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GE.2023.0011

Datum
2023-12-20
Gericht
CDAP
Bereich
Schweiz

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N° affaire: GE.2023.0011 Autorité:, Date décision: CDAP, 20.12.2023 Juge: RGN Greffier: PG Publication (revue juridique):   Ref. TF:   Nom des parties contenant:

A........./Municipalité de C........., Direction générale du territoire et du logement


CONTRÔLE DES HABITANTS DOMICILE LOGEMENT LIBERTÉ D'ÉTABLISSEMENT REGISTRE PUBLIC COMMUNE RÉSIDENCE PRINCIPALE NUMÉRO D'IDENTIFICATION AUTORITÉ CANTONALE COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE BAIL À LOYER IMMEUBLE PERMIS DE CONSTRUIRE TRAVAUX SOUMIS À AUTORISATION POLICE DES CONSTRUCTIONS

CC-23 Cst-24 Cst-36-1 Cst-65 LCH-1 LCH-3 LCH-9 LHR-3-b LHR-6 LRS-2-2 RLCH-3

Résumé contenant: Dès l’instant où la recourante est établie sur le territoire de la commune où elle a son domicile, celle-ci doit être reconnue comme étant sa commune d’établissement. En refusant d’inscrire la recourante pour le motif que l’appartement qu’elle occupe aurait été aménagé par le propriétaire de l’immeuble en violation des règles de la police des constructions, l’autorité intimée a introduit une condition supplémentaire à celles prévues par le droit fédéral et le droit cantonal pour l’inscription au registre des habitants. Admission du recours.

TRIBUNAL CANTONAL

COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC

 

Arrêt du 20 décembre 2023

Composition

M. Raphaël Gani, président; Mme Annick Borda et M. Alain Thévenaz, juges; M. Patrick Gigante, greffier.

Recourante

 

 A......... à ******** représentée par Me Jean-Claude Perroud, avocat à Lausanne. 

Autorité intimée

 

Municipalité de C........., à ********, représentée par Me Yves Nicole, avocat à Yverdon-les-Bains.   

Autorité concernée

 

Direction générale du territoire et du logement, à Lausanne.    

 

Objet

Divers

 

Recours A......... c/ décision de la Municipalité de C......... du 1er décembre 2022 refusant de l'inscrire au Registre du Contrôle des habitants

 

Vu les faits suivants:

A.                     B......... est propriétaire de la parcelle ******** de la commune de C........., dans la localité de ********, sur laquelle sont érigés une habitation et garage n° ECA ******** de 445 m2. La parcelle est colloquée hors zone à bâtir, plus précisément en zone équestre au sens des art. 55 ss du règlement de 1993 sur le plan général d'affectation et la police des constructions (RPGA) de l'ancienne commune de ********. L'art. 55 RPGA confirme que la zone équestre est réservée à la pratique du sport équestre et aux activités en relation étroite avec celle-ci. L'art. 56 RPGA précise que seuls sont autorisés les bâtiments nécessaires à l'exploitation du centre équestre ainsi que l'habitation pour l'exploitant et le personnel de l'exploitation.

En 2011, B......... a requis l’autorisation de construire sur ces bâtiments une maison d'habitation avec deux logements et des locaux administratifs. La Direction générale du territoire et du logement (DGTL, alors le Service du développement territorial) a délivré l'autorisation spéciale pour une construction hors zone à bâtir, en considérant que le projet était conforme à l'art. 56 du règlement de 1993 sur le plan général d'affectation et la police des constructions (RPGA) de l'ancienne commune de ********. L'autorisation portait sur des locaux administratifs et, à raison d'une surface brute de plancher utile de 285 m2, sur deux logements, destinés l'un au chef de l'exploitation, l'autre à un employé. Les travaux ont été réalisés et le permis d'habiter le bâtiment n° ECA ********, accordé par la municipalité le 14 novembre 2013.

B.                     Le 11 mars 2021, la Municipalité de C......... a avisé B......... qu'une tierce personne avait requis d’être inscrite au Contrôle des habitants de la commune, dans un logement sis dans le bâtiment n° ECA ********. Elle a requis B......... d'indiquer si des travaux avaient été effectués pour la création d'un logement supplémentaire. La municipalité a visité le bâtiment n° ECA ******** le 27 octobre 2021 et y a constaté l'aménagement d'un troisième appartement, prêt à être habité. Le 12 novembre 2021, un nouveau locataire s'est adressé au Contrôle des habitants de la commune pour annoncer son arrivée au 1er janvier 2022. La municipalité a refusé de donner suite à cette demande, au motif que l’appartement dans lequel il venait d’emménager avait été créé sans autorisation.

Le 23 novembre 2021, la municipalité a rendu une décision aux termes de laquelle elle a, notamment, ordonné une réaffectation initiale de la structure correspondant au troisième appartement en locaux administratifs liés à l'exploitation équestre, conformément aux autorisations délivrées et fait défense à B......... de louer cet appartement à des tiers, en application des art. 105 et 127 de la loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC; BLV 700.11). B......... a recouru contre cette décision auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (CDAP). La juge instructrice a assorti ce recours de l’effet suspensif. Le 25 janvier 2022, B......... a également saisi la DGTL d’une requête en vue de la régularisation de l’appartement nouvellement créé, conformément à l’art. 24d de la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l’aménagement du territoire (LAT; RS 700).

C.                     B......... a conclu avec A........., alors domiciliée à ********, un nouveau contrat de bail portant sur la jouissance de l'appartement litigieux, avec effet dès le 1er mars 2022. A......... a entrepris des démarches auprès de l’administration de la commune de C........., qui a refusé de l’inscrite au registre des habitants. Le 18 février 2022, B......... est intervenu auprès de la municipalité, par la plume de l’avocat Jean-Claude Perroud, afin qu’elle inscrive A......... au Contrôle des habitants de la commune. Le 22 février 2022, la Municipalité a répondu à B......... que le Contrôle des habitants ne pouvait pas procéder à l'inscription de l’intéressée, au motif que le bail à loyer ne mentionnait aucun numéro d’identificateur de logement (Eidgenössischen Wohnungsidentifikator [EWID]) et qu'il lui était impossible d'inscrire un nouvel habitant dans un logement non répertorié.

Le recours interjeté par B......... contre la décision de la municipalité du 23 novembre 2021 a partiellement été admis, par arrêt de la CDAP AC.2022.0002 du 12 août 2022. Cette décision a été déclarée nulle en tant qu'elle ordonne la réaffectation initiale de l'appartement créé en locaux administratifs et annulée, en tant qu'elle interdit à B......... de louer cet appartement à des tiers.

Le 10 novembre 2022, B......... est derechef intervenu auprès de la municipalité, toujours par la plume de l’avocat Perroud, afin qu’elle donne pour instruction à ses services d’inscrire A......... au contrôle des habitants de la commune. Par décision du 1er décembre 2022, la municipalité a confirmé son refus de donner suite à cette demande, compte tenu de la prise de position négative de la DGTL dans le cadre de la procédure de régularisation de l’appartement occupé par l’intéressée.

D.                     Par acte du 17 janvier 2023, A......... a saisi la CDAP d’un recours contre cette dernière décision dont elle demande principalement la réforme, en ce sens qu'ordre soit donné à la Municipalité de C......... de l'inscrire sans délai au registre des habitants, subsidiairement l’annulation.

A......... a également requis à titre provisionnel que son inscription à titre provisoire au registre des habitants de la Commune de C......... soit ordonnée. Par avis du 19 janvier 2023, le juge instructeur a refusé de faire droit à cette requête à titre superprovisionnel.

Dans sa réponse, la municipalité propose le rejet du recours et la confirmation de la décision attaquée.

Appelée à la procédure, la DGTL s’est déterminée; elle a rappelé sa prise de position négative dans le cadre de la procédure de régularisation de l’appartement occupé par l’intéressée. Par décision du 25 avril 2023, la DGTL a ordonné la réaffectation en locaux administratifs du logement occupé actuellement par A.......... B......... a recouru à la CDAP contre cette décision (cause AC.2023.0171).

Dans sa réplique, A......... a maintenu ses conclusions, ainsi que sa requête de mesures provisionnelles.

Par décision du 6 octobre 2023, le juge instructeur a refusé de faire droit à la requête de mesures provisionnelles.

Dans sa duplique, la municipalité maintient ses conclusions.

A......... s’est déterminée en dernier lieu.

Considérant en droit:

1.                      a) Aux termes de l’art. 92 al. 1 de la loi cantonale du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; BLV 173.36), le Tribunal cantonal connaît des recours contre les décisions et décisions sur recours rendues par les autorités administratives, lorsque la loi ne prévoit aucune autre autorité pour en connaître.

b) Interjeté devant l’autorité judiciaire compétente pour en connaître (v. dans ce sens arrêts CDAP GE.2020.0060 du 16 juin 2020 consid. 1a; GE.2019.0197 du 16 décembre 2019 consid. 1), dans la forme et le délai prescrits par les art. 79, respectivement 95 al. 1 LPA-VD, le présent recours est recevable. Il y a donc lieu d’entrer en matière.

2.                      La recourante s’en prend tout d’abord à la décision attaquée sous l’angle du principe de légalité. Elle reproche à l’autorité intimée d’avoir abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant de l’inscrire au contrôle communal des habitants.

a) Aux termes de l'art. 24 al. 1 Cst., les Suisses et les Suissesses ont le droit de s'établir en un lieu quelconque du pays. La liberté d’établissement figure au nombre des droits inaliénables et imprescriptibles reconnus par la jurisprudence (arrêt TF 1C.107/2014 du 1er avril 2014 consid. 3.3 réf. citées).

Cette liberté impose aux cantons et aux communes de permettre à chaque citoyen suisse de s’établir sur son territoire, de s’inscrire dans les registres communaux et de recevoir en dépôt, si nécessaire, son acte d’origine et elle empêche en outre les communes et les cantons d’entraver ou de rendre plus difficile le transfert de la résidence choisie dans un autre canton, commune, ou pays étranger (ATF 135 I 233 consid. 5.2; ATF 128 I 280 consid. 4.1.1; ATF 127 I 97 consid. 4c; arrêt 2C.41/2021 du 5 août 2021 consid. 5.1). La notion d'établissement (au sens large), qui ne correspond pas à la notion de domicile au sens des art. 23 et ss CC, est une notion de police, qui désigne la résidence (ou établissement au sens étroit) ou le séjour, policièrement réguliers, d'une personne dans un lieu déterminé (cf. arrêts TF 2C.649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.1; 2C.581/2012 du 28 juin 2012 consid. 4.1; cf. ég. Beat Rudin, in: Basler Kommentar, Bundesverfassung, Waldmann/Belser/Epiney [édit.], Bâle 2015, n°20 ad art. 24 Cst.; Jean-François Aubert/Pascal Mahon, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, Zurich 2003, n°6 ad art. 24 Cst.). La liberté d’établissement s’applique aussi bien à l’intérieur d’un canton que dans les rapports entre cantons; elle interdit à ceux-ci mais également aux communes d’entraver de manière injustifiée l’établissement d’une personne sur leur territoire, par exemple en imposant des conditions ou des taxes particulières (Aubert/Mahon, op. cit., n°7 ad art. 24 Cst., réf. citées). Selon la jurisprudence, l'établissement présuppose l'existence de relations d'une durée et d'une intensité suffisantes avec le lieu où la personne souhaite être considérée comme établie (cf. arrêts TF 2C.579/2015 du 2 octobre 2015 consid. 2.1; 2C.20/2009 du 13 mars 2009 consid. 1.3; 2P.49/2007 du 3 août 2007 consid. 2.2). La liberté d'établissement ne permet ainsi pas à une personne de désigner un lieu quelconque comme lieu d'établissement sans que les conditions effectives pour ce faire soient remplies (arrêt TF 2C.20/2009 précité consid. 1.2).

Comme tout droit fondamental, la liberté d’établissement peut être restreinte aux conditions de l’art. 36 al. 1, 1ère et 2e phr., Cst., aux termes duquel toute restriction d’un droit fondamental doit être fondée sur une base légale et les restrictions graves, prévues par une loi. A cela s’ajoute que toute restriction d’un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d’un droit fondamental d’autrui (al. 2) et proportionnée au but visé (al. 3). Il en va ainsi des restrictions affectant les personnes se trouvant dans des rapports de droits spéciaux (v. Aubert/Mahon, op. cit., n°9 ad art. 24 Cst., plus particulièrement note 35). Ainsi, l'exercice de mandats politiques supérieurs peut être réservé aux habitants du canton, la puissance étatique devant être exercée par les personnes qui lui sont soumises (ATF 128 I 280 consid. 4.4 p. 286; v. ég. arrêt CCST.2008.0004 du 2 juin 2008, s’agissant d’un membre d’une municipalité). En outre, le Code civil contient à cet égard un certain nombre de règles fixant le domicile d’une personne physique.

b) Aux termes de l’art. 65 Cst., la Confédération collecte les données statistiques nécessaires concernant l’état et l’évolution de la population, de l’économie, de la société, de la formation, de la recherche, du territoire et de l’environnement en Suisse (al. 1). Elle peut légiférer sur l’harmonisation et la tenue des registres officiels afin de rationaliser la collecte (al. 2). L’art. 65 al. 2 Cst. habilite la Confédération à édicter des prescriptions relatives à la tenue des registres et au système d’annonces et de mutations des habitants pour permettre à la statistique fédérale de disposer de données homogènes et comparables (FF 2006 439s. p. 440).

L'établissement devant être inscrit au registre des habitants, la matière est régie par la loi fédérale du 23 juin 2006 sur l'harmonisation des registres des habitants et d'autres registres officiels de personnes (LHR; RS 431.02). Vu son art. 1er al. 1, cette loi a pour objectif de simplifier la collecte de données à des fins statistiques et l'échange de données personnelles légalement requis entre les registres. A son art. 3, cette loi définit le registre des habitants, tenu de manière informatisée ou manuelle par le canton ou la commune, dans lequel sont inscrites toutes les personnes qui y sont établies ou en séjour (let. a); elle définit en outre la commune d'établissement comme celle dans laquelle une personne réside, de façon reconnaissable pour des tiers, avec l'intention d'y vivre durablement et d'y avoir le centre de ses intérêts personnels. Une personne est réputée établie dans la commune où elle a déposé le document requis; elle ne peut avoir qu'une commune d'établissement (let. b). La commune de séjour est celle dans laquelle une personne réside dans un but particulier sans intention d'y vivre durablement, mais pour une durée d'au moins trois mois consécutifs ou répartis sur une même année; il s'agit notamment de la commune dans laquelle une personne séjourne pour y fréquenter les écoles ou se trouve placée dans un établissement d'éducation, un hospice, un hôpital ou une maison de détention (let. c). Selon l’art. 2 al. 2 de la loi fédérale du 20 mars 2015 sur les résidences secondaires (LRS; RS 702) est une résidence principale au sens de la présente loi un logement occupé par une personne au moins ayant comme commune d’établissement au sens de l’art. 3 let. b LHR la commune dans laquelle se trouve le logement. La personne doit donc avoir sa résidence principale dans la commune; peu importe qu’elle soit propriétaire ou qu’elle utilise le bien d’une autre manière, par exemple dans le cadre d’un contrat de location ou d’un droit de séjour (cf. Jonas Alig, Das Zweitwohnungsgestz, in: ZBl 117/2016 p. 227s. not. 230).

Conformément au principe d'exhaustivité, d'exactitude et d'actualité des données s'appliquant à tous les registres fédéraux ainsi qu'aux registres cantonaux et communaux des habitants (Message du 23 novembre 2005 concernant l'harmonisation des registres officiels, in: FF 2006 439s. p. 470), lesdits registres doivent contenir des données actuelles, exactes et complètes (art. 5 LHR) en rapport avec chaque personne établie ou en séjour sur le territoire de la commune (cf. art. 6 LHR). Le registre des habitants est défini à l’art. 6 LHR; celui-ci doit contenir au minimum, pour chaque personne établie ou en séjour, les données relatives aux identificateurs et aux caractères suivants:

"a.          numéro AVS au sens de l’art. 50c de la loi fédérale du 20 décembre 1946                      sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS);

b.            numéro attribué par l’office à la commune et nom officiel de la commune;

c.            identificateur de bâtiment selon le Registre fédéral des bâtiments et des              logements (RegBL) de l’office;

d.            identificateur de logement selon le RegBL, ménage dont la personne est                       membre et catégorie de ménage;

e.            nom officiel de la personne et autres noms enregistrés à l’état civil;

f.            totalité des prénoms cités dans l’ordre exact;

g.            adresse et adresse postale, y compris le numéro postal d’acheminement et                   le lieu;

h.            date de naissance et lieu de naissance;

i.             lieux d’origine, si la personne est de nationalité suisse;

j.             sexe;

k.            état civil;

l.             appartenance à une communauté religieuse reconnue de droit public ou                        reconnue d’une autre manière par le canton;

m.           nationalité;

n.            type d’autorisation, si la personne est de nationalité étrangère;

o.            établissement ou séjour dans la commune;

p.            commune d’établissement ou commune de séjour;

q.            en cas d’arrivée: date, commune ou Etat de provenance;

r.            en cas de départ: date, commune ou Etat de destination;

s.            en cas de déménagement dans la commune: date;

t.            droit de vote et éligibilité aux niveaux fédéral, cantonal et communal;

u.            date de décès."

Cette disposition contient une liste exhaustive des identificateurs et des caractères qui doivent figurer pour chaque personne dans les registres des habitants. Cette liste a pour but d’assurer la clarté et la transparence pour les services chargés de tenir les registres (FF 2006 p. 471). Ainsi, dans le cadre de l'harmonisation des registres, tout personne inscrite dans un registre des habitants se voit attribuer un identificateur fédéral de bâtiment (EGID) et un identificateur fédéral de logement (EWID), correspondant respectivement au bâtiment et au logement où elle réside. L'EGID et l'EWID sont mis à disposition par le Registre fédéral des bâtiments et des logements (RegBL). Ils permettent d’identifier clairement chaque bâtiment et chaque logement en Suisse (Office fédéral de la statistique [OFS]; source: https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/registres/registre-personnes/harmonisation-registres/egid-ewid.html). Le contenu du site en question fait également apparaître que les nos EWID suivants sont autorisés par l’OFS:

"(…)

Codage

Signification

EWID> 0, EWID tiré du RegBL

L’EWID du logement dans lequel vit la personne (cas normal).

999

La personne ne réside pas dans un logement, il s’agit:

·         des personnes dans les ménages administratifs;

·         des personnes dans les ménages collectifs qui n’habitent pas dans un logement enregistré dans le RegBL (p. ex. hôpital, home);

·         des personnes logeant dans des mansardes qui ne sont pas enregistrées dans le RegBL en tant que logement;

·         des personnes logeant dans une habitation provi­soire selon le RegBL.

vide

L’EWID est encore vide ou suite à des indications insuffisantes concernant le logement, à une mise à jour encore non effectuée du RegBL ou pour d’autres raisons, la personne n’a pas encore pu se voir attribuer un EWID.

(…)"

c) L'art. 11 LHR prévoit que les cantons édictent les dispositions nécessaires, afin que toute personne physique qui déménage s'annonce au service du contrôle des habitants dans les quatorze jours qui suivent l'événement (let. a); toute personne tenue de s'annoncer communique, de façon conforme à la vérité, les données énumérées à l'art. 6 LHR ainsi que, le cas échéant, les documents nécessaires (let. b). L'art. 12 al. 1 let. b LHR souligne par ailleurs que les cantons doivent édicter les dispositions nécessaires afin que les bailleurs et gérants d'immeuble, pour les locataires qui habitent leurs immeubles, qui y emménagent ou qui les quittent, communiquent gratuitement aux services du contrôle des habitants qui en font la demande les renseignements relatifs aux personnes tenues de s'annoncer, si ces dernières ne s'acquittent pas de leur obligation de s'annoncer au sens de l'art. 11 LHR. Il s'agit à cet égard d'une obligation de renseigner des bailleurs subsidiaire à l'obligation d'annonce de la population (FF 2006 p. 476). Conformément au principe d'exhaustivité, d'exactitude et d'actualité des données s'appliquant à tous les registres fédéraux ainsi qu'aux registres cantonaux et communaux des habitants, lesdits registres doivent contenir des données actuelles, exactes et complètes (art. 5 LHR) en rapport avec chaque personne établie ou en séjour sur le territoire de la commune (cf. art. 6 LHR).

Dans le domaine du droit de domicile, les cantons (et les communes) disposent de compétences réduites, essentiellement limitées au contrôle et à l’enregistrement des habitants et aux normes y relatives (dans le même sens voir Arnold Marti, Entwicklung und heutiger Stand des Einwohnerkontroll- und - meldewesens in der Schweiz - weitreichende Veränderungen durch das Registerharmonisierungsgesetz des Bundes, in: ZBl 120/2019 p. 591 ss, p. 595s.; v. ég. arrêt TF 2C.919/2011 du 9 février 2012 consid. 2.3.2). Le Tribunal fédéral a ainsi jugé qu’il ne serait pas dans l'esprit du législateur fédéral qu’une autorité communale bénéficie d’une marge de manœuvre en ce qui concerne les inscriptions et les radiations dans le registre des habitants, car cela irait à l'encontre de l'objectif d'une pratique harmonisée des registres dans toute la Suisse (arrêt TF 2C.919/2011 du 9 février 2012 consid. 2.3.2). En revanche, aucune norme de droit positif fédéral ou cantonal ne soumet le séjour en un lieu déterminé à un régime d’autorisation de police. L’obligation introduite par la loi pour chaque citoyen de s’annoncer aux autorités de la commune dans laquelle il s’établit sert à cette dernière à identifier le type de relation qui s’instaure entre la personne et le territoire, et à qualifier par conséquent le type de séjour dans la commune, dans le but de procéder ensuite à une inscription correcte dans le registre des habitants (arrêt TF 2C.738/2018 du 2 novembre 2021, in: RDAF 2022 II 142s., consid. 3.3.1).

Dans le canton de Vaud, la loi cantonale du 9 mai 1983 sur le contrôle des habitants (LCH; BLV 142.01) dispose qu'il est tenu, dans les communes, un registre communal des habitants (art. 1 al. 1, art. 2a LCH). A teneur de l'art. 1 al. 1 LCH, le contrôle des habitants des communes est destiné à fournir aux administrations publiques les renseignements dont elles ont besoin sur l'identité, l'état civil et le lieu d'établissement ou de séjour des personnes résidant plus de trois mois sur le territoire communal. Cette loi prévoit, pour ceux qui résident dans une commune, des "déclarations obligatoires" (art. 3 ss LCH), en particulier la déclaration d'arrivée (art. 3 LCH) et la déclaration de départ (art. 6 LCH). Lorsqu'une personne n'est plus établie de manière policièrement régulière sur le territoire d'une commune, il convient que l'autorité compétente prononce l'annulation de son inscription au registre des habitants (cf. GE.2019.0197 du 16 décembre 2019 consid. 3c; GE.2011.0218 du 12 avril 2012 consid. 3). Aux termes de l’art. 9 LCH, le bureau compétent enregistre les données suivantes dans le registre des habitants au sens de la LHR (al. 1):

"a.          les données fournies au sens de la présente loi ;

b.            le numéro attribué par l'Office fédéral de la statistique (ci-après : OFS) à la          commune et le nom officiel de la commune ;

c.            l'identificateur de bâtiment (EGID) selon le Registre fédéral des bâtiments et                  des logements de l'OFS ;

d.            l'identificateur de logement (EWID) selon le Registre fédéral des bâtiments                    et des logements de l'OFS, le ménage dont la personne est membre et la                       catégorie de ménage ;

e.            le droit de vote et d'éligibilité de la personne aux niveaux fédéral, cantonal et        communal ;

f.             la date du décès de la personne."

Le bureau indique en particulier si la personne est établie dans la commune ou si elle ne fait qu'y séjourner (al. 2). Une personne est réputée établie à l'endroit où le contrôle des habitants a procédé à son inscription en résidence principale ; à défaut d'une telle inscription, l'endroit où se trouve le centre de ses intérêts (lieu de résidence principal) est déterminant. Il ne peut y avoir qu'un lieu d'établissement (al. 3). Chaque commune est tenue d'avoir un bureau de contrôle des habitants (art. 15 LCH) qui a notamment pour tâche, en fonction des déclarations d'arrivée et de départ, de tenir à jour le registre de la population résidente (cf. art. 9 et art. 17 LCH).

Ces dispositions sont complétées par le règlement d’application de la LCH, du 28 décembre 1983 (RLCH; BLV 142.01.1), dont l’art. 3 précise qu’à l'exception des détenus, toute personne, y compris les mineurs et les personnes privées de leurs droits civils, doit être annoncée et inscrite à son lieu de résidence effective, quel que soit le lieu de son domicile civil.

d) Selon la jurisprudence, ce sont le domicile civil et les domiciles spéciaux qui continuent à déterminer si une personne est établie dans une commune donnée au sens de l’art. 3 LHR et non l'inverse (arrêts TF 2C.25/2023 du 5 mai 2023 consid. 5.1.3; 2C.341/2016 du 3 octobre 2016 consid. 4.2; 2C.791/2011 du 4 avril 2012 consid. 1.3). On rappelle à cet égard qu’en droit civil, selon l'art. 23 al. 1 CC, le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l'intention de s'y établir. Ainsi, l'établissement se définit, d'une part, par la volonté de s'installer définitivement dans un lieu et, d'autre part, par l'expression de cette volonté par l'installation effective de sa résidence dans ce lieu (Marti, op. cit., p. 603). Selon l'art. 24 CC, toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau (al. 1); le lieu où elle réside est considéré comme son domicile, lorsque l’existence d’un domicile antérieur ne peut être établie ou lorsqu’elle a quitté son domicile à l’étranger et n’en a pas acquis un nouveau en Suisse (al. 2). Il ne faut cependant pas perdre de vue que le Code civil et la LHR poursuivent des buts différents (arrêt TF 2C.919/2011 du 9 février 2012 consid. 3.2).

Le rôle du contrôle des habitants est en effet de localiser la population. Afin de fournir aux administrations cantonales et communales les renseignements dont elles ont besoin pour accomplir certaines tâches, il enregistre les personnes qui résident durablement sur le territoire communal, en précisant si elles y sont "établies" ou "en séjour". Bien qu'on ait souvent tendance à confondre ces termes, le domicile ne s'identifie pas à l'établissement ou au séjour (arrêts CDAP GE.2019.0197 du 16 décembre 2019 consid. 3b; GE.2017.0010 du 10 juillet 2017 consid. 2; GE.2011.0218 du 12 avril 2012 consid. 3; GE.2011.0036 du 18 octobre 2011 consid. 2d). Le domicile est un lien territorial qui a des conséquences juridiques particulières sur le statut d'une personne. L'établissement (au sens large) est quant à lui une notion de police qui désigne la résidence (ou établissement au sens étroit, cf. arrêt TF 2C.478/2008 du 23 septembre 2008 consid. 4.4) ou le séjour, policièrement réguliers, d'une personne en un lieu déterminé (arrêt TF 2C.599/2011 du 13 décembre 2011 consid. 2.4). Le Tribunal cantonal du canton de Fribourg a dès lors jugé que lorsque les deux conditions de la résidence durable et de l'intention de s'établir dans une commune étaient réunies, elles impliquaient, pour cette dernière, de devoir accepter la demande du requérant et de l’inscrire au registre de ses habitants, la commune ne pouvant pas lier l'inscription litigieuse à des obligations de police des constructions ou découlant du contrat de location, sauf à introduire des conditions supplémentaires à celles prévues par le droit fédéral et le droit cantonal (arrêt 601 2017 191 du 10 décembre 2018).

3.                      Dans le cas d’espèce, la municipalité intimée justifie son refus d’inscrire la recourante au contrôle des habitants, au motif que le bail à loyer dont cette dernière se prévaut ne mentionne aucun numéro EWID, de sorte qu'il lui serait impossible, selon elle, d'inscrire un nouvel habitant dans un logement non répertorié. Selon ses explications, il lui appartiendrait de s'assurer de l'existence de tels numéros d'identificateurs et, dans le cas où l'immeuble indiqué par le déclarant ne serait pas répertorié dans le Registre fédéral des bâtiments et des logements de l'OFS, de refuser l'inscription dans le registre des habitants de la Commune, sous peine de violer l'art. 9 LCH.

a) Tout d’abord, il n’est pas contesté que la recourante habite dans le troisième appartement aménagé à l’intérieur du bâtiment n° ECA ******** et y a constitué, sur le plan du droit civil, son domicile au sens de l’art. 23 CC. Force est par conséquent de retenir qu’elle s’est établie dans la commune de C......... à compter du 1er mars 2022, date de prise d’effet du bail conclu avec B.......... La question à résoudre est de savoir si c’est à tort ou à juste titre que les autorités de cette dernière commune ont refusé de l’inscrire au registre des habitants.

b) B......... a obtenu en 2011 l’autorisation d’aménager dans le bâtiment n° ECA ******** deux logements et des locaux administratifs. Or, il s’est avéré qu’un troisième logement avait été aménagé, à l’insu au demeurant des autorités. Dans un premier temps, la municipalité a, par décision du 23 novembre 2021, ordonné la réaffectation de ce troisième appartement en locaux administratifs liés à l'exploitation équestre, conformément aux autorisations délivrées et fait défense à B......... de louer cet appartement à des tiers. Le recours dont B......... a saisi la CDAP à l’encontre de cette décision a été assorti de l’effet suspensif, de sorte que ce dernier a pu conférer à la recourante la jouissance de cet appartement, à compter du 1er mars 2022. La décision de la municipalité a été déclarée nulle, par arrêt AC.2022.0002 du 12 août 2022, faute de compétence de cette dernière en la matière. B......... a tenté depuis lors d’obtenir la régularisation de cet appartement; en vain, puisque par décision du 25 avril 2023, la DGTL a ordonné la réaffectation en locaux administratifs du logement occupé actuellement par la recourante. B......... a déféré cette dernière décision à la CDAP, qui n’a pas encore statué sur ce recours. Sur le plan de la police des constructions, la question de la licéité de l’aménagement de cet appartement dans le bâtiment n° ECA ******** est par conséquent toujours pendante. Cela explique qu’à ce jour, aucun numéro EWID n’ait été attribué à celui-ci au Registre fédéral des bâtiments et des logements. Il n’est pas certain toutefois que ces constatations soient déterminantes pour trancher le sort du présent recours.

c) En effet, dès l’instant où, depuis le 1er mars 2022, la recourante est établie sur la commune de C......... où elle a son domicile, cette dernière doit être reconnue comme étant sa commune d’établissement au sens des art. 3 let. b LHR et 9 al. 3 LCH. Par conséquent, dès l’instant où la recourant avait annoncé son arrivée sur le territoire cantonal, il appartenait aux autorités communales de contrôler que cette annonce correspondait à la réalité. Dans l’affirmative, celles-ci n’avaient d’autre possibilité que d’inscrire la recourante au registre des habitants de la commune, conformément aux art. 6 LRH et 9 LCH. Il importe peu à cet égard que l’appartement occupé par cette dernière ne se soit pas, compte tenu des doutes que suscite la régularité de son aménagement dans le bâtiment n° ECA ********, vu attribuer un numéro d’identification EWID. Comme on l’a vu plus haut, cette situation est expressément prévue par les directives fédérales, à teneur desquelles les autorités communales pouvaient en pareil cas inscrire, dans le respect des art. 6 let. d LHR et 9 al. 1 let. d LCH, le n°999, voire même ne rien indiquer du tout. En réalité, en refusant d’inscrire la recourante pour le motif que l’appartement qu’elle occupe aurait été aménagé par le propriétaire de l’immeuble en violation des règles de la police des constructions, l’autorité intimée a introduit une condition supplémentaire à celles prévues par le droit fédéral et le droit cantonal pour l’inscription au registre des habitants. Force est ainsi d’admettre qu’en dépit de ses explications, elle a abusé de son pouvoir d’appréciation en la matière.

4.                      a) Il suit de ce qui précède que le recours sera accueilli. La décision attaquée sera réformée (cf. art. 90 al. 1, 1ère phrase, LPA-VD), en ce sens que la recourante est inscrite au registre des habitants de la commune de C..........

b) Les frais de procédure seront mis à la charge de la commune succombant (cf. art. 49 al. 1, 91 et 99 LPA-VD). En outre, cette dernière devra verser à la recourante, qui obtient gain de cause avec l’assistance d’un avocat, une indemnité à titre de dépens (cf. art. 55 al. 1, 91 et 99 LPA-VD).

 

 

 

Par ces motifs  la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal arrête:

 

I.                       Le recours est admis.

II.                      La décision de la Municipalité de C........., du 1er décembre 2022, est réformée, en ce sens qu’A......... est inscrite au registre des habitants de la commune de C..........

III.                    Les frais d’arrêt, par 800 (huit cents) francs, sont mis à la charge de la Commune de C..........

IV.                    La Commune de C......... doit à A......... une indemnité de 2'000 (deux mille) francs à titre de dépens.

 

Lausanne, le 20 décembre 2023

 

Le président:                                                                                            Le greffier:          

 

Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint.

Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral (Tribunal fédéral suisse, 1000 Lausanne 14). Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.