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N° affaire:
AC.2014.0100
Autorité:, Date décision:
CDAP, 19.12.2014
Juge:
GVI
Greffier:
NCU
Publication (revue juridique):
Ref. TF:
Nom des parties contenant:
UVAVINS-CAVE DE LA CÔTE Société coopérative/Municipalité de Nyon, Service du développement territorial
PERMIS DE CONSTRUIRE CONFORMITÉ À LA ZONE ZONE INDUSTRIELLE ET ARTISANALE ÉGALITÉ DANS L'ILLÉGALITÉ
LAT-22LAT-22-2LAT-22-2-a
Résumé contenant:
Rejet du recours formé contre le refus de délivrer le permis de construire un local de vente et d'aménager sept places de stationnement en zone industrielle.
Principe d'égalité dans l'illégalité; le citoyen ne peut prétendre à l'application de ce principe, entre autres conditions, que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi.
En l'espèce, l'autorité intimée a autorisé par le passé l'implantation d'activités commerciales en zone industrielle, laissant s'instaurer une certaine mixité entre activités industrielles et commerciales dans cette zone. Elle a cependant depuis lors manifesté la volonté de revenir à une pratique plus stricte concernant les activités autorisées dans cette zone et rien ne permet de penser qu'elle va persévérer dans l'inobservation de sa réglementation. La recourante ne peut donc pas prétendre à l'application du principe d'égalité de traitement pour continuer à bénéficier d'une pratique extensive abandonnée par l'autorité.
TRIBUNAL CANTONAL COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC
Arrêt du 19 décembre 2014
Composition
M. Guillaume Vianin, président; Mme Imogen Billotte, juge; M. Antoine Thélin, assesseur; Mme Nathalie Cuenin, greffière.
Recourante
UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE société coopérative, à Tolochenaz, représentée par Me Olivier FREYMOND, avocat, à Lausanne
Autorité intimée
Municipalité de Nyon, représentée par Me Jean-Michel HENNY, avocat, à Lausanne
Autorité concernée
Service du développement territorial, à Lausanne
Objet
Permis de construire
Recours UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE société coopérative c/ décision de la Municipalité de Nyon du 17 février 2014 refusant le permis de construire un local de vente et l'aménagement de sept places de stationnement sur la parcelle n° 1125.
Vu les faits suivants
A. La société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE société coopérative est propriétaire de la parcelle n° 1125 de la Commune de Nyon. Sur cette parcelle, d'une surface de 4'966 m2, est érigé un bâtiment commercial ECA n° 1684a d'une surface de 1'011 m2. La parcelle est affectée en zone industrielle A selon le plan général d'affectation de la Commune de Nyon ainsi que le règlement communal sur le plan d'extension et la police des constructions (ci-après RPE), approuvés par le Conseil d'Etat le 16 novembre 1984.
B. Le 21 mai 2013, la société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE a déposé une demande de permis de construire pour la création d'un local de vente (surface bâtie, y compris le passage entre le bâtiment existant et celui projeté, de 247 m2) et l'aménagement de 7 places de stationnement sur la parcelle n° 1125.
Le 20 juin 2013, le chef du service de l'urbanisme de la Ville de Nyon a informé l'architecte de la requérante que le dossier ne serait pas mis à l'enquête publique, le projet, de nature commerciale, n'étant pas conforme à l'affectation de la zone industrielle A, spécifiquement à l'art. 44 RPE. Une séance a eu lieu le 5 juillet 2013, à l'occasion de laquelle l'autorité a accepté d'entrer en matière, à condition que la surface de vente soit réduite et que les locaux soient utilisés exclusivement pour la commercialisation de la production de la cave attenante, une servitude en ce sens étant inscrite au registre foncier.
Le 29 juillet 2013, par le biais de son conseil, UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE, a informé la Municipalité qu'elle avait décidé de ne pas modifier son projet, dont elle a demandé la mise à l'enquête publique. Elle a invoqué un arrêt du Tribunal cantonal du 19 janvier 2010 (référence AC.2008.0122), confirmé par un arrêt du Tribunal fédéral du 21 juin 2010 (référence 1C.122/2010), relatifs à l'art. 44 RPE. Le 4 octobre 2013, elle a mis en demeure la Municipalité de Nyon (ci-après Municipalité) de mettre le projet à l'enquête publique.
Le projet, mis à l'enquête du 26 octobre au 24 novembre 2013, n'a pas suscité d'opposition.
La Centrale des autorisations CAMAC a délivré sa synthèse n° 139065 le 9 décembre 2013, dont il résulte que les instances cantonales compétentes consultées ont préavisé favorablement au projet et ont délivré les autorisations cantonales spéciales nécessaires.
C. Dans l'intervalle, le 4 octobre 2013, la Municipalité a approuvé le règlement relatif à la constitution d'une zone réservée Secteur "Champ-Colin", lequel est libellé comme il suit:
"Art. 1 Sur l'ensemble de la zone industrielle A, dite de Champ-Colin, délimitée sur le plan N° 13-01 ci-joint, est constituée une zone réservée au sens de l'art. 46 LATC.
Art. 2 A l'intérieur de cette zone, il ne pourra être délivré aucun permis de construire sous réserve des dispositions de l'article 3 ci-dessous.
Art. 3 1) La Municipalité peut délivrer des permis de construire pour autant que les constructions prévues soient exclusivement destinées à la production industrielle et artisanale, ainsi qu'aux activités administratives qui leur sont strictement liées et qui seront hébergées au sein du même bâtiment.
2) La Municipalité peut délivrer des permis de démolir.
Art. 4 La présente zone réservée déploie ses effets, au sens des dispositions légales, jusqu'au 30 juin 2018 au plus tard."
Il résulte du rapport au sens de l'art. 47 OAT relatif à cette zone, établi en novembre 2013, que la constitution d'une zone réservée fait suite aux arrêts précités du Tribunal cantonal et du Tribunal fédéral. Elle doit permettre à la Municipalité "de refuser toute demande de permis non conforme à la destination souhaitée". Dans ce rapport, la Municipalité précise "qu'elle n'entend pas prendre une nouvelle orientation dans l'évolution de cette zone" mais "assurer les intentions exprimées dans le règlement sur le plan d'extension", la destination initiale de la zone devant être confirmée par la réglementation future.
La zone réservée a été mise à l'enquête publique du 13 décembre 2013 au 11 janvier 2014. Elle a fait l'objet d'une opposition de la société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE le 9 janvier 2014.
D. A la même date, le conseil de la société UVAVINS
Par décision du 17 février 2014, la Municipalité a refusé le permis de construire. Elle a retenu, en substance, que le projet n'était conforme ni à l'art. 44 RPE, la zone industrielle A n'étant pas susceptible d'accueillir des commerces, ni aux dispositions de la zone réservée.
E. Le 6 mars 2014, par l'intermédiaire de son conseil, la société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE a déféré cette décision à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal, concluant, avec suite de frais et dépens, qu'il soit ordonné à la Municipalité de délivrer le permis de construire.
Le Service du développement territorial s'est déterminé sur le recours le 1er avril 2014.
Dans sa réponse du 9 mai 2014, sous la plume de son conseil, la Municipalité a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision querellée.
La recourante s'est encore déterminée le 3 juin 2014.
F. Par avis du 17 septembre 2014, l'autorité intimée a été invitée à renseigner le Tribunal au sujet de la procédure relative à la constitution de la zone réservée "Champ Colin".
La Municipalité a répondu que suite à l'opposition de la société UVAVINS CAVE DE LA CÔTE, cette société avait été entendue le 10 avril 2014. Elle a ajouté qu'elle envisageait de soumettre un préavis au Conseil communal dans le courant du printemps 2015.
La réponse de la Municipalité a été communiquée aux autres parties pour information.
G. Le 10 octobre 2014, la Municipalité a encore été invitée à se déterminer à propos de la portée de l'art. 80 RPE.
Les observations de l'autorité intimée des 4 et 26 novembre 2014 ont été communiquées pour information aux autres parties.
H. Le Tribunal a ensuite statué.
Les arguments des parties seront repris ci-après dans la mesure utile.
Considérant en droit
1. La recourante, destinataire de la décision lui refusant le permis de construire sollicité, a qualité pour recourir (art. 75 al. 1 let. a de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative [LPA-VD; RSV 173.36]). Le recours a pour le surplus été formé devant le tribunal compétent, dans le délai et en respectant les formes prescrites (art. 79, 92, 95 et 99 LPA-VD). Il est par conséquent recevable et il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.
2. Aussi bien la recourante que l'autorité intimée ont demandé la tenue d'une inspection locale. La recourante a par ailleurs requis la production, par la Municipalité, des dossiers de police des constructions relatifs aux projets autorisés dans la zone industrielle A depuis l'arrêt rendu par la Cour de droit administratif et public le 19 janvier 2010 (AC.2008.0122).
a) La garantie constitutionnelle du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999: Cst.; RS 101) comprend le droit de fournir des preuves pertinentes, celui d'avoir accès au dossier et celui de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3, 129 II 497 consid. 2.2, 124 II 132 consid. 2b). En particulier, le droit de faire administrer des preuves suppose que le fait à prouver soit pertinent et que le moyen de preuve proposé soit apte et nécessaire à prouver ce fait (ATF 130 II 425 consid. 2.1). Ce droit n'empêche par ailleurs pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que celles-ci ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2; 137 III 208 consid. 22; 136 I 229 consid. 5.3; 130 II 425 consid. 2.1).
b) Au vu des pièces au dossier, la Cour s'estime suffisamment renseignée pour statuer en connaissance de cause, ainsi que cela ressort aussi des motifs exposés ci-après auxquels il est renvoyé, de sorte qu'il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner les mesures d'instruction sollicitées. Il n'est dès lors pas donné suite aux réquisitions des parties en ce sens.
3. La recourante fait valoir que son projet respecte l'art. 44 RPE tel qu'il a été interprété de manière extensive par la Municipalité jusqu'à la constitution de la zone réservée. Elle se réfère aux arrêts du Tribunal cantonal (AC.2008.0122 du 19 janvier 2010) et du Tribunal fédéral (1C.122/2010 du 21 juin 2010) précités et invoque le principe d'égalité de traitement.
a) L'autorisation de construire est délivrée si notamment la construction projetée est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a de la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire [LAT; RS 700]). L'art. 44 RPE, qui définit la zone industrielle A, est libellé de la manière suivante:
"Cette zone est réservée aux établissements industriels, fabriques, garages-ateliers ou industriels, ainsi qu'aux entreprises artisanales.
Des habitations de modeste importance peuvent toutefois être autorisées, si elles sont nécessitées par des raisons d'exploitation.
Les habitations devront s'intégrer aux bâtiments et installations d'exploitation, de façon à former un ensemble architectural cohérent."
Le Tribunal administratif puis la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal ont été amenés à se prononcer à plusieurs reprises au sujet de la conformité d'activités commerciales aux zones industrielles de différentes communes. Il ressort de la jurisprudence que les activités sans rapport avec la production, la fabrication ou la transformation de biens matériels ne sont en principe pas compatibles avec la définition d'une zone industrielle réservée aux activités de type industriel. La jurisprudence a néanmoins réservé les cas dans lesquels la commune avait montré dans une pratique constante une interprétation large de la notion d'activité industrielle en admettant des activités commerciales non industrielles, comme la vente, les activités de service ou encore celles de détente et de loisir (arrêt AC.2008.0019 du 27 octobre 2008 consid. 5 et les références; ATF 1C.426/2007 du 8 mai 2008 consid. 4.2).
Le 19 janvier 2010, appelée à se prononcer sur le refus par la Municipalité de Nyon d'autoriser l'exploitation d'un "shop" en zone industrielle A, régie par l'art. 44 RPE, la Cour de droit administratif et public a admis le recours et invité la Municipalité à délivrer le permis de construire (AC.2008.0122). Elle a notamment indiqué ce qui suit:
"Dans un arrêt 1C.426/2007 du 8 mai 2008, le Tribunal fédéral a jugé arbitraire l'interdiction de construire une station-service avec "shop" et bar, sous prétexte que ces deux dernières activités étaient contraires à la notion de zone industrielle et dans le but de prévenir la mixité de la zone, alors que la commune y avait autorisé des activités qui n'étaient pas typiquement industrielles et qu'elle ne s'était donc jusque là pas montrée rigoureusement attachée à ce principe.
En l'espèce, même si l'autorité intimée prétend avoir la volonté d'appliquer strictement l'art. 44 RPE, on ne peut que constater que sont actuellement exploitées dans la zone industrielle A de nombreuses entreprises qui déploient des activités qui relèvent soit de la prestation de services [...] soit de la vente [...]. Or, il ressort des pièces produites par l'autorité intimée que, sur la quarantaine d'entreprises mentionnées par la recourante, une vingtaine d'entre elles se sont vues accorder une autorisation.
[...]"
Par arrêt du 21 juin 2010 (1C.122/2010), le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par la Municipalité contre l'arrêt cantonal, retenant ce qui suit:
"La Cour cantonale a retenu qu'en dépit de la volonté exprimée par la recourante, la zone industrielle comprend actuellement de nombreuses entreprises sans rapport avec l'activité industrielle, soit plusieurs sociétés de prestation de services (taxis, fiduciaire, sociétés informatiques) ou de vente. La commune recourante ne conteste pas que sur la quarantaine d'entreprises mentionnées par la constructrice, une vingtaine ait été autorisées. Il n'est donc nullement arbitraire de considérer que l'autorité communale a délibérément laissé s'instaurer une certaine mixité entre entreprises industrielles et commerciales, quand bien même elle aurait récemment refusé l'implantation d'un café-restaurant, dont la non-conformité à la zone est particulièrement évidente. Les démarches que la commune dit avoir entreprises pour exiger une mise en conformité sont d'ailleurs nettement postérieures à la décision de refus du 14 avril 2008. Sur l'ensemble de ces points, la situation est comparable à celle qui a donné lieu à l'arrêt 1C.426/2007 du 8 mai 2008, concernant également une station-service avec shop dans une zone industrielle.
[...]
L'arrêt attaqué n'apparaît dès lors pas arbitraire dans ses motifs. Il ne l'est pas non plus dans son résultat car la commune pourrait adopter à l'avenir une pratique plus stricte et cohérente (comme elle a tenté tardivement de le faire au cours de la procédure cantonale), et éviter ainsi une multiplication d'entreprises n'ayant pas de caractère industriel."
b) En effet, le principe de la légalité de l'activité administrative prévaut en principe sur celui de l'égalité de traitement (ATF 126 V 390 consid. 6a). En conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité de traitement, lorsque la loi est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle l'aurait été faussement, voire pas appliquée du tout dans d'autres cas. Cela présuppose cependant, de la part de l'autorité dont la décision est attaquée, la volonté d'appliquer correctement à l'avenir les dispositions légales en question. Le citoyen ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi (ATF 127 II 113 consid. 9; 125 II 152 consid. 5; 122 II 446 consid. 4a). Il faut encore que l'autorité n'ait pas respecté la loi selon une pratique constante, et non pas dans un ou quelques cas isolés (ATF 132 II 485 consid. 8.6; 127 I 1 consid. 3a; 126 V 390 consid. 6a), et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant n'impose de donner la préférence au respect de la légalité (ATF 139 II 49 consid. 7.1; 136 I 65 consid. 5.6; 123 II 248 consid. 3c). C'est seulement lorsque toutes ces conditions sont remplies que le citoyen est en droit de prétendre, à titre exceptionnel, au bénéfice de l'égalité dans l'illégalité (8C.418/2013 du 15 octobre 2014 consid. 4.6.1; 1C.426/2011 du 18 juin 2011 consid. 7.1; 1C.419/2011 du 18 juin 2011 consid. 6.1).
c) En l'occurrence, l'autorité intimée a clairement autorisé par le passé l'implantation d'activités commerciales en zone industrielle A, laissant ainsi s'instaurer une certaine mixité entre activités industrielles et commerciales dans cette zone. Elle ne le conteste d'ailleurs pas. Elle a néanmoins depuis lors manifesté la volonté de revenir à une pratique plus stricte s'agissant des activités autorisées dans cette zone. Elle l'a signifié à la recourante peu après le dépôt par cette dernière de la demande d'autorisation litigieuse, de sorte que son comportement n'apparaît pas contraire aux règles de la bonne foi. La volonté de la Municipalité de Nyon de rompre avec son ancienne pratique et de ne plus autoriser aucun projet à caractère commercial en zone industrielle A résulte également de la procédure entamée tendant à la constitution de la zone réservée "Champ Colin", et ce indépendamment du bien-fondé de cette procédure du point de vue du respect des exigences mises à la création d'une telle zone.
Compte tenu de ces éléments, rien ne permet de penser que l'autorité intimée va persévérer dans l'inobservation de la règlementation communale, en particulier de l'art. 44 RPE, en continuant à l'avenir à autoriser des constructions commerciales en zone industrielle A. La recourante ne peut donc pas prétendre à l'application de l'égalité dans l'illégalité pour obtenir l'autorisation requise, ce principe ne trouvant application qu'exceptionnellement et l'une des conditions exigées à cet égard par la jurisprudence fédérale n'étant pas remplie. Dans son arrêt du 21 juin 2010 précité, le Tribunal fédéral avait d'ailleurs expressément réservé la possibilité pour la commune d'adopter à l'avenir une pratique plus stricte et cohérente afin d'éviter une multiplication d'entreprises dépourvues de caractère industriel en zone industrielle (cf. consid. 4.3). C'est par conséquent en vain que la recourante invoque le principe d'égalité de traitement en relation avec l'art. 44 RPE pour continuer à bénéficier d'une pratique extensive abandonnée depuis par l'autorité intimée.
4. Invitée à se déterminer en cours de procédure au sujet de l'art. 80 RPE, étant donné le contenu de cette disposition, la Municipalité a indiqué que celle-ci ne la contraignait pas à autoriser des activités commerciales en zone industrielle A, au motif que cette zone est "réservée" aux seules activités expressément mentionnées à l'art. 44 RPE.
a) L'art. 80 RPE, figurant dans les dispositions du règlement communal applicables à toutes les zones, est libellé ainsi:
"Dans toutes les zones, le commerce et l'artisanat non gênants pour le voisinage peuvent être autorisés, à condition de ne pas compromettre le caractère des lieux.
[...]"
Selon la jurisprudence, la municipalité jouit d’un certain pouvoir d’appréciation dans l’interprétation qu’elle fait des règlements communaux (arrêts AC.2013.0230 du 4 février 2014 consid. 9c; AC.2013.0237 du 12 décembre 2013 consid. 4c/aa et les références). Cette liberté implique que, dans la mesure où la lecture que l’autorité intimée fait des dispositions de son règlement n’est pas insoutenable, le tribunal s’abstient de sanctionner la décision attaquée (arrêt AC.2013.0237 du 12 décembre 2013 consid. 4c/aa et les références). Selon le Tribunal fédéral, l'autorité cantonale de recours n'est toutefois pas définitivement liée par l'interprétation d'une disposition réglementaire communale et peut adopter une autre interprétation si celle-ci repose sur des motifs sérieux, objectifs et convaincants, tirés du texte ou de la systématique de la norme, de sa genèse ou de son but (ATF 1C.103/2008 du 23 septembre 2008 consid. 2.4).
b) En l'espèce, la Municipalité soutient que l'art. 80 RPE, de nature potestative, ne l'oblige aucunement à autoriser des constructions commerciales en zone industrielle A. Elle précise que le terme "réservée" figurant à l'art. 44 RPE régissant cette zone doit être interprété en ce sens que seules les activités expressément mentionnées par cette disposition peuvent y être autorisées, alors que le terme "destinée" figurant notamment à l'art. 51 RPE régissant la zone industrielle B, n'implique pas d'exclusivité. Eu égard au large pouvoir d'appréciation dont l'autorité intimée dispose, l'interprétation qu'elle fait de l'art. 80 RPE, selon laquelle cette disposition ne la contraint pas à autoriser des constructions commerciales en zone industrielle A, n'est pas insoutenable. Au contraire, cette interprétation apparaît cohérente, considérée à la lumière des considérations susmentionnées (consid. 3).
5. Pour les motifs qui précèdent, le recours doit être rejeté, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs de la recourante relatifs à la zone réservée. La Cour de céans tient toutefois à rappeler ce qui suit à propos de l'effet anticipé des plans et des règlements en voie d’élaboration, régi par l'art. 77, respectivement l'art. 79 de la loi vaudoise du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC; RSV 700.11), selon le stade d’avancement de la procédure.
a) L’art. 77 LATC a la teneur suivante:
"1 Le permis de construire peut être refusé par la municipalité lorsqu'un projet de construction, bien que conforme à la loi et aux plans et aux règlements, compromet le développement futur d'un quartier ou lorsqu'il est contraire à un plan ou à un règlement d'affectation communal ou intercommunal envisagé, mais non encore soumis à l'enquête publique. Dans les mêmes conditions, le département peut s'opposer à la délivrance du permis de construire par la municipalité lorsqu'un plan cantonal d'affectation ou une zone réservée sont envisagés. La décision du département lie l'autorité communale.
2 L'autorité élaborant le plan ou le règlement est tenue de mettre à l'enquête publique son projet dans le délai de huit mois à partir de la communication par la municipalité de la décision du refus de permis, dont un double est remis au département.
3 Le projet doit être adopté par l'autorité compétente dans les six mois dès le dernier jour de l'enquête publique.
4 Le département, d'office ou sur requête de la municipalité, peut prolonger les délais fixés aux alinéas 2 et 3 de six mois au plus chacun. Le Conseil d'Etat dispose de la même faculté lorsqu'il s'agit d'un plan ou d'un règlement cantonal.
5 Lorsque les délais fixés ci-dessus n'ont pas été observés, le requérant peut renouveler sa demande de permis de construire. La municipalité doit statuer dans les trente jours, après avoir consulté le département."
L'art. 79 LATC prévoit ce qui suit:
"1 Dès l'ouverture d'une enquête publique concernant un plan ou un règlement d'affectation, la municipalité refuse toute autorisation de bâtir allant à l'encontre du projet.
2 L'article 77, alinéas 3 à 5, est applicable par analogie, les délais des alinéas 3 et 4 ne courant que dès la communication de la décision du refus."
b) Le seul fait que le règlement relatif à la zone réservée "Champ-Colin" ne soit pas encore en vigueur ne s'oppose donc pas à son application, contrairement à ce que prétend la recourante. Lorsque la Municipalité a statué sur la demande de permis de construire sollicitée, le 17 février 2014, elle avait préalablement déjà mis à l'enquête publique le projet de constitution de la zone réservée, de sorte qu'elle devait, en application de l'art. 79 al. 1 LATC, refuser le projet litigieux non conforme à cette zone. On peut certes se demander si des exceptions sont possibles, dans certaines circonstances extraordinaires, en particulier dans l'hypothèse où l'autorité intimée aurait violé les principes de la confiance et de la bonne foi en tardant à traiter le dossier de la recourante de manière à lui opposer cet argument, ce que cette dernière soutient. Cette question peut cependant rester ouverte, puisque le refus du permis de construire est de toute manière fondé sous l'angle de l'art. 44 RPE.
6. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée. Succombant, la recourante supportera l'émolument judiciaire, ainsi qu'une indemnité à titre de dépens en faveur de la Municipalité de Nyon, qui a procédé avec l'assistance d'un mandataire professionnel (art. 49 al. 1 et 55 al. 1 LPA-VD).
Par ces motifs la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal arrête:
I. Le recours est rejeté.
II. La décision de la Municipalité de Nyon du 17 février 2014 est confirmée.
III. L'émolument de justice, arrêté à 2'500 (deux mille cinq cents) francs, est mis à la charge de la société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE société coopérative.
IV. La société UVAVINS - CAVE DE LA CÔTE société coopérative versera à la Commune de Nyon une indemnité de 2'500 (deux mille cinq cents) francs à titre de dépens.
Lausanne, le 19 décembre 2014
Le président: La greffière:
Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint.
Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral. Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.