avril 2014, la DGE-FORET a constaté que la forêt était figurée correctement sur le plan de situation et levé les oppositions concernant la constatation de la nature forestière (art. 24 al. 4 LVLFo).

Il s'impose de constater que la procédure légale a été respectée. Quoi qu'en disent les recourants, la loi ne prévoit pas de procédure de constatation "contradictoire" de l'aire forestière en pareille hypothèse, pas davantage qu'elle ne prévoit que la décision de constatation de l'aire forestière devrait faire l'objet d'une enquête publique distincte de celle du permis de construire (bien plutôt, l'art. 24 al. 3 in fine LVLFo prévoit expressément le contraire). C'est ainsi dans le cadre de la procédure de permis de construire et sur la base du plan de situation ad hoc (sur lequel il est fait mention de la "lisière selon délimitation du 01.10.2012") que les tiers ont eu la possibilité de faire valoir leurs griefs en lien avec la délimitation de l'aire forestière, comme l'ont au demeurant fait certains des opposants dans le cas d'espèce. La décision de la DGE-FORET statuant sur leurs oppositions était ensuite susceptible de recours devant la cour de céans; on ne voit pas dans ces conditions en quoi la procédure suivie serait contraire au droit [...]. 

  1. Sur le fond, les recourants contestent en premier lieu la délimitation de l'aire forestière (telle qu'elle résulte du plan établi le 1er octobre 2012 par l'inspecteur des forêts [...]) confirmée par la DGE-FORET dans le cadre de la synthèse CAMAC du 7 avril 2014 et la levée de leurs oppositions sur ce point - étant rappelé qu'il a d'ores et déjà été constaté que leurs griefs portant sur la procédure suivie dans ce cadre ne résistaient pas à l'examen (cf. consid. 2b supra).

a-b) [portée de l'art. 2 LFo, ...]

c) En l'espèce, les recourants font en substance valoir que la détermination de l'aire forestière ne correspond pas à l'avancée réelle de la forêt, respectivement qu'il conviendrait de tenir également compte dans ce cadre du "massif arbusif" situé au sud/sud-ouest de la forêt telle que délimitée, voire du "pâturage" (ou de la "prairie", ou encore de la "clairière") dans le périmètre concerné; les recourants A........ et B........ relèvent en particulier dans leur écriture du 21 juillet 2015 que la surface non comptabilisée dépasserait les 2'000 m2, sans même tenir compte du "pâturage", et produisent à cet égard le plan suivant [...].

aa) La DGE-FORET a indiqué que les "alignements d'arbres" concernés n'avaient pas été considérés comme forêt dans la mesure où l'aire occupée par ces alignements était régulièrement pâturée et/ou entretenue et qu'au vu de la configuration de ces boisements et de l'exploitation suivie, c'était leur aspect "pâturage", "parc", ou "espace vert" qui l'emportait [...]; dans son écriture du 23 janvier 2015, elle a encore indiqué que l'on ne trouvait jamais de pâturage boisé (au sens de l'art. 2 OFo) sur le plateau vaudois.

Entendu à l'occasion de l'audience du 27 mai 2015, l'inspecteur forestier ayant participé à la "levée de lisière" reproduite sur le plan du 1er octobre 2012 a précisé que ces éléments boisés avaient été exclus de l'aire forestière pour des motifs qui tenaient à la largeur des cordons concernés, à la densité de la végétation ou encore à l'âge des arbres. Il a encore relevé que ce cordon boisé se situait entre une zone où l'herbe était fauchée (qui faisait notamment office d'aire de jeux) et une zone de pâturage, laquelle n'avait pas une couverture végétale suffisamment dense pour être qualifiée de forêt et ne comprenait que peu d'arbres et de végétation typiquement forestière. Les repousses d'arbres étaient en outre peu nombreuses et n'avaient qu'un à deux ans au maximum; il ne s'agissait donc pas d'une clairière intégrée dans une zone forestière, le terrain n'ayant jamais été boisé. Il apparaissait enfin d'emblée qu'il ne s'agissait pas d'une prairie maigre, de sorte qu'il n'avait pas été procédé à un relevé précis de la flore et de la faune - cette dernière ne constituant au demeurant pas un critère permettant de définir une forêt.  

bb) Il s'impose de constater que les griefs des recourants ne permettent pas de remettre en cause la délimitation de l'aire forestière litigieuse.

Il convient de relever d'emblée que la surface forestière délimitée sur le plan établi par les recourants A........ et B........ reproduit ci-dessus ne constitue pas, au vu de son manque de continuité et de la densité des peuplements concernés, un tout cohérent qu'il conviendrait d'appréhender comme un ensemble; au vrai, cette délimitation apparaît totalement artificielle. Le tribunal a constaté lors de l'inspection locale du 27 mai 2015 la présence de cordons boisés ayant une forme de "fer à cheval" [...], auquel les autres arbres mis en évidence par les intéressés ne sont pas directement reliés - il s'agit bien plutôt de boisements épars (parfois constitué d'un seul arbre).

Cela étant, l'inspecteur forestier a exposé de façon convaincante à l'occasion de l'inspection locale les motifs pour lesquels ces cordons boisés avaient été exclus de l'aire forestière, compte tenu notamment de leur largeur, de la densité de la végétation et de sa situation. La DGE-FORET et l'inspecteur forestier ont en outre indiqué de façon détaillée les motifs pour lesquels les parties non boisées situées dans le périmètre en cause ne pouvaient être comprises dans l'aire forestière, et ce ni à titre de pâturages boisés (art. 2 OFo; art. 3 al. 1 RLVLFo) - les recourants ne contestent pas que de tels pâturages ne se trouvent jamais sur le plateau vaudois - ni à titre de clairière intégrée dans une zone forestière; les surfaces concernées n'ont en effet jamais été boisées (en attestent au demeurant différentes photographies de la situation antérieure produites par les recourants), et les repousses d'arbres étaient trop peu nombreuses et trop jeunes. C'est le lieu de rappeler que le moment décisif pour apprécier la nature forestière d'un peuplement correspond à celui de la décision de première instance (cf. ATF 124 II 85 consid. 4d; ATF 1C.169/2009 du 14 octobre 2009 consid. 3.1), soit en l'occurrence le 7 avril 2014 [...]; l'évolution de la situation depuis lors, s'agissant notamment de l'âge et du nombre des repousses, n'a pas à être prise en compte dans ce cadre.

Pour le reste et compte tenu de ce qui précède, ni les essences des arbres concernés ni le fait que la "prairie" en cause n'ait plus été pâturée depuis quelques années ne sauraient avoir une incidence déterminante s'agissant de qualifier la surface concernée en tant que forêt, quoi qu'en disent les recourants A........ et B........ dans leur écriture du 21 juillet 2015. Il n'apparaît pas davantage que ces surfaces devraient être qualifiées de forêt en tant qu'elles exerceraient des "fonctions de la forêt" [...]; en particulier, si les recourants ont fait valoir à l'occasion de l'inspection locale du 27 mai 2015 qu'il convenait de tenir compte de la faune, on ne voit pas que cette dernière bénéficierait sur les surfaces concernées d'un habitat irremplaçable obligeant à retenir l'existence d'une fonction sociale; le tribunal fait sienne à cet égard (et d'une façon générale) l'appréciation de l'inspecteur forestier, en ce sens qu'un relevé précis de la faune et de la flore ne se justifie pas, la qualification en tant que forêt des boisements et de la "clairière" apparaissant d'emblée exclue; les requêtes respectives des recourants dans le sens de la mise en œuvre d'une expertise sur ce point doivent en conséquence être rejetées. 

cc) En définitive, le tribunal considère ainsi que la DGE-FORET n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation ni violé le droit en confirmant la délimitation de l'aire forestière telle que résultant du plan du 1er octobre 2012 (reproduite sur le plan de situation du projet litigieux), considérant que les autres boisements étaient bien plutôt assimilables à un "parc" ou un "espace vert", et en levant les oppositions formées à l'encontre de cette délimitation."

Les considérants de l'arrêt du 27 juillet 2016 contiennent en outre les passages suivants, à propos de la validité du PEP (consid. 5):

"Les recourants soutiennent également que le PEP "Prealpina" serait obsolète et devrait faire l'objet d'une révision (ou d'un réexamen). Ils concluent ainsi (implicitement à tout le moins) à l'annulation du permis de construire pour ce motif et au renvoi du dossier à la municipalité intimée afin qu'elle entreprenne une telle révision.

a-b) [portée de l'art. 21 LAT et de l'art. 63 aLATC, ...]

c) En l'occurrence, les recourants soutiennent en premier lieu que le PEP "Prealpina" ne serait plus conforme à la législation applicable. Ils invoquent dans ce cadre la teneur de la fiche sectorielle ad hoc du PDCom du 26 février 2001 ainsi que les modifications respectives de LAT, du Plan directeur cantonal (PDCant) et de la LLavaux, en référence en particulier à l'obligation pour la commune de réduire ses zones à bâtir surdimensionnées. 

aa) Le PEP "Prealpina" est entré en vigueur en 1985 (soit il y a une trentaine d'années) et n'a fait l'objet d'aucune concrétisation depuis lors. Dans le cadre de la fiche sectorielle du PDCom du 26 février 2001 à laquelle les recourants se réfèrent, il était déjà relevé qu'aucune construction n'avait été réalisée sur la base de cette planification spéciale et que "compte tenu de l'évolution du contexte foncier et de la conjoncture, il conv[enait] de revoir le contenu du plan en vigueur", avec pour principe général la mise en œuvre d'un plan de quartier visant à renforcer les équipements liés au tourisme, à l'accueil et au sport; il était alors en substance prévu de déplacer le "lieu collectif de détente et de sport" (correspondant au secteur 3 du PEP "Prealpina") dans la partie sud de la parcelle n° 1418 (l'avancée de la forêt dans la partie nord de cette parcelle étant d'ores et déjà relevée), de prolonger le "secteur hôtelier" (correspondant au secteur 1 du PEP "Prealpina") dans sa partie sud jusqu'à la route de Chardonne (afin d'assurer un "dégagement visuel") et de réduire le "secteur des constructions" (correspondant au secteur 2 du PEP "Prealpina") en conséquence [...]. Il n'a toutefois pas été procédé aux différentes modifications prévues.

Le périmètre concerné par le PEP "Prealpina" a désormais été intégré dans le "périmètre du centre" de la commune de Chexbres dans le cadre du Centre régional Puidoux-Chexbres ([dans les faits, à la lettre C, il est indiqué que ce périmètre a été adopté par la municipalité le 8 avril 2014 et approuvé par le SDT le 16 avril 2014 [...]), en accord avec les autorités cantonales. Un tel "périmètre du centre" est destiné à être reporté sur la carte du PDCant et intégré aux planifications communales (cf. la directive d'application des mesures B11 et B12 du PDCant intitulée "Méthode pour délimiter le périmètre des centres" éditée le 26 janvier 2011 par le SDT, ch. 3.1 et 3.3 p. 7) - la municipalité intimée a au demeurant expressément indiqué que le PDCom et le Plan général d'affectation de la commune étaient en cours de révision dans ce sens; il est ainsi assimilable à une planification directrice (qui n'est pas en tant que telle soumise à enquête publique; cf. art. 35 ss LATC s'agissant des Plans directeurs communaux et des Plans directeurs localisés).

A ce stade, il s'impose en conséquence de constater que le PDCom du 26 février 2001, singulièrement la fiche sectorielle consacrée au PEP "Prealpina", n'est plus réputée correspondre aux intentions communales (en accord avec les autorités cantonales) s'agissant de l'affectation du sol dans le cadre du périmètre concerné; sous cet angle, c'est bien plutôt le PDCom du 26 février 2001 qui pourrait être qualifié d'obsolète - dans la mesure où il en résulte une limitation conséquente de la zone constructible, alors que la création de nouvelles zones à bâtir et la densification sont bien plutôt en principe encouragées dans les "périmètres du centre" (cf. PDCant, stratégie A et mesure A11).

bb) Quoi qu'il en soit, le statut du sol est déterminé par le plan d'affectation en vigueur (soit en l'espèce le PEP "Prealpina") et ne peut dépendre directement d'un plan directeur; le PDCom du 26 février 2001 auquel les recourants se réfèrent, en particulier, ne constitue qu'un "plan d'intention servant de référence et d'instrument de travail" et ne lie pas directement les autorités (contrairement au PDCant approuvé par le Conseil fédéral; cf. art. 31 LATC et arrêt AC.2015.0091 du 24 mars 2016 consid. 2). La délimitation du "périmètre du centre" de la commune étant également assimilable, comme on vient de la voir, à une planification directrice, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les griefs des recourants en tant qu'ils portent directement sur l'intégration du PEP "Prealpina" dans ce périmètre [...]. 

cc) Cela étant, se référant notamment, implicitement à tout le moins, à l'art. 15 al. 2 LAT (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er mai 2014) - dont il résulte que "les zones à bâtir surdimensionnées doivent être réduites" -, respectivement aux modifications de la LLavaux et du PDCant dans le même sens, les recourants font valoir que le périmètre du PEP "Prealpina" serait en premier lieu concerné par une telle obligation de réduction des zones à bâtir, compte tenu de sa situation en périphérie du territoire communal.

Il n'est pas contesté que la parcelle sur laquelle est prévu le projet litigieux est en l'état située en zone constructible. Pour le reste, la question de la réduction des zones à bâtir surdimensionnées relève de la procédure de planification et n'a en principe pas sa place dans la procédure de permis de construire; sous cet angle, la modification de la LAT en vigueur depuis le 1er mai 2014 ne remet a priori pas en cause le droit des propriétaires d'obtenir un permis de construire pour un projet conforme à un plan en vigueur [...]. En l'occurrence et quoi qu'en disent les recourants, il n'apparaît pas que des circonstances exceptionnelles justifieraient de refuser le permis de construire litigieux en lien avec l'obligation pour la commune de réduire ses zones à bâtir. La parcelle concernée se situe en effet dans un environnement largement bâti (même si ce caractère bâti est relativement peu dense, notamment au sud de la parcelle); le fait qu'elle se situe non loin de la frontière du territoire communal est sans incidence dans ce cadre, et on ne voit pas pour le reste en quoi son affectation en zone constructible ne serait en tant que telle pas conforme aux principes des planifications directrices du PDCant ou de la LLavaux. A cela s'ajoute que, comme déjà relevé, la parcelle en cause a été intégrée dans le "périmètre du centre" de la commune, ce qui atteste à tout le moins de la volonté concordante des autorités communales et cantonales de ne pas remettre en cause son caractère constructible; on ne voit manifestement pas en quoi la seule volonté contraire des recourants justifierait que le permis de construire litigieux soit refusé dans l'attente d'une hypothétique révision du PEP "Prealpina" conforme à leurs désirs, lesquels ne correspondent aucunement à l'intention affichée des autorités.

d) Les recourants invoquent par ailleurs une modification des circonstances justifiant à leur sens que le PEP "Prealpina" soit révisé.

aa) Les intéressés se réfèrent à cet égard à l'avancée de la forêt ainsi qu'à l'existence de nombreux arbres protégés sur la parcelle [...].

Il n'est pas contesté que la situation telle qu'elle se présentait lorsque le PEP "Prealpina" a été adopté a évolué s'agissant de l'arborisation; c'est au demeurant en référence à ce point que le SDT a relevé dans son rapport de synthèse d'examen préalable du 10 avril 2014 que ce plan était "obsolète" [...]. Cela étant, on ne voit pas en quoi le fait que le secteur 3 ne puisse plus être concrétisé conformément à sa destination, ou seulement dans une mesure restreinte - d'une part en effet, la partie est de ce secteur n'est pas concernée par la forêt, et il n'apparaît pas d'autre part qu'il serait a priori exclu d'intégrer la forêt dans une telle zone de détente -, remettrait en tant que tel en cause l'entier du PEP "Prealpina". [...]. Dans cette mesure, les modifications des circonstances dont se prévalent les recourants en lien avec l'arborisation seraient le cas échéant de nature à justifier un réexamen de la destination du secteur 3, voire une adaptation du "périmètre du centre" afin d'en exclure la forêt (selon la "Méthode pour délimiter le périmètre des centres" du SDT déjà mentionnée, les forêts font partie des "secteurs à exclure en périphérie du périmètre du centre" [...]); il n'apparaît pas en revanche qu'elles justifieraient la remise en cause du PEP "Prealpina" dans son entier et obligeraient dans ce cadre à refuser le permis de construire litigieux dans l'attente de la révision de ce plan.

bb)  [...] On ne saurait en effet considérer que la route (cantonale) de Chardonne ne permettrait pas de desservir les bâtiments érigés sur la parcelle concernée; le fait que le trafic sur cette route ait été estimé à environ 4'400 véhicules par jour et que le projet litigieux soit réputé entraîner une augmentation d'environ 200 mouvements [...], soit une augmentation du trafic de moins de 5 %, ne saurait à l'évidence suffire à remettre en cause la planification elle-même sous l'angle de l'équipement de la parcelle. [...].

e) En définitive, il s'impose de constater que les arguments des recourants selon lesquels les modifications des dispositions légales respectivement des circonstances justifieraient un contrôle préjudiciel du PEP "Prealpina" ne résistent pas à l'examen. Il convient bien plutôt d'examiner la réglementarité du projet litigieux en regard des dispositions réglementaires en vigueur."

Le motif de l'admission du recours (cf. ch. I du dispositif) était une violation des normes du règlement du PEP (RPEP) sur la hauteur des façades ou de certains bâtiments (consid. 6 de l'arrêt du 17 juillet 2016; à propos de cette réglementation, cf. consid. 9 infra).

D.                     A........ et B........ ont déposé un recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal, en demandant l'annulation de la décision de constatation de la nature forestière. La Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a rejeté ce recours par un arrêt rendu le 6 juillet 2017 (cause 1C.430/2016). Elle a en particulier considéré ce qui suit:

"4. [...] Les recourants se plaignent de ce que la cour cantonale n'a pas ordonné une expertise "permettant d'infirmer ou de confirmer les dires du garde-forestier datant de 2012". Celle-ci a en effet jugé dans son arrêt qu'un relevé précis de la faune et de la flore ne se justifiait pas, la qualification en tant que forêt des boisements et de la clairière litigieux apparaissant d'emblée exclue. La cour cantonale s'est référée au préavis de la DGE-FORET figurant dans la synthèse CAMAC, lui-même fondé sur les observations de l'inspecteur forestier ayant établi le plan de limite forestière en 2012. Elle s'est également référée aux écritures déposées par ce service en cours de procédure, aux explications données par le spécialiste lors de l'inspection locale, ainsi qu'aux observations de ses propres membres à cette occasion. 

Comme on le verra ci-dessous, les constatations retenues et l'appréciation des faits sont suffisamment étayées. Pour justifier leur réquisition de preuve, les recourants se contentent de contester appellatoirement les constatations de l'inspecteur forestier. Certes, celui-ci a exclu de se référer au critère de la faune alors que le message du Conseil fédéral du 29 juin 1988 concernant la loi sur les forêts (FF 1988 III 172 ch. 21) identifiait la fonction sociale de la forêt, entre autres, en ce qu'elle pouvait "offr[ir] à la faune et à la flore un habitat irremplaçable". Contrairement à ce qu'affirment les recourants, il ne s'agit toutefois pas d'un critère posé par la loi. Sa pertinence peut évidemment varier de cas en cas. Tout arbre ou bosquet est susceptible d'offrir un abri à la faune, alors que tout arbre ou bosquet n'est pas nécessairement une forêt. Vu la description et l'appréciation circonstanciée de la nature du secteur, il n'y a pas lieu de remettre en cause les compétences et l'objectivité de l'inspecteur forestier qui a jugé un relevé de la faune inutile en l'espèce. 

Pour le reste, outre que la LAT n'est pas applicable à la désignation de l'aire forestière (art. 18 al. 3 LAT), il n'apparaît pas que la cour cantonale aurait abusivement restreint son pouvoir d'examen. Dans un domaine technique requérant des connaissances spécifiques, comme en l'espèce en matière biologique, il est usuel et même souhaité que le juge s'en remette à l'avis d'experts et/ou des services spécialisés dans la mesure où la pertinence de ces avis est consciencieusement examinée. Or, les premiers juges se sont livrés à une analyse détaillée des caractéristiques biologiques des lieux relevées par les autorités spécialisées, de sorte que l'usage qu'ils ont fait de leur pouvoir d'appréciation n'est pas critiquable. 

[...]

  1. Sur le fond, les recourants critiquent l'aire forestière retenue par les autorités cantonales. Ils affirment qu'un boisement d'une surface de plus de 2'600 m2 en a à tort été exclue, violant ainsi les limites quantitatives fixées par les droits fédéral et cantonal. [...]

6.2. La surface de 2'600 m2 dont font état les recourants est un cordon boisé en forme de fer à cheval entourant un pré, et situé en aval de la zone qualifiée de forêt par les autorités cantonales. Celles-ci ont constaté que la largeur du cordon était insuffisante pour satisfaire aux critères quantitatifs posés par le droit cantonal. En outre, d'un point de vue qualitatif, la densité, l'âge et les essences des arbres ne sont pas typiques de peuplements forestiers. Le secteur litigieux remplit selon elles plus les fonctions d'un parc que d'une forêt, l'aire étant régulièrement pâturée et entretenue. L'arrêt attaqué précise que les boisements sont épars, parfois même constitués d'un seul arbre et sans continuité. L'OFEV confirme cette appréciation, en se référant notamment à la couverture du sol qui ne présente pas les caractéristiques végétales d'un sol forestier. L'office fédéral souligne en outre les importantes différences avec la surface voisine reconnue comme forêt. L'OFEV se rallie également à la position des autorités cantonales, exposant que les lieux ne constituent pas un pâturage boisé au sens de la législation fédérale, faute de tradition d'exploitation sylvicole.  

Vu ce qui précède, il n'y a pas de raison de remettre en cause l'appréciation concordante de l'inspecteur forestier, de la cour cantonale composée notamment d'assesseurs spécialisés et du spécialiste de la division forêt de l'OFEV. Les recourants se raccrochent pour l'essentiel à l'argument de la surface pour soutenir la nature forestière du secteur. Or, en cet endroit, les arbres ne sont pas dans une continuité ni dans une densité telles que la surface puisse être considérée comme un tout. Dans de telles circonstances, la qualité des arbres d'essence indigène du secteur litigieux, relevée par la cour cantonale, n'est pas non plus propre à conférer un caractère forestier à celui-ci. Certes, la spécification des essences aurait été un indicateur supplémentaire qui aurait sans doute donné le sentiment d'une plus grande transparence aux opposants. Cela étant, les spécialistes s'accordent à dire que les essences forestières ne sont pas suffisamment présentes et rien ne justifie que cette constatation des faits soit remise en cause (cf. art. 97 al. 1 et 105 al. 1 LTF). 

Enfin, le paradoxe relevé par les recourants s'agissant de l'absence de fonction sociale de la forêt due à la présence de barrières n'en est pas un. Il ne s'agit pas en l'occurrence d'un espace qui avait vocation forestière et a au fil du temps été fermé au public, mais bien d'une prairie entretenue entourée d'un cordon boisé. En effet, si les caractéristiques (essences indigènes, valeur des arbres, fonction de délassement) sur lesquelles s'appuient les recourants peuvent être celles d'une surface forestière, elles sont également celles d'un parc que la législation exclut précisément de la notion de forêt. 

En définitive, vu la retenue que s'impose le Tribunal fédéral à l'égard de l'appréciation des circonstances locales, il y a lieu de confirmer l'arrêt cantonal en ce sens que le secteur litigieux n'est pas une forêt au sens de la législation fédérale." 

E.                     Le 27 mai 2021, C........ a déposé une demande de permis de construire pour un projet consistant à édifier, sur la parcelle n° 1418, 6 immeubles d'habitation avec 65 places de parking en sous-sol et 21 places extérieures, après démolition de quatre bâtiments existants.

Les nouveaux immeubles, soit les bâtiments A1, A2, B, C, D et E, sont prévus à l'intérieur des périmètres d'implantation A, B, C, D et E du PEP, respectivement. Le plan de situation reporte l'aire forestière, au nord de la parcelle, avec la "lisière légalisée le 29.10.2012". Il figure également une bande de 10 m depuis cette lisière, les constructions projetées (bâtiments d'habitation et parkings souterrains) étant implantés au-delà de cette limite.

F.                     Avant cette démarche, C........ avait présenté son projet à la Commission consultative de Lavaux, son terrain étant situé à l'intérieur du "territoire d'agglomération I" du plan de protection de Lavaux (cf. art. 20 de la loi du 12 février 1979 sur le plan de protection de Lavaux [LLavaux; BLV 701.43]). Après deux préavis, respectivement du 27 octobre et du 24 novembre 2020, dans lesquels cette Commission proposait quelques modifications, elle a établi un dernier préavis, du 22 décembre 2020, qui comporte encore certaines remarques ou observations mais qui conclut que moyennant leur prise en considération, le projet pourra être mis à l'enquête publique.

G.                     Le dossier de la demande de permis de construire a été mis à l'enquête publique du 19 juin au 18 juillet 2021. A........ et B........ ont déposé une opposition le 16 juillet 2021.

H.                     Le dossier a été transmis aux services concernés de l'administration cantonale. Les autorisations spéciales et préavis de ces services ont été regroupés dans la synthèse CAMAC n° 203666 du 11 août 2021. Les textes suivants figurent dans cette synthèse:

"La Direction des ressources et du patrimoine naturels, Division Inspection cantonale des forêts du 5ème arrondissement (DGE/DIRNA/FO05) délivre l'autorisation spéciale requise aux conditions impératives ci-dessous:

CONSTATATION

L´aire forestière figurée sur le plan de situation est conforme à la nature des lieux selon le levé de lisière réalisé par l’inspecteur des forêts en date du 01.10.2012 (article 23 LVLFo). Toutefois, il convient de préciser que l’aire forestière n’ayant pas été constatée dans le cadre de la révision du plan d’affectation au sens des articles 10 al. 2 et 13 al. 1 LFo, celle-ci figure à titre indicatif et est déterminée par la nature des lieux, conformément à l’article 1 RLVLFo.

Le projet empiète dans la bande inconstructible des 10 mètres à la forêt et requiert l´octroi d´une dérogation au sens des art. 27 LVLFo et 26 RLVLFo (distance par rapport à la forêt).

Bien que le projet ait fait l’objet de nombreuses oppositions, aucune ne concerne la législation forestière.

Préavis

En conséquence, l'Inspection des forêts du 5ème arrondissement préavise favorablement le projet aux conditions impératives suivantes:

  1. Avant le début des travaux, un contact sera pris avec le garde forestier [...] pour déterminer le périmètre du chantier, les éventuels arbres à abattre et les mesures à prendre pour minimiser l'impact des travaux sur la forêt.

  2. Préalablement au début des travaux, une barrière de chantier [...] sera installée à au moins 2 mètres de la lisière forestière [...].

  3. En dehors des travaux nécessaires à la réalisation du projet tel que figuré sur les plans de situation et des aménagements extérieurs, aucun aménagement ne sera autorisé à moins de 10 mètres de la forêt. Cela comprend toute construction, terrassement de +/- 50 cm et changement de nature du sol.

  4. Pendant les travaux, toutes mesures utiles seront prises pour éviter des dommages à la forêt, aux arbres, au sol et aux fonctions forestières.

  5. Aucun terrassement ou mouvement de terre ne sera réalisé à moins de 2 mètres de la forêt.

  6. Aucun déblai ou matériau ne sera déposé en forêt ou à moins de 2 mètres de la lisière.

  7. Après les travaux, une visite du chantier sera organisée avec le garde forestier pour vérifier la conformité des travaux réalisés et des mesures de remise en état définies par la DGE-Forêt.

CONCLUSION ET RECOMMANDATION

L’Inspection des forêts du 5e arrondissement signale que l'implantation retenue résulte du libre choix du requérant qui en assume tous les risques et inconvénients durant et après les travaux (chute de branches ou d'arbres, ombre, humidité, etc.). Tout traitement spécifique de la forêt lié à ces risques et inconvénients est soumis à l'autorisation du Service forestier."

– A propos de la protection du site naturel en dehors de la forêt:

"La Direction des ressources et du patrimoine naturels, Division Biodiversité et paysage (DGE/DIRNA/BIODIV) préavise favorablement au présent projet dont l'exécution devra respecter les conditions impératives ci-dessous:

[...] Des arbres devront être abattus pour réaliser les constructions. Le plan des aménagements extérieures prévoit des plantations de remplacement.

Une partie de la parcelle n’a pas été entretenue. De la végétation broussailleuse s’est installée sur les secteurs abandonnés. Cette broussaille est susceptible de constituer un biotope.

La DGE-BIODIV considère qu'il est de la responsabilité des autorités communales de s'assurer que les conditions d'abattage soient bien remplies. Cependant, le projet n’est pas complet pour ce qui concerne la protection des biotopes et des arbres à maintenir.

La parcelle est située dans un vallon exposé à la vue. L’intégration des constructions dans le site doit être prévue.

Considérant ce qui précède, la DGE-BIODIV préavise favorablement la réalisation du projet pour autant que les conditions suivantes soient prises en considération:

I.                       La constructrice demande par ailleurs une autorisation d'abattre certains arbres présents sur sa parcelle, en dehors de l'aire forestière. Le dossier de la demande de permis de construire contient un rapport du bureau F........, à ********, intitulé "Concept paysager". Ce rapport contient des indications au sujet de l'arborisation, à savoir une "liste des abattages pré-projet" (29 arbres, inventoriés en juillet 2012 et dont l'abattage a été constaté lors d'une visite sur site le 9 décembre 2020) et une "liste des abattages projetés". Le rapport précise que 24 arbres devraient être abattus dans le cadre du projet – 1 séquoia géant, 10 arbres fruitiers, 3 bouleaux, 9 pins sylvestres, 1 épicéa –, en fonction des critères suivants: "empiétement direct ou proche (< 5 m) des bâtiments et ouvrages en sous-sol projetés; modifications topographiques, ouvrages en surface non déplaçables (accès rampe parking); état sanitaire des sujets". Il est encore indiqué que l'abattage de ces sujets devra être compensé par la plantation d'un nombre d'arbres majeurs d'une valeur équivalente (soit 24 arbres) et que 37 arbres sont conservés dans le cadre du projet. S'agissant des arbres existants, ce rapport reprend les données d'un inventaire réalisé en 2012 par le bureau G.........

J.                      Etant donné que la DGE (DGE/DIRNA/BIODIV) demandait à la constructrice, dans son préavis, de compléter le dossier, le bureau H......., à ********, a établi le 14 septembre 2021 un rapport intitulé "complément nature et paysage", qui contient un inventaire des arbres et autres valeurs naturelles sur le site et qui propose des mesures compensatoires (à propos du remplacement des arbres, des structures buissonnantes et de l'intégration des bâtiments avec la végétation). Ce rapport précise (p. 5-6) que le nouvel inventaire effectué révèle la présence dans le parc de 76 arbres, dont 14 fruitiers (pommiers, poiriers et noyers). 24 arbres ont été ajoutés par rapport à l'inventaire de 2012 (principalement des rejets de souches d'érables sycomores et de frênes, au nord-ouest de la parcelle). Dans le cadre du projet, 25 arbres devront être abattus, dont 9 arbres fruitiers; il indique notamment quels arbres montrent des signes de décrépitude évidents ou présentent des problèmes de sécurité. Le rapport H........ décrit par ailleurs des "mesures de compensation des arbres et autres valeurs naturelles impactées par les travaux" (p. 8 ss). Le biologiste de la DGE/DIRNA/BIODIV a pris position sur ce rapport en retenant qu'il correspondait à ce qui avait été demandé dans la synthèse CAMAC; il a accepté ces propositions en demandant que les travaux d'abattage et de débroussaillage se réalisent en dehors de la période de reproduction de la faune sauvage. 

K.                     Le 13 octobre 2021, la municipalité a délivré le permis de construire requis en rejetant les oppositions. Cette décision comporte l'autorisation d'abattre les arbres mentionnés dans le rapport H........ du 14 septembre 2021, avec les mesures de compensation (voir les conditions particulières communales, qui se réfèrent à ce rapport). Le permis de construire (n° 12/2020) reprend le contenu de la synthèse CAMAC, sous le titre "conditions particulières cantonales", et il prévoit que ces conditions particulières font partie intégrante de l'autorisation.

L.                      Agissant le 12 novembre 2021 par la voie du recours de droit administratif, A........ et B........ demandent à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal de réformer la décision de la municipalité du 13 octobre 2021, ainsi que les autorisations spéciales contenues dans la synthèse CAMAC, dans le sens d'un refus du permis de construire. A titre subsidiaire, ils concluent à l'annulation des décisions précitées.

Dans sa réponse du 31 janvier 2022, la municipalité conclut au rejet du recours.

Dans sa réponse du 31 janvier 2022, la constructrice conclut au rejet du recours ainsi qu'à la confirmation des décisions attaquées.

Dans sa réponse du 31 janvier 2022, la DGE conclut au rejet du recours.

Les recourants ont déposé une réplique le 22 mars 2022, en confirmant leurs conclusions.

La constructrice s'est déterminée sur la réplique par mémoire du 21 avril 2022, en confirmant également ses conclusions.

Les recourants et la constructrice ont encore écrit au tribunal, respectivement les 11 et 16 août 2022.

M.                    La Cour a procédé à une inspection locale le 23 août 2022, en présence des parties.

N.                     Le 2 septembre 2022, la DGE a adressé au tribunal la lettre suivante:

"Suite à l'inspection locale du 23 août 2022, DGE-FORET souhaite rectifier les déterminations qu'elle a produites le 22 janvier 2022.

Certes, la lisière forestière a été levée en 2021 [sic] et mise à l'enquête en 2013 avec la demande de permis de construire. En revanche, elle n'a pas été reportée sur le PEP "Prealpina". Par conséquent, la conception dynamique de la forêt continue de s'appliquer sans restriction et l'aire forestière a pu s'étendre au détriment de la zone à bâtir depuis 2012."

Les déterminations du 22 janvier 2022, auxquelles il est fait référence, figurent dans la réponse de la DGE du 31 janvier 2022. Le passage pertinent est le suivant:

"c) Dérogation à la limite inconstructible de la forêt

En l'espèce, la constatation de la nature forestière a été ordonnée par le service compétent dans le cadre de la demande de permis de construire déposée courant 2012 par la Fondation E........, la lisière n'ayant pas encore été délimitée (art. 23 al. 3 let. a LVLFo); comme l'a confirmé la DGE-FORET dans la synthèse CAMAC du 7 avril 2014. [...]

La constructrice ayant renoncé à ce premier projet en même temps qu'elle déposait une nouvelle demande de permis de construire, la constatation de la nature forestière a par la suite été rattachée à cette nouvelle demande [...], la lisière forestière étant directement représentée sur le plan de situation du projet; dans le cadre de la synthèse CAMAC du 7 avril 2014, la DGE-FORET a constaté que la forêt était figurée correctement sur le plan de situation du projet et levé les oppositions concernant la constatation de la nature forestière (art. 24 al. 4 LVLFo).

La lisière a été constatée selon les règles en vigueur puisque le droit vaudois permet une constatation d'office en cas de demande de permis de construire à proximité d'une lisière (1C.430/2016). Le fait que des arbres aient poussé entre 2012 et 2021 ne change rien à la lisière délimitée en 2012."

O.                     Les recourants ont déposé une nouvelle écriture le 12 septembre 2022. La constructrice s'est déterminée à ce propos le 15 septembre 2022, puis elle a complété ses déterminations le 23 septembre et le 19 octobre 2022.

P.                     Le 29 novembre 2022, les recourants ont déposé une requête de mesures provisionnelles, tendant à ce qu'interdiction soit faite à la constructrice de procéder à la coupe, l'élagage ou l'abattage de quelconque arbre situé sur la parcelle n° 1418. Elle se référait à un permis de coupe de l'Inspection cantonale des forêts, délivré à la constructrice le 25 octobre 2022, autorisant la coupe de 8 résineux et 14 feuillus, dans le périmètre de la forêt existante. La constructrice s'est déterminée sur cette requête le 30 novembre 2022, en concluant à son rejet.

Par décision du 5 décembre 2022, le juge instructeur a rejeté la requête de mesures provisionnelles. Il a indiqué que le sort des frais et dépens de cette décision incidente serait fixé dans la décision finale.

Q.                     Le permis de coupe précité a par ailleurs fait l'objet d'un recours à la CDAP, déposé le 29 novembre 2022 par A........ et B......... Ce recours a été déclaré irrecevable par un arrêt rendu le 8 décembre 2022 (cause AC.2022.0411).

R.                     Les recourants ont produit, avec leur mémoire de recours, un rapport du 11 novembre 2021 du bureau I........, à ********, intitulé "Expertise biologique". Avec leur réplique, ils ont produit un rapport complémentaire de ce bureau du 16 février 2022. Ils ont par ailleurs produit un rapport du 26 juillet 2022 du président du J........ (J........), à propos de la valeur écologique du lieu-dit "En Perche" (soit le périmètre du PEP).

La constructrice a produit un rapport du 17 janvier 2022 établi par le bureau K........, à ********, intitulé "Analyse de la situation du projet de construction sur la parcelle n° 1418 de la commune de Chexbres"; ce rapport analyse les milieux naturels présents sur le site. La constructrice a également produit deux rapports complémentaires du bureau H........, du 15 avril 2022 (complément d'information des arbres nos 1 et 3) et du 22 septembre 2022 (complément à la planification de la végétation arborée). Ce dernier rapport décrit une mesure de compensation complémentaire dans le cadre de la réalisation du projet, à savoir la plantation de six arbres supplémentaires; il indique par ailleurs la localisation des structures buissonnantes et cordons boisés qui doivent être déplacés et réaménagés. Dans un courrier du 23 septembre 2022, se référant à ce dernier rapport, la constructrice s'est engagée, dans le cadre du projet, à planter 6 arbres indigènes supplémentaires, en sus des 24 arbres de compensation d'ores et déjà avalisés dans le cadre du permis de construire. La municipalité a pris position à ce sujet le 14 octobre 2022, en indiquant qu'elle ajouterait cette proposition comme charge au permis de construire.

S.                     A ce stade, il n'a pas été statué sur les réquisitions suivantes des recourants:

– la production de tous les permis de construire délivré à Chexbres depuis le 1er janvier 2015;

– la production de toutes les autorisations pour les abattages d'arbres délivrées pour la parcelle n° 1418, en particulier s'agissant des 29 arbres abattus depuis 2012, et des "rapports de vérification des essences compensatrices plantées";

– la production du projet de plan d'affectation communal (PACom) et de plan directeur communal (PDCom) ainsi que le rapport de pré-étude (vision communale) du 26 juillet 2019, mis à jour les 18 juin et 7 décembre 2020 (cette réquisition ayant été présentée dans la réplique).

 

Considérant en droit:

1.                      La décision par laquelle une municipalité lève les oppositions à un projet et délivre le permis de construire peut faire l'objet d'un recours de droit administratif au sens des art. 92 ss de la loi du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; BLV 173.36). Le recours peut également viser les autorisations spéciales délivrées par des autorités cantonales, notifiées avec le permis de construire (cf. art. 120 à 123 de la loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions [LATC; BLV 700.11]). En l'occurrence, le recours a été déposé en temps utile (art. 95 LPA-VD) et il respecte les exigences légales de motivation (art. 79 LPA-VD, par renvoi de l'art. 99 LPA-VD). La qualité pour recourir est définie à l'art. 75 LPA-VD (par renvoi de l'art. 99 LPA-VD): selon la lettre a de cet article, elle est reconnue à toute personne ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente, qui est atteinte par la décision et qui dispose d'un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (à propos de l'intérêt digne de protection, voir notamment, dans la jurisprudence fédérale, ATF 141 II 50 consid. 2.1, ATF 137 II 40 consid. 2.3). Le propriétaire d'un bien-fonds directement voisin, qui a formé opposition lors de l'enquête publique, a en principe qualité pour recourir lorsqu'il fait valoir que la construction projetée, à cause de ses dimensions ou des nuisances, aurait des effets sur sa situation. C'est manifestement le cas des actuels recourants. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.

2.                      Les recourants dénoncent le caractère prétendument obsolète du PEP "Prealpina"; il y aurait, selon eux, lieu d'en contrôler la validité à titre incident ou préjudiciel. Le maintien en zone constructible de la parcelle n° 1418, selon la réglementation du PEP, ne serait pas conforme au droit fédéral en raison du surdimensionnement des zones à bâtir sur le territoire de Chexbres. La création de 57 logements, avec un accroissement prévisible de la population de 170 unités, contreviendrait à la mesure A11 du Plan directeur cantonal (PDCn) qui fixe des objectifs pour la révision des plans d'affectation communaux, s'agissant des capacités des zones d'habitation et mixtes, car cette augmentation de population dépasserait la "croissance accordée" par le PDCn jusqu'en 2036. Les recourants soutiennent par ailleurs que l'équipement de la parcelle n° 1418 laisse à désirer parce que la route de Chardonne ne permettrait pas d'absorber le trafic induit par les nouveaux appartements, et ils invoquent différents autres motifs d'aménagement du territoire pour contester la validité du PEP.

a) Normalement, le Tribunal cantonal – et a fortiori une municipalité – ne peut pas, dans une procédure de permis de construire, examiner si le plan d'affectation en vigueur est valable. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le contrôle incident ou préjudiciel d'un plan d'affectation dans le cadre d'une procédure relative à un acte d'application est en principe exclu. Un tel contrôle est néanmoins admis, à titre exceptionnel, lorsque les conditions d'un réexamen des plans au sens notamment de l'art. 21 al. 2 de la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) sont réunies. Aux termes de cette disposition, lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d'affectation feront l'objet des adaptations nécessaires; une modification sensible des circonstances au sens de l'art. 21 al. 2 LAT peut être purement factuelle, mais également d'ordre juridique, comme une modification législative. L'art. 21 al. 2 LAT prévoit un examen en deux étapes: la première déterminera si les circonstances se sont sensiblement modifiées au point de justifier un réexamen du plan; si le besoin s'en fait réellement sentir, il sera adapté, dans une deuxième étape. A chacune de ces deux étapes, il convient de procéder à une pesée d'intérêts tenant compte, d'une part, de la nécessité d'une certaine stabilité de la planification et, d'autre part, de l'intérêt d'une adaptation des plans aux changements intervenus (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.1; TF 1C.645/2020 du 21 octobre 2021 consid. 3.2; CDAP AC.2022.0193 du 8 février 2023 consid. 2c et les arrêts cités).

b) Depuis la révision de la LAT du 15 juin 2012 (entrée en vigueur le 1er mai 2014), l'obligation de réduire les zones à bâtir surdimensionnées, conformément à ce que prescrit désormais l'art. 15 al. 2 LAT, peut constituer, selon la situation concrète dans la commune concernée, un élément décisif propre à démontrer une modification sensible des circonstances au sens de l'art. 21 al. 2 LAT. Ces questions ne doivent cependant pas être traitées abstraitement. Pour mettre en œuvre l'obligation de l'art. 15 al. 2 LAT, les autorités cantonales ont notamment élaboré, lors de la 4e adaptation du Plan directeur cantonal (PDCn) – adaptation adoptée par le Grand Conseil le 20 juin 2017 et approuvée par le Conseil fédéral le 31 janvier 2018 –, une mesure A11, intitulée "Zones d'habitation et mixtes". Elle est ainsi libellée:

"Les communes évaluent, avant de soumettre au Canton tout plan d'affectation, la nécessité de redimensionner leurs zones à bâtir en vérifiant l'adéquation entre leur capacité d'accueil en habitants et la croissance démographique projetée, limitée par type d'espace du projet de territoire cantonal selon le tableau suivant:

Périmètre compact d'agglomération et de centre cantonal [...]

Périmètre des centres régionaux: croissance annuelle maximale: 1.7% de la population 2015.

Périmètre des centres locaux: croissance annuelle maximale: 1.5% de la population 2015.

Périmètre des localités à densifier: croissance annuelle maximale: 1.5% de la population 2015.

Villages et quartiers hors centre: croissance annuelle maximale: 0.75% de la population 2015.

[...]

Les communes qui doivent redimensionner leurs zones à bâtir révisent leurs plans d'affectation et soumettent leur projet à l'approbation du Canton au plus tard cinq ans après l’adoption du Plan directeur cantonal par le Grand Conseil. Jusqu'à cette date, les communes peuvent utiliser le 31 décembre 2036 comme horizon de planification.

[...]

Pour répondre aux besoins à 15 ans, les communes, dans l’ordre:

  1. réaffectent les terrains excédant les besoins ou peu adéquats au développement;

  2. densifient le territoire urbanisé;

  3. mettent en valeur les réserves et les friches, notamment par la densification.

L’extension de la zone à bâtir n’est admise que lorsque la capacité découlant des trois points précédents est insuffisante pour répondre aux besoins à 15 ans. [...]"

Le processus de révision du plan des zones (ou d'établissement du nouveau plan d'affectation communal, PACom) a été engagé à Chexbres il y a quelques années. Cette commune est un centre régional, selon les critères du PDCn (ce centre régional s'étend sur le territoire de la commune voisine de Puidoux). Néanmoins, le service cantonal chargé de l'aménagement du territoire (SDT, ensuite DGTL) a retenu l'existence d'un surdimensionnement des zones à bâtir dans les quartiers hors centre.

Dans la décision attaquée, la municipalité retient que la parcelle litigieuse, comme tout le périmètre du PEP "Prealpina", est localisée dans le "périmètre de centre à densifier" (type centre régional), de sorte que les prescriptions ou objectifs prévus pour les quartiers hors centre ne sont pas pertinents. Comme cela ressort de l'arrêt AC.2014.0224 du 27 juillet 2016, l'opération de délimitation du périmètre du centre, préalable aux autres démarches de révision de la planification communale, a déjà été effectuée en 2014 (consid.5c/aa, reproduit supra let. C). Les recourants font toutefois valoir que, vu la situation de la parcelle n° 1418, proche de secteurs non constructibles (les terrains au nord de l'autoroute) ou de terrains de la zone à bâtir faisant partie des quartiers hors centre de Chexbres, le périmètre du centre aurait pu être délimité autrement, de manière à en exclure ladite parcelle. Or cet argument n'est pas concluant. Pour la mise en œuvre de la mesure A11 du PDCn, la municipalité était tenue dans un premier temps de fixer une limite, à l'est du noyau de la localité, pour le périmètre de centre régional. Son choix d'y inclure la parcelle n° 1418 n'a pas été critiqué par le service cantonal (SDT/DGTL) et il est du reste défendable ou correct, vu la configuration des lieux, singulièrement la proximité de quartiers bâtis, sous l'autoroute. Dans la présente procédure, il n'y a donc aucun motif de revoir les données de base en fonction desquelles le futur plan d'affectation communal sera établi.

Dans un arrêt récent concernant une zone réservée cantonale instituée par le département cantonal chargé de l'aménagement du territoire dans un quartier hors centre de Chexbres, la CDAP a relevé que dans le périmètre du centre régional – selon des estimations d'un bureau d'urbanisme mandaté par la municipalité –, le potentiel d'accueil de nouveaux habitants était en réalité inférieur au besoin, déterminé selon les critères de la mesure A11 du PDCn concernant la croissance de la population (arrêt AC.2021.0109 du 9 novembre 2021, faits, let. C). Les recourants ne contestent pas ces données et ils ne prétendent pas que les zones d'habitation dans le périmètre de centre régional seraient surdimensionnées. Or le système du PDCn implique une évaluation différenciée, selon que les terrains se trouvent à l'intérieur ou à l'extérieur du périmètre de centre. Dans ces conditions, on ne voit pas en quoi l'obligation légale de réduire les zones à bâtir surdimensionnées, imposée par l'art. 15 al. 2 LAT depuis le 1er mai 2014, représenterait une modification sensible des circonstances, au sens de l'art. 21 al. 2 LAT, pour le périmètre du centre régional et singulièrement la parcelle n° 1418. Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la réquisition des recourants tendant à ce que la municipalité produise les permis de construire délivrés depuis 2015, afin que l'on puisse déterminer le nombre de logements autorisés depuis lors. Cet élément est sans pertinence pour l'appréciation de l'évolution des circonstances.

c) Les recourants n'invoquent pas d'autres circonstances pertinentes, dans ce contexte. Ils se réfèrent au plan directeur communal de 2001, dont la CDAP a déjà constaté le caractère obsolète dans son arrêt du 27 juillet 2016 (consid. 5c/aa, reproduit supra, let. C). Ce document n'a plus aucune portée. Quoi qu'il en soit, un plan directeur communal de cette époque (cf. art. 35 ss aLATC) ne pouvait pas contenir en tant que tel des mesures d’aménagement du territoire ayant un effet contraignant pour les propriétaires. Même après l'approbation par le Conseil d'Etat, les plans directeurs communaux restaient des "plans d'intention servant de référence et d'instrument de travail pour les autorités cantonales et communales", sans portée juridique particulière (art. 31 al. 2 aLATC; cf. arrêts CDAP AC.2022.0193 du 8 février 2023 consid. 2g; AC.2013.0041 du 12 juin 2014 consid. 1d). Une éventuelle contradiction entre le projet de la constructrice et cet ancien plan directeur communal ne justifierait aucunement un contrôle préjudiciel de la validité du PEP "Prealpina". Cela étant, ce plan d'extension partiel, qui est un plan d'affectation au sens des art. 14 ss LAT et qui a donc matériellement la même portée qu'un plan des zones (cf. ATF 146 II 289 consid. 7.2), a été élaboré par les autorités communales plusieurs années après l'entrée en vigueur de la LAT, le 1er janvier 1980. Il n'y a aucun motif de considérer que les autorités de planification auraient alors mal appliqué la nouvelle loi fédérale, singulièrement l'art. 15 LAT qui prévoyait que les zones à bâtir devaient comprendre les terrains probablement nécessaires à la construction dans les quinze ans à venir; ce périmètre pouvait en outre être décrit comme propre à la construction et adéquat pour des habitations, à l'instar des parcelles voisines, dont celle des recourants. En d'autres termes, si le plan directeur communal de 2001 doit être qualifié d'obsolète, il n'en va pas de même du PEP de 1985.

d) Les recourants font encore valoir qu'en appliquant les dispositions du PEP sur l'implantation et le volume des constructions, on ne garantit pas une utilisation du sol suffisamment dense, au regard des objectifs de la mesure A11 du PDCn. Il y est en effet prévu que dans les nouvelles zones d'habitation et mixtes, l'indice d'utilisation du sol (IUS) doit être au minimum de 0.4 hors des centres et de 0.625 dans les centres. Or, d'après les calculs des recourants, le PEP n'autoriserait en réalité qu'un IUS de 3.12 sur la parcelle n° 1418. Cet argument n'est toutefois pas pertinent car l'octroi par la municipalité du permis de construire litigieux n'exclut pas que, lors de l'établissement du PACom ou ultérieurement, les autorités de planification révisent le PEP en vue de garantir une utilisation plus dense de cette zone à bâtir, conformément à la mesure A11 du PDCn ("La mise à jour des plans d'affectation doit garantir une densification des zones à bâtir"). Les éventuelles révisions futures du statut du sol, dans le périmètre du PEP "Prealpina" – que ce soit dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions de la LAT entrées en vigueur en 2014 ou de celles de la LLavaux – n'ont pas d'influence pour l'examen de la légalité du permis de construire litigieux, ces planifications (éventuellement) envisagées n'ayant pas d'effet anticipé négatif à défaut de mesures conservatoires prononcées sur la base des art. 46 ss LATC. Il n'y a donc pas lieu de donner suite à la réquisition tendant à la production des projets de plans d'aménagement communaux.

e) Enfin, l'argument des recourants selon lequel le terrain litigieux ne disposerait pas d'une voie d'accès suffisante, de sorte qu'il ne pourrait pas être maintenu dans une zone destinée à l'habitation, n'est à l'évidence pas concluant. Comme cela est indiqué dans la décision attaquée (ch. 3 p. 2) et comme le révèlent les éléments du dossier ainsi que les constatations faites à l'inspection locale, la route de Chardonne (route cantonale en traversée de localité) est une voie d'accès adaptée pour accueillir le trafic de transit et celui des véhicules des habitants des zones directement desservies par cette route – notamment les recourants, qui ne prétendent pas que leur terrain ne serait pas équipé. En d'autres termes, la zone à bâtir définie par le PEP "Prealpina" est dotée, en matière de voies d'accès, d'un équipement correspondant aux exigences de l'art. 19 al. 1 LAT (à propos de cette norme du droit fédéral, cf. notamment TF 1C.585/2021 du 27 octobre 2022 consid. 3.1.1 et les arrêts cités; s'agissant concrètement de l'équipement de la parcelle litigieuse, voir l'arrêt AC.2014.0224 du 27 juillet 2016 consid. 5d/bb, reproduit supra let. C).

f) Les recourants présentent différents griefs en relation avec la protection de la forêt et des biotopes, sur la parcelle n° 1418. Or cela ne remet pas en question la validité du PEP "Prealpina"; en d'autres termes, il n'est pas établi que les caractéristiques naturelles de l'endroit auraient évolué de telle manière que le droit fédéral imposerait le classement de la parcelle dans une zone à protéger au sens de l'art. 17 al. 1 let. d LAT. Le contrôle préjudiciel du plan d'affectation spécial n'est pas justifié, de ce point de vue. Sur la base de ces griefs, il y aura en revanche lieu d'examiner si, concrètement, le projet de construction respecte les prescriptions du droit fédéral (LPN, LFo) qui doivent être appliquées indépendamment du contenu du plan d'affectation communal (cf. notamment CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 6; cf. infra, consid. 3 et 4).

En définitive, c'est à tort que les recourants contestent le caractère applicable des dispositions du PEP "Prealpina". Les considérations développées à ce propos dans l'arrêt du 27 juillet 2016 (reproduites ci-avant sous let. C) demeurent valables.

3.                      Les recourants critiquent la dérogation (ou autorisation spéciale) accordée par la Direction générale de l'environnement (DGE/DIRNA) pour un empiétement dans la bande inconstructible des 10 m à la forêt.

a) La décision attaquée retient (motivation du rejet de l'opposition, ch. 5 p. 3) que le projet n'impacte par l'aire forestière située sur la parcelle n° 1418, respectant la bande inconstructible de 10 m. Seules des interventions provisoires pour les travaux de terrassement et de démolition de deux bâtiments existants auront lieu dans ces 10 m – c'est l'objet de l'autorisation spéciale précitée, figurant dans la synthèse CAMAC –, interventions allant au demeurant dans le sens d'une meilleure protection de la forêt puisqu'elles auront pour effet de supprimer définitivement toute construction près de la lisière.

b) La distance qui doit séparer les constructions de la lisière d'une forêt est prescrite par l'art. 27 de la loi forestière du 8 mai 2012 (LVLFo; BLV 921.01), qui a la teneur suivante: 

"Distance par rapport à la forêt (LFo, art. 17)

1 La distance minimale des constructions et installations par rapport à la forêt doit être fixée en fonction de la situation et de la hauteur prévisible du peuplement. Dans tous les cas, les constructions et installations sont interdites à moins de dix mètres de la limite de la forêt.

2 Dans les zones affectées, lorsque la situation impose une distance supérieure à dix mètres par rapport à la limite de la forêt, le service fixe, après consultation de la commune territoriale, la distance appropriée lors de l'établissement ou de la révision des plans d'affectation.

3 Hors des zones à bâtir, le service, après consultation de la commune territoriale, peut exiger une distance de plus de dix mètres par rapport à la limite de la forêt lorsque les circonstances l'exigent.

4 Des dérogations ne peuvent être octroyées par le service que si la conservation, le traitement et l'exploitation de la forêt ne sont pas compromis et si la protection du site, de la nature et du paysage est assurée. Elles peuvent faire l'objet d'une mention au Registre foncier.

5 Les dérogations peuvent, dans les limites du droit fédéral, être subordonnées à la signature par le bénéficiaire d'une décharge de responsabilité pour le préjudice qu'il pourrait subir du fait de la chute d'arbres ou de parties d'arbres. Cette décharge fait l'objet d'une mention au Registre foncier."

En l'occurrence, vu les caractéristiques de la forêt se trouvant sur la parcelle n° 1418 – elle est insérée dans le territoire urbanisé et ne dépasse les limites de cette parcelle que sur la bande de terrain directement sous l'autoroute –, il n'est pas contesté que la distance de 10 m est appropriée (cf. art. 27 al. 1, 2e phrase LVLFo, qui pose cette règle générale).

Cela étant, une question préalable doit être traitée dans ce contexte. Dans l'acte de recours, il est relevé que la limite de la forêt figure à titre indicatif sur le plan de situation, comme la DGE l'a mentionné dans son autorisation spéciale. Juridiquement, si le tracé de la lisière est indicatif, cela signifie qu'il pourrait ne pas correspondre au tracé déterminant pour l'application de la législation forestière.

 Dans son autorisation spéciale intégrée dans la synthèse CAMAC du 11 août 2021, la DGE a retenu que l'aire forestière figurée sur le plan de situation était conforme à la "nature des lieux selon le levé de lisière réalisé par l’inspecteur des forêts en date du 01.10.2012 (article 23 LVLFo)" mais qu'elle n'avait toutefois pas été constatée dans le cadre de la révision d'un plan d’affectation, de sorte qu'elle était mentionnée "à titre indicatif".

Ainsi, l'aire forestière sur le plan de situation du projet litigieux n'est pas figurée à titre indicatif parce que l'auteur de ce plan (le géomètre ou l'architecte de la constructrice) aurait lui-même choisi le tracé de la lisière, sans en être certain. Bien au contraire, le mandataire de la constructrice a reporté sur le plan de situation des données naturelles ou topographiques qui avaient été établies dans le cadre d'un précédent projet de construction. La DGE, en délivrant son autorisation spéciale, n'a pas laissé entendre que le tracé de la lisière n'était pas fiable ni qu'il ne correspondait pas à la réalité. La mention du caractère indicatif signifie bien plutôt que les autorités compétentes en matière d'aménagement du territoire ne peuvent pas retenir d'emblée que ce tracé n'est plus réexaminable ni qu'il serait juridiquement contraignant. En réalité, la différence entre un tracé indicatif et un tracé contraignant provient du type de procédure dans lequel il a été fixé.

L'art. 23 al. 1 LVLFo prévoit que le service en charge de l'application de la législation forestière – actuellement: la DGE – est compétent pour les constatations de la nature forestière. En vertu de l'art. 10 al. 2 let. a de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur les forêt (LFo; RS 921.0), une telle constatation doit être ordonnée "lors de l'édiction et de la révision des plans d'affectation au sens de la [LAT] [...] là où des zones à bâtir confinent ou confineront à la forêt". Les effets de cette constatation sont alors définis à l'art. 13 LFo, qui a la teneur suivante:

"Délimitation des forêts par rapport aux zones d’affectation

1 Les limites des bien-fonds dont la nature forestière a été constatée conformément à l’art. 10, al. 2, sont fixées dans les plans d’affectation.

2 Les nouveaux peuplements à l’extérieur de ces limites de forêts ne sont pas considérés comme forêt.

3 Les limites de forêts peuvent être réexaminées dans le cadre d’une procédure en constatation de la nature forestière conformément à l’art. 10 lorsque les plans d’affectation sont révisés et que les conditions effectives se sont sensiblement modifiées."

En l'occurrence, la procédure de constatation, avec le relevé de l'inspecteur forestier en 2012, n'était pas liée à l'établissement d'un plan d'affectation communal. Les autorités communales ont modifié ponctuellement le PEP "Prealpina" en 2018, sans toutefois fixer directement la limite de la forêt dans ce plan d'affectation. Aussi l'art. 13 al. 2 LFo n'est-il pas applicable, qui supprime en principe le caractère dynamique de la forêt (par une mesure incluse dans le plan d'affectation, une limite statique en bordure des zones où, pour des motifs d'aménagement du territoire, il faut empêcher une croissance de l'aire forestière - cf. CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 7c et les références).

La validité, formelle et matérielle, du plan de limite forestière établi en 2012 par l'inspecteur forestier a été admise dans le cadre de la contestation portant sur le précédent projet de construction sur la parcelle n° 1418. Il résulte en effet de l'arrêt du Tribunal fédéral 1C.430/2016 du 6 juillet 2017 (partiellement reproduit sous let. D supra) que la confirmation, par la CDAP, de la constatation de la nature forestière rendue par la DGE sur la base de ce relevé est conforme au droit fédéral. Dans cette précédente affaire, il s'agissait d'examiner un parc arboré - ou une prairie entretenue avec des éléments boisés - , jouxtant la forêt, mais qui n'avait néanmoins pas de caractère forestier. La situation n'a pas sensiblement changé depuis lors puisque, quand elle a dû se prononcer sur le projet actuellement litigieux, la DGE n'a pas estimé qu'il fallait revoir la limite forestière. Si l'autorité forestière cantonale, qui a recueilli le préavis de l'inspecteur des forêts de l'arrondissement, avait eu un doute, elle aurait engagé une nouvelle procédure de constatation, car même une légère extension de l'aire forestière en direction du sud aurait été susceptible de rendre certains bâtiments projetés non réglementaires (singulièrement les bâtiments A2 et B, implantés à précisément 10 m de la lisière figurée sur le plan). Invitée à se déterminer sur le recours en tant qu'autorité intimée, la DGE n'a pas changé de position, puisqu'elle a affirmé sans équivoque que "le fait que des arbres aient poussé entre 2012 et 2021 ne change rien à la lisière délimitée en 2012" (cf. supra, faits, let. N, où cette réponse est citée). La lettre du 2 septembre 2022 de la DGE, qui rappelle que "la conception dynamique de la forêt continue de s'appliquer sans restriction" et que "l'aire forestière a pu s'étendre au détriment de la zone à bâtir depuis 2012" ne saurait être considérée comme le résultat d'une nouvelle appréciation des circonstances locales. Cette lettre ne se fonde pas sur un nouveau préavis du spécialiste de la DGE – l'inspecteur des forêts de l'arrondissement – et elle ne fait pas référence à un autre plan de l'aire forestière sur la parcelle n° 1418. Elle doit bien plutôt être interprétée comme une réserve ou une précision de nature juridique: comme le relevé de la lisière n'a pas été inclus dans le plan d'affectation après 2012, une nouvelle constatation de la nature forestière aurait été possible même sans modification sensible des conditions effectives (cf. art. 13 al. 3 LFo a contrario). Or précisément, dans sa réponse, la DGE n'a pas retenu l'existence d'une modification, même peu importante, des conditions effectives, c'est-à-dire de la situation des boisements sur la parcelle. En d'autres termes, la dernière lettre de la DGE rappelle que la forêt aurait pu dans l'intervalle s'étendre au détriment de la zone à bâtir, selon le régime juridique résultant des art. 10 et 13 LFo (cf. Alain Maunoir/Gaëtan Blaser-Suarez, in Commentaire de la loi sur les forêts, Abt/Norer/Wild/Wisard éd., Zurich 2022, art. 13 N. 20), mais l'appréciation concrète de la situation figure dans l'autorisation spéciale de la synthèse CAMAC, confirmée dans la réponse du 22 janvier 2022.

Il s'ensuit que la bande inconstructible de 10 m a été correctement figurée sur le plan de situation. Il est manifeste que les travaux projetés dans cet espace ne compromettent pas la conservation de la forêt (cf. art. 27 al. 4 LVLFo) puisqu'aucun ouvrage ne s'y trouvera à l'issue du chantier. La DGE n'a omis aucun élément dans la pesée des intérêts (cf. à ce propos l'art. 26 al. 3 du règlement du 18 décembre 2013 d'application de la loi forestière [RLVLFo; BLV 921.01.1]). Le grief de violation de la législation forestière est mal fondé.

4.                      Les recourants reprochent à la municipalité et à la DGE de n'avoir pas effectué une pesée des intérêts adéquate en ce qui concerne la protection des biotopes et des arbres (hors de la forêt). Ils allèguent l'existence d'un biotope d'importance régionale sur la parcelle n° 1418.

a) En vertu de l'art. 78 al. 4 Cst., la Confédération est autorisée à légiférer sur la protection de la faune et de la flore et sur le maintien de leur milieu naturel dans sa diversité. L'art. 18 al. 1 de la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN; RS 451) dispose que la disparition d'espèces animales et végétales indigènes doit être prévenue par le maintien d'un espace vital suffisamment étendu (biotopes), ainsi que par d'autres mesures appropriées.  

L'art. 18 al. 1bis LPN énumère les biotopes qu'il y a lieu de protéger tout particulièrement: les rives, les roselières et les marais, les associations forestières rares, les haies, les bosquets, les pelouses sèches et autres milieux qui jouent un rôle dans l'équilibre naturel ou présentent des conditions particulièrement favorables pour les biocénoses. Selon la jurisprudence, la notion de biotope se rapporte à un espace vital suffisamment étendu, exerçant une certaine fonction (ATF 121 II 161 consid. 2b/bb; TF 1C.653/2019 du 15 décembre 2020 consid. 3.1). La législation fédérale contient des prescriptions spéciales pour les biotopes d'importance nationale (cf. art. 18a LPN, art. 16 et 17 de l'ordonnance du 16 janvier 1991 sur la protection de la nature et du paysage [OPN; RS 451.1]), qui ne sont pas applicables en l'espèce. Les cantons doivent cependant aussi veiller à la protection et à l'entretien des biotopes d'importance régionale et locale (art. 18b LPN).

Les critères déterminants pour qualifier les biotopes sont ceux de l'art. 14 al. 3 OPN, ainsi libellé:

"Les biotopes sont désignés comme étant dignes de protection sur la base:

a. de la liste des milieux naturels dignes de protection figurant à l’annexe 1, caractérisés notamment par des espèces indicatrices;

b. des espèces de la flore et de la faune protégées en vertu de l’art. 20;

c. des poissons et écrevisses menacés, conformément à la législation sur la pêche;

d. des espèces végétales et animales rares et menacées, énumérées dans les Listes rouges publiées ou reconnues par l’OFEV;

e. d’autres critères, tels que les exigences des espèces migratrices ou la con­nexion des sites fréquentés par les espèces."

b) L'art. 18 al. 1ter LPN prévoit que si, tous intérêts pris en compte, il est impossible d'éviter des atteintes d'ordre technique aux biotopes dignes de protection, l'auteur de l'atteinte doit veiller à prendre des mesures particulières pour en assurer la meilleure protection possible, la reconstitution ou, à défaut, le remplacement adéquat. L'alinéa 1ter exige, une fois le caractère digne de protection reconnu au biotope, qu'une pesée générale de tous les intérêts soit effectuée. Si, sur cette base, le biotope ne l'emporte pas, il peut être décidé de lui porter atteinte. Dans un tel cas, il faut en assurer la meilleure protection possible, la reconstitution ou le remplacement adéquat (cf. aussi art. 14 al. 6 et 7 OPN). En d'autres termes, pour les atteintes portées à l'espace vital d'espèces animales ou végétales – celles résultant d'interventions humaines dont les impacts sont accrus par rapport à la seule présence de l'homme ou au fonctionnement propre du milieu naturel –, le droit fédéral prévoit une série d'étapes. Dans un premier temps, une pesée générale de tous les intérêts doit être effectuée; si, sur cette base, la protection du biotope ne l'emporte pas, l'atteinte est admissible. En ce cas, dans un deuxième temps, doit être assurée au biotope la meilleure protection possible ou la reconstitution. A défaut, dans un troisième temps, le remplacement adéquat doit être ordonné (cf. Thierry Largey, la protection des biotopes dans la zone à bâtir, URP/DEP 2021 p. 356 ss, 359). Comme le résume la jurisprudence fédérale, ces dispositions imposent une pesée d'intérêts tenant compte de l'importance des atteintes prévisibles, de l'intérêt public lié à la réalisation du projet et de l'efficacité des mesures de compensation (ATF 147 II 319 consid. 8.2; TF 1C.628/2019 du 22 décembre 2021 consid. 7.1 – dans ce dernier arrêt, le TF a admis une "approche pragmatique" consistant à intégrer les mesures de reconstitution ou de remplacement dans la pesée des intérêts, ce qui permet de définir d'emblée les effets à long terme de l'atteinte; cf. également CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 6).

c) Si un biotope digne de protection, d'importance régionale ou locale, se trouve dans une zone à bâtir, la pesée des intérêts peut s'effectuer dans le cadre de la procédure d'autorisation ordinaire, à savoir celle du permis de construire pour un projet de bâtiment (art. 22 LAT). La présence d'un biotope n'entraîne pas nécessairement le classement du terrain dans une zone à protéger au sens de l'art. 17 LAT car les exigences de l'art. 18 LPN peuvent être appliquées dans la zone à bâtir. La jurisprudence retient alors, à propos de l'atteinte à un biotope digne de protection situé dans la zone à bâtir, que doivent être pris en considération dans la pesée des intérêts l'intérêt à une utilisation des parcelles conforme au plan d'affectation en vigueur (intérêt à la sécurité du droit), pour la mise en œuvre des principes de la LAT, singulièrement ceux ayant trait à la densification des territoires réservés à l'habitat (art. 3 al. 3 let. abis LAT; cf. TF 1C.653/2019 du 15 décembre 2020 consid. 3.6.2; CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 6c et les références).

d) En l'espèce, une partie de la parcelle n° 1418 est soumise au régime de l'aire forestière, inconstructible. Dans la mesure où ce terrain constitue un biotope, il est protégé en vertu de la législation forestière, indépendamment de la réglementation des art. 18 ss LPN. Quoi qu'il en soit, il n'est pas question, dans le projet litigieux, d'une atteinte à la forêt, les exigences de la LFo étant respectées.

La question décisive est de savoir si, là où le projet litigieux prévoit des constructions ou des installations nouvelles, à l'intérieur des périmètres d'implantation (pour les bâtiments) et dans certains espaces intermédiaires (pour les garages souterrains, les voies d'accès et les places de stationnement), il porte atteinte à des biotopes dignes de protection. La définition de la notion de biotope, dans la législation fédérale, confère une importante marge d'appréciation aux autorités cantonales et communales – disposant de connaissances particulières sur les aspects scientifiques ou les circonstances locales – lors de l'identification des biotopes, dont l'existence et l'emplacement peuvent être déterminés de cas en cas, notamment dans le cadre de la procédure d'autorisation de construire. Les juges doivent par conséquent faire preuve d'une certaine retenue lorsqu'il s'agit de déterminer si un habitat doit être qualifié de biotope d'importance régionale ou locale (cf. Largey, op. cit., p. 358; cf. TF 1C.653/2019 du 15 décembre 2020 consid. 3.6.2, TF 1C.126/2020 du 15 février 2021 consid. 6.2.3 – où il a été reproché au Tribunal cantonal d'avoir méconnu la position des spécialistes de la DGE-BIODIV à propos de l'intérêt à la protection d'un "biotope-relais" en ville de Lausanne –, CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 6d).

e) Il ressort du dossier que la DGE a examiné soigneusement la question de la protection des biotopes. Lorsque cette autorité cantonale a été appelée à se prononcer sur le projet litigieux, la législation cantonale prévoyait ce qui suit à l'art. 4a de la loi sur la protection de la nature, des monuments et des sites (LPNMS – le titre de cette loi a été modifié le 1er juin 2022 [loi sur la protection de la nature et des sites, LPNS] puis ce texte a été remplacé, à partir du 1er janvier 2023, par la loi du 30 août 2022 sur la protection du patrimoine naturel et paysager [LPrPNP; BLV 4501.11]):

"Art. 4a   Protection des biotopes

1 Sont protégés les biotopes au sens des articles 18 et suivants de la loi fédérale sur la protection de la nature.

2 Toute construction ou installation portant atteinte à un biotope doit faire l'objet d'une autorisation spéciale du Département en charge de la protection de la nature et des paysages (ci-après: le département).

2bis, 3, 4 [...]"

En l'espèce, la DGE – pour le département cantonal compétent – n'a pas délivré une autorisation spéciale au sens de l'alinéa 2 ci-dessus mais un simple préavis assorti de conditions, parce qu'elle a considéré que les constructions et installations projetées ne porteraient pas atteinte à un biotope digne de protection. Dans ses déterminations sur le recours, la DGE expose en substance ceci: les milieux présents sur la parcelle n° 1418 se sont développés puisque la parcelle n'a pas été entretenue ces dernières années, en raison de l'abandon de l'exploitation agricole. De la végétation buissonnante, en partie constituée par des espèces exotiques envahissantes, s'est implantée. C'est en quelque sorte une friche agricole qui abrite certainement une partie de l'année des espèces intéressantes, mais elle a plus un rôle d'abri qu'une valeur biologique en soi. Deux haies/bosquets seront touchés, mais des mesures de compensation sont prévues; les autres milieux naturels seront peu touchés. La forêt située en amont et une grande partie des arbres seront conservés (les plus beaux notamment ont été épargnés). Si toutes les mesures de compensation proposées par le bureau H........ sont retenues et mises en place, le projet évite de porter atteinte, dans la mesure du possible, aux valeurs biologiques et naturelles recensées. Là où des atteintes ne peuvent être évitées, elles seront compensées de manière adéquate. En définitive, on ne se trouve pas en présence d'un biotope digne de protection au sens de l'art. 14 al. 3 OPN car aucune espèce de la flore ou de la faune protégée en vertu de l'art. 20 OPN n'y a été recensée. Le biologiste de la DGE, qui s'était rendu sur place pour préparer le préavis de la synthèse CAMAC, était présent lors de l'inspection locale du 23 août 2022. Il résulte des explications qu'il a alors données qu'il confirme l'évaluation précitée.

Le rapport produit par les recourants, intitulé "expertise biologique", retient en conclusion (synthèse, p. 16) que la majorité des biotopes existants peuvent être considérés comme dignes de protection; il est très probable que plusieurs espèces protégées au sens de l'art. 20 OPN soient présentes ou exercent une partie de leur cycle vital sur la parcelle n° 1418. Cette parcelle présente un patrimoine arboré remarquable. Ces différents éléments amènent l'expert des recourants à considérer que la parcelle constitue, sur la majeure partie de sa surface, un biotope d'importance régionale. Ce rapport du 11 novembre 2021 précise que le relevé de terrain a été effectué "sur site" le 8 novembre 2021, sans toutefois que l'expert ait accès au site naturel lui-même puisqu'il est resté sur les routes (route de Chardonne, chemin du Champs-Pâquis, route d'accès à l'hôtel – cf. p. 5). Il relève qu'aucun biotope digne de protection figurant à l'annexe 1 de l'OPN n'est présent sur la parcelle n° 1418. L'expert des recourants a établi un rapport complémentaire le 16 février 2022, sans nouvelle visite sur la parcelle (cf. p. 2). Il confirme les conclusions de son premier rapport, notamment à propos de la grande probabilité de la présence de plusieurs espèces protégées et/ou menacées (la parcelle héberge des milieux susceptibles d'abriter ces espèces qui ont notamment été observées à proximité directe), et il recommande des études complémentaires pour obtenir une évaluation complète de l'état initial. Les espèces de la faune protégées qui sont mentionnées par l'expert sont la salamandre tachetée, le crapaud commun, le lézard des murailles, l'orvet fragile et la vipère aspic (p. 10 du rapport du 11 novembre 2021).

Il n'incombe pas à la Cour de droit administratif et public de compléter l'instruction à propos des caractéristiques des biotopes présents sur la parcelle litigieuse, ni de discuter de façon détaillée de toutes les atteintes qu'un chantier important provoquera dans les milieux naturels, à l'intérieur des périmètres d'implantation des constructions, où ces milieux seront supprimés, et ailleurs dans le parc, la prairie ou la forêt, où ces milieux pourront être atteints mais aussi, le cas échéant, améliorés grâce aux mesures compensatoires proposées dans le rapport H........ du 14 septembre 2021. Le service spécialisé de l'administration cantonale a retenu que ces biotopes n'étaient pas dignes de protection en se fondant sur une analyse concrète, qui manifestement correspond aux critères de l'art. 14 al. 3 OPN. Il est établi, sur la base du dossier, qu'on ne trouve pas sur la parcelle n° 1418 de milieux naturels dignes de protection figurant à l'annexe 1 de l'OPN (cf. art. 14 al. 3 let. a OPN); l'appréciation doit donc être effectuée en fonction de la présence sur place d'espèces végétales et animales protégées, voire menacées (cf. art. 14 al. 3 let. b, d et e OPN). Cela étant, il ne suffit pas que l'on puisse établir que certaines espèces de la faune se trouvent, voire se reproduisent sur cette parcelle pour que les biotopes concernés soient obligatoirement désignés comme étant dignes de protection et, par conséquent, à protéger. Les normes du droit fédéral laissent une certaine marge d'appréciation aux autorités cantonales. En l'occurrence, les espèces animales mentionnées par l'expert des recourants peuvent également se trouver aux alentours de la parcelle litigieuse, ainsi qu'ailleurs sur le territoire de Chexbres ou des communes voisines (cela est indiqué notamment à la p. 9 du rapport du 11 novembre 2021); elles peuvent aussi subsister dans les milieux naturels préservés ou reconstitués sur la parcelle, en dehors des périmètres d'implantation des constructions.

f) Les recourants invoquent encore le fait que la parcelle n° 1418 est située partiellement (la partie inférieure) dans un "territoire d'intérêt biologique supérieur" (TIBS) du réseau écologique cantonal. Les TIBS constituent des zones tampons autour des "territoires d'intérêt biologique prioritaire" (TIBP). Dans sa réponse au recours, la DGE expose que les deux TIBP les plus proches sont le TIBP 110 (à 1.5 km à l'est, entre Cremières et Chardonne) et le TIBP 102 (à 3 km à l'ouest, au nord de l'autoroute au-dessus d'Epesses); la parcelle n° 1418 fait partie des "autres surfaces du sous-réseau" permettant la liaison entre les TIBP, et elle n'a pas de valeur particulière. Cet élément n'est donc pas décisif pour l'application des art. 18 ss LPN. Au demeurant, selon la jurisprudence fédérale, les éléments du réseau écologique cantonal sont évolutifs et non contraignants; ils offrent surtout une possibilité d'analyse et de réflexion sur le fonctionnement des paysages (TF 1C.657/2018 du 18 mars 2021, consid. 9.8 non publié aux ATF 147 II 319).

Les griefs des recourants tirés des règles du droit fédéral sur la protection des biotopes sont par conséquent mal fondés. Comme cela sera exposé ci-dessous, les règles du droit cantonal sur la protection des arbres, dans la mesure où elles complètent la réglementation des art. 18 ss LPN, ne sont pas non plus violées.

5.                      Les recourants se plaignent d'une violation des dispositions visant spécifiquement la protection des arbres, hors de la forêt.

a) Dans la décision de rejet de l'opposition, la municipalité a retenu en substance ce qui suit: le rapport des bureaux F........ et H........ fournissent toutes les indications concernant les arbres à abattre et à compenser, soit 25 arbres, sur les 120 arbres décomptés actuellement sur la parcelle. Les abattages sont nécessaires pour le projet; ils concernent pour la plupart des arbres en mauvais état sanitaire et ils sont conformes au règlement communal sur la protection des arbres. Il en va de même des plantations compensatoires proposées. Le concept paysager qui sera mis en œuvre dans le cadre du projet, incluant les plantations compensatoires et autres mesures recommandées par les services spécialisés, est de qualité et aura pour effet une amélioration globale de l'arborisation et de la végétalisation du périmètre. La municipalité a par ailleurs pris acte, après le dépôt du recours, de l'intention de la constructrice de planter 6 arbres supplémentaires, les mesures de compensation étant ainsi complétées.

b) Le règlement communal sur la protection des arbres, adopté par le conseil communal le 16 décembre 2016 et approuvé par le Département du territoire et de l'environnement le 30 janvier 2017, prévoit que "tous les arbres de 30 cm de diamètre et plus, mesurés à 1,30 m du sol, ainsi que les cordons boisés, les boqueteaux et les haies vives sont protégés" (art. 2 al. 1). Il contient des règles sur l'autorisation d'abattage des arbres protégés, ainsi que sur l'arborisation compensatoire, en se référant aux normes du droit cantonal (art. 3 à 5).

En l'occurrence, compte tenu de la date de la décision attaquée, sont applicables l'ancienne LPNMS et son règlement d'application (RLPNMS ou RLPNS; BLV 450.11.1) qui instaurent une protection des arbres qui méritent d'être sauvegardés en raison de l'intérêt général qu'ils présentent (art. 4 LPNMS). Selon l'art. 5 LPNMS, il s'agit des arbres, cordons boisés, boqueteaux et haies vives qui sont compris dans un plan de classement cantonal ou qui font l'objet d'un arrêté de classement au sens de l'art. 20 LPNMS (let. a), ou encore de ceux que désignent les communes par voie de classement ou de règlement communal, et qui doivent être maintenus soit en raison de leur valeur esthétique, soit en raison des fonctions biologiques qu'ils assurent (let. b). Leur abattage est toutefois possible, en vertu de l'art. 6 al. 1 LPNMS, lorsque leur état sanitaire n'est pas satisfaisant, lorsqu'ils empêchent une exploitation agricole rationnelle ou lorsque des impératifs techniques ou économiques l'imposent. Cette liste exemplative est complétée, en exécution de l'art. 6 al. 3 LPNMS, par l'art. 15 RLPNS, qui précise les conditions auxquelles les communes peuvent donner l'autorisation d'abattage. Selon la jurisprudence, l'autorité doit tenir compte de l'ensemble des circonstances et mettre en balance l'intérêt public à la conservation de l'arbre protégé avec celui de l'administré à sa suppression. Dans le cadre de cette pesée d'intérêts, il convient notamment de tenir compte de l'importance de la fonction esthétique ou biologique des plantations, de leur âge, de leur situation dans l'agglomération et de leur état sanitaire. L'intérêt à la conservation d'un arbre protégé doit en outre être comparé à l'intérêt visant à permettre une utilisation rationnelle des terrains à bâtir conforme au plan d'affectation (cf. notamment CDAP AC.2021.0209 du 26 janvier 2023 consid. 6d; AC.2021.0154 du 18 janvier 2022 consid. 3b; AC.2019.0073 du 12 novembre 2019 consid. 8).

Lorsque la réalisation d'une construction implique l'abattage d'arbres protégés, la municipalité statue généralement de manière coordonnée sur la demande de permis de construire selon la LATC et la demande d'autorisation d'abattage. Aussi le dossier de la demande de permis de construire doit-il, en vertu de l'art. 69 al. 1 ch. 1 let. g du règlement du 19 septembre 1986 d'application de la LATC (RLATC; BLV 700.11.1), comprendre un plan de situation figurant "l'emplacement des arbres protégés et de tous les arbres d'un diamètre supérieur à 0,30 m (mesuré à 1 m du sol), des boqueteaux et des haies vives dont la construction projetée entraînerait l'abattage". Les principes de la coordination (cf. art. 25a LAT) n'exigent cependant pas du propriétaire foncier qui envisage de réaliser une construction qu'il attende le dépôt de la demande de permis de construire pour demander simultanément l'autorisation d'abattage (cf. AC.2021.0209 du 26 janvier 2023 consid. 5). Il est concevable de requérir la permission d'abattre des arbres en invoquant des motifs autres que le projet de construction, par exemple un mauvais état sanitaire de la plante. C'est pourquoi, en l'espèce, il importe peu de savoir si – comme les recourants semblent le soutenir –, ces dernières années, certains arbres présents sur la parcelle ont été abattus en violation du règlement communal: cette question n'est pas décisive pour le sort de la demande de permis de construire. Sur ce point, le dossier produit par la municipalité contient donc tous les éléments pertinents, de sorte qu'il n'y a pas lieu de compléter l'instruction dans le sens requis par les recourants.

Les recourants n'indiquent pas de manière spécifique les arbres qui, d'après eux, ne devraient pas être supprimés; en particulier, ils ne prétendent pas, démonstration à l'appui, que les bâtiments projetés pourraient être construits sans porter atteinte aux arbres concernés. On constate en effet, sur les plans, que tous les arbres à abattre dont l'état sanitaire est satisfaisant se trouvent dans l'emprise ou à proximité directe des bâtiments projetés. S'agissant des mesures de compensation prévues par la constructrice, ils n'expliquent pas en quoi elles seraient insuffisantes. En définitive, les recourants font valoir de manière toute générale que le maintien des plantations existantes serait favorable pour la préservation des milieux naturels dans leur quartier, mais ils ne critiquent pas de manière concluante l'autorisation d'abattage délivrée par la municipalité. Cette autorité a effectué une pesée correcte des intérêts en présence, en permettant une utilisation rationnelle des terrains à bâtir conforme au plan d'affectation spécial tout en garantissant le maintien et le développement de l'arborisation (par des mesures de compensation) en dehors des périmètres d'implantation. Ce grief des recourants est par conséquent mal fondé.

6.                      Les recourants invoquent les principes du droit fédéral en matière d'équipement (art. 19 LAT, cf. supra, consid. 2e) en critiquant le nombre de places de stationnement pour automobiles prévu dans le projet. Ils relèvent que l'art. 4.1 RPEP prévoit l'obligation d'aménager "1 place de stationnement par tranche ou fraction de 80 m2 de surface de plancher habitable brute" et au moins 1 place par logement. Or, avec 86 places de stationnement, le projet ne respecte pas ces prescriptions car il faudrait en aménager davantage. Cela étant, les recourants allèguent qu'une application stricte de l'art. 4.1 RPEP aboutirait à un résultat choquant, à savoir à un nombre de places de parc qu'ils jugent excessif.

Selon la jurisprudence, l'autorité communale dispose d'une certaine latitude de jugement pour appliquer les normes sur le stationnement. Quand le règlement communal prévoit une formule de calcul permettant en principe de déterminer le nombre minimal (ou maximal) de cases, la jurisprudence admet qu'une municipalité ait une pratique qui s'en écarte pour des motifs objectifs, en accord avec les principes généraux du droit dont celui de la proportionnalité, car cela entre dans le champ de l'autonomie communale (cf. par exemple TF 1C.209/2022 du 25 août 2022 consid. 6.1, 1C.419/2015 du 3 octobre 2016 consid. 4.4; CDAP AC.2019.0073 du 12 novembre 2019 consid. 9). En l'occurrence, la municipalité retient dans sa décision qu'une réduction du nombre de places de parc, par rapport aux prescriptions du RPEP, semble plutôt aller dans le sens des intérêts des recourants; ces derniers ne le contestent pas. Dans ces conditions, on ne voit aucun motif de reprocher à la municipalité une violation de la réglementation communale.

7.                      Les recourants soutiennent que le projet aurait dû être refusé car ils voient mal (pour reprendre leur formulation) comment depuis un véhicule des sapeurs-pompiers stationné au centre de la parcelle n° 1418, sur une surface d'appui, les agents du service de défense contre l'incendie pourraient accéder aux bâtiments B et C avec des moyens d'extinction. Cela étant, ils ne prétendent pas, dans leur argumentation, que le commandant de l'organisation intercommunale – le SDIS Coeur de Lavaux – qui, d'après la décision attaquée, a validé le plan de la constructrice indiquant l'emplacement des surfaces de manœuvre et d'appui pour les véhicules des sapeurs-pompiers, aurait mal évalué la situation. Ce grief des recourants est inconsistant. La réponse de la constructrice décrit bien les mesures prévues sur la base des prescriptions en matière de sécurité incendie, avec des illustrations. Il n'y a pas lieu d'évoquer plus en détail ces prescriptions dans le présent arrêt, un renvoi à la jurisprudence étant suffisant (cf. notamment TF 1C.666/2021 du 28 juillet 2022 consid. 2 et les références) vu le caractère manifestement infondé des critiques visant la décision attaquée.

8.                      Les recourants dénoncent une violation de l'art. 3.9 RPEP en faisant valoir que la surface de plancher habitable, pour l'ensemble du projet, dépasse le maximum fixé.

a) Le PEP fixe, pour chaque périmètre d'implantation du secteur 2, une "surface de plancher habitable brute" (abrégée S.P.B. sur le plan) maximum. L'art. 3.9 RPEP, qui règle cette question, dispose ce qui suit à ses alinéas 3 et 4:

"La surface totale de plancher habitable brute des bâtiments prévus dans les périmètres d'implantation A-B-C-D-E ne pourra pas être dépassée. Cette surface est de 6'500 m2.

Au surplus, la norme ORL no 514420 du 11.10.1966 sert de référence pour le calcul de la surface de plancher habitable brute."

Cette norme ORL est citée notamment dans l'ouvrage de Benoît Bovay et al., Droit fédéral et vaudois de la construction (4e éd. 2010, p. 603). S'agissant de la détermination de la surface utile brute de plancher, cette norme indique que cette surface "se compose de la somme de toutes les surfaces d'étages en-dessous et en-dessus du sol, y compris les surfaces des murs et des parois dans leur section horizontale". Certains éléments n'entrent toutefois pas en considération parce que ce sont des "surfaces non utilisées ou non utilisables pour l'habitation ou le travail": il en va ainsi par exemple des caves, des greniers, des buanderies des logements, des balcons et loggias ouverts pour autant qu'ils ne servent pas de coursive.

Il apparaît ainsi que la municipalité n'a pas – contrairement à ce qu'affirment les recourants – violé l'art. 3.9 RPEP en ne comptant pas, dans la surface déterminante, celle des buanderies et des balcons (lesquels ne servent pas de coursive).

b) Cela étant, les recourants relèvent que la surface de plancher habitable totale, de 6'812 m2, dépasse le maximum de 6'500 m2 fixé à l'art. 3.9 al. 3 RPEP. Or la municipalité a appliqué à ce propos l'art. 97 al. 4 LATC qui prévoit que "les bâtiments neufs ou rénovés atteignant des performances énergétiques sensiblement supérieures aux normes en vigueur bénéficient d'un bonus supplémentaire de 5% dans le calcul des coefficients d'occupation ou d'utilisation du sol". Les recourants ne font pas valoir que les bâtiments de la constructrice n'atteindraient pas les performances énergétiques mentionnées dans cet article mais ils soutiennent que l'art. 3.9 RPEP n'impose pas à proprement parler le respect d'un coefficient d'occupation ou d'utilisation du sol (COS ou CUS). Cet argument est spécieux car la réglementation communale, en limitant la surface utile brute de plancher selon des critères définis dans la norme ORL, a concrètement la même portée qu'une norme qui fixe un coefficient en fonction de la surface constructible du terrain. L'interprétation que la municipalité a faite du RPEP pour justifier l'application du "bonus énergétique" de l'art. 97 al. 4 LATC n'est pas critiquable. En l'occurrence, ce "bonus" est de 325 m2. La surface de plancher totale a donc été correctement définie.

9.                      Les recourants se plaignent enfin d'une violation des règles sur la hauteur des constructions. Celles-ci sont fixées à l'art. 3.4 RPEP, qui dispose en substance que la hauteur maximale des façades principales est limitée à 7.00 m et se mesure entre le niveau du terrain aménagé – ou, pour le bâtiment C, le niveau du terrain naturel – et le dessus de la sablière.

La question des éléments déterminants pour le calcul de la hauteur, à la base et dans la partie supérieure des bâtiments, a été longuement traitée dans l'arrêt AC.2014.0224 du 27 juillet 2016 (consid. 6a). En résumé, il avait alors été reproché à l'auteur du projet de mesurer la hauteur à partir du niveau du rez supérieur plutôt que de celui du rez inférieur, ce qui provoquait un dépassement de la valeur limite (7 m) d'environ 2,5 à 3 m. Dans la présente espèce, les recourants font valoir – singulièrement à propos du bâtiment A1 – un grief comparable, en ce sens que la hauteur de 7 m, mesurée par la constructrice à partir du niveau aménagé du rez-de-chaussée, aurait dû être mesurée depuis le sol du garage en sous-sol car, d'après elle, ce niveau souterrain serait visible ou dégagé.

Dans la décision attaquée, la municipalité expose que le terrain aménagé est localisé au premier niveau habitable situé sur des plateformes aménagées à cet effet; l'entrée des garages ne peut correspondre au niveau du terrain aménagé puisqu'il constitue un accès à un ouvrage souterrain, lequel a été limité au strict minimum par la constructrice. Elle retient en définitive que le gabarit et la volumétrie des bâtiments sont entièrement conformes aux prescriptions du PEP. D'après la jurisprudence, lorsqu'une municipalité interprète les normes du droit communal et apprécie les circonstances locales, dans le cadre de l'octroi d'une autorisation de construire, elle bénéficie d'une liberté d'appréciation particulière, que l'autorité de recours contrôle avec retenue (cf. art. 2 al. 3 LAT). Dans la mesure où la décision communale repose sur une appréciation soutenable des circonstances pertinentes et que celle-ci est dûment motivée, la juridiction de recours doit la respecter. En dépit de son pouvoir d'examen complet, elle ne peut intervenir et, le cas échéant, substituer sa propre appréciation à celle des autorités communales que si celle-ci n'est objectivement pas soutenable ou contrevient au droit supérieur (cf. notamment ATF 145 I 52 consid. 3.6; TF 1C.499/2017 du 19 avril 2018 consid. 3.1.2; CDAP AC.2020.0291 du 17 février 2022 consid. 8a). En l'occurrence, il apparaît que la municipalité a bien appliqué les normes du PEP sur la hauteur des bâtiments. Les explications et croquis figurant dans la réponse de la constructrice, auxquels il convient de renvoyer, révèlent en effet que le projet a été conçu de manière à respecter l'art. 3.4 RPEP, en tenant compte des précisions résultant de l'arrêt du 27 juillet 2016. On constate également que ces bâtiments n'ont pas plus que trois niveaux et qu'ils sont donc conformes au principe de l'art. 20 let. b LLavaux, qui prévoit, dans le territoire d'agglomération I, que "les constructions nouvelles ont une hauteur maximum de trois niveaux y compris les parties dégagées par la pente". Ce dernier grief des recourants est donc mal fondé.

10.                   Il résulte des considérants que le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté, ce qui entraîne la confirmation de la décision de la municipalité – et par conséquent des autorisations spéciales dont elle est assortie.

Les recourants, qui succombent, doivent payer les frais de justice (art. 49 LPA-VD), fixés en fonction de l'importance et de la difficulté de la cause (art. 4 al. 1 du tarif des frais judiciaires et des dépens en matière administrative [TFJDA; BLV 173.36.5.1]). Ils comprennent les frais de la décision incidente rendue à la requête des recourants.

La constructrice et la commune, qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat, ont droit à des dépens, à la charge des recourants (art. 55 LPA-VD).

 

 

Par ces motifs  la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal arrête:

 

I.                       Le recours est rejeté.

II.                      La décision rendue le 13 octobre 2021 par la Municipalité de Chexbres est confirmée.

III.                    Un émolument judiciaire de 4'000 (quatre mille) francs est mis à la charge des recourants A........ et B........, solidairement entre eux.

IV.                    Une indemnité de 4'000 (quatre mille) francs, à payer à titre de dépens à C........, est mise à la charge des recourants A........ et B........, solidairement entre eux.

V.                     Une indemnité de 4'000 (quatre mille) francs, à payer à titre de dépens à la Commune de Chexbres, est mise à la charge des recourants A........ et B........, solidairement entre eux.

 

Lausanne, le 8 mars 2023

 

Le président:                                                                                            La greffière:        

                                                                                                                 

Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint, ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement.

Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral (Tribunal fédéral suisse, 1000 Lausanne 14). Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.